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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.4/2005 /RrF 
 
Arrêt du 16 juin 2005 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Corboz, président, Klett et Favre. 
Greffière: Mme Cornaz. 
 
Parties 
A.________, 
demandeur et recourant, représenté par Me Jean-Jacques Martin, 
 
contre 
 
B.________, 
défendeur et intimé, représenté par Me Bruno 
Mégevand. 
 
Objet 
mandat; dommages-intérêts; compétence, 
 
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre 
civile de la Cour de justice du canton de Genève 
du 12 novembre 2004. 
 
Faits: 
A. 
A.________ est domicilié à Genève. B.________ habite actuellement à Madrid en Espagne. X.________ SA est une société sise à Madrid. Lors de sa constitution, ses actions ont été réparties à raison de 3'900 pour A.________, 100 pour l'épouse de celui-ci et 16'000 pour Y.________ Ltd. 
 
Le 3 décembre 1991, A.________ a, par l'intermédiaire de son épouse, chargé B.________ de vendre les actions qu'il détenait dans la société X.________ SA. Le 5 décembre 1991, B.________, agissant pour le compte de A.________, a vendu les actions de celui-ci à Y.________ Ltd, actionnaire majoritaire de X.________ SA. 
B. 
Le 24 septembre 2003, A.________ a assigné B.________ devant le Tribunal de première instance du canton de Genève en paiement de la somme de 975'000 fr. Il exposait que Y.________ Ltd appartenait en réalité à B.________. Il reprochait à celui-ci d'avoir vendu ses actions X.________ SA à leur valeur nominale, bien inférieure au prix qu'il aurait pu en tirer s'il avait agi conformément aux intérêts du mandant. Il faisait ainsi valoir une prétention en réparation du dommage subi, fondée sur une responsabilité contractuelle, pour violation des obligations de diligence et de fidélité découlant du mandat, ainsi que sur une responsabilité délictuelle, pour avoir commis des infractions pénales, soit abus de confiance et gestion déloyale. 
 
Lors de l'audience d'introduction, B.________ a soulevé une exception d'incompétence ratione loci. Par jugement du 4 mars 2004, le Tribunal de première instance du canton de Genève a admis sa compétence à raison du lieu pour connaître de la demande formée par A.________ contre B.________. Saisie par celui-ci et statuant par arrêt du 12 novembre 2004, la Cour de justice du canton de Genève a annulé le jugement du Tribunal de première instance et, statuant à nouveau, constaté son incompétence, déclarant par conséquent irrecevable la demande de A.________ du 24 septembre 2003. En substance, elle a considéré qu'il n'y avait pas de compétence selon l'art. 2 CL, le domicile de B.________ étant actuellement à Madrid. Elle a contesté l'existence d'un acte illicite et n'a plus laissé subsister que l'hypothèse d'une action contractuelle selon l'art. 5 ch. 1 CL. Les parties n'ayant pas déterminé la loi applicable au mandat, les juges cantonaux se sont référés à l'art. 117 LDIP et, admettant que B.________ avait sa résidence habituelle à Genève en décembre 1991, ils ont décidé d'appliquer le droit suisse. Puis, sur la base de l'art. 74 al. 2 ch. 3 CO, ils ont constaté que B.________ était domicilié à Madrid en décembre 1991 et que, par conséquent, le lieu de l'exécution selon l'art. 5 ch. 1 CL se trouvait en Espagne. 
C. 
A.________ (le demandeur) interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Il conclut à ce que la Cour de céans réforme l'arrêt de la Cour de justice du 12 novembre 2004, dise et constate que les tribunaux genevois sont compétents à raison du lieu pour connaître du litige l'opposant à B.________, ce faisant, renvoie l'affaire à l'autorité cantonale afin qu'elle se prononce sur le fond de la demande du 24 septembre 2003, subsidiairement renvoie l'affaire à l'autorité cantonale en l'invitant à compléter le dossier et statuer à nouveau, sous suite de dépens. Il requiert également l'assistance judiciaire. 
 
Par décision du 25 février 2005, la Cour de céans a admis la requête d'assistance judiciaire déposée par le demandeur et désigné Me Jean-Jacques Martin comme avocat d'office de celui-ci. 
 
B.________ (le défendeur) conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable, sous suite de dépens. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 I 57 consid. 1; 130 II 65 consid. 1, 321 consid. 1 p. 324, 509 consid. 8.1). 
1.1 Le recours en réforme n'est recevable en règle générale que contre les décisions finales rendues en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ). En l'espèce, la cour cantonale a limité son examen à l'exception d'incompétence soulevée par le défendeur. Contrairement à l'instance inférieure, elle a constaté l'incompétence des tribunaux genevois pour connaître du litige opposant celui-ci au demandeur. Ce faisant, elle a exclu définitivement que la même action puisse être introduite entre les mêmes parties devant les tribunaux de ce canton, rendant par-là une décision finale, qui est à ce titre sujette à recours (ATF 130 III 136 consid. 1.1 et les références citées). 
 
Pour le surplus, le recours a été interjeté en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55 OJ), par la partie qui s'est vu opposer une exception d'incompétence. Comme le recours porte sur une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), il convient d'entrer en matière. 
1.2 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il faille rectifier des constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis (art. 64 OJ). Dans la mesure où la partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte (ATF 130 III 102 consid. 2.2 p. 106, 136 consid. 1.4). Il ne peut être présenté de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est donc pas ouvert pour remettre en cause l'appréciation des preuves et les constatations de fait qui en découlent ATF 130 III 136 consid. 1.4; 129 III 618 consid. 3). 
2. 
La cause revêt à l'évidence des aspects internationaux. Le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, doit donc vérifier d'office et avec un plein pouvoir d'examen le droit applicable (ATF 130 III 417 consid. 2; 118 II 83 consid. 2b). Comme la cour cantonale l'a relevé à juste titre, la Suisse et l'Espagne sont parties à la Convention de Lugano, du 16 septembre 1988, concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (RS 0.275.11, ci-après: CL), de sorte que celle-ci s'applique à la présente cause. 
3. 
A titre principal, le demandeur se plaint d'une violation de l'art. 5 ch. 1 CL, en ce sens que la cour cantonale aurait méconnu la notion de lieu d'exécution effectif consacrée par cette disposition. Il est d'avis que la cour cantonale aurait dû se contenter de déterminer le lieu de la mauvaise exécution effective du devoir de diligence et de fidélité du défendeur, au lieu de procéder à l'analyse - plus complexe et inutile - du lieu où la prestation litigieuse aurait dû être exécutée. Or, il serait manifeste que l'obligation litigieuse aurait été (mal) exécutée à Genève. Le défendeur aurait violé son devoir de diligence et de fidélité du mandataire dans le cadre de la conclusion du contrat de vente des actions, passé à Genève. C'est ce que la Cour de justice aurait voulu dire en indiquant qu'"en outre, l'appelant [B.________] était physiquement présent à Genève au moment de la signature du contrat". Ce fait ressortirait également clairement de la lettre du contrat du 5 décembre 1991, qui porte la mention "A Genève, le 5 décembre 1991". 
3.1 En principe, les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat contractant sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat (art. 2 al. 1 CL). Cependant, en matière contractuelle, le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat contractant peut être attrait, dans un autre Etat contractant, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée (art. 5 ch. 1 CL). A la différence de l'art. 113 LDIP, l'art. 5 ch. 1 CL fonde ainsi une compétence alternative, et non subsidiaire, au for général du domicile du défendeur (cf. Dutoit, Droit international privé suisse, Commentaire de la loi fédérale du 18 décembre 1987, 4e éd., Bâle 2005, n. 4 ad art. 113 LDIP; Bucher/Bonomi, Droit international privé, 2e éd., Bâle 2004, n. 905 p. 47; Keller/Kren Kostkiewicz, Commentaire zurichois, n. 21 ad art. 113 LDIP; Amstutz/Peter Vogt/Wang, Commentaire bâlois, n. 16 ad art. 113 LDIP). 
 
La notion de "matière contractuelle" de l'art. 5 ch. 1 CL est une notion autonome qui ne doit pas être interprétée par renvoi au droit interne de l'un ou l'autre des Etats concernés (ATF 122 III 43 consid. 3b p. 45, 298 consid. 3a p. 299; plus récemment arrêt 4P.88/2000 du 10 mai 2000, consid. 3b/aa; cf. également Dutoit, op. cit., n. 4 ad art. 113 LDIP; Bucher/Bonomi, op. cit., n. 891 p. 244). L'obligation à retenir n'est ni l'une quelconque des obligations nées du contrat, ni l'obligation caractéristique, mais l'obligation qui sert de base à l'action en justice (ATF 124 III 188 consid. 4a p. 189; 122 III 298 consid. 3a p. 299 s.; plus récemment arrêt 4P.88/2000 du 10 mai 2000, consid. 3b/aa; cf. également Dutoit, op. cit., n. 4 ad art. 113 LDIP; Knoepfler/ Schweizer/Othenin-Girard, Droit international privé suisse, 3e éd., Berne 2005, n. 517 p. 275; Bucher/Bonomi, op. cit., n. 906 p. 248). 
 
Au contraire, le lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée, au sens de l'art. 5 ch. 1 CL, ne se détermine pas de manière autonome (ATF 124 III 188 consid. 4a p. 189; 122 III 43 consid. 3b p. 45; on relèvera qu'à l'inverse, l'art. 5 ch. 1 let. b du nouveau Règlement CE n° 44/2001, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (règlement "Bruxelles I") prévoit qu'aux fins de l'application de cette disposition, et sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est, pour la fourniture de services, le lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis; sur ce dernier point, cf. notamment Dutoit, op. cit., n. 4bis ad art. 113 LDIP; Knoepfler/Schweizer/Othenin-Girard, op. cit., n. 517b p. 276; Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 26 ad art. 113 LDIP); lorsque les parties n'ont pas désigné le lieu d'exécution de l'obligation litigieuse, le lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée, au sens de l'art. 5 ch. 1 CL, est déterminé conformément à la loi qui régit l'obligation litigieuse selon sa règle de conflit de lois, et c'est ensuite le lieu d'exécution désigné par cette loi qui fonde la compétence spéciale (ATF 124 III 188 consid. 4a p. 189; 122 III 298 consid. 3a p. 300; plus récemment arrêt 4P.88/2000 du 10 mai 2000, consid. 3b/aa; cf. également Dutoit, op. cit., n. 4 ad art. 113 LDIP; Knoepfler/Schweizer/Othenin-Girard, op. cit., n. 517 p. 275; Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 24 ad art. 113 LDIP; Gaudemet-Tallon, Compétence et exécution des jugements en Europe, Règlement n° 44/2001, Conventions de Bruxelles et de Lugano, 3e éd., Paris 2002, n. 191 p. 149). 
 
La doctrine est divisée sur le point de savoir si, selon l'art. 5 ch. 1 CL, le demandeur a le choix entre le for de l'exécution concrète et celui de l'exécution déterminée en fonction de la loi ou de la convention, ou si l'action doit être portée au lieu de l'exécution prévue par le contrat tant que la prestation n'a pas été effectuée et au lieu de l'exécution effective une fois que celle-ci a eu lieu (cf. en faveur de la première solution, Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 22 ad art. 113 LDIP; partisans de la seconde: Dutoit, op. cit., n. 5 ad art. 113 LDIP; Kropholler, Europäisches Zivilprozessrecht, Kommentar zu EuGVO und Lugano-Übereinkommen, 7e éd., Heidelberg 2002, n. 27 ad art. 5 CL, qui expose que la prise en considération du lieu d'exécution effectif permet de faire montre d'une certaine flexibilité, dans le cadre de l'application de l'art. 5 ch. 1 CL, quant au moment déterminant, et de tenir compte de modifications de circonstances, notamment si le défendeur change d'Etat de domicile; Donzallaz, La Convention de Lugano du 16 septembre 1988 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, vol. III, Berne 1998, n. 4673 p. 207 s.). Cette controverse peut toutefois demeurer indécise, dans la mesure où elle ne joue aucun rôle en l'espèce. En effet, comme précédemment exposé, l'art. 5 ch. 1 CL ne désigne pas directement le "lieu où l'exécution qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée", mais comporte un renvoi au droit matériel régissant la cause. Ainsi, qu'il s'agisse du lieu où la prestation doit être exécutée ou, s'agissant comme en l'espèce d'une prestation qui a déjà été effectuée, de celui où elle a été exécutée, le juge doit appliquer son droit international privé pour déterminer le lieu d'exécution au sens de l'art. 5 ch. 1 CL. Même si elle peut susciter la critique, notamment être qualifiée de complexe et peu satisfaisante (Gaudemet-Tallon, op. cit., n. 189 p. 148), cette méthode n'en demeure pas moins applicable. 
 
En définitive, quoi qu'en dise le demandeur, le recours à la notion de "lieu d'exécution effectif" déduite de l'art. 5 ch. 1 CL ne permet nullement de considérer que cette disposition consacrerait, de manière autonome, un for au lieu de la conclusion du contrat, en l'occurrence de vente des actions, à l'occasion de laquelle le défendeur aurait violé son devoir de diligence et de fidélité découlant du mandat. On relèvera encore que si le Tribunal fédéral a effectivement eu l'occasion de retenir l'existence d'un for au lieu de la conclusion d'une convention (cf. arrêt 4P.88/2000 du 10 mai 2000, consid. 3b/bb; 4C.343/1999 du 3 février 2000, consid. 2b), il s'agissait de cas d'application de l'art. 5 ch. 3 CL qui, en matière de responsabilité délictuelle, prévoit un for au lieu où le fait dommageable s'est produit. A cet égard, il convient de préciser que l'art. 5 ch. 3 CL, qui règle à la fois la compétence internationale et la compétence locale (ATF 125 III 346 consid. 4b p. 348), vise aussi bien le lieu où le dommage est survenu (Erfolgsort) que le lieu du fait générateur (Handlungsort), ce dernier lieu pouvant d'ailleurs être multiple et créer autant de fors au choix du demandeur (cf. ATF 131 III 153 consid. 6.2; 125 III 346 consid. 4a et 4c/aa et les références citées). Or, la critique élevée par le demandeur se situe clairement sur le plan de la responsabilité contractuelle, seul aspect encore litigieux devant le Tribunal fédéral. Le demandeur n'est en effet pas revenu sur le fait que la cour cantonale ait considéré que sa compétence ne pouvait pas se fonder sur l'art. 5 ch. 3 CL, dès lors qu'il était douteux qu'un acte illicite ait été commis par le défendeur lors de la vente litigieuse - celui-ci ayant été acquitté par le Tribunal pénal de Madrid -, de sorte que la Cour de céans n'a pas à revoir cette question (art. 55 al. 1 let. c OJ). 
3.2 Il résulte de ce qui précède que la cour cantonale n'a pas erré en ne retenant pas l'existence d'un for au lieu de la conclusion du contrat de vente, si bien qu'il n'y a pas lieu de se pencher sur le point, soulevé par le demandeur, de savoir si celle-ci a commis une inadvertance manifeste en ne constatant pas que le lieu de la conclusion du contrat du 5 décembre 1991 était Genève, dès lors que cet élément n'a pas d'incidence sur la solution du litige (cf. ATF 95 II 503 consid. 2a p. 507). Pour le surplus, le raisonnement des juges cantonaux, qui ont appliqué les art. 117 LDIP et 74 al. 2 ch. 3 CO, ne prête pas le flanc à la critique. Le demandeur expose d'ailleurs que, dans l'hypothèse où la Cour de céans devait écarter son argumentation principale, il ne remettrait pas en cause l'analyse juridique ayant conduit la cour cantonale à appliquer l'art. 74 al. 2 ch. 3 CO et donc à rechercher le domicile du défendeur en décembre 1991. 
4. 
Le demandeur se plaint d'une violation de l'art. 23 CC en lien avec l'art. 74 al. 2 ch. 3 CO, dans la mesure où la cour cantonale a considéré que le domicile du défendeur en décembre 1991 était à Madrid et non pas à Genève. Il ne conteste pas qu'il ressorte des constatations de fait de la cour cantonale que la résidence effective du défendeur dans un lieu déterminé désignait Genève. S'agissant de l'intention de celui-ci de s'établir dans un lieu, les manifestations objectives et reconnaissables pour les tiers étaient contradictoires. Vis-à-vis des autorités (carte d'identité) et des assurances sociales (caisse maladie), le défendeur aurait été domicilié en Espagne dès 1990. A l'égard de la police suisse des étrangers, il aurait quitté ce pays pour l'Espagne le 30 septembre 1991 seulement. Vis-à-vis des tiers, en particulier du demandeur, le défendeur aurait maintenu ses liens avec Genève au moment de la vente des actions, en décembre 1991. Ainsi, celui-ci serait à l'origine de nombreuses contradictions, d'un point de vue temporel et géographique, qui ne sauraient lui profiter. Dans la mesure où le défendeur avait sa résidence effective à Genève en décembre 1991, avait vécu à Genève les années précédentes et avait manifesté objectivement et de manière reconnaissable à l'égard du demandeur au moment de la vente des actions qu'il avait la volonté de rester dans ce lieu de manière durable, il apparaissait approprié et conforme au droit de considérer qu'il était domicilié à Genève en décembre 1991. 
4.1 Le domicile est déterminé selon les critères prévus par l'art. 20 al. 1 let. a LDIP, dont la teneur correspond à celle de l'art. 23 al. 1 CC: une personne physique a son domicile au lieu ou dans l'Etat où elle réside avec l'intention de s'y établir, ce qui suppose qu'elle fasse du lieu en question le centre de ses intérêts personnels et professionnels (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 238; 120 III 7 consid. 2a; plus récemment Dutoit, op. cit., n. 1 ad art. 20 LDIP; Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 21 ad art. 20 LDIP; Staehelin, Commentaire bâlois, n. 5 ad art. 23 CC; Bucher, Personnes physiques et protection de la personnalité, 4e éd., Bâle 1999, n. 363 p. 87). 
 
Le lieu où la personne réside et son intention de s'établir constituent des questions de fait dont la solution lie le Tribunal fédéral (ATF 120 III 7 consid. 2a), étant rappelé que la jurisprudence actuelle ne se fonde pas sur la volonté intime de l'intéressé, mais sur l'intention manifestée objectivement et reconnaissable pour les tiers (ATF 127 V 237 consid. 1 p. 238; 120 III 7 consid. 2b p. 8; 119 II 64 consid. 2b/bb; plus récemment Dutoit, op. cit., n. 1 ad art. 20 LDIP; Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 21 ad art. 20 LDIP; Staehelin, op. cit., n. 5 ad art. 23 CC; Bucher, op. cit., n. 364 p. 87). Si ces manifestations relèvent du fait, les conclusions à en tirer quant à l'intention de s'établir au sens des art. 23 CC et 20 LDIP constituent une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement (ATF 120 III 7 consid. 2a et la référence citée). 
 
Lorsqu'il s'agit de déterminer le domicile d'une personne, le lieu indiqué par celle-ci n'est pas toujours décisif. Il faut, au contraire, se fonder sur l'endroit que sa conduite effective désigne comme le centre de ses intérêts personnels et professionnels. Une personne qui séjourne à l'étranger peut avoir un domicile en Suisse lorsqu'elle a en Suisse le centre de son existence, de ses relations, de ses intérêts idéaux et matériels, et de sa vie domestique, l'établissement de la famille jouant à cet égard un rôle important (arrêt 7B.241/2003 du 8 janvier 2004, consid. 4.2). 
 
En revanche, les documents administratifs tels que permis de circulation, permis de conduire, papiers d'identité, attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales, ou encore les indications figurant dans des décisions judiciaires ou des publications officielles ne sont pas déterminants à eux seul. Ils constituent certes des indices sérieux de l'existence du domicile, propres à faire naître une présomption de fait à cet égard; il n'en demeure pas moins qu'il ne s'agit que d'indices et la présomption que ceux-ci créent peut être renversée par des preuves contraires (cf. ATF 125 III 100 consid. 3 p. 101; arrêt 4P.288/1993 du 15 avril 1994, publié in SJ 1995 p. 49, consid. 2c p. 52; plus récemment arrêt 7B.241/2003 du 8 janvier 2004, consid. 4.2; cf. également Staehelin, op. cit., n. 23 ad art. 23 CC). 
 
Lorsqu'une personne séjourne en deux endroits différents et qu'elle a des relations avec ces deux endroits, le domicile se trouve au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances (ATF 125 III 100 consid. 3 p. 102; plus récemment arrêt 7B.241/2003 du 8 janvier 2004, consid. 4.2). 
 
En principe, le domicile et la résidence habituelle coïncident (Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 44 ad art. 20 LDIP). La doctrine prévoit une exception pour les saisonniers, qui gardent leur domicile dans leur patrie, mais se créent une résidence habituelle en Suisse pendant la saison où ils travaillent (cf. Dutoit, op. cit., n. 5 ad art. 20 LDIP; Keller/Kren Kostkiewicz, op. cit., n. 44 ad art. 20 LDIP; Staehelin, op. cit., n. 18 ad art. 23 CC). 
4.2 Dans la partie "en fait" de son arrêt, la cour cantonale a retenu que, selon les procurations signées le 3 décembre 1991 par l'épouse du demandeur en faveur du défendeur, celui-ci résidait à Genève au .... De même, l'adresse mentionnée dans le contrat de vente du 5 décembre 1991 par le défendeur était le ..., à Genève. L'attestation de l'Office cantonal de la population du 17 mai 2004 mentionnait que la dernière adresse connue du défendeur à Genève était le ..., à Genève et qu'il était parti pour l'Espagne le 30 septembre 1991. Divers documents (avis de remboursement caisse maladie, carte d'identité) indiquaient que le défendeur était domicilié à Madrid en 1990 et 1991. 
 
Appliquant les art. 117 LDIP et 20 LDIP, les juges cantonaux ont considéré que le défendeur avait conservé sa résidence habituelle à Genève, quand bien même son domicile se trouvait déjà à Madrid en décembre 1991. En effet, le défendeur avait lui-même présenté Genève comme l'endroit où il résidait, tant sur les procurations du 3 décembre 1991 que dans le contrat de vente daté du 5 du même mois. Le demandeur pouvait ainsi considérer de bonne foi que la résidence habituelle du défendeur se trouvait à Genève, sans que la question de la durée de son séjour soit déterminante. En outre, le défendeur était physiquement présent à Genève au moment de la signature des contrats et il avait créé une apparence extérieure concernant sa résidence à Genève, encore une fois, en indiquant dans les contrats résider dans cette ville. 
 
Appelée à déterminer le domicile du défendeur au sens de l'art. 74 al. 2 ch. 3 CO, la cour cantonale a retenu que, même si l'on pouvait considérer que celui-ci avait conservé une résidence habituelle à Genève, son domicile était en Espagne déjà en décembre 1991, dès lors que l'attestation de l'Office cantonal de la population indiquait son départ pour l'Espagne le 30 septembre 1991 et que d'autres indices (carte d'identité, avis remboursement caisse maladie, famille, etc.) confirmaient que celui-ci possédait le centre principal de ses intérêts dans ce pays, à Madrid. 
4.3 Le raisonnement de la cour cantonale, qui aboutit à la conclusion qu'en décembre 1991, le défendeur avait, en même temps, sa résidence habituelle en Suisse et son domicile en Espagne, ne résiste pas à l'examen. En effet, le comportement du défendeur au moment de la signature du contrat de vente des actions conclu en exécution du mandat, soit en particulier le fait qu'il ait indiqué, sur les procurations et dans le contrat de vente, une adresse à Genève, apparaissait, de façon reconnaissable pour les tiers, comme la manifestation de ce que cet endroit était le centre de ses relations professionnelles, avec lequel il entretenait les relations les plus étroites. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il s'agissait là de preuves permettant de renverser la présomption créée par les indices constitués par les divers documents administratifs selon lesquels le défendeur aurait été domicilié en Espagne. Pour le surplus, l'on ne voit pas que l'on se trouve en présence d'une situation analogue à celle d'un saisonnier, susceptible d'avoir un domicile différent de sa résidence habituelle. La cour cantonale a donc violé le droit fédéral en considérant que le domicile du défendeur était en Espagne, alors qu'il était en Suisse. 
5. 
Il résulte de ce qui précède que le lieu d'exécution déterminant au sens de l'art. 5 ch. 1 CL est au domicile du défendeur en décembre 1991, soit à Genève, dont les tribunaux sont compétents pour connaître du litige opposant le demandeur à celui-ci. Il y a donc lieu d'admettre le recours, d'annuler l'arrêt attaqué et de renvoyer la cause à l'autorité cantonale compétente pour qu'elle statue sur le fond. 
6. 
Compte tenu de l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la charge du défendeur (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). Comme le demandeur a obtenu l'assistance judiciaire, les honoraires de son avocat, fixés dans le dispositif du présent arrêt, seront supportés par la Caisse du Tribunal fédéral au cas où les dépens ne pourraient être recouvrés (art. 152 al. 2 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est admis et l'arrêt attaqué est annulé. 
2. 
Les tribunaux suisses sont déclarés compétents à raison du lieu pour connaître du litige opposant le demandeur au défendeur, selon demande du 24 septembre 2003, et la cause est renvoyée à l'autorité cantonale compétente pour qu'elle statue sur le fond. 
3. 
Un émolument judiciaire de 11'000 fr. est mis à la charge du défendeur. 
4. 
Le défendeur versera au demandeur une indemnité de 13'000 fr. à titre de dépens. Au cas où ces dépens ne pourraient être recouvrés, la Caisse du Tribunal fédéral versera cette somme à l'avocat d'office du demandeur. 
5. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des par-ties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 16 juin 2005 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: