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[AZA 0] 
5C.13/1999 
IIe COUR CIVILE 
************************* 
 
23 mars 2000 
 
Composition de la Cour: M. Reeb, Président, M. Weyermann, M. Raselli, Mme Nordmann et M. Merkli, Juges. 
Greffière: Mme Bruchez. 
_____________________ 
 
Dans la cause civile pendante 
entre 
 
X.________, défendeur et recourant, représenté par Me Olivier Freymond, avocat à Lausanne, 
 
et 
1. H.________, défendeur et recourant par voie de jonction, représenté par Me François Chaudet, avocat à Lausanne, 
2. D.________, demandeur et intimé, représenté par Me Charles- Henri de Luze, avocat à Lausanne, 
3. L.________, défendeur et intimé, représenté par Me Laurent Trivelli, avocat à Lausanne. 
 
(responsabilité pour la tenue du registre foncier) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les faits suivants: 
 
A.- a) En 1970, D.________ et ses soeurs ont cohérité d'un immeuble sis sur la Commune de Y.________, immatriculé au registre foncier sous le no .... Ils ont vendu ce bien-fonds à J.________, fils de D.________. L'acte authentique de vente instrumenté par le notaire H.________ le 27 octobre 1986 et auquel D.________ était représenté par son tuteur, L.________, prévoyait notamment un droit d'habitation à vie en faveur du pupille à inscrire au registre foncier. Cette inscription avait été requise par la Chambre des tutelles du Tribunal cantonal, intervention qui avait entraîné, le 14 juillet 1986, la modification - approuvée par les autorités tutélaires les 11 août et 16 septembre 1986 - d'un premier projet d'acte. 
 
b) Pour financer son achat, J.________ a obtenu de la Banque Z.________ un prêt qui devait être garanti par une cédule hypothécaire de 300'000 fr., grevant en premier rang la parcelle no .... L'acte hypothécaire a été instrumenté par le notaire H.________ le 27 octobre 1986, sitôt après la vente. Requis de procéder aux inscriptions du transfert immobilier et de la cédule, le Conservateur du Registre foncier de Y.________a suspendu la procédure et invité le notaire à préciser le rang de la servitude personnelle par rapport à celui du droit de gage; en effet, la cédule ne mentionnait pas, sous la rubrique "état des droits et des charges antérieurs", le droit d'habitation constitué en faveur de D.________, mais seulement une servitude de passage à pied et à tous véhicules. 
 
Le 12 novembre 1986, le notaire a alors adressé au tuteur un document non daté intitulé "postposition", en précisant que celui-ci aurait dû être signé simultanément à la constitution de la cédule hypothécaire et qu'il s'agissait donc d'une omission de sa part. La déclaration de postposition rappelle que D.________ bénéficie d'un droit d'habitation inscrit au registre foncier le 5 novembre 1986 sous le no 02 et grevant la parcelle no .... dont J.________ est propriétaire à Y.________; D.________, par l'intermédiaire de son tuteur, y déclare en outre postposer ce droit à une cédule hypothécaire de 300'000 fr. inscrite le 5 novembre 1986 sous le no 03 et grevant en premier rang l'immeuble précité. La mention de la cédule hypothécaire s'explique par le fait que la déclaration de postposition - datée du 27 octobre 1986 - a en réalité été signée par le tuteur le 13 ou le 14 novembre. Sous la rubrique "date de l'inscription", le conservateur du registre foncier a indiqué, postérieurement à la signature du document par le tuteur, celle du 5 novembre 1986. 
 
Au journal du Registre foncier de Y.________, la réquisition d'inscription de la vente porte le no 01, celle du droit d'habitation le no 02, celle de la cédule hypothécaire le no 03 et celle de la postposition du droit d'habitation le n° 04, étant précisé que toutes ces réquisitions ont été portées au journal sous la date du 5 novembre 1986. 
 
c) Par acte authentique du 10 février 1987 instrumenté par le notaire H.________ et inscrit au Registre foncier de Y.________ le 18 février suivant, le montant de la cédule hypothécaire a été porté à 400'000 fr. à la suite d'un prêt complémentaire de 100'000 fr. accordé à J.________. Il y est précisé que D.________, représenté par L.________, a consenti à cette augmentation. De fait, le 4 février précédent, pupille et tuteur avaient apposé leurs signatures - légalisées par le notaire prénommé - sur un document portant consentement à ce que le droit d'habitation soit primé par une cédule hypothécaire en premier rang de 400'000 fr. 
 
d) A la suite d'une division de parcelle, la surface de l'immeuble no .... a été réduite à 968 m2. Ce bien-fonds a été réalisé le 16 octobre 1992 dans le cadre de la faillite de J.________ ouverte le 23 avril 1991. La Banque Z.________ ayant demandé la double mise à prix, il a été adjugé dégrevé du droit d'habitation. Ni D.________ ni son tuteur n'ont produit dans la faillite la créance correspondant à la valeur résiduelle de la servitude personnelle. 
 
e) Par la suite, la Justice de paix et la Chambre des tutelles ont rendu attentifs les différents protagonistes à la responsabilité qu'ils pouvaient encourir pour n'avoir pas soumis à l'approbation des autorités de tutelle la postposition du droit d'habitation. En particulier, l'officier public a été dénoncé à la Chambre des notaires, qui n'a pu toutefois que constater la prescription de l'action disciplinaire. 
 
f) Le 10 mai 1993, la Justice de paix a relevé L.________ de ses fonctions de tuteur et a nommé l'avocat C.________ en qualité de curateur de D.________, aux fins de défendre les intérêts de ce dernier dans le litige pouvant l'opposer au notaire H.________, à son ancien tuteur, L.________, et à X.________. 
 
B.- Le 13 octobre 1993, D.________, par son curateur, a ouvert action contre les prénommés; il a conclu à ce que les défendeurs soient condamnés, solidairement entre eux ou, subsidiairement, chacun dans la mesure que justice dira, à lui payer la somme de 258'400 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 13 octobre 1993. 
 
Statuant le 30 janvier 1998, la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rendu le dispositif suivant: 
 
"I. Les défendeurs H.________, L.________ et X.________, solidairement entre eux, doivent payer au demandeur D.________ la somme de 95'628 francs [...], avec intérêt à 5% l'an dès le 13 octobre 1993. 
 
II. Les frais de Justice sont arrêtés à 6'932 fr. 05 [...] pour le demandeur, à 5'407 fr. 85 [...] pour le défendeur H.________, à 4'106 fr. 60 [...] pour le défendeur L.________ et à 3'200 francs [...] pour le défendeur X.________. 
 
III. Les défendeurs, solidairement entre eux, doivent payer au demandeur la somme de 17'199 fr. [...] à titre de dépens. 
 
IV. Le défendeur H.________ doit rembourser: 
 
a) au défendeur L.________, toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 10% des montants fixés aux chiffres I et III ci-dessus en capital, intérêts, frais et dépens, avec intérêts à 5% l'an dès le jour du paiement; 
 
b) au défendeur X.________, toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 30% des montants fixés aux chiffres I et III ci-dessus en capital, intérêts, frais et dépens, avec intérêts à 5% l'an dès le jour du paiement. 
 
V. Le défendeur X.________ doit rembourser: 
 
a) au défendeur L.________, toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 10% des montants fixés aux chiffres I et III ci-dessus en capital, intérêts, frais et dépens, avec intérêts à 5% l'an dès le jour du paiement; 
 
b) au défendeur H.________, toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 60% des montants fixés aux chiffres I et III ci-dessus en capital, intérêts, frais et dépens, avec intérêts à 5% l'an dès le jour du paiement. 
 
VI. Le défendeur L.________ doit rembourser: 
 
a) au défendeur H.________, toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 60% des montants fixés aux chiffres I et III ci-dessus en capital, intérêts, frais et dépens, avec intérêts à 5% l'an dès le jour du paiement; 
 
b) au défendeur X.________, toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 30% des montants fixés aux chiffres I et III ci-dessus en capital, intérêts, frais et dépens, avec intérêts à 5% l'an dès le jour du paiement. 
 
VII. Le défendeur L.________ doit payer: 
 
a) au défendeur H.________, la somme de 1'590 fr. 80 [...] à titre de dépens; 
 
b) au défendeur X.________, la somme de 1'438 fr. 50 [...] à titre de dépens. 
 
VIII. Le défendeur H.________ doit payer: 
 
a) au défendeur L.________, la somme de 8'797 fr. 30 [...] à titre de dépens; 
 
b) au défendeur X.________, la somme de 8'151 fr. 50 [...] à titre de dépens. 
 
IX. Le défendeur X.________ doit payer: 
 
a) au défendeur L.________, la somme de 4'390 fr. 60 [...] à titre de dépens; 
 
b) au défendeur H.________, la somme de 4'772 fr. 30 [... ] à titre de dépens. 
 
X. Toutes autres ou plus amples conclusions sont rejetées. " 
 
C.- X.________ exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral, concluant, avec suite de dépens, à la réforme de l'arrêt cantonal en ce sens qu'il n'est pas débiteur des montants mis à sa charge aux chiffres I, III, V et IX du dispositif. 
 
D.________ propose le rejet du recours dans la mesure où celui-ci tend à la réforme des chiffres I et III du dispositif et s'en remet à justice pour le surplus. L.________ demande le rejet du recours. H.________ en fait de même et demande, par voie de jonction, à être libéré du paiement des sommes mises à sa charge aux chiffres I, III, IV et VIII du dispositif du jugement attaqué. 
 
Aucune des parties n'a été invitée à se déterminer sur le recours joint. 
 
Considérant en droit : 
 
1. Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 125 II 293 consid. 1a p. 299 et les arrêts cités). 
 
a) Selon l'art. 48 al. 1 OJ, le recours en réforme n'est recevable en règle générale que contre les décisions finales prises par les tribunaux ou autres autorités suprêmes des cantons et qui ne peuvent pas être l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal, soit d'un recours ayant effet suspensif et dévolutif (ATF 120 II 93 consid. 1b p. 94 s.). En l'espèce, le recourant principal ayant été condamné exclusivement en application du droit fédéral, un recours en réforme au Tribunal cantonal vaudois selon l'art. 451a al. 1 CPC vaud. ne saurait entrer en considération, dès lors que cette disposition n'ouvre cette voie que contre des contestations civiles pécuniaires régies concurremment par le droit fédéral et cantonal ou le droit étranger. Le recours principal devant le Tribunal fédéral est dès lors recevable sous l'angle de l'art. 48 al. 1 OJ. Interjeté en temps utile - compte tenu des féries de Noël (art. 34 al. 1 let. c OJ) - contre une décision rendue dans une contestation civile de nature pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint manifestement 8'000 fr., il l'est aussi au regard des art. 46 et 54 al. 1 OJ
 
b) Lorsque plusieurs défendeurs agissent, comme en l'espèce, en consorité simple, chacun d'eux conserve son indépendance et peut faire valoir ses droits sans égard à ses codéfendeurs. Ce principe vaut également pour la procédure de recours: chaque consort peut recourir séparément et de manière indépendante (O. Vogel, Grundriss des Zivilprozessrechts, 6e éd., chap. 5, n. 62, p. 149), étant précisé qu'il ne peut attaquer que la partie du dispositif qui le concerne (Guldener, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p. 493; Habscheid, Schweizerisches Zivilprozess- und Gerichtsorganisationsrecht, 2e éd., n. 279). Partant, seuls les consorts qui sont visés activement ou passivement par un recours sont parties à la procédure de recours (cf. Guldener, op. cit. , p. 499) et ont ainsi qualité pour déposer un recours joint (Poudret, Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, n. 2.2.1 ad art. 59 et 61 OJ et l'arrêt cité). Telle est précisément la position du notaire, en sorte que son recours joint est, de ce point de vue, recevable. 
 
c) Autant que le notaire conclut à la réforme du chiffre I du dispositif qui l'a condamné à verser au demandeur la somme de 95'628 fr., plus accessoires, son recours est toutefois irrecevable. Il en va de même lorsqu'il demande à être libéré de son obligation de rembourser au tuteur toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 10% des montants fixés aux chiffres I et III du dispositif. Par la voie de la jonction, l'intimé ne peut en effet conclure qu'à la réforme du jugement au détriment du recourant principal, en l'occurrence du canton (art. 59 al. 2 OJ). Le recours joint n'est pas plus recevable dans la mesure où il tend à la réforme du chiffre IV/b du dispositif, selon lequel le notaire doit rembourser à l'Etat toute somme payée par ce dernier au demandeur au-delà de 30% des montants fixés au chiffre III statuant sur les dépens. Ce chef de conclusions concerne en effet la répartition interne des dépens dus au demandeur, domaine qui relève du droit cantonal et ne saurait faire l'objet d'un recours en réforme (art. 43 al. 1 OJ). 
 
Le recours joint est en revanche recevable en tant qu'il porte sur la répartition interne des dommages-intérêts. Fondée exclusivement sur le droit fédéral (art. 50 s. CO), cette question ne peut pas être l'objet d'un recours ordinaire de droit cantonal (cf. supra, consid. 1a). En concluant, dans le mémoire de réponse, ne rien devoir rembourser en capital et accessoires au canton, le recourant demande par ailleurs - en temps utile (art. 59 al. 3 OJ) - la réforme de l'arrêt querellé au détriment du recourant principal (art. 59 al. 2 OJ). 
 
d) Les dépens des instances cantonales ne sont pas réglés par le droit civil fédéral. Le recours principal est donc irrecevable dans la mesure où le recourant demande la réforme de l'arrêt cantonal sur ce point (chiffres III et IX du dispositif). Il en va de même du recours joint autant qu'il porte sur la condamnation du notaire à payer des dépens au demandeur et à ses codéfendeurs (chiffres III et VIII du dispositif). Les recourants entendent sans doute leurs chefs de conclusions comme une conséquence de l'admission de leur recours (art. 159 al. 6 OJ). 
 
2.- Le recourant principal prétend que la postposition au gage immobilier du droit d'habitation constitué en faveur du pupille n'est soumise ni à l'autorisation de l'autorité tutélaire (art. 421 ch. 2 CC) ni à l'approbation de l'autorité de surveillance (art. 404 al. 3 CC). En résumé, un tel acte ne saurait être assimilé à une cession d'un droit ou à une renonciation à celui-ci, au sens de l'art. 421 ch. 2 CC, dès lors qu'il n'a pas pour conséquence de transférer le droit à un tiers ou d'y mettre un terme. Le fait qu'il affaiblit la servitude ne suffirait pas à le faire tomber sous le coup de la disposition précitée. Le conservateur du registre foncier ne pouvait par ailleurs juger de la nécessité d'une approbation selon l'art. 404 al. 3 CC. Comme il ne lui appartient pas d'interpréter le contenu matériel de différents actes distincts, il ne pouvait en effet conclure qu'ils formaient un tout avec la vente. 
 
a) Après avoir exclu l'application de l'art. 421 ch. 1 CC, l'autorité cantonale n'a pas vraiment tranché la question de savoir si une autorisation au sens de l'art. 421 ch. 2 CC ou une approbation selon l'art. 404 al. 3 CC devait être requise. Elle a en effet considéré que le consentement de l'autorité tutélaire est nécessaire en vertu de l'art. 421 ch. 2 CC si l'on doit envisager que la postposition du droit d'habitation et la création de la cédule hypothécaire - opérations simultanées - sont indépendantes de la constitution du droit d'habitation et de la vente de la parcelle. Dans cette hypothèse, la postposition concernerait en effet la diminution d'un droit réel restreint du demandeur sur l'immeuble d'un tiers, soit un acte de disposition de nature à diminuer sérieusement la substance de ce droit et ne relevant manifestement pas de l'administration ou de l'exploitation courantes. Et quand bien même devrait-on suivre la thèse selon laquelle les différents actes relèveraient d'une unique opération globale, une approbation de l'autorité de surveillance (art. 404 al. 3 CC) serait aussi nécessaire. 
 
b) On ne peut qu'approuver la cour cantonale lorsqu'elle considère que l'acte litigieux tombe sous le coup de l'art. 421 ch. 2 CC, et renvoyer sur ce point à sa motivation pertinente. Cette disposition, selon laquelle le consentement de l'autorité tutélaire est nécessaire pour acheter, vendre ou mettre en gage d'autres biens au-delà des besoins de l'administration ou de l'exploitation courantes, vise notamment la cession de droits réels restreints (Philippe Meier, Le consentement des autorités de tutelle aux actes du tuteur, thèse Fribourg, 1994, p. 350; Ostertag, Commentaire bernois, vol. IV/III, 1917, Exkurs ad art. 965 CC, n. 54). Elle s'applique aussi lorsqu'est en jeu un acte de disposition relatif à de tels biens, diminuant la jouissance du patrimoine du pupille (Ostertag, op. cit. , n. 53; Egger, Commentaire zurichois, nos 22 ss ad art. 421 CC; cf. Thomas Geiser, Commentaire bâlois, n. 14 ad art. 421/422 CC). Postposer une servitude, en l'occurrence un droit d'habitation à un droit de gage, ne signifie pas autre chose. La postposition revient, en effet, à renoncer au bénéfice du rang affecté à son droit et à consentir ainsi à ce que ce dernier soit primé par un autre, postérieur (Steinauer, Les droits réels, Tome II, 2e éd., nos 2162 et 2162a, et Tome III, nos 2763 ss). Elle fait ainsi perdre à son titulaire, en l'espèce au pupille, le privilège d'exiger, en cas de réalisation, que l'immeuble soit vendu grevé de la servitude (Steinauer, op. cit. , Tome II, n. 2153). En d'autres termes, elle prive l'intéressé du droit que lui offre son rang antérieur d'empêcher une double mise à prix selon l'art. 142 LP, qui pourrait entraîner la perte de la servitude sans contrepartie assurée (Steinauer, op. cit. , Tome II, nos 2154 ss), situation dans laquelle s'est précisément retrouvé le demandeur. Elle ne relevait par ailleurs pas de l'administration ou de l'exploitation courantes, dès lors que, comme l'ont souligné les juges cantonaux, elle n'avait aucun caractère de nécessité et était susceptible d'entraîner des conséquences importantes pour le patrimoine du pupille, à savoir ôter à celui-ci le bénéfice d'un logement garanti à vie. 
 
3.- Le recourant principal soutient que le conservateur n'a pas agi illicitement dans la tenue du registre foncier, en sortequelaresponsabilitéducantonnesauraitêtreengagéeausensdel'art. 955al. 1CC.Enrésumé, le conservateur n'aurait pas violé l'art. 965 al. 1 CC, car il n'avait pas à vérifier si l'acte litigieux était soumis à l'approbation des autorités de tutelle. Il n'a en effet pas à "entrer dans l'interprétation de questions de droit matériel ou d'opportunité" et voit son devoir d'examen allégé lorsque la réquisition émane d'un officier public. Se référant à la doctrine (Deschenaux, Le registre foncier, in Traité de droit privé suisse, vol. V, tome II/2, p. 404 et 409) et à la jurisprudence (ATF 124 III 341), le recourant prétend en effet qu'il incombe en priorité au notaire de s'assurer de la nécessité d'une autorisation et de la capacité du requérant. 
a) Le conservateur du registre foncier saisi d'une réquisition d'inscription émanant d'un tuteur doit, en vertu de l'art. 965 al. 1 et 2 CC, examiner d'office si celui-ci peut représenter le pupille à l'acte juridique en question ou si son pouvoir de représentation est conditionnellement restreint, notamment par les art. 421 et 422 CC (Homberger, Commentaire zurichois, nos 11 et 41 ad art. 965 CC). En d'autres termes, il doit s'assurer que l'autorité compétente a donné son approbation (Steinauer, op. cit. , Tome premier, 3e éd., nos 739 et 849a; Deschenaux, op. cit. , p. 409; Homberger, op. cit. , n. 46 ad art. 965 CC). Lorsque cette dernière fait défaut, il ne peut en aucun cas procéder à l'inscription définitive (art. 966 al. 1 CC; Steinauer, op. cit. , Tome premier, n. 854; cf. aussi: art. 24 al. 1bis let. b ORF, entré en vigueur le 1er janvier 1995). Il doit agir de la même manière s'il n'a que des doutes quant à la nécessité de l'autorisation et que celle-ci n'a pas été requise (cf. ATF 56 I 199; Homberger, op. cit. , n. 4 ad art. 966 CC). Dès lors qu'il incombe au seul requérant de produire les pièces justificatives nécessaires (cf. art. 965 al. 1 CC), on ne saurait en revanche suivre l'opinion de certains auteurs (Meier, op. cit. , p. 313; Ostertag, op. cit. , Exkurs ad art. 965 CC, n. 54), selon laquelle le conservateur devrait provoquer lui-même la décision de l'autorité tutélaire. 
 
b) En l'espèce, la postposition du droit d'habitation requérait le consentement de l'autorité tutélaire (cf. supra, consid. 2b). Dès lors, saisi d'une réquisition de postposition signée par le tuteur en l'absence de toute autorisation, le conservateur aurait dû refuser de donner suite à l'inscription définitive. Par son comportement contraire, il a agi de manière illicite. A cet égard, la jurisprudence et la doctrine relatives à la répartition des compétences entre le conservateur et le notaire ne sont d'aucun secours au canton, dans la mesure où elles ont trait à une toute autre question, à savoir au pouvoir du conservateur de vérifier la capacité de discernement du requérant. 
 
4.- Le recourant principal et le recourant par voie de jonction se plaignent d'une violation de l'art. 51 al. 2 CO
 
a) Le recourant principal reproche d'abord à la cour cantonale d'avoir retenu que le conservateur a commis une faute. A l'appui de son moyen, il soutient en particulier que son fonctionnaire pouvait admettre que la déclaration de postposition préparée par le notaire était régulière en la forme et bénéficiait de l'approbation de l'autorité de surveillance contenue dans l'acte de vente. Ce grief est mal fondé. Les juges cantonaux ont imputé, à juste titre, au conservateur du registre foncier un manquement de la volonté aux devoirs imposés par l'ordre juridique. Ce fonctionnaire aurait dû reconnaître, en examinant la question avec la diligence requise par sa fonction, que le consentement de l'autorité tutélaire était nécessaire. En effet, il savait, en vertu de l'acte de vente, que le demandeur était sous tutelle, qu'il habitait l'appartement sur lequel portait le droit d'habitation à inscrire, que ce droit était une des contre-prestations de la transaction et que l'autorité de surveillance venait d'approuver celle-ci moyennant constitution d'un droit d'habitation à vie à inscrire au registre foncier. Par ailleurs, au regard de sa formation, il connaissait ou, à tout le moins, devait connaître les conséquences de la postposition, à savoir que, par un tel acte, le demandeur renonçait à certains droits et s'exposait au risque d'une radiation de la servitude en cas de double mise à prix (cf. supra, consid. 2b) et, partant, pouvait se voir priver de la garantie d'un logement à vie et d'une partie de la contre-prestation. Alors même que la postposition déséquilibrait la vente au détriment du pupille, il ne pouvait décemment penser que l'approbation de cette dernière par les autorités de tutelle couvrait aussi l'opération litigieuse. Ces circonstances auraient dû au moins susciter chez lui de sérieux doutes quant au pouvoir de représentation du tuteur et l'amener à refuser l'inscription définitive de la postposition. 
 
b) Le recourant principal - quoique implicitement - et le recourant par voie de jonction contestent ensuite la répartition interne des responsabilités. En particulier, le notaire demande une aggravation - sans toutefois la chiffrer (art. 55 al. 1 let. b OJ) - de la responsabilité du canton par rapport à la sienne. A l'appui de son argumentation, il soutient qu'il appartenait principalement au conservateur - spécialiste en la matière - de vérifier la nécessité d'une autorisation et, le cas échéant, d'attirer l'attention des autres protagonistes sur ce point. Vu son silence, les derniers prénommés pouvaient de bonne foi estimer que la postposition du droit d'habitation ne requérait pas le consentement des autorités de tutelle. 
 
Les juges cantonaux ont réparti les responsabilités à raison de 60% pour le notaire, de 10% pour le tuteur et de 30% pour le canton. Ils ont en bref considéré que la faute du notaire est nettement plus lourde que celle du tuteur, motif pris que le premier bénéficie de connaissances juridiques spécialisées dans le domaine en question et qu'il a adressé pour signature au second la réquisition de postposition en se contentant de présenter l'opération comme une simple formalité devant réparer une omission sans conséquence. A sa décharge, le tuteur a été incité à signer la réquisition litigieuse par un officier public, qui était tenu à un devoir d'impartialité et d'information qui n'a pas été accompli. Enfin, la faute du canton, du fait du manquement de son fonctionnaire spécialisé, apparaît moyennement grave. 
 
Ces considérations ne souffrent aucune discussion. En particulier, elles n'excèdent pas le pouvoir d'appréciation dont jouit l'autorité cantonale en la matière (cf. ATF 80 II 247 consid. 5 p. 254; 93 II 345 consid. 6 p. 353), en ce sens que cette dernière aurait abusé de cette faculté en se référant à des critères dénués de pertinence ou en ne tenant pas compte d'éléments essentiels ou que sa décision apparaîtrait manifestement inéquitable dans le cas particulier (ATF 121 III 64 consid. 3c p. 68/69 et les arrêts cités). Au contraire, elles sont d'autant plus pertinentes que le conservateur du registre foncier intervient chronologiquement après le notaire, pour n'exercer qu'un pouvoir de contrôle, et que l'acte de constitution de la cédule hypothécaire ne mentionnait pas l'existence de droits ou charges antérieurs. Le notaire a non seulement violé son devoir de conseil et d'information envers le pupille et son tuteur, mais aussi son devoir de rédiger un acte clair et dépourvu d'ambiguïté (cf. sur ce point: Denis Piotet, La responsabilité patrimoniale des notaires et autres officiers publics, thèse Lausanne 1981, p. 126/127). 
 
5.- Vu ce qui précède, le recours principal et celui par voie de jonction doivent être rejetés, dans la mesure de leur recevabilité, aux frais de leur auteur (art. 156 al. 1 OJ). Le recourant principal versera en outre au notaire, au tuteur et au pupille - qui ont été invités à se déterminer - une indemnité à titre de dépens (art. 159 al. 1 et 2 OJ). Le Tribunal fédéral n'ayant pas requis des parties qu'elles répondent au recours joint, il n'y a pas lieu de condamner le recourant par voie de jonction à leur verser des dépens. 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Rejette le recours principal et le recours joint, dans la mesure où ils sont recevables, et confirme l'arrêt entrepris. 
 
2. Met à la charge du recourant principal: 
a) un émolument judiciaire de 5'000 fr. 
b) une indemnité de 5'000 fr. à verser à D.________, de 4'500 fr. à verser à L.________ et de 2'000 fr. à verser à H.________. 
 
3. Met à la charge du recourant par voie de jonction un émolument judiciaire de 5'000 fr. 
 
4. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
______________________ 
 
Lausanne, le 23 mars 2000 
BRU/frs 
Au nom de la IIe Cour civile 
duTRIBUNALFEDERALSUISSE : 
Le Président, 
 
La Greffière,