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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_77/2019  
 
 
Arrêt du 11 février 2019  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, 
Jacquemoud-Rossari, Oberholzer, Rüedi et Jametti. 
Greffier : M. Graa. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représentée par Me Béatrice Haeny, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, 
intimé. 
 
Objet 
Mutilation d'organes génitaux féminins commise à l'étranger; erreur sur l'illicéité, 
 
recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel du 14 décembre 2018 (CPEN.2018.76). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par jugement du 12 juillet 2018, le Tribunal de police du Littoral et du Val-de-Travers a condamné X.________, pour mutilation d'organes génitaux féminins, à une peine privative de liberté de huit mois, avec sursis durant deux ans. 
 
B.   
Par jugement du 14 décembre 2018, la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel a rejeté l'appel formé par X.________ contre ce jugement. 
 
La cour cantonale a retenu les faits suivants. 
 
B.a. X.________ - née en 1987 - et A.________ sont mariés et tous deux ressortissants somaliens, nés en Somalie. Ils sont les parents de quatre enfants, dont deux filles, B.________ née en 2006 et C.________ née en 2007, tous nés en Somalie.  
 
A.________ est venu seul en Suisse, où il est arrivé en 2008 pour y déposer une demande d'asile. Sa mère, son épouse et les quatre enfants ont quitté leur quartier de D.________ vers octobre 2013 puis ont passé un certain temps dans un centre pour réfugiés en Somalie. Les intéressés ont ensuite gagné l'Ethiopie. Une demande de regroupement familial ayant été acceptée, ils sont venus rejoindre A.________ en Suisse, où ils sont arrivés en novembre 2015. 
 
B.b. Avant de gagner la Suisse, en Somalie, au printemps 2013 puis en septembre 2013, X.________ a amené un tiers à pratiquer une excision totale ou quasi-totale sur sa fille B.________, respectivement une ablation clitoridienne partielle sur sa fille C.________.  
 
C.   
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 14 décembre 2018, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens qu'elle est acquittée et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Elle sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
La recourante fait grief à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 124 CP. Selon elle, cette disposition ne permettrait pas de poursuivre en Suisse un auteur ayant mutilé des organes génitaux féminins alors que celui-ci n'avait aucun lien avec ce pays. 
 
Il convient ainsi de déterminer si la disposition en question permet de poursuivre un auteur ayant réalisé les éléments constitutifs de l'infraction avant sa venue sur le territoire suisse. 
 
1.1. Aux termes de l'art. 124 CP, celui qui aura mutilé des organes génitaux féminins, aura compromis gravement et durablement leur fonction naturelle ou leur aura porté toute autre atteinte sera puni d'une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins (al. 1). Quiconque se trouve en Suisse et n'est pas extradé et commet la mutilation à l'étranger est punissable. L'art. 7 al. 4 et 5 CP est applicable (al. 2).  
 
1.2. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique). Le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme; il ne se fonde sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 144 V 313 consid. 6.1 p. 316 et les références citées).  
 
1.2.1. La lettre de l'art. 124 al. 2 CP précise que cette disposition peut sanctionner toute personne, commettant la mutilation à l'étranger, se trouvant en Suisse et n'étant pas extradée. Il ne ressort pas de la lettre de la loi que la poursuite pénale serait exclue lorsque l'auteur a agi alors qu'il ne séjournait ou ne résidait pas en Suisse.  
 
1.2.2. L'art. 124 CP trouve son origine dans une initiative parlementaire déposée le 17 mars 2005 par la Conseillère nationale Maria Roth-Bernasconi. Cette dernière demandait alors l'élaboration d'une norme pénale réprimant la pratique directe et l'incitation à la commission des mutilations sexuelles féminines en Suisse, cette norme devant aussi être applicable aux personnes se trouvant en Suisse s'agissant d'actes commis à l'étranger (cf. Initiative parlementaire "Réprimer explicitement les mutilations sexuelles commises en Suisse et commises à l'étranger par quiconque se trouve en Suisse", Rapport de la Commission des affaires juridiques du Conseil national du 30 avril 2010, FF 2010 5125 [ci-après : Rapport CAJ-N]). A la suite de cette initiative parlementaire, la Commission des affaires juridiques du Conseil national a élaboré un avant-projet de modification du CP impliquant notamment la création d'une nouvelle disposition pénale. Ce texte, qui proposait en substance de réprimer la mutilation des organes génitaux féminins - même si l'acte a été commis à l'étranger et n'est pas pénalement répréhensible dans l'Etat dans lequel il a été perpétré -, a été soumis à une procédure de consultation. A propos de la poursuite d'actes commis à l'étranger, quelques participants ont proposé de limiter l'application de la norme aux auteurs ayant leur domicile en Suisse, ou y étant établis, au moment de la commission de l'acte (cf. Commission des affaires juridiques du Conseil national, Révision partielle du CP [introduction d'une norme pénale réprimant explicitement les mutilations génitales féminines], Rapport sur les résultats de la procédure de consultation, septembre 2009, p. 13). Cette proposition n'a pas été suivie par la Commission des affaires juridiques du Conseil national, laquelle a, dans son avant-projet remanié, proposé un art. 124 al. 2 disposant qu'est punissable quiconque commet l'acte à l'étranger, se trouve en Suisse et n'est pas extradé. Le but était de s'écarter de la règle de la double punissabilité et de pouvoir engager en Suisse des poursuites pénales contre "tous les auteurs de mutilations génitales féminines, quel que soit le lieu où l'acte a été commis et indépendamment de sa punissabilité dans le pays où il a été perpétré" (cf. Rapport CAJ-N, p. 5144). La commission a également relevé qu'il convenait de combler les "lacunes" qui faisaient obstacle à la poursuite des actes visés en raison du principe de la double punissabilité, dès lors qu'une grande majorité des infractions étaient commises à l'étranger, "notamment dans des pays dans lesquels les mutilations génitales féminines ne sont pas punies (comme la Somalie) ". Elle s'est, à cet égard, référée à l'art. 5 CP, en regrettant que les mutilations génitales féminines pratiquées sur des mineures ne figurassent pas dans la liste d'infractions de cette disposition (cf.  Idem, p. 5140). Le Conseil fédéral a quant à lui expliqué qu'il importait de mettre en oeuvre "tous les moyens appropriés pour lutter efficacement contre la pratique des mutilations génitales féminines et sanctionner pénalement les auteurs". L'introduction d'une nouvelle norme en la matière dans le CP devait ainsi notamment permettre la "prévention de telles pratiques" et faciliter la lutte contre celles-ci (cf. Avis du Conseil fédéral du 25 août 2010, FF 2010 5151). S'agissant de la répression des actes commis à l'étranger, le Conseil fédéral a indiqué ce qui suit (cf.  Idem, p. 5154) :  
 
"La CAJ-N propose d'inscrire le principe de l'universalité illimitée à l'art. 124, al. 2, P-CP. Les lésions des organes génitaux féminins seraient donc poursuivies selon le droit suisse, quels que soient la nationalité de l'auteur et de la victime, le lieu de commission de l'acte et la législation applicable en ce lieu. On s'écarte ainsi de la règle de la double punissabilité. Comme, contrairement à l'initiative parlementaire, le libellé adopté par la CAJ-N n'exige pas que l'auteur soit établi en Suisse, même les personnes qui y séjournent brièvement, voire y sont en transit, pourront être poursuivies. 
 
En renonçant à exiger que l'infraction soit soumise à la règle de la double punissabilité et que l'auteur ait son domicile en Suisse, le projet soumet la poursuite pénale des lésions infligées aux organes génitaux féminins à l'étranger aux mêmes conditions que celles qui valent pour les infractions commises à l'étranger sur des mineurs, qui sont énumérées à l'art. 5 CP. Les actes visés dans les deux cas présentant une gravité relativement comparable et les victimes de lésions infligées aux organes génitaux féminins étant assez souvent des mineures, le Conseil fédéral souscrit à la réglementation proposée." 
 
Au cours des débats parlementaires, le rapporteur de la Commission des affaires juridiques du Conseil national a rappelé que la répression des mutilations génitales féminines était essentiellement compliquée par le fait que celles-ci étaient souvent pratiquées à l'étranger, raison pour laquelle l'art. 124 al. 2 CP envisagé prévoyait la punissabilité de l'infraction en Suisse, même s'agissant d'un acte commis à l'étranger, cela indépendamment de la nationalité de l'auteur ou de la victime (cf. BO 2010 CN 2133). Il a ajouté que l'objectif était d'élaborer une norme permettant de "couvrir raisonnablement tous [l]es cas de mutilations" (cf. BO 2010 CN 2141). Les discussions n'ont, pour le reste, tant au Conseil national qu'au Conseil des Etats, pas porté sur la question du séjour ou du domicile de l'auteur en Suisse au moment de la commission de l'acte en tant que condition à la poursuite de l'infraction. 
 
Il découle de ce qui précède que le législateur n'a aucunement voulu limiter les poursuites pénales fondées sur l'art. 124 CP aux auteurs qui séjournaient en Suisse au moment des faits. Une telle restriction, proposée à l'occasion de la procédure de consultation de l'avant-projet, n'a pas été reprise dans le texte soumis à l'Assemblée fédérale. Le Conseil fédéral, dans son avis, a d'ailleurs souligné que la poursuite pouvait concerner des auteurs qui n'étaient aucunement établis en Suisse, voire qui n'y étaient que de passage. Les références à l'art. 5 CP confirment de surcroît qu'un principe d'universalité illimitée était bien envisagé, cette disposition autorisant la poursuite d'infractions rattachées avec la Suisse par la seule présence de l'auteur sur le territoire au moment de l'action pénale (cf. URSULA CASSANI, in Commentaire romand, Code pénal I, nos 8 s. ad art. 5 CP). 
 
1.2.3. L'interprétation téléologique de la norme concernée conduit au même constat. L'art. 124 CP doit viser la répression la plus large possible des mutilations d'organes génitaux féminins, notamment dans un but de prévention générale. Un tel but ne serait pas atteint en admettant que des personnes puissent échapper à toute poursuite en Suisse par le simple fait d'avoir réalisé les éléments constitutifs de l'infraction à l'étranger. Ces personnes pourraient alors, en toute impunité, se livrer à la mutilation d'organes génitaux féminins dans leur pays avant de gagner la Suisse, en sachant qu'une telle pratique y sera proscrite. Cette situation aboutirait à un résultat contraire à celui que s'est proposé d'atteindre le législateur par l'adoption de l'art. 124 al. 2 CP.  
 
1.2.4. La formulation de l'art. 124 al. 2 CP correspond par ailleurs à celle d'autres infractions du CP dont la poursuite - également fondée sur le principe d'universalité - est possible par le fait que l'auteur se trouve en Suisse et n'est pas extradé, lorsque les actes sont commis à l'étranger. Tel est le cas des infractions commises à l'étranger sur des mineurs (art. 5 al. 1 CP) ainsi que de celles réprimées par les art. 181a et 185bis CP. La formulation correspond aussi à celle de l'art. 264m CP, concernant les actes visés aux titres 12biset 12ter ou à l'art. 264k CP commis à l'étranger ("s'il se trouve en Suisse et n'est pas extradé"; "  sich in der Schweiz befindet und nicht ausgeliefert wird "; "  si trova in Svizzera e non è estradato "). Cette similitude appuie une interprétation de l'art. 124 al. 2 identique à celle des dispositions précitées.  
 
1.2.5. Au sein de la doctrine, plusieurs auteurs considèrent que l'art. 124 al. 2 CP permet de poursuivre l'auteur par le seul fait que celui-ci se trouve en Suisse et n'est pas extradé (cf. MEYLAN/GANDOY, in Commentaire romand, Code pénal II, 2017, n° 79 ad art. 124 CP; CHRISTOPHER GETH, in Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, 3e éd. 2017, no 5 ad art. 124 CP; DUPUIS et al., Petit Commentaire du Code pénal, 2e éd. 2017, n° 13 ad art. 124 CP), y compris si l'intéressé ne réside en Suisse que pour une courte durée ou n'y est que de passage (cf. ANDREAS DONATSCH, in Donatsch et al., StGB/JStG Kommentar, 20e éd. 2018, n° 5 ad art. 124 CP; ANDREAS DONATSCH, Strafrecht III, Delikte gegen den Einzelnen, 11e éd. 2018, p. 61; NIGGLI/GERMANIER, in Basler Kommentar, Strafrecht I, 4e éd. 2018, n° 47 ad art. 124 CP).  
 
1.3. Ce qui précède conduit à interpréter l'art. 124 al. 2 CP comme permettant la poursuite de l'infraction dès lors que l'auteur, qui a commis la mutilation à l'étranger, se trouve en Suisse et n'est pas extradé.  
 
Cette interprétation ne saurait être altérée par le fait que, comme le soutient la recourante, le législateur eût éventuellement adopté une disposition pénale dont la portée s'est révélée plus large que ce qu'avait initialement envisagé la Conseillère nationale à l'origine de l'initiative parlementaire, laquelle cherchait essentiellement à combattre le "tourisme" des mutilations, soit le fait, pour des parents établis en Suisse, de se rendre à l'étranger afin de pratiquer sur leurs filles des actes illicites. Peu importe également que cette large portée conférée à l'art. 124 al. 2 CP - voulue par le législateur - puisse produire un effet dissuasif quant à la venue en Suisse de parents, en particulier de mères, ayant mutilé des organes génitaux féminins. On ne voit pas, en effet, que le législateur aurait souhaité exempter de poursuites des femmes désireuses de "se réfugier en Suisse", comme le prétend la recourante. 
 
En définitive, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant que la recourante pouvait être poursuivie pour mutilation d'organes génitaux féminins même si les actes qui lui sont reprochés ont été commis à l'étranger et à une époque où l'intéressée n'était jamais venue en Suisse. Le grief doit être rejeté. 
 
2.   
La recourante se prévaut d'une erreur sur l'illicéité au sens de l'art. 21 1ère phrase CP. 
 
2.1. Selon l'art. 21 CP, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable. L'erreur sur l'illicéité vise le cas où l'auteur agit en ayant connaissance de tous les éléments constitutifs de l'infraction, et donc avec intention, mais en croyant par erreur agir de façon licite (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 p. 241; cf. ATF 141 IV 336 consid. 2.4.3 p. 343 et les références citées). La réglementation relative à l'erreur sur l'illicéité repose sur l'idée que le justiciable doit faire tout son possible pour connaître la loi et que son ignorance ne le protège que dans des cas exceptionnels (ATF 129 IV 238 consid. 3.1 p. 241; arrêt 6B_1084/2018 du 21 novembre 2018 consid. 2.4.1 et les références citées). Pour exclure l'erreur de droit, il suffit que l'auteur ait eu le sentiment de faire quelque chose de contraire à ce qui se doit ou qu'il eût dû avoir ce sentiment (ATF 129 IV 6 consid. 4.1 p. 18; 104 IV 217 consid. 2 p. 218; arrêt 6B_216/2018 du 14 novembre 2018 consid. 2.3). La possibilité théorique d'apprécier correctement la situation ne suffit pas à exclure l'application de l'art. 21 1ère phrase CP. Ce qui est déterminant c'est de savoir si l'erreur de l'auteur peut lui être reprochée (ATF 116 IV 56 consid. II.3a p. 68; arrêt 6B_716/2018 du 23 octobre 2018 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral a ainsi considéré que seul celui qui avait des "raisons suffisantes de se croire en droit d'agir" pouvait être mis au bénéfice de l'erreur sur l'illicéité. Une raison de se croire en droit d'agir est "suffisante" lorsqu'aucun reproche ne peut être adressé à l'auteur du fait de son erreur, parce qu'elle provient de circonstances qui auraient pu induire en erreur toute personne consciencieuse (ATF 128 IV 201 consid. 2 p. 210; 98 IV 293 consid. 4a p. 303; arrêt 6B_1084/2018 précité consid. 2.4.1). Le caractère évitable de l'erreur doit être examiné en tenant compte des circonstances personnelles de l'auteur, telles que son degré de socialisation ou d'intégration (arrêt 6B_1102/2015 du 20 juillet 2016 consid. 4.1 et les références citées).  
 
2.2. La cour cantonale a exposé que la Constitution somalienne de 2012 interdisait l'excision, la loi pénale ne contenant cependant pas de disposition expresse à ce sujet. La recourante n'avait peut-être pas une connaissance concrète du cadre constitutionnel, mais elle avait recouru aux services d'une exciseuse, dont l'adresse lui avait été fournie par des habitants du quartier, laquelle exerçait à son domicile. La recourante ignorait si cette personne avait des connaissances médicales. Cela suggérait une certaine clandestinité des interventions, dont la recourante devait avoir conscience. Si des hôpitaux ou des médecins avaient pratiqué ce genre d'intervention, la recourante aurait sans doute préféré s'adresser à eux pour la sécurité de ses filles. L'intéressée savait, selon ses propres déclarations, que l'excision était "quelque chose qui n'est pas bien". Malgré son instruction sommaire, elle pouvait dès lors se douter que l'excision n'était pas ou plus juridiquement admise dans son pays. Elle avait donc à tout le moins eu une certaine conscience de l'illicéité de ses actes. La recourante n'avait cependant pas cherché à se renseigner auprès des autorités, ce qu'elle aurait pu faire puisqu'elle vivait dans la capitale de son pays. Elle avait néanmoins choisi d'agir selon ce qu'elle considérait comme une tradition. Son erreur avait ainsi été évitable et l'intéressée ne pouvait se prévaloir que d'une erreur évitable sur l'illicéité.  
 
2.3. La recourante énumère tout d'abord les critères qui devraient être pris en considération par le juge avant de se prononcer sur une éventuelle erreur sur l'illicéité en relation avec l'art. 124 CP, tels que formulés par la Commission des affaires juridiques du Conseil national dans son rapport du 30 avril 2010 (cf. Rapport CAJ-N, p. 5131). Ces éléments ne sauraient toutefois d'aucune manière lier le Tribunal fédéral dans l'interprétation de l'art. 21 CP. Au demeurant, les aspects évoqués - soit la punissabilité des actes dans le pays d'origine de l'auteur, son niveau d'éducation, la durée de son séjour en Suisse ou sa connaissance de l'illicéité de la mutilation d'organes génitaux féminins en Suisse - ont tous été considérés par la cour cantonale.  
 
La recourante se prévaut ensuite de divers éléments - ainsi son faible niveau d'éducation, la pression sociale en faveur de l'excision en Somalie ou encore le fait qu'elle eût été elle-même excisée lorsqu'elle était enfant - dont on ne voit pas en quoi ils contrediraient les constatations de la cour cantonale relatives aux doutes éprouvés par celle-ci au moment d'agir. La cour cantonale a en effet retenu, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF; ATF 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375; 135 IV 152 consid. 2.3.2 p. 156), que l'intéressée avait fait pratiquer les interventions illicites dans un cadre clandestin, en sachant que cette pratique n'était pas "bien" et sans prendre davantage de renseignements en la matière. La recourante a donc eu le sentiment de faire quelque chose de contraire à ce qui se doit (cf. consid. 2.1 supra). La cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant que son erreur avait été évitable et en appliquant l'art. 21 2ème phrase CP. Le grief doit être rejeté. 
 
3.   
La recourante demande, en se prévalant d'un éventuel acquittement, à ne pas être astreinte au remboursement à l'Etat de l'indemnité accordée à son défenseur d'office dans la procédure d'appel. Vu l'issue de la cause, cette argumentation est sans objet. 
 
4.   
Le recours doit être rejeté. Comme la recourante est dans le besoin et que ses conclusions ne paraissaient pas d'emblée vouées à l'échec, sa demande d'assistance judiciaire doit être admise (art. 64 al. 1 LTF). Par conséquent, il y a lieu de la dispenser des frais et d'allouer une indemnité à sa mandataire, désignée comme avocate d'office (art. 64 al. 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise. Me Béatrice Haeny est désignée comme conseil d'office et une indemnité de 3'000 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 11 février 2019 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
Le Greffier : Graa