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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.122/2006 /fzc 
 
Arrêt du 27 juin 2006 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Corboz, président, Rottenberg Liatowitsch, Favre, Kiss et Mathys. 
Greffière: Mme Aubry Girardin. 
 
Parties 
1. X.________, 
défendeur et recourant, 
2. Y.________, 
défendeur et recourant, 
 
contre 
 
Banque A.________, 
demanderesse et intimée, représentée par Me Viviane 
J. Martin, avocate, 
 
Objet 
société anonyme; responsabilité des administrateurs, 
(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice genevoise du 17 février 2006). 
 
Faits: 
 
A. 
A.a Le 29 juillet 1983, la société Z.________ S.A. a été constituée à Genève. Ses actionnaires étaient B.N.________, ressortissant syrien, et les membres de sa famille. Le conseil d'administration était composé de C.N.________, président, de D.________ et de trois avocats genevois. Z.________ S.A. n'a jamais déployé aucune activité. 
 
Le 5 juillet 1984, D.________ et les trois avocats genevois ont démissionné du conseil d'administration. Ils ont été remplacés par E.________, ainsi que par les avocats Y.________, X.________ et F.________. En 1986, G.________ a succédé à ce dernier, qui a lui-même été remplacé par H.________ en 1991. Celui-ci, ainsi que E.________ ont démissionné du conseil d'administration de Z.________ S.A. le 18 janvier 1993. 
A.b Avant chaque assemblée générale, la fiduciaire I.________ S.A., organe de révision de Z.________ S.A., déposait son rapport relatif à l'exercice précédent. Y.________ et X.________, apparemment seuls présents à l'assemblée, adressaient un exemplaire du rapport de révision, un procès-verbal succinct de l'assemblée générale et leurs notes d'honoraires d'administrateurs à C.N.________ et à E.________. Ils demandaient au président du conseil d'administration quelles étaient ses intentions quant à l'avenir de Z.________ S.A. et attiraient régulièrement son attention sur la diminution constante de la fortune de la société en raison des frais inhérents au maintien de son existence. 
 
Le 2 avril 1990, I.________ S.A. a informé le conseil d'administration de Z.________ S.A. que les comptes de l'exercice 1989 totalisaient des pertes supérieures à la moitié du capital social en faisant référence à l'art. 725 CO. Comme le bilan ne mentionnait aucune dette, il a été décidé d'approuver les comptes, de reporter les pertes et de maintenir l'existence de la société. Il a été procédé de la même façon pour les bilans relatifs aux exercices 1990 et 1991, Z.________ S.A. n'ayant alors toujours pas de dette. 
A.c En juillet 1983, les membres de la famille N.________ étaient entrés en pourparlers avec J.________, en vue de l'acquisition de cinq villas à Anières, que celui-ci avait fait construire avec un financement de la Banque A.________. 
 
Le 1er juillet 1984, Z.________ S.A. a conclu avec J.________ un contrat de bail relatif à la location de l'une de ces villas pour une durée de dix ans, moyennant un loyer annuel initial de 132'000 fr. Le bail pouvait être résilié trois mois au moins avant son échéance. Les quatre autres villas ont été louées par des membres de la famille N.________. 
 
Le 18 octobre 1991, J.________, qui n'arrivait plus à faire face à ses obligations financières, a cédé les loyers des villas à la Banque A.________. 
 
Dès le mois de mars 1992, après le refus des autorités helvétiques d'autoriser les locataires à acquérir les villas d'Anières, les loyers, y compris celui de la villa louée par Z.________ S.A., qui étaient auparavant payés en un seul versement mensuel par le débit d'un compte bancaire dont le titulaire est resté inconnu, ont cessé d'être versés. 
 
Le 18 août 1992, J.________ a fait notifier à Y.________ et à X.________, en tant qu'administrateurs de Z.________ S.A., un commandement de payer portant sur 98'883,40 fr. plus intérêt correspondant aux loyers de la villa louée par la société pour les mois de mars à septembre 1992. Les deux administrateurs ont formé opposition, alléguant n'avoir jamais eu connaissance de l'existence d'un contrat de bail. 
 
Le 20 août 1992, l'avocate de J.________ a communiqué à Y.________ et à X.________ une copie du bail litigieux, ainsi que des mises en demeure adressées par le propriétaire à ses locataires et à l'avocate en charge de la défense des intérêts des membres de la famille N.________. Y.________ et X.________ ont répondu qu'ils contestaient la validité du bail qui, selon eux, n'avait pas été signé par un représentant autorisé de Z.________ S.A. 
 
Le 16 novembre 1992, un nouveau commandement de payer a été notifié à Z.________ S.A. Il portait sur un montant de 42'378,60 fr. plus intérêt correspondant aux loyers de la villa d'octobre à décembre 1992. Y.________ et X.________ ont formé opposition. 
 
 
Par courrier du 14 décembre 1992, l'avocate de la famille N.________ a déclaré résilier le bail de la villa louée par Z.________ S.A. pour son plus proche terme, précisant que la société était disposée à restituer immédiatement les locaux. Elle priait le bailleur de l'assister dans la recherche d'un locataire de remplacement. Copie de ce courrier a été adressée à Y.________ et à X.________. 
 
Le 2 février 1993, Y.________ et X.________ ont formé opposition à un troisième commandement de payer portant sur le montant de 42'378,60 fr. à titre de loyers de la villa pour les mois de janvier à mars 1993 notifié à Z.________ S.A. 
 
Le 17 février 1993, Y.________ et X.________ ont fait part à l'organe de contrôle de Z.________ S.A. de la réclamation portant sur les loyers de la villa, lui demandant s'il était opportun de constituer une provision et de déposer le bilan. La fiduciaire I.________ S.A. a estimé qu'une simple note en pied de bilan était suffisante. 
 
Le rapport de l'organe de révision du 19 avril 1993 relatif aux comptes de l'exercice 1992 comportait, en pied de bilan, la mention qu'il était réclamé à la société un loyer d'une villa pour laquelle Z.________ S.A. aurait signé un contrat de bail d'une durée de dix ans, dont les administrateurs contestaient la validité. 
 
Le bilan au 31 décembre 1992 de Z.________ S.A. faisait état de 300'000 fr. de fonds propres desquels était déduite une perte comptabilisée de 219'279,60 fr. Les actifs s'élevaient à 82'410,40 fr. 
A.d Par jugements du 17 mars 1993, le Tribunal de première instance du canton de Genève a prononcé la mainlevée des oppositions aux deux premiers commandements de payer les montants réclamés par J.________. Selon ces décisions, la dette de loyer en capital, intérêt et frais s'élevait, au 31 décembre 1992, à 144'527,60 fr. 
 
Le 5 avril 1993, Z.________ S.A. a déposé deux actions en libération de dette devant le Tribunal des baux et loyers contre J.________, déclaré en faillite le 29 mars 1993. La masse en faillite de ce dernier et la Banque A.________ ont conclu, à titre reconventionnel, à ce que Z.________ S.A. soit condamnée à payer le montant de 260'884,40 fr. plus intérêt. Cette demande a été amplifiée par la suite de 174'474 fr. plus intérêt. 
 
 
Lors de l'assemblée générale de Z.________ S.A. du 8 juin 1995, Y.________ et X.________, qui n'étaient pas parvenus à nouer un contact avec C.N.________ et sa famille, ont déclaré ne pas pouvoir accepter leur réélection en qualité d'administrateurs. L'organe de révision a présenté sa démission. 
 
Le 15 juillet 1995, la masse en faillite de J.________ a cédé à la Banque A.________ la totalité de l'état locatif des cinq villas à Anières, avec effet au 29 mars 1993. 
 
Par jugement du 19 octobre 1995, le Tribunal des baux et loyers a considéré que Z.________ S.A. était liée par le contrat de bail du 1er juillet 1984. Il a déclaré non fondées les actions en libération de dette et, statuant sur demande reconventionnelle, il a condamné Z.________ S.A. à payer à J.________ (respectivement à sa masse en faillite) et à la Banque A.________ les loyers de la villa pour la période du 1er janvier au 30 mars 1993, soit 42'240 fr. avec intérêt à 5 % dès le 15 février 1993 et les loyers allant du 1er avril 1993 au 30 mars 1995, soit 337'920 fr. avec intérêt à 5 % dès le 1er avril 1994, dès lors que la villa était toujours occupée. 
 
Il a été constaté que la famille N.________ avait disposé de cette villa jusqu'en mars 1996. 
A.e Le 1er décembre 1995, Z.________ S.A. a été dissoute d'office par le Préposé au registre du commerce, les administrateurs suisses n'ayant pas été remplacés. Selon le dernier bilan établi au 31 décembre 1994, Z.________ S.A. était en état de surendettement et aucun assainissement n'était envisageable. 
 
La faillite sans poursuite préalable de Z.________ S.A. a été prononcée le 18 février 1997. La masse en faillite de J.________ et la Banque A.________ ont produit une créance de 611'688,70 fr. correspondant aux arriérés de loyers du 1er mars 1992 au 30 mars 1995 (520'960 fr.), avec intérêts calculés au jour de la faillite (89'625,10 fr.), selon le jugement du Tribunal des baux et loyers du 19 octobre 1995, plus les frais et dépens. La production a été admise en troisième classe. 
 
Le 20 août 1997, la masse en faillite de J.________ et la Banque A.________ se sont fait céder les droits de la masse en faillite de Z.________ S.A. pour agir en responsabilité contre les administrateurs de la société dans un délai de six mois. Faute d'actifs réalisables, ils ont obtenu, le 3 novembre 1997, un acte de défaut de biens pour le montant total de leur production. 
 
B. 
Le 29 janvier 1998, la Banque A.________, agissant comme cessionnaire des droits de la masse en faillite de Z.________ S.A., a formé une action en responsabilité auprès des autorités judiciaires genevoises contre C.N.________, Y.________ et X.________. Elle a conclu à leur condamnation, conjointe et solidaire, au paiement de 611'688 fr. plus intérêt. 
 
C.N.________ ne s'est jamais présenté ni fait représenter au cours de la procédure. 
 
Par jugement du 28 février 2002, le Tribunal de première instance, statuant par défaut, a condamné C.N.________ à payer à la Banque A.________ la somme de 611'688 fr. avec intérêt à 5 % l'an dès le 18 février 1997. Statuant contradictoirement, il a débouté la banque de ses conclusions à l'encontre de Y.________ et X.________, considérant que leur responsabilité d'administrateurs n'était pas engagée. 
 
Statuant sur appel de la Banque A.________, la Cour de justice, par arrêt du 14 mars 2003, a annulé le jugement du 28 février 2002 et renvoyé la cause au Tribunal de première instance pour complément d'instruction et décision sur la quotité du dommage subi par Z.________ S.A. Elle a en substance retenu que les administrateurs avaient violé leurs devoirs en n'agissant pas conformément à l'art. 725 CO
 
Par jugement du 7 avril 2005, le Tribunal de première instance a condamné Y.________ et X.________, conjointement et solidairement, à payer à la Banque A.________ la somme de 166'267,20 fr. avec intérêt à 5 % l'an dès le 18 février 1997. Ce montant correspondait à six mois de loyers de la villa (84'757,20 fr.) et aux honoraires facturés durant les exercices 1993 à 1995 (81'510 fr.). 
 
Tant la Banque A.________ que Y.________ et X.________ ont appelé de ce jugement. 
 
Par arrêt du 17 février 2006, la Chambre civile de la Cour de justice a, sous réserve des dépens, annulé le jugement du 7 avril 2005 et condamné Y.________ et X.________, conjointement et solidairement, à payer à la Banque A.________ le montant de 545'488 fr. plus intérêt à 5 % l'an dès le 29 janvier 1998, en déclarant C.N.________ codébiteur solidaire de cette somme. 
 
C. 
Contre cet arrêt, Y.________ et X.________ déposent chacun un recours en réforme au Tribunal fédéral. Ils concluent tous deux à l'admission de leur recours et à l'annulation des jugements attaqués, en disant que les prétentions émises par la Banque A.________ sont entièrement dénuées de fondement. 
La Banque A.________ conclut, à la forme, à l'irrecevabilité des recours et, au fond, à leur rejet dans la mesure de leur recevabilité, ainsi qu'à la confirmation des arrêts de la Cour de justice des 14 mars 2003 et 17 février 2006. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et avec une pleine cognition la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 III 667 consid. 1). 
 
1.1 Interjetés par chacun des administrateurs suisses, qui ont succombé dans leurs conclusions libératoires, et dirigés contre un jugement final rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ), les deux recours portent sur une contestation civile dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ). Déposés en temps utile (art. 54 al. 1 OJ) et, contrairement à l'avis de la demanderesse, dans les formes requises (art. 55 OJ), ils sont donc en principe recevables. 
 
1.2 En vertu de l'art. 24 PCF, applicable à titre subsidiaire aux procédures de recours au Tribunal fédéral (art. 40 OJ), la jonction de recours émanant de plusieurs parties et dirigés contre la même décision peut être ordonnée (Poudret, COJ I, Berne 1990, N. 2 ad art. 40 OJ p. 343 s.). En l'occurrence, les recours proviennent de deux administrateurs et sont dirigés contre la même décision, qui les condamne conjointement et solidairement à verser 545'488 fr. plus intérêt à la demanderesse. Dans leurs écritures respectives, les défendeurs font valoir des griefs semblables et formulent des conclusions identiques. Il paraît donc justifié de joindre les deux causes et de les traiter dans une seule procédure, le présent arrêt se prononçant sur les deux recours (cf. ATF 113 Ia 390 consid. 1). 
 
1.3 Dans leurs recours respectifs, les défendeurs s'en prennent non seulement à l'établissement du dommage, mais remettent également en cause les conditions de leur responsabilité. 
 
Le principe de la responsabilité des administrateurs a été admis par la cour cantonale dans son arrêt du 14 mars 2003, les juges renvoyant au surplus la cause au tribunal de première instance pour qu'il se prononce sur le dommage subi par la banque. Les défendeurs n'ont pas recouru contre cette décision. Comme l'a déjà indiqué le Tribunal fédéral, amené à se prononcer sur la procédure de mainlevée de l'opposition à des poursuites concernant les frais de procédure mis à la charge de l'un des défendeurs dans l'arrêt du 14 mars 2003, ce dernier constitue un jugement préjudiciel (arrêt du Tribunal fédéral 5P.290/2004 du 1er novembre 2004, consid. 3.3). Il n'y a toutefois pas lieu de se demander si cette décision aurait pu faire l'objet d'un recours en réforme immédiat aux conditions de l'art. 50 al. 1 OJ, dès lors que cette voie de droit n'a qu'un caractère facultatif et n'empêche pas la partie qui le préfère d'attendre le prononcé de la décision finale avant de recourir au Tribunal fédéral (ATF 127 III 351 consid. 1a p. 353). Dans le cadre de la présente procédure peuvent donc être examinés non seulement les griefs liés à la fixation du dommage, mais également les critiques portant sur les conditions de la responsabilité des administrateurs. 
 
1.4 Il appartient au Tribunal fédéral de déterminer qui est partie devant lui (cf. ATF 90 I 8 consid. 2 in fine). En l'espèce, seuls les deux administrateurs ayant été condamnés conjointement et solidairement à verser 545'488 fr. à la demanderesse ont recouru en réforme au Tribunal fédéral. Le président du conseil d'administration, qui a été déclaré codébiteur de cette somme, n'a pas recouru. Il ressort en outre de l'arrêt attaqué que son domicile actuel est inconnu et qu'il a fait défaut durant toute la procédure cantonale. Il ne sera donc pas considéré comme une partie devant la Cour de céans. 
 
2. 
La cour cantonale a admis la responsabilité des administrateurs. Reprenant l'analyse qui figurait dans son arrêt du 14 mars 2003, elle a considéré que les défendeurs auraient dû provisionner, dès la notification du premier commandement de payer, le 18 août 1992, la prétention découlant du contrat de bail de la villa, même incertaine. Si ce poste avait été comptabilisé, l'intégralité du capital de Z.________ S.A. aurait été pratiquement absorbée par les dettes et la société se serait trouvée, dès 1992, en état de surendettement justifiant l'avis au juge. Les manquements des administrateurs avaient ainsi conduit à différer le prononcé de la faillite et, partant, à augmenter les pertes de la société. Se déterminant ensuite sur la question du dommage, la cour cantonale a tenu pour raisonnable d'admettre que les administrateurs auraient eu jusqu'au 31 décembre 1992 pour faire effectuer un bilan intermédiaire et aviser le juge de la situation. Elle a ainsi établi le dommage à 545'488 fr., ce qui correspondait à la différence entre le découvert dans la faillite effective de Z.________ S.A. le 18 février 1997 et le découvert existant au 31 décembre 1992. Les défendeurs ne pouvaient se prévaloir de la simulation voire de la nullité du contrat de bail, cette position étant contredite par le jugement définitif du 19 octobre 1995 rendu par le Tribunal des baux et loyers. Quant au comportement du bailleur qui, selon les défendeurs, n'aurait pas fait ce qui était en son pouvoir pour diminuer son dommage à partir de décembre 1992, la cour a estimé qu'il s'agissait d'une objection qu'aurait pu avoir Z.________ S.A., mais qui ne pouvait plus être invoquée à l'encontre de la communauté des créanciers. L'existence d'une éventuelle faute d'un tiers, en l'occurrence de la banque, de nature à rompre le lien de causalité adéquate a, pour sa part, été niée. Les administrateurs étaient ainsi tenus de réparer l'entier du préjudice subi par Z.________ S.A. 
 
3. 
Avant d'examiner si les conditions de la responsabilité des administrateurs sont réalisées, il y a lieu de préciser, en regard de la jurisprudence récente, la nature de l'action dirigée par la banque créancière. 
 
3.1 L'action dont dispose un créancier social envers les organes d'une société dépend du type de dommage subi. A cet égard, trois situations sont envisageables. 
3.1.1 Premièrement, le créancier peut être lésé à titre personnel par le comportement des organes, à l'exclusion de tout dommage causé à la société. Il subit alors un dommage direct (cf. ATF 110 II 391 consid. 1, confirmé notamment in arrêt du Tribunal fédéral 4C.142/2004 du 4 octobre 2004 consid. 4). 
3.1.2 Deuxièmement, le créancier peut encourir une perte, car le comportement d'un administrateur a appauvri la société, de sorte qu'il ne parvient pas à récupérer ou seulement de manière incomplète ses prétentions envers celle-ci. Son dommage n'est alors qu'indirect, car il découle de l'insolvabilité de la société (ATF 131 III 306 consid. 3.1.1; 128 III 180 consid. 2c p. 183). Dans ce cas très fréquent, les manquements des organes causent en premier lieu un dommage à la société, le créancier n'étant lésé que par ricochet (Reflexschaden). Pour qualifier ce dommage, la pratique utilise indifféremment les termes de dommage ou préjudice réfléchi, indirect ou par ricochet. Dans la suite de cet arrêt, on parlera de dommage par ricochet. 
 
 
Tant que la société demeure solvable, c'est-à-dire qu'elle est en mesure d'honorer ses engagements, le dommage reste dans sa seule sphère, sans toucher les créanciers sociaux, qui pourront obtenir le plein de leurs prétentions. C'est seulement lorsque les manquements des organes entraînent l'insolvabilité de la société, puis sa faillite, que le créancier subit une perte qui constitue un dommage par ricochet (cf. arrêt 4C.142/2004 précité consid. 4; Forstmoser/Sprecher/Töndury, Persönliche Haftung nach Schweizer Aktienrecht, Zurich 2005, p. 37 N 82). 
3.1.3 En troisième lieu, il existe encore des situations, plus rares, dans lesquelles on discerne à la fois un dommage direct pour le créancier et un dommage direct pour la société (cf. ATF 131 III 306 consid. 3.1.2). En d'autres termes, le comportement de l'organe porte directement atteinte au patrimoine de la société et du créancier social, sans que le préjudice causé à ce dernier ne dépende de la faillite de la société. 
 
3.2 La qualité pour agir du créancier lésé à l'encontre de l'organe de la société varie en fonction des trois situations précitées. Les distinctions qui suivent sont dictées par le respect des règles générales du droit de la responsabilité civile. Parmi celles-ci figure le principe selon lequel seul le lésé direct peut demander réparation de son dommage, celui qui ne subit qu'un dommage par ricochet en raison d'une relation particulière avec le lésé direct ne dispose d'aucune action en réparation contre l'auteur du dommage (ATF 131 III 306 consid. 3.1.1 et les références citées). 
3.2.1 Lorsque le comportement d'un organe de la société cause un dommage direct à un créancier, alors que la société ne subit elle-même aucun préjudice, le créancier lésé peut agir à titre individuel et réclamer des dommages-intérêts au responsable (cf. ATF 131 III 306 consid. 3.1.2). Son action est régie par les règles ordinaires de la responsabilité civile et, à condition qu'elle repose sur un fondement juridique valable, elle n'est soumise à aucune restriction (ATF 131 III 306 consid. 3.1.2, confirmé in arrêt du Tribunal fédéral 4C.48/2005 du 13 mai 2005 consid. 2.1; Corboz, Note sur la qualité pour agir en responsabilité contre un administrateur ou un réviseur, in SJ 2005 I p. 390 ss, 391). Les limitations posées par la jurisprudence quant à la possibilité pour le créancier social d'agir individuellement contre un organe ne sont pas applicables (consid. 3 non publié de l'ATF 129 III 129; cf. infra consid. 3.2.3). La réparation de ce dommage peut être invoquée en tout temps par l'intéressé, peu importe que la société ait été mise en faillite ou non (ATF 127 III 374 consid. 3a p. 377). 
3.2.2 En cas de dommage par ricochet du créancier, la qualité de lésé appartient à la société qui se trouve directement appauvrie par le comportement de l'organe. En vertu des principes généraux de la responsabilité, c'est la société qui est en première ligne légitimée à réclamer des dommages-intérêts à l'organe responsable. Le créancier social ne dispose lui-même d'aucune action individuelle pour obtenir réparation du dommage qu'il a subi par ricochet (ATF 131 III 306 consid. 3.1.1). Lorsque la société tombe en faillite, la créance que celle-ci pouvait faire valoir contre l'organe responsable est remplacée par une créance de la communauté des créanciers (cf. ATF 117 II 432 consid. 1b/dd p. 439 s.), qu'il appartient en priorité à l'administration de la faillite de faire valoir (cf. art. 757 al. 1 CO). Toutefois, si l'administration de la faillite renonce à exercer l'action sociale (art. 757 al. 2 CO), un créancier social peut réclamer la réparation du dommage subi directement par la société (ATF 131 III 306 consid. 3.1.1 p. 311). Il exerce alors l'action de la communauté des créanciers, mais le produit éventuel de l'action servira d'abord à couvrir ses propres prétentions telles que colloquées (ATF 132 III 342 consid. 2.1; 117 II 432 consid. 1b/ff p.440). En matière de poursuite et faillite, ce mécanisme est réglé à l'art. 260 LP (sur les liens entre cette disposition et l'art. 757 CO, cf. consid. 1.2 non publié de l'ATF 132 III 222). Le créancier social qui a obtenu la cession des droits de la masse en application de l'art. 260 LP agit alors sur la base d'un mandat procédural (ATF 132 III 342 consid. 2.2; 121 III 488 consid. 2b p. 492). Il est ainsi légitimé à actionner l'organe responsable pour réclamer la réparation du dommage subi par la société. 
3.2.3 Enfin, dans les cas où tant la société que le créancier social se trouvent directement lésés, il faut appliquer les règles posées par la pratique, afin d'éviter que l'action individuelle du créancier entre en concurrence avec les prétentions de la société. C'est uniquement dans cette hypothèse et pour parer au risque d'une compétition entre les actions en responsabilité exercées respectivement par la société ou l'administration de la faillite et par les créanciers directement touchés que la jurisprudence a limité le droit d'agir de ces derniers (ATF 131 III 306 consid. 3.1.2, confirmé in arrêt 4C.48/2005 précité consid. 2.1), afin de donner une priorité à l'action sociale (Corboz, Note, op. cit., p. 392). Ainsi, lorsque la société est aussi lésée, un créancier social peut agir à titre individuel contre un organe en réparation du dommage direct qu'il a subi seulement s'il peut fonder son action sur un acte illicite (art. 41 CO), une culpa in contrahendo ou sur une norme du droit des sociétés conçue exclusivement pour protéger les créanciers (ATF 122 III 176 consid. 7 p. 189 s., confirmé in ATF 131 III 306 consid. 3.1.2 et les arrêts cités). L'importance pratique de cette règle restrictive a souvent été exagérée par la doctrine (cf. encore récemment Andrew M. Garbarski, La responsabilité civile et pénale des organes dirigeants de sociétés anonymes, thèse Lausanne 2005, p. 60 ss). En effet, comme déjà indiqué, ces principes ne valent que dans les cas où l'on discerne un dommage direct à la fois pour la société et pour le créancier. Ils ne sont pas applicables lorsque seul le créancier social est lésé (cf. supra consid. 3.2.1). Quant au cas le plus fréquent dans lequel le créancier subit un dommage par ricochet découlant de l'insolvabilité de la société, ces limitations ne s'appliquent pas davantage. Elles n'ont du reste aucun intérêt dans ce cas, puisque le créancier social lésé par ricochet ne dispose précisément d'aucune action individuelle contre l'organe responsable, ce qui exclut tout risque de concurrence avec l'action de la société. 
 
3.3 En l'espèce, la demanderesse a produit une créance de 611'688 fr. dans la faillite de Z.________ S.A. correspondant aux loyers impayés de la villa et aux indemnités pour occupation illicite de celle-ci, plus divers frais et intérêts, selon le jugement du Tribunal des baux et loyers du 19 octobre 1995. Faute d'actifs réalisables, la demanderesse a obtenu un acte de défaut de biens portant sur la totalité de sa production. Elle a donc été lésée, dans la mesure où elle n'a pu récupérer le montant de sa créance à la suite de la faillite de Z.________ S.A., ce qui est le propre d'un dommage par ricochet. Dès lors que, selon les faits retenus, la demanderesse s'est fait céder les droits de la masse en faillite de Z.________ S.A. pour agir en responsabilité contre les administrateurs de la société, sa légitimation active doit être admise. La demanderesse exerce ainsi l'action de la société, de sorte qu'il faut déterminer si le comportement des administrateurs était de nature à engager leur responsabilité vis-à-vis de Z.________ S.A. et non pas à l'égard de la banque, qui n'est que lésée par ricochet. 
Comme la demanderesse n'a pas subi de dommage direct, la cour cantonale n'avait pas à examiner si celle-ci possédait la légitimation active pour faire valoir un tel dommage. Le grief des défendeurs à ce propos tombe donc à faux. 
 
4. 
4.1 Les manquements reprochés aux administrateurs sont postérieurs au premier commandement de payer portant sur les loyers de la villa, notifié le 18 août 1992. Le nouveau droit de la société anonyme entré en vigueur le 1er juillet 1992 est donc applicable (ATF 128 III 180 consid. 2b et l'arrêt cité). 
 
4.2 En vertu de l'art. 754 al. 1 CO, les membres du conseil d'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à l'égard de la société, de même qu'envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu'ils leur causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs. La responsabilité des administrateurs envers la société fondée sur cette disposition est subordonnée à la réunion des quatre conditions générales suivantes, à savoir la violation d'un devoir, une faute (intentionnelle ou par négligence), un dommage et l'existence d'un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation du devoir et la survenance du dommage (ATF 132 III 342 consid. 4.1). Il appartient au demandeur à l'action en responsabilité de prouver la réalisation de ces conditions (art. 8 CC), qui sont cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 4C.281/2004 du 9 novembre 2004, in SJ 2005 I p. 221, consid. 2.3). 
 
Les défendeurs reprochent en substance à la cour cantonale d'avoir violé le droit fédéral en admettant que les conditions d'application de l'art. 754 CO étaient réunies. 
 
5. 
Ils contestent en premier lieu avoir fautivement manqué à leurs devoirs d'administrateurs. 
 
5.1 L'administrateur est tenu d'accomplir sa mission avec diligence (art. 717 al. 1 CO). Il lui appartient notamment de contrôler de manière régulière la situation économique et financière de la société (Böckli, Schweizer Aktienrecht, 3e éd., Zurich 2004, § 13 N. 767; Wüstiner, Commentaire bâlois, N. 32 ad art. 725 CO). L'art. 669 al. 1 CO impose de constituer des provisions pour risques et charges, afin de couvrir les engagements incertains et les risques de pertes sur les affaires en cours. Le montant de la provision à indiquer au bilan doit être évalué selon le principe de la prudence (Neuhaus/Schönbächler, Commentaire bâlois, N. 22 ad art. 669 CO) et va dépendre de la probabilité que la prétention émise à l'encontre de la société se concrétise (Böckli, op. cit., § 8 N. 494). S'il ressort du dernier bilan annuel que la moitié du capital-actions et des réserves légales n'est plus couverte, le conseil d'administration convoque immédiatement une assemblée générale et lui propose des mesures d'assainissement (art. 725 al. 1 CO). S'il existe des raisons sérieuses d'admettre que la société est surendettée, un bilan intermédiaire est dressé et soumis à la vérification de l'organe de révision (art. 725 al. 2 1re phrase CO). Lorsque les dettes sociales ne sont plus couvertes, les administrateurs doivent en principe aviser le juge (cf. art. 725 al. 2 CO; ATF 128 III 180 consid. 2e p. 185). Exceptionnellement, il peut être renoncé à un avis immédiat au juge, si des mesures tendant à un assainissement concret et dont les perspectives de succès apparaissent comme sérieuses sont prises aussitôt (ATF 116 II 533 consid. 5a p. 541, confirmé in arrêt du Tribunal fédéral 4C.366/2000 du 19 juin 2001, consid. 4b et les références citées). En pratique, pour déterminer s'il existe des "raisons sérieuses" d'admettre un surendettement, le conseil d'administration ne doit pas seulement se fonder sur le bilan, mais aussi tenir compte d'autres signaux d'alarmes liés à l'évolution de l'activité de la société (cf. Böckli, op. cit., § 13 N. 768), tels l'existence de pertes continuelles (Garbarski, op. cit., p. 167) ou l'état des fonds propres (Wüstiner, op. cit., N. 33 ad art. 725 CO). L'administrateur qui tarde de manière fautive à aviser le juge au sens de l'art. 725 al. 2 CO répond du dommage qui en découle (Glanzmann/Roberto, Verantwortlichkeit des Verwaltungsrates in Sanierungssituationen, in Praxis zum unternehmerischen Verantwortlichkeitsrecht, Zurich 2004, p. 77 ss, 80). 
 
5.2 En l'espèce, il a été constaté en fait, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (ATF 128 III 180 consid. 2e p. 185), que la situation financière et économique de Z.________ S.A. était précaire depuis des années. Cette société n'avait jamais exercé la moindre activité. Les défendeurs, qui en ont été les administrateurs à partir de 1984, demandaient au président du conseil d'administration quelles étaient ses intentions quant à l'avenir de Z.________ S.A. et attiraient régulièrement son attention sur le fait que la fortune de la société diminuait chaque année, en raison des frais inhérents au maintien de son existence. En avril 1990, l'organe de révision, évoquant l'art. 725 CO, a indiqué que les comptes de l'exercice 1989 totalisaient des pertes supérieures à la moitié du capital social. Comme le bilan de Z.________ S.A. ne mentionnait aucune dette, il a été décidé d'approuver les comptes, de reporter les pertes et de maintenir l'existence de la société. Il a été procédé de la même façon pour le bilan des exercices 1990 et 1991. Dans ce contexte, en recevant, le 18 août 1992, un commandement de payer la somme de 98'883,40 fr. plus intérêt correspondant aux loyers d'une villa louée par Z.________ S.A., accompagné, deux jours plus tard, d'une copie du bail en cause, ainsi que des mises en demeure adressées par le propriétaire, les défendeurs ne pouvaient se contenter d'indiquer qu'ils contestaient la validité du contrat. Cette prétention, qui reposait sur un bail transmis aux défendeurs, dont la validité a du reste été reconnue ultérieurement par le Tribunal des baux et loyers, devait au contraire être prise au sérieux. Les deux administrateurs devaient, en application du principe de prudence, provisionner la créance découlant du bail dès 1992, ce d'autant que, le 16 novembre 1992, un nouveau commandement de payer portant sur 42'378,60 fr. leur a été notifié. Compte tenu de la situation financière préexistante de Z.________ S.A., créer une provision impliquait l'obligation de dresser un bilan intermédiaire. Comme la dette de loyer, en capital, intérêts et frais pour 1992 découlant des deux commandements de payer se montait au total à 144'527 fr., la société, dont les actifs à la clôture de l'exercice 1992, selon le bilan établi par l'organe de révision, s'élevaient à 82'410,40 fr., se trouvait surendettée. En outre, il a été constaté que toute perspective d'assainissement immédiat était illusoire, de sorte que les administrateurs étaient tenus, en 1992 déjà, d'aviser le juge conformément à l'art. 725 al. 2 CO. Les défendeurs, qui exerçaient parallèlement la profession d'avocats, devaient maîtriser cette procédure (cf. arrêt du Tribunal fédéral 4C.265/1992 du 4 février 1994 consid. 3b). Ils sont pourtant demeurés passifs et ont attendu le 17 février 1993 pour informer la fiduciaire de la réclamation portant sur les loyers de la villa, se satisfaisant de l'avis émis par l'organe de révision selon lequel une simple note en pied de bilan mentionnant cette créance était suffisante. 
 
Il en découle que c'est à juste titre que la cour cantonale a conclu que les défendeurs avaient fautivement manqué à leurs devoirs d'administrateurs résultant de l'art. 725 CO
 
5.3 Les défendeurs ne peuvent être suivis lorsqu'ils cherchent à démontrer que, compte tenu des renseignements dont ils disposaient en 1992, ils étaient en droit de douter de l'existence d'un contrat de bail conclu par Z.________ S.A., ce qui les dispensait de provisionner cette créance. En effet, à partir du mois d'août 1992, ils détenaient un exemplaire de ce contrat et pouvaient prendre tous les renseignements à ce sujet auprès du bailleur et de l'avocate de la famille N.________. De plus, même s'ils considéraient cette créance comme incertaine, les administrateurs ne pouvaient, selon le principe de prudence, simplement l'ignorer et ne constituer aucune provision, alors que, comme le Tribunal des baux l'a par la suite jugé, ledit bail était parfaitement valable. Au demeurant, les défendeurs présentent sur ce point une argumentation purement appellatoire, qui se fonde sur des faits ne ressortant pas de l'arrêt attaqué, de sorte que l'on peut douter de sa recevabilité (ATF 130 III 136 consid. 1.4). 
 
6. 
A titre subsidiaire, les défendeurs contestent également la réalisation des autres conditions de l'art. 754 al. 1 CO, à savoir l'existence d'un dommage et d'un lien de causalité. 
 
6.1 Ils s'en prennent tout d'abord à la créance de loyers produite par la demanderesse dans la faillite de Z.________ S.A et admise en totalité à l'état de collocation. Ils soutiennent qu'elle serait fictive et, subsidiairement, trop élevée, le bailleur n'ayant rien fait pour réduire le dommage causé par la violation des obligations contractuelles du locataire. 
 
Comme déjà indiqué, la demanderesse n'a pas été lésée directement par les manquements imputables aux administrateurs. Elle est légitimée à s'en prendre aux défendeurs seulement en tant que cessionnaire des droits de la masse en faillite de Z.________ S.A. et ne peut réclamer que le paiement de dommages-intérêts à la société, le produit éventuel de l'action servant d'abord à couvrir ses propres prétentions (cf. supra consid. 3.3). Or, la jurisprudence a récemment précisé que, dans le cadre d'un procès en responsabilité mené contre un organe d'une société en faillite, le fondement matériel de la prétention du créancier demandeur qui agit en qualité de cessionnaire des droits de la masse au sens de l'art. 260 LP ne peut être revu par les juges (cf. ATF 132 III 342 consid. 2 et les développements figurant dans cette décision). Il en découle que les défendeurs ne peuvent remettre en cause, dans la présente procédure, ni le bien-fondé ni la quotité de la créance de la demanderesse figurant à l'état de collocation. Leurs griefs à ce sujet sont donc irrecevables. 
 
6.2 Les défendeurs reprochent ensuite à la cour cantonale d'avoir procédé à une fausse application de la théorie de la différence, en retenant que le dommage subi par la société s'élevait à 545'488 fr. 
 
Le dommage juridiquement reconnu réside dans la diminution involontaire de la fortune nette; il correspond à la différence entre le montant actuel du patrimoine du lésé et le montant qu'aurait ce même patrimoine si l'événement dommageable ne s'était pas produit (ATF 132 III 186 consid. 8.1, 321 consid. 2.2.1 p. 324 et les arrêts cités). Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité cantonale a méconnu la notion juridique du dommage. En revanche, savoir s'il y a eu un dommage et quelle en est la quotité est une question de fait qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme (ATF 130 III 145 consid. 6.2). 
 
Pour établir le dommage, la cour cantonale a calculé la différence entre le découvert qu'aurait eu Z.________ S.A. si les administrateurs n'avaient pas manqué à leurs devoirs, ce qui aurait conduit au prononcé de la faillite de la société au 31 décembre 1992, et le découvert existant lors de la faillite effective de la société le 18 février 1997. On ne voit pas qu'un tel raisonnement révèle une méconnaissance de la notion juridique du dommage. 
 
Les défendeurs, sous le couvert d'une fausse application de la notion de dommage, contestent une nouvelle fois l'étendue de leurs manquements et remettent en cause le fait que l'on puisse leur reprocher de ne pas avoir procédé à l'avis au juge au sens de l'art. 725 al. 2 CO en 1992 déjà. Sur ce point, il suffit de renvoyer à ce qui a été dit à propos de la violation fautive du devoir de diligence des administrateurs (cf. supra consid. 5.2). La Cour de céans est parvenue à la conclusion que les juges cantonaux n'avaient pas violé le droit fédéral en considérant que les défendeurs auraient dû, en 1992 déjà, provisionner la créance de loyer, dresser un bilan intermédiaire de la société et, finalement, procéder à l'avis au juge au sens de l'art. 725 al. 2 CO. Sur cette base, on ne voit pas que l'on puisse reprocher à la cour cantonale d'avoir retenu le 31 décembre 1992 pour le prononcé de la faillite hypothétique de Z.________ S.A. et d'être partie de cette date pour établir le dommage subi par la société. 
 
Quant à l'argument subsidiaire des défendeurs selon lequel, s'ils avaient provisionné la créance en 1992, ils auraient dû prendre en compte l'ensemble des loyers dus a posteriori, de sorte que l'aggravation du surendettement se serait limitée à une créance de 7'609,05 née après le 31 décembre 1992, il ne repose sur aucune logique. 
 
6.3 En ce qui concerne le lien de causalité adéquate, également remis en cause par les défendeurs, il est admis que tout retard dans le dépôt du bilan est en règle générale préjudiciable à la société (Widmer-Banz, Commentaire bâlois, n. 9 et 20 ad art. 755 CO; arrêt du Tribunal fédéral 4C.118/2005 du 8 août 2005 consid. 4.5 et les arrêts cités). On ne saurait donc reprocher à la cour cantonale d'avoir méconnu la notion de causalité adéquate (sur cette notion, cf. ATF 129 II 312 consid. 3.3) en retenant un tel lien entre les manquements des défendeurs et le dommage subi par Z.________ S.A. en raison de l'augmentation de son découvert entre le 31 décembre 1992 et le 18 février 1997, moment de sa faillite effective. 
 
Les défendeurs ne formulent d'ailleurs aucune critique consistante, se contentant d'indiquer qu'un lien de causalité ne peut être admis si le dommage et la violation des devoirs sont inexistants. 
 
Ils cherchent également à se prévaloir de la rupture du lien de causalité adéquate, découlant de l'occupation illicite de la villa. Ce faisant, ils remettent une nouvelle fois en cause le montant de la prétention découlant du bail qu'a fait valoir la demanderesse dans la faillite et qui a été admise à l'état de collocation. Une telle critique n'est pas admissible, lorsque, comme en l'espèce, il s'agit de se prononcer sur la responsabilité des administrateurs pour le dommage causé à la société faillie (cf. supra consid. 6.1). 
 
6.4 En conclusion, les conditions de l'art. 754 CO étant réunies, c'est à juste titre que la cour cantonale a condamné les défendeurs à payer à la demanderesse, en tant que cessionnaire des droits de la masse, des dommages-intérêts qui correspondent au montant du préjudice subi par la société. 
 
7. 
Dans une dernière critique, les défendeurs se prévalent de l'art. 759 CO, reprochant à la cour cantonale d'avoir totalement ignoré cette disposition. 
 
L'art. 759 al. 1 CO institue une solidarité différenciée (ATF 122 III 324 consid. 7b p. 325), dès lors qu'il prévoit que, si plusieurs personnes répondent d'un même dommage, chacune d'elles est solidairement responsable dans la mesure où le dommage peut lui être imputé personnellement en raison de sa faute et au vu des circonstances. Dans les rapports externes, c'est-à-dire dans les rapports entre les organes responsables et le lésé, le montant du dommage auquel un administrateur peut être condamné solidairement ne peut dépasser le dommage qu'il a causé ou contribué à causer et qui lui est imputable personnellement en raison de sa faute et au vu des circonstances (ATF 122 III 324 consid. 7b p. 325; cf. aussi ATF 127 III 453 consid. 5d p. 456 s.). Chaque coresponsable peut donc faire valoir ses motifs personnels d'atténuation de la responsabilité, tels que la faute légère, la gêne, l'action de complaisance, la différence des situations économiques ou la faible rémunération (Corboz, La responsabilité des organes en droit des sociétés, Bâle 2005, N. 14 ad art. 759 CO; Widmer/Banz, op. cit., N. 4 ss ad art. 759 CO). 
 
L'arrêt attaqué ne révèle pas l'existence de circonstances permettant d'en conclure que les défendeurs ne devraient pas supporter l'ensemble du dommage ou que l'un ou l'autre d'entre eux pourrait, à titre individuel, se prévaloir d'un facteur personnel d'atténuation, ce que ceux-ci n'invoquent du reste nullement dans leurs recours. Par conséquent, la cour cantonale n'avait pas à individualiser le dommage au stade des rapport externes. On ne peut donc lui reprocher d'avoir méconnu le principe de la solidarité différenciée de l'art. 759 CO
 
Dans ces circonstances, les recours doivent être rejetés, dans la mesure où ils sont recevables. 
 
8. 
Compte tenu de ce qui précède, les défendeurs, débiteurs solidaires, supporteront les frais, calculés globalement pour les deux recours (art. 156 al. 1 et 7 OJ) et verseront des dépens à la demanderesse (art. 159 al. 1 et 5 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Les recours sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. 
 
2. 
Un émolument judiciaire global de 8'000 fr. est mis à la charge des défendeurs, solidairement entre eux. 
 
3. 
Les défendeurs, débiteurs solidaires, verseront à la demanderesse une indemnité de 9'000 fr. à titre de dépens. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice genevoise. 
Lausanne, le 27 juin 2006 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: