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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_227/2007 /ech 
 
Arrêt du 26 septembre 2007 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Corboz, Président, 
Klett, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss. 
Greffier: M. Abrecht. 
 
Parties 
X.________ Assurances, 
recourante, représentée par Me Michel Bergmann, 
 
contre 
 
Y.________, 
intimé, représenté par Me Jérôme Picot. 
 
Objet 
responsabilité civile du détenteur de véhicule automobile, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 11 mai 2007. 
 
Faits : 
A. 
A.a Le 16 novembre 2002, A.________ circulait de nuit en ville de Genève à bord d'un véhicule dont il est le détenteur. Obliquant à gauche, il a heurté Y.________, piéton, qui s'était engagé sur la chaussée pour la traverser. Selon les constatations des gendarmes, le point de choc se situe au milieu de la chaussée, à 4,40 m du trottoir que le piéton venait de quitter; l'endroit de l'accident était sombre et au moins un véhicule se trouvait en stationnement illicite le long de la rue. 
 
Les analyses toxicologiques effectuées sur A.________ ont révélé qu'au moment de l'accident, il se trouvait sous l'influence de plusieurs produits stupéfiants, mélangés à de l'alcool (taux de 0,38 g / 1000). Il a reconnu suivre une cure de méthadone. 
 
Les analyses toxicologiques effectuées sur Y.________ n'ont décelé aucune trace de stupéfiants ou d'alcool. Dénoncé pour s'être engagé sur la chaussée sans prêter l'attention commandée par les circonstances, il a été acquitté par le Tribunal de police par jugement du 11 décembre 2003. 
A.b Y.________ a été blessé lors de l'accident, en particulier au genou. Il s'est trouvé en incapacité totale d'exercer son activité professionnelle de chauffeur de taxi indépendant dès le jour de l'accident, soit dès le 16 novembre 2002. Selon le Dr B.________, médecin-traitant de Y.________, et le Dr C.________, spécialiste en chirurgie orthopédique, l'incapacité de travail de Y.________ a duré jusqu'au 18 octobre 2004. 
A.c Y.________ exerce la profession de chauffeur de taxi indépendant depuis 1998. Ses déclarations fiscales font état d'un revenu brut de 20'946 fr. en 2000, de 23'033 fr. en 2001 et de 22'045 fr. en 2002 (pour dix mois et demi de travail). 
 
Y.________ était affilié auprès de E.________ (ci-après: E.________), qui lui offrait de faire des missions spécifiques. En 2002, E.________ a commencé à offrir à des chauffeurs indépendants des missions importantes, impliquant l'engagement d'un grand nombre de véhicules pendant plusieurs semaines. Le 15 novembre 2002, soit la veille de l'accident, E.________ a écrit à Y.________ pour lui confirmer une mission du 19 novembre 2002 au 7 janvier 2003 pour un montant forfaitaire de 680 fr. par jour, soit un total de 34'000 fr. 
 
E.________ a en outre pu faire bénéficier ses chauffeurs, en assurant une rotation entre eux lorsque la mission ne nécessitait pas l'engagement de tous, de missions de respectivement deux mois au cours de l'été 2003, dix jours en octobre 2003, six jours en décembre 2003 et un mois en été 2004, pour une rémunération moyenne de 980 fr. par jour, soit un potentiel de chiffre d'affaires de 103'880 fr. 
B. 
B.a Le 24 mars 2004, Y.________ a actionné X.________ Assurances, assureur responsabilité civile de A.________, devant le Tribunal de première instance du canton de Genève, en concluant au paiement de 216'151 fr. 80 à titre de réparation du gain manqué et de 40'000 fr. à titre de tort moral, plus intérêts. 
 
La défenderesse a conclu au déboutement total du demandeur. À l'appui de ses conclusions, elle a soutenu que son assuré n'avait commis aucune faute, que le demandeur avait au contraire commis une faute grave, que son assuré devait être libéré de toute responsabilité, que le montant du dommage n'avait pas été démontré, que le demandeur ne pouvait prétendre à une indemnité pour tort moral puisqu'il n'était pas victime d'un dommage permanent et que les prestations de l'assurance-invalidité qu'il aurait pu réclamer devaient être imputées sur ses revenus; enfin, une expertise portant sur le déroulement de l'accident devait être ordonnée. 
B.b Par jugement du 9 janvier 2006, le Tribunal de première instance a condamné la défenderesse à payer au demandeur les montants de 59'775 fr. 75 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er novembre 2003 et de 2'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 novembre 2002. 
 
Le premier juge a notamment retenu que l'assuré de la défenderesse avait commis une faute grave, qu'aucune faute ne pouvait être reprochée au demandeur, que celui-ci avait été incapable de travailler jusqu'au 17 octobre 2004, que son revenu hypothétique si l'accident n'était pas survenu était de 92'952 fr. 25, qu'il convenait d'imputer sur ce revenu hypothétique des dépenses de 33'176 fr. 50 qu'il avait pu s'épargner et qu'aucune rente de l'assurance-invalidité ne pouvait être demandée faute d'invalidité permanente. 
B.c Statuant par arrêt du 11 mai 2007 sur appel du demandeur et appel incident de la défenderesse, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève a réformé le jugement de première instance en ce sens qu'elle a condamné la défenderesse à payer au demandeur les montants de 44'183 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er novembre 2003, 34'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15 décembre 2002, 68'560 fr. 80 avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mars 2003 et 8'544 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 novembre 2002. 
C. 
Agissant par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, la défenderesse conclut avec suite de frais et dépens à la réforme de cet arrêt en ce sens que le demandeur soit débouté de toutes ses conclusions. 
 
La défenderesse a en outre présenté une requête d'effet suspensif, que le Président de la cour de céans, après avoir invité le demandeur et la cour cantonale à se déterminer sur cette requête, a admise par décision du 13 juillet 2007. 
 
Le demandeur conclut avec suite de frais et dépens au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Comme la décision attaquée a été rendue après l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007 (RO 2006, 1242), de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), le recours est régi par le nouveau droit (art. 132 al. 1 LTF; ATF 133 IIII 399 consid. 1.1). 
1.2 Interjeté par la partie défenderesse qui a succombé dans ses conclusions libératoires prises devant l'autorité précédente et a donc qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF; arrêt 4A_28/2007 du 30 mai 2007, destiné à publication, consid. 1.1), le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 75 LTF). Portant sur une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 francs (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours est donc en principe recevable, puisqu'il a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prévues par la loi (art. 42 LTF). 
1.3 Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Sauf l'exception prévue par l'art. 106 al. 2 LTF pour la violation de droits fondamentaux ou de dispositions de droit cantonal et intercantonal, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4 in fine). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF - sanctionnée par l'irrecevabilité des recours dont la motivation est manifestement insuffisante (art. 108 al. 1 let. b LTF) -, le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui. 
1.4 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (cf. ATF 130 III 136 consid. 1.4; cf. aussi ATF 133 III 399 consid 7.1). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
2. 
2.1 
2.1.1 La cour cantonale a rappelé que le détenteur d'un véhicule automobile répond du dommage causé par l'emploi du véhicule (art. 58 al. 1 LCR), mais peut se libérer de sa responsabilité s'il prouve, d'une part, que l'accident a été causé sans faute à sa charge, et, d'autre part, qu'il est dû exclusivement à la faute grave du lésé ou d'un tiers (art. 59 al. 1 LCR; ATF 111 II 89 consid 1). 
2.1.2 Les juges cantonaux ont considéré qu'en conduisant sous l'influence de plusieurs produits stupéfiants, mélangés à de l'alcool, A.________ avait violé les règles les plus élémentaires de la circulation (art. 31 al. 2 LCR) et avait ainsi commis une faute grave. Ils ont estimé qu'il n'y avait dès lors pas lieu d'examiner si la configuration des lieux de l'accident rendait ce dernier inévitable même pour un conducteur ne se trouvant pas sous l'emprise de stupéfiants et/ou d'alcool. 
2.1.3 S'agissant d'une éventuelle faute du lésé, qui avait traversé la chaussée hors d'un passage piéton et n'avait donc pas la priorité (art. 47 al. 5 OCR), la cour cantonale a indiqué qu'il ne résultait pas des faits de la cause que le demandeur aurait traversé la chaussée à l'improviste (cf. art. 49 al. 2 LCR) sans accorder la priorité à A.________; si ce dernier et son épouse avaient bien déclaré que le demandeur avait un téléphone mobile à la main au moment de traverser la chaussée, ces affirmations étaient fermement contestées et la procédure n'avait pas apporté d'éléments permettant de retenir une faute du demandeur. 
2.1.4 Les juges cantonaux ont écarté les conclusions de la défenderesse tendant à ordonner une expertise sur le « mécanisme de l'accident ». Rappelant que le recours à une mesure probatoire ne s'impose que si elle est à la fois nécessaire et utile, et que l'art. 8 CC, dont découle le droit à la preuve, n'empêche pas le juge de refuser une mesure probatoire à la suite d'une appréciation anticipée des preuves, la cour cantonale a considéré qu'il n'y avait aucune raison de s'écarter de l'appréciation faite par le juge pénal, qui avait acquitté le demandeur de toutes charges pénales, d'autant que la défenderesse n'apportait aucun élément pouvant contredire cette appréciation. 
2.2 Si, par suite de l'emploi d'un véhicule automobile, une personne est tuée ou blessée ou qu'un dommage matériel est causé, le détenteur est civilement responsable (art. 58 al. 1 LCR). Le détenteur est libéré de sa responsabilité, notamment, s'il prouve que l'accident a été causé par une faute grave du lésé, sans que lui-même ait commis de faute (art. 59 al. 1 LCR; ATF 111 II 89 consid 1). Il lui incombe donc de prouver non seulement qu'il n'a lui-même commis aucune faute, mais encore que l'accident a été causé par une faute grave du lésé. Lorsque la preuve de cette seconde condition n'est pas rapportée, le détenteur ne saurait ainsi être libéré de sa responsabilité civile selon l'art. 59 al. 1 LCR, quand bien même il établit qu'aucune faute ne peut lui être reprochée (ATF 111 II 89 consid. 1b in fine; cf. ATF 124 III 182 consid. 4c in limine). 
2.3 En l'espèce, l'autorité précédente a considéré que la défenderesse n'avait pas établi que l'accident avait été causé par une faute grave du demandeur (cf. consid. 2.1.3 supra). La défenderesse conteste cette appréciation, en soutenant notamment que les juges cantonaux auraient arbitrairement retenu qu'elle n'avait apporté aucun élément pouvant contredire l'appréciation du juge pénal. 
2.3.1 L'autorité cantonale a fait sienne l'appréciation du juge pénal, qui avait acquitté le demandeur en considérant que rien ne permettait de retenir que celui-ci n'avait pas accordé toute la prudence nécessaire à la traversée de la chaussée. Or cette conclusion n'est nullement infirmée par les éléments que la défenderesse cherche à mettre en avant dans son recours. C'est ainsi en vain que la défenderesse invoque les déclarations faites immédiatement après l'accident par le demandeur, qui aurait admis ne pas avoir prêté garde à la circulation: dans ses premières déclarations, telles que consignées dans le rapport d'accident établi par la gendarmerie, le demandeur a expliqué avoir regardé à gauche et à droite avant de s'engager sur la chaussée, et, alors qu'il traversait celle-ci, avoir été heurté violemment par une voiture; il a exposé qu'il n'avait pas vu cette voiture et a reconnu qu'il n'avait pas regardé en arrière. Il ne ressort ainsi pas de ces déclarations que le demandeur se serait élancé imprudemment sur la chaussée sans prêter attention à la circulation, mais seulement qu'il n'a pas regardé en arrière après avoir entrepris la traversée de la chaussée, ce qui ne paraît pas constitutif d'une violation des devoirs imposés aux piétons par les art. 49 al. 2 LCR et 47 OCR - même en admettant que, comme le soutient la défenderesse, il est plus facile pour un piéton de remarquer une voiture qui circule avec ses feux de croisement que pour un automobiliste de remarquer un piéton dans un carrefour non éclairé - et ne saurait à plus forte raison être considéré comme une faute grave. Quant à l'argument de la défenderesse selon lequel la vitesse de A.________ était nécessairement réduite en raison de la configuration des lieux, il n'est d'aucun secours à la défenderesse et tend au contraire à confirmer que A.________, étant donné la vitesse réduite de son véhicule, aurait dû, s'il avait été apte à la conduite, pouvoir réagir à temps pour éviter la collision. 
2.3.2 La défenderesse ne saurait par ailleurs reprocher aux juges cantonaux de n'avoir pas motivé pour quelles raisons le demandeur n'aurait commis aucune faute et d'avoir par là violé l'art. 29 al. 2 Cst. En effet, si le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., implique notamment l'obligation pour le juge de motiver ses décisions, le juge n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 129 I 232 consid. 3.2; 126 I 97 consid. 2b; 122 IV 8 consid. 2c et les arrêts cités). En l'espèce, les juges cantonaux ont clairement motivé les raisons pour lesquelles ils sont parvenus à la conclusion que le demandeur n'a commis aucune faute, sans qu'il puisse leur être fait le reproche de ne pas avoir longuement discuté les arguments de la défenderesse qui étaient impropres à infirmer une telle conclusion, comme on vient de le voir. 
2.4 C'est enfin sans arbitraire que les juges cantonaux ont pu considérer, par une appréciation anticipée des preuves, que l'expertise sollicitée par la défenderesse n'était pas susceptible d'apporter la preuve que l'accident aurait été causé par une faute grave du demandeur (cf. consid. 2.1.4 supra). La défenderesse soutient que seule une expertise technique permettrait de déterminer les circonstances de l'accident et de démontrer qu'aucune faute en relation de causalité ne peut être reprochée au conducteur et que le piéton a commis une faute grave. Toutefois, au moment de citer les questions de fait qu'une expertise serait concrètement susceptible d'élucider, la défenderesse ne cite que des questions en rapport avec la faute du conducteur, tandis qu'on ne discerne pas, à considérer les affirmations de la défenderesse relatives à la prétendue faute grave du demandeur, ce qu'une expertise technique serait susceptible d'apporter en plus de ce qui ressort déjà du dossier. 
2.5 Comme la défenderesse n'a pas apporté la preuve que l'accident aurait été causé par une faute grave du demandeur (cf. consid. 2.3.1 supra), et comme l'autorité précédente pouvait considérer sans arbitraire qu'une expertise technique n'était pas susceptible d'apporter une telle preuve (cf. consid. 2.4 supra), l'une des conditions cumulatives de la libération de la responsabilité civile du détenteur selon l'art. 59 al. 1 LCR fait défaut (consid. 2.2 supra). Cela étant, il n'y a pas lieu d'examiner si l'autorité précédente, comme le soutient la défenderesse, a omis à tort d'examiner si la faute de A.________ était en relation de causalité avec le dommage, ou si toute personne placée dans les mêmes circonstances ayant pleine possession de ses moyens n'aurait pas été en mesure d'éviter l'accident qui s'est produit, auquel cas la relation de causalité naturelle entre la faute commise par A.________ et le dommage ferait défaut. Dans tous les cas, la défenderesse, en tant qu'assureur responsabilité civile de A.________, peut être recherchée en réparation du dommage (art. 58 al. 1 et 65 LCR). 
3. 
3.1 
3.1.1 En ce qui concerne le montant du dommage subi par le demandeur ensuite de l'accident, l'autorité précédente a retenu que le demandeur avait réalisé durant les trois années précédant l'accident un revenu moyen de 23'057 fr. par an, soit 1'921 fr. par mois. 
3.1.2 Cette constatation n'est pas remise en cause par la défenderesse. Celle-ci reproche en revanche à la cour cantonale d'avoir fixé le dommage en ajoutant au gain manqué « ordinaire » de 44'183 fr. (1'921 fr. x 23 mois) des gains manqués « extraordinaires » de 34'000 fr. et de 68'560 fr. 80 pour aboutir à une indemnité totale de 146'743 fr. 80 pour 23 mois d'incapacité de travail, soit plus du triple du revenu moyen réalisé par le demandeur pendant les trois années précédentes. Ces griefs seront examinés plus loin (cf. consid. 3.4 et 3.5 infra). 
3.2 
3.2.1 S'agissant de la date à laquelle le demandeur - dont il n'était pas contesté qu'il avait subi une incapacité de travail totale dès le 16 novembre 2002 - avait récupéré sa capacité de travail, point sur lequel les avis des médecins divergeaient, l'autorité cantonale a retenu que l'incapacité totale de travail couvrait la période du 16 novembre 2002 au 17 octobre 2004, soit une période de vingt-trois mois. Elle a suivi les appréciations du Dr B.________ et Dr C.________, en exposant que ces médecins avaient assuré un suivi du demandeur pendant toute la période d'incapacité et que leurs avis étaient postérieurs à l'avis du Dr D.________, lequel n'avait vu le demandeur qu'à une seule reprise en été 2003, à la demande de la défenderesse. 
3.2.2 La défenderesse soutient qu'une appréciation non entachée d'arbitraire aurait dû conduire la cour cantonale à retenir les taux d'incapacité de travail fixés par le Dr D.________, à savoir une incapacité de travail de 100% du jour de l'accident au 15 juillet 2003, puis une capacité de travail de 50% dès le 16 juillet 2003 et complète dès le 16 septembre 2003. Elle fait valoir que le Dr D.________ serait le seul médecin à avoir posé un diagnostic correct, puisqu'il avait considéré qu'une arthroscopie opératoire du genou n'était pas justifiée au vu des observations médicales et qu'une arthroscopie exploratoire qui avait finalement eu lieu le 29 juillet 2004 avait confirmé que les endroits examinés étaient tous normaux. Selon la défenderesse, le Dr C.________ avait d'ailleurs revu son diagnostic après avoir connu le résultat de l'arthroscopie exploratoire qui montrait qu'il s'était trompé; en outre, le Dr B.________ se serait déclaré d'accord avec les taux d'incapacité de travail arrêtés par le Dr D.________. 
3.2.3 Par ces critiques, la défenderesse ne démontre pas que l'appréciation opérée par les juges cantonaux serait arbitraire. En particulier, l'inutilité d'une arthroscopie opératoire, telle que finalement démontrée par l'arthroscopie exploratoire effectuée le 29 juillet 2004, ne remet pas en cause l'existence des lésions dûment constatées qui ont été à l'origine de l'incapacité de travail temporaire du demandeur. Si le Dr C.________, lors de son audition du 6 décembre 2004, a effectivement modifié son diagnostic dans la mesure où il ne conclut désormais plus à la présence d'une plica synoviale préexistante, il n'a pas modifié son appréciation sur la capacité de travail du demandeur, qu'il a revu trois fois depuis l'arthroscopie du 29 juillet 2004. Quant au Dr B.________, qui a régulièrement suivi le demandeur, il a déclaré lors de son audition du 23 février 2005 qu'il avait noté dans son certificat du 15 octobre 2004 que le demandeur pouvait reprendre son travail à 100% pour voir comment cela allait évoluer, mais qu'il estimait que sa capacité de travail ne devrait être que de 50% car le genou enflait le soir et était encore douloureux. Dans ces conditions, il n'est pas déterminant que, selon ce qu'a expliqué le Dr D.________ lors de son audition du 21 avril 2005, le Dr B.________ « s'était déclaré d'accord avec [s]on opinion qui était que le patient pouvait reprendre son travail de chauffeur à 50% ». Les juges cantonaux pouvaient sans arbitraire se fonder sur les appréciations du Dr C.________ et du Dr B.________, qui ont régulièrement suivi le demandeur jusqu'au moment où celui-ci a pu reprendre le travail. 
3.3 
3.3.1 La cour cantonale a rejeté une requête de la défenderesse tendant à la suspension de la procédure jusqu'à droit connu sur le montant d'une éventuelle rente AI. Elle a exposé que, comme le demandeur n'avait pas fait de demande à l'assurance-invalidité et avait recouvré une pleine capacité de travail à partir du 18 octobre 2004, une éventuelle demande qu'il ferait aujourd'hui à l'assurance-invalidité ne lui permettrait pas de recevoir des prestations (cf. art. 48 al. 2 LAI), si bien qu'il ne se justifiait pas de suspendre la procédure. 
3.3.2 La défenderesse soutient que si le demandeur a effectivement subi une incapacité de travail complète de plus d'une année, il devrait percevoir une rente de l'assurance-invalidité (art. 28 LAI), rente qui devrait être imputée sur les prétentions émises contre la défenderesse (art. 72 LPGA; cf. art. 52 aLAI), et cela même si le demandeur a omis de la réclamer; en ne procédant pas à cette imputation et en ne donnant aucune explication sur les raisons pour lesquelles elle ne déduisait pas les prestations dues par l'assurance-invalidité, la cour cantonale aurait violé non seulement les art. 72 LPGA et 52 aLAI, mais également l'art. 29 al. 2 Cst. pour n'avoir pas motivé sa décision. 
3.3.3 L'art. 72 al. 1 LPGA (RS 830.1), en vigueur depuis le 1er janvier 2003 - qui reprend le principe posé auparavant par l'art. 52 aLAI, applicable ratione temporis au présent litige (cf. ATF 131 III 360 consid. 7.1) -, dispose que dès la survenance de l'événement dommageable, l'assureur social est subrogé, jusqu'à concurrence des prestations légales, aux droits de l'assuré et de ses survivants contre tout tiers responsable. Lorsque la personne lésée dispose d'un droit direct contre l'assureur en responsabilité civile, ce droit passe également à l'assureur subrogé (art. 72 al. 4 LPGA). Il s'ensuit que les prestations couvertes par les assurances sociales sont déduites du dommage que le lésé peut réclamer au responsable ou à son assureur, ce qui permet notamment d'éviter une surindemnisation du lésé (ATF 131 III 360 consid. 6.1 et les références citées). Cette déduction ne peut évidemment intervenir que si le lésé a droit à des prestations de l'assurance sociale. 
 
L'assuré a droit à une rente s'il est invalide à 40% au moins (art. 28 LAI; RS 831.20). Est réputée invalidité l'incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée (art. 8 al. 1 LPGA; cf. art. 4 al. 1 aLAI). Les conditions de l'incapacité permanente de gain sont réalisées lorsqu'on ne doit pas s'attendre, selon toute vraisemblance, à une amélioration non plus qu'à une aggravation de l'état de santé de l'assuré (art. 29 RAI; RS 831.201). 
 
En l'espèce, il n'apparaît pas que l'incapacité de gain du demandeur ensuite de l'accident du 16 novembre 2002 ait jamais pu être présumée permanente ou de longue durée. Les conditions d'octroi d'une rente de l'assurance-invalidité n'ayant ainsi jamais été remplies, l'argumentation de la défenderesse tombe manifestement à faux. 
3.4 
3.4.1 À l'instar du premier juge, la cour cantonale a considéré que les revenus hypothétiques que le demandeur aurait pu tirer des diverses missions qu'il aurait pu effectuer pour E.________ devaient s'ajouter au gain manqué « ordinaire »: d'une part, les missions proposées étaient d'une importance toute particulière et permettaient au demandeur de percevoir des montants sans commune mesure avec ses revenus habituels, et d'autre part, les enquêtes avaient confirmé que ce n'était qu'en 2002 que E.________ avait commencé à proposer à ses chauffeurs des missions beaucoup plus importantes que par le passé. 
 
Les juges cantonaux ont estimé qu'il fallait distinguer la mission du 19 novembre 2002 au 7 janvier 2003 des autres missions proposées: d'une part, le texte de cette mission était une confirmation de mission, alors que les autres n'étaient que des offres de mission; d'autre part, cette confirmation avait été faite le 15 novembre 2002, soit la veille de l'accident, et portait sur une mission qui devait se faire dans un avenir quasi immédiat, soit à partir du 19 novembre 2002. Observant que le responsable de E.________, entendu à titre de témoin, ne s'était plus souvenu si cette mission avait finalement eu lieu ou pas, l'autorité précédente a considéré que E.________ s'était formellement engagée par cette confirmation de mission et que le demandeur aurait en toute hypothèse pu en exiger le paiement, même si la mission avait finalement été annulée par le client de E.________. Dès lors, il devait être retenu que le demandeur aurait pu bénéficier de cette mission s'il n'avait pas été accidenté le 16 novembre 2002 et qu'il aurait pu réaliser un chiffre d'affaires de 34'000 fr. à cette occasion. 
3.4.2 La défenderesse soutient que, comme le responsable de E.________ entendu à titre de témoin ne s'est plus souvenu si la mission en question avait eu lieu, le demandeur n'aurait pas prouvé son dommage. Par ailleurs, le contrat entre E.________ et le demandeur s'analyserait comme un contrat de transport de personnes, régi par les règles du mandat, de sorte que si la mission avait été annulée, le mandat aurait été résilié avec effet immédiat (art. 404 CO) et le demandeur n'aurait pas pu prétendre à la rémunération convenue. 
3.4.3 L'autorité précédente a constaté que le demandeur avait reçu, la veille de l'accident, la confirmation d'une mission qui devait se faire dans un avenir quasi immédiat, soit à partir du 19 novembre 2002. Certes, elle a observé que le responsable de E.________, entendu à titre de témoin, ne s'était plus souvenu si cette mission avait finalement eu lieu ou pas. Il n'existe cependant aucun indice qu'elle n'aurait pas eu lieu. Vu la proximité chronologique, l'autorité précédente a conclu que « [c]e n'est que parce que l'appelant a été victime de l'accident du 16 novembre 2002 qu'il n'a pas pu assurer cette mission et ne peut donc pas en demander le paiement à E.________ ». Elle a ajouté: « Dans ces conditions, la Cour retient pour certain que l'appelant aurait pu bénéficier de cette mission s'il n'avait pas été accidenté le 16 novembre 2002 et qu'il aurait pu réaliser un chiffre d'affaires de 34'000 fr. à cette occasion » (arrêt attaqué, p. 18 in fine). Ce faisant, la cour cantonale a opéré une constatation de fait, dont la défenderesse ne démontre pas qu'elle serait arbitraire; de fait, rien ne permet de penser sérieusement, surtout en tenant compte de la proximité chronologique, que le mandat aurait été révoqué. 
3.5 
3.5.1 La cour cantonale a considéré que les autres missions qui avaient été proposées au demandeur pendant son incapacité de travail avaient un caractère plus hypothétique. Il était établi que les missions suivantes avaient eu lieu: deux mois au cours de l'été 2003 (soixante jours, rémunération inconnue); 10 au 19 octobre 2003 (dix jours, 990 fr. par jour); 8 au 13 décembre 2003 (six jours, 1'200 fr. par jour); un mois en été 2004 (750 fr. par jour). Au total, les potentialités manquées par le demandeur portaient ainsi sur cent six jours, pour une rémunération journalière moyenne de 980 fr., soit une potentialité de chiffre d'affaires de 103'880 fr. Selon la cour cantonale, il s'agit là de la « perte d'une chance », qui doit être réparée dans la mesure de la probabilité de sa réalisation. Considérant que le demandeur avait de fortes probabilités de se voir confier des missions proposées par E.________ - puisqu'étant l'un des rares chauffeurs à bénéficier d'une voiture de luxe et parlant l'anglais, il correspondait tout particulièrement au profil recherché -, les juges cantonaux ont retenu que la perte de chance pouvait raisonnablement s'évaluer à 66% des missions proposées et ont donc arrêté l'indemnité due à ce titre à 65'560 fr. 80. 
3.5.2 La défenderesse soutient que l'autorité précédente aurait appliqué à tort la théorie de la perte d'une chance, inconnue du droit suisse. Elle fait valoir que si la cour cantonale, plutôt que de se fonder sur cette théorie, avait apprécié la prétendue perte subie sur la base des art. 8 CC et 41 ss (notamment 42) CO, elle aurait dû arriver à la conclusion, vu la rotation que E.________ assurait entre ses différents chauffeurs, que le demandeur aurait pu tout au plus bénéficier d'une seule des missions en question, et que le montant y relatif serait de toute façon englobé dans les revenus qu'il déclare usuellement, soit 20'000 fr. à 23'000 fr. par an. Ainsi, selon la défenderesse, la seule perte effective à prendre en considération serait une perte de 1'921 fr. par mois pour une incapacité de travail à 100%; ajouter à ce montant d'autres rémunérations, telle celle de E.________, reviendrait à indemniser le demandeur à double, en violation des art. 41 ss CO
3.5.3 La théorie de la perte d'une chance a été développée pour les cas où le lien de causalité naturelle entre le fait imputable au responsable et le dommage est incertain: par exemple, un médecin retarde fautivement le traitement approprié qui aurait peut-être sauvé la vie de son patient, ou un avocat omet fautivement de déposer dans les délais un recours qui aurait peut-être été couronné de succès (Christoph Müller, La perte d'une chance, in La réforme du droit de la responsabilité civile, Bâle 2004, p. 143 ss, 144 s.; cf. Luc Thévenoz, La perte d'une chance et sa réparation, in Quelques questions fondamentales du droit de la responsabilité civile: actualités et perspectives, Colloque du droit de la responsabilité civile 2001, Université de Fribourg, 2002, p. 237 ss, 238 s.). Dans ces cas, l'enjeu total - dans les exemples précités, la survie du malade ou le gain du procès - est aléatoire, de sorte qu'il est impossible de prouver le lien de causalité naturelle entre le fait générateur de responsabilité et le fait que l'enjeu total ne peut pas être atteint (Müller, op. cit., p. 171). Pour surmonter les difficultés découlant du lien de causalité incertain et éviter le principe du tout ou rien résultant du fait que le lien de causalité ne peut qu'être admis ou nié (cf. Müller, op. cit., p. 145), la théorie de la perte d'une chance considère comme dommage réparable la perte d'une chance mesurable de réaliser un gain ou d'éviter un préjudice; le dommage correspond ainsi à la probabilité pour le lésé d'obtenir ce profit ou de ne pas subir ce désavantage (Franz Werro, La responsabilité civile, 2005, n. 129 p. 35; Thévenoz, op. cit., p. 241). 
 
Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a considéré que la réception en droit suisse de la théorie précitée, qui revient en définitive à admettre la réparation d'un préjudice en fonction de la probabilité - quelle qu'elle soit - que le fait générateur de responsabilité ait causé le dommage, était à tout le moins problématique et qu'il n'était pas arbitraire de ne pas l'avoir appliquée dans un cas qui mettait en jeu la responsabilité, régie par le droit cantonal, d'un hôpital public envers un patient pour les actes d'un médecin employé de l'établissement (arrêt 4A_61/2007 du 13 juin 2007, destiné à la publication, consid. 4.4.3). 
3.5.4 En l'espèce, quoi qu'en disent les juges cantonaux, le raisonnement qu'ils ont suivi ne procède pas de l'application de la théorie de la perte d'une chance. En effet, l'autorité précédente n'a pas considéré comme dommage la probabilité que le demandeur obtienne un enjeu total. Elle a retenu comme certain que le demandeur a été empêché, du fait de l'accident, de réaliser un gain; seule l'étendue de ce gain manqué - soit l'étendue du dommage dans son acception classique (cf. ATF 132 III 186 consid. 8.1, 321 consid. 2.2.1 p. 324; 131 III 360 consid. 6.1; 129 III 18 consid. 2.4 et les arrêts cités), et non dans le sens de la perte d'une chance - présentait un caractère aléatoire. 
 
En observant que les missions autres que celles dont le demandeur avait reçu confirmation la veille de l'accident revêtaient un caractère plus aléatoire, la cour cantonale a constaté que le demandeur était confronté à une difficulté particulière à apporter la preuve (Beweisnot; cf. ATF 133 III 81 consid. 4.2.2 et les arrêts cités). Cette circonstance justifie l'application de l'art. 42 al. 2 CO, qui prévoit que, lorsque le montant exact du dommage ne peut être établi, le juge le détermine équitablement, en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée. Cette disposition, qui vise tant la preuve de l'existence du dommage que celle de son étendue, instaure une preuve facilitée en faveur du lésé (ATF 122 III 219 consid. 3a). Celui-ci n'en doit pas moins fournir au juge, dans la mesure où c'est possible et où on peut l'attendre de lui, tous les éléments de fait constituant des indices de l'existence du dommage et permettant ou facilitant son estimation (ATF 131 III 360 consid. 5.1 et les arrêts cités). 
 
Dans le cas présent, le demandeur a fourni au juge, autant que cela lui était possible, tous les éléments de fait permettant de conclure à l'existence du dommage et de le déterminer équitablement en considération du cours ordinaire des choses. Examinant les circonstances concrètes, la cour cantonale s'est déclarée convaincue que le demandeur aurait obtenu 66% des missions proposées et qu'il aurait ainsi pu réaliser un chiffre d'affaires de 65'560 fr. 80. Cette estimation du dommage relève de la constatation des faits (ATF 131 III 360 consid. 5.1 et la jurisprudence citée), et la demanderesse ne démontre pas en quoi elle reposerait sur une appréciation arbitraire des preuves. Quant au grief selon lequel la prise en considération du gain que le demandeur aurait pu réaliser grâce aux missions d'importance de E.________ reviendrait à indemniser le demandeur à double, il se heurte aux constatations de fait et aux explications convaincantes de l'autorité précédente (cf. consid. 3.4.1 in limine supra). 
3.6 
3.6.1 La défenderesse reproche à l'autorité précédente d'avoir confondu chiffre d'affaires et bénéfice en retenant comme dommage le chiffre d'affaires que le demandeur aurait réalisé grâce aux missions de E.________. Elle fait valoir que la perte effective subie par le demandeur aurait dû être calculée en déduisant du chiffre d'affaires les frais nécessaires pour réaliser les missions (essence, usure du véhicule et des pneus, assurances, frais de garage, etc., auxquels s'ajouteraient, pour les longues missions, les frais de restaurant et d'hôtel). En outre, la cour cantonale aurait fait fi de la jurisprudence constante selon laquelle la perte de gain doit se calculer sur le revenu net, après déductions sociales, que le lésé aurait perçu sans accident. 
3.6.2 La jurisprudence invoquée par la défenderesse sur la prise en compte du revenu net, toutes les cotisations aux assurances sociales devant être déduites, n'est pas applicable au cas d'espèce. Elle se rapporte en effet à l'hypothèse où il s'agit de calculer l'atteinte à l'avenir économique résultant d'une invalidité permanente: dans ce cas, la perte de gain pendant la période active - c'est-à-dire du jour de l'accident à celui où le lésé aurait cessé d'exercer une activité lucrative - se calcule sur la base du salaire net de toute cotisation sociale, parce que le dommage de rente de vieillesse est indemnisé selon un calcul distinct (ATF 129 III 135 consid. 2.2). Dans le cas d'espèce, s'agissant d'indemniser une perte de gain temporaire sans calculer un dommage de rente, il n'y a pas lieu de prendre en compte le revenu net du demandeur pour calculer la perte de gain indemnisable. 
3.6.3 En observant qu'un chauffeur indépendant doit assumer des frais variables qu'il aurait fallu déduire du revenu brut - soit du chiffre d'affaires - qui aurait été réalisé sans l'accident, la défenderesse invoque le principe de la compensatio lucri cum damno. Selon la jurisprudence et la doctrine, il faut tenir compte dans le calcul du dommage des avantages que l'événement dommageable a procurés à la victime; en particulier, il convient de déduire du montant du préjudice les dépenses que la victime a épargnées du fait de l'événement dommageable (ATF 128 III 22 consid. 2e/cc p. 28 et les références citées; 112 Ib 322 consid. 5a p. 330; 108 II 434 consid. 2b). 
 
Dans le cas d'une compensatio lucri cum damno, il appartenait à la défenderesse, en vertu de l'art. 8 CC, d'alléguer et de prouver les faits permettant de constater l'existence d'un avantage dont elle puisse exiger l'imputation sur le montant du dommage (ATF 128 III 22 consid. 2e/cc p. 28). Or la défenderesse ne prétend pas qu'elle aurait allégué en procédure cantonale les frais que le demandeur aurait épargnés et on ne trouve aucune trace d'une telle allégation. Il apparaît ainsi que la défenderesse présente une argumentation juridique nouvelle reposant sur des faits qui n'ont pas été allégués précédemment et dont le Tribunal fédéral ne saurait dès lors tenir compte (art. 99 al. 1 LTF; cf. consid. 1.4 in fine supra). 
3.7 
3.7.1 La défenderesse reproche à l'autorité précédente d'avoir violé l'art. 47 CO, et plus particulièrement la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à cette disposition, en allouant au demandeur une indemnité pour tort moral de 8'544 fr. Elle prétend que les maux dont a souffert le demandeur sont de nature passagère et ne donnent donc pas lieu à tort moral et que, s'il fallait allouer une indemnité pour tort moral, celle-ci devrait être réduite en fonction de la faute de la victime. 
3.7.2 En vertu de l'art. 47 CO, applicable par renvoi de l'art. 62 al. 1 LCR, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les circonstances particulières visées par cette disposition doivent consister dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO (ATF 89 II 396 consid. 3). Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé; s'il s'agit d'une atteinte passagère, elle doit être grave, s'être accompagnée d'un risque de mort, d'une longue hospitalisation ou de douleurs particulièrement intenses ou durables (arrêt 4C.283/2005 du 18 janvier 2006, consid. 3.1.1, reproduit in JdT 2006 I 476 ss, 477/478; Alfred Keller, Haftpflicht im Privatrecht, Band II, 2e éd. 1998, p. 132). Parmi les autres circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO figurent aussi une longue période de souffrance et d'incapacité de travail (arrêt 4C.283/2005 précité, consid. 3.1.1; Alexandre Guyaz, L'indemnisation du tort moral en cas d'accident, in SJ 2003 II p. 1 ss, 16). 
 
Statuant selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 132 II 117 consid. 2.2.3 in limine). Le Tribunal fédéral n'intervient dès lors que si la décision s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, ou lorsqu'elle repose sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle, ou encore lorsqu'elle n'a pas tenu compte d'éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; en outre, il redresse un résultat manifestement injuste ou une iniquité choquante (ATF 132 II 117 consid. 2.2.5; 125 III 412 consid. 2a et les arrêts cités). 
3.7.3 En l'espèce, l'autorité précédente a constaté en fait que le demandeur a dû subir une longue période d'incapacité de travail, que son humeur en a été affectée et que son amie l'a quitté. Cela étant, elle a constaté que dans des cas proches du demandeur, l'indemnité pour tort moral s'était élevée à 15'000 fr. ou 20'000 fr., mais qu'elle ne pouvait pas aller au-delà des conclusions prises par le demandeur, qui avait réclamé une indemnité de 8'544 fr. par application analogique des principes de la loi sur l'assurance-accidents. 
 
On ne voit pas, eu égard aux constatations de fait sur lesquelles elle a fondé sa décision, que la cour cantonale se soit écartée des règles établies par la doctrine et la jurisprudence, telles qu'elles viennent d'être rappelées (cf. consid. 3.7.2 supra), ni qu'elle soit parvenue à un résultat choquant. Par ailleurs, comme on l'a vu, le demandeur n'a pas commis de faute qui justifierait une réduction de l'indemnité allouée à titre de tort moral. Partant, le grief de violation de l'art. 47 CO ne peut qu'être rejeté. 
4. 
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF) et versera à son adverse partie une indemnité à titre de dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 5'500 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 6'500 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 26 septembre 2007 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: