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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_786/2020  
 
 
Arrêt du 1er septembre 2021  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Stadelmann, Juge présidant, Moser-Szeless et Kradolfer, Juge suppléant. 
Greffier : M. Ourny. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Alain Ribordy, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg, 
route du Mont-Carmel 5, 1762 Givisiez, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (rente d'invalidité), 
 
recours contre l'arrêt de la IIe Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 29 octobre 2020 (608 2019 228). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1956 et sans formation professionnelle, a travaillé en qualité de machiniste de chantier comme indépendant. Le 8 juillet 2011, il a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité auprès de l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg (ci-après: l'office AI), arguant souffrir principalement d'une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite et d'une déchirure de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche. Par décision du 11 décembre 2013, l'office AI a rejeté cette demande, motif pris que l'assuré ne présentait aucune perte de gain.  
 
A.b. Le 21 avril 2017, l'assuré - faisant valoir des douleurs au dos et aux épaules - a déposé une nouvelle demande de prestations auprès de l'office AI. Par décision du 26 juin 2017, celui-ci n'est pas entré en matière sur cette seconde demande, au motif que l'intéressé n'avait pas apporté la preuve de l'aggravation de son état de santé depuis la décision du 11 décembre 2013. Par arrêt du 12 mars 2018, la II e Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg (ci-après: la IIe Cour des assurances sociales) a rejeté le recours formé contre la décision du 21 avril 2017 et a invité l'office AI à traiter ledit recours comme une nouvelle demande de prestations.  
Reprenant l'examen du dossier, l'office AI a recueilli l'avis du docteur B.________, spécialiste en anesthésiologie et médecin auprès du Service médical régional de l'assurance-invalidité (SMR). Dans son rapport du 13 novembre 2018, ce médecin a conclu que l'activité de machiniste exercée par l'assuré était contre-indiquée depuis 2010. En revanche, l'intéressé était capable de travailler dans une activité adaptée à certaines limitations fonctionnelles au niveau du dos et des épaules. L'office AI a également mis en oeuvre une enquête économique pour les indépendants. 
Par décision du 28 juin 2019, l'office AI a rejeté la nouvelle demande de prestations de l'assuré, compte tenu de l'absence de toute perte de gain. 
 
B.  
Saisie d'un recours contre la décision de l'office AI, la II e Cour des assurances sociales l'a rejeté par arrêt du 29 octobre 2020.  
 
C.  
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à son annulation et à la reconnaissance de son droit à une rente entière d'invalidité dès le 1 er février 2018.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral, qui est un juge du droit, fonde son raisonnement juridique sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 145 V 188 consid. 2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 2 LTF). Si le recourant entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF); à défaut, un état de fait divergent de celui de la décision attaquée ne peut pas être pris en compte (ATF 145 V 188 consid. 2 précité; 135 II 313 consid. 5.2.2). 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d'invalidité à partir du 1 er février 2018, plus particulièrement, au regard des motifs du recours, sur les revenus avec et sans invalidité qui doivent être pris en compte pour fixer le taux d'invalidité.  
 
2.2. L'arrêt attaqué expose de manière complète les dispositions et la jurisprudence relatives à la notion d'invalidité (art. 8 al. 1 LPGA en relation avec l'art. 4 al. 1 LAI), à son évaluation d'après la méthode ordinaire de comparaison des revenus (art. 16 LPGA; ATF 129 V 222), à la détermination du revenu sans invalidité d'un indépendant (arrêt 9C_502/2014 du 5 septembre 2014 consid. 3 et les références), ainsi qu'à l'exigibilité d'un changement d'activité professionnelle dans le cadre de l'obligation de diminuer le dommage, notamment pour un indépendant (ATF 138 I 205 consid. 3.2 et 3.3; arrêt 9C_36/2018 du 17 mai 2018 consid. 4.2 et les références). Il suffit d'y renvoyer.  
 
2.3. On rappellera que la constatation des revenus à comparer dans le cadre de la détermination du taux d'invalidité se présente en tant que question de fait dans la mesure où elle repose sur une appréciation concrète des preuves, mais en tant que question de droit dans la mesure où la décision se base sur l'expérience générale de la vie (arrêt 9C_502/2014 précité consid. 3 et les références), tandis que l'exigibilité d'un changement d'activité professionnelle dans le cadre de l'obligation de diminuer le dommage est une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement (arrêt 9C_36/2018 précité consid. 4.2 et les références).  
 
3.  
La cour cantonale a retenu que le recourant avait maintenu son activité indépendante moyennant des adaptations (horaire réduit, sous traitance, etc.), quand bien même ladite activité était considérée comme inadaptée à ses limitations fonctionnelles. Il s'était ainsi conformé à son obligation de réduire le dommage. La moyenne des revenus annuels réalisés dans son entreprise durant les cinq années précédant la survenance de l'atteinte à la santé (soit avant 2011) s'élevait à 60'297 fr. 50. Après indexation à l'évolution des salaires nominaux, il en résultait un revenu sans invalidité de 63'493 fr. 25. Compte tenu des bénéfices nets réalisés entre 2016 et 2018 (respectivement de 75'672 fr. 35, 89'491 fr. 45 et 109'796 fr. 85), le revenu moyen indexé pour les années 2011 à 2018 - au cours desquelles le recourant avait poursuivi son activité indépendante avec des aménagements - s'élevait à 70'988 fr. 20. Les juges cantonaux ont constaté que si les frais relatifs à des travaux confiés à des tiers avaient fortement augmenté en 2015 par rapport à ceux déclarés entre 2011 et 2014, il en allait de même du chiffre d'affaires. Tout portait ainsi à croire que l'activité du recourant était dès 2015 supérieure à celle réalisée auparavant, malgré son handicap, de sorte qu'il avait été contraint de recourir à l'aide de tiers sans que cela ne diminue toutefois son revenu net. Entre 2016 et 2018, le recours à des travaux de tiers avait diminué de manière proportionnelle au chiffre d'affaires, suivant ainsi le volume des affaires. La diminution du chiffre d'affaires ne pouvait donc pas être prioritairement imputée aux problèmes de santé de l'intéressé. En tout état de cause, le revenu moyen réalisé malgré le handicap était au moins équivalent voire supérieur à celui réalisé avant l'invalidité. 
La juridiction cantonale a par ailleurs constaté que le revenu retenu par l'intimé dans une activité adaptée, laquelle correspondait à une activité légère dans les services ou dans l'industrie légère selon l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) 2016, s'élevait à 67'070 fr. 60. Ce revenu d'invalide impliquait une comparaison avec un revenu sans invalidité d'au moins 111'784 fr. 35 pour parvenir à une perte de gain de plus de 40 % ouvrant le droit à une rente d'invalidité. Or le recourant n'avait jamais réalisé un tel revenu. Même en revoyant à la hausse le revenu sans invalidité, en l'adaptant au renchérissement voire en tenant compte de son développement réel, un tel correctif n'aurait pas eu d'incidence notable sur la perte de gain subie et le droit à la rente. Sur la base des moyennes de revenu calculées par l'intimé, rien ne permettait de déduire de manière plausible que le revenu tiré de l'activité indépendante aurait pu dépasser 110'000 fr. si le recourant n'avait souffert d'aucun problème de santé. Au final, celui-ci n'avait subi aucune perte de gain en dépit de ses atteintes à la santé. 
Toujours selon les premiers juges, il ne se justifiait pas d'appliquer un abattement de 25 % sur le revenu tiré d'une activité adaptée, tel que requis par le recourant, dès lors qu'au regard du marché du travail en 2017, les possibilités d'employabilité d'un assuré de 61 ans ne paraissaient pas illusoires, d'autant que l'activité légère retenue par l'intimé ne nécessitait aucune formation spécifique. 
 
4.  
 
4.1. Le recourant, se plaignant d'une violation de l'art. 16 LPGA, reproche tout d'abord à l'instance précédente d'avoir adopté un raisonnement contradictoire et arbitraire au sujet du changement de profession. Les premiers juges auraient en effet retenu qu'il s'était conformé à son obligation de réduire le dommage en maintenant son activité indépendante moyennant des adaptations, mais ils auraient calculé le revenu d'invalide selon le revenu statistique découlant d'un changement d'activité et non pas sur la base de sa capacité de travail réduite dans l'activité habituelle. Le recourant soutient que la cour cantonale aurait dû retenir comme invalidité le taux médico-théorique de l'incapacité de travail dans l'activité de machiniste ou, plus concrètement, comparer les revenus sans invalidité et d'invalide dans cette activité. Or les juges cantonaux se seraient contentés de vagues considérations pour évaluer le revenu sans invalidité et l'auraient opposé à un revenu d'invalide dans une autre profession. En outre, ils n'auraient pas examiné certains de ses arguments démontrant qu'un changement d'activité n'était pas exigible, en violation de son droit d'être entendu. Ils se seraient contentés à ce titre de considérations générales, en faisant de surcroît référence à des précédents jurisprudentiels sans pertinence pour le cas d'espèce. Ils auraient en particulier dû tenir compte de son âge, du fait qu'il n'avait aucune formation professionnelle et du fait qu'il avait exercé l'activité de machiniste avec succès durant des dizaines d'années.  
 
4.2. Le recourant perd de vue que les premiers juges ont principalement retenu l'absence de toute perte de gain en dépit de ses problèmes de santé, dès lors qu'il avait réalisé entre 2011 et 2018 un revenu moyen supérieur à celui réalisé avant les atteintes à sa santé apparues en 2011. Ce faisant, il s'est effectivement conformé au principe selon lequel un invalide doit, avant de requérir des prestations de l'assurance-invalidité, entreprendre de son propre chef tout ce que l'on peut raisonnablement attendre de lui pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité et obtenir un revenu qui exclut une invalidité ouvrant droit à une rente (cf. ATF 138 I 205 consid. 3.2). Par ailleurs, en invoquant le taux médico-théorique de l'incapacité de travail comme machiniste, le recourant ne remet pas en cause les constatations de l'instance précédente quant au revenu moyen réalisé malgré le handicap dans cette activité aménagée.  
De plus, ce n'est en réalité qu'à titre subsidiaire que la juridiction cantonale a relevé que même en tenant compte du revenu tiré d'une éventuelle activité dans une autre profession adaptée à ses limitations fonctionnelles, sa perte de revenu ne serait pas supérieure à 40 %. En tout état de cause, on ne voit pas en quoi l'activité adaptée retenue par l'autorité précédente ne serait pas exigible, dès lors qu'elle prend en considération les limitations fonctionnelles du recourant telles que définies par le docteur B.________, ce que le recourant ne conteste pas. Par ailleurs, il n'est pas arbitraire de considérer que l'assuré aurait été en mesure de retrouver un emploi dans une activité adaptée légère sur un marché équilibré du travail, malgré son âge au moment de sa (nouvelle) demande de prestations en 2017 (61 ans) et son manque de formation professionnelle, compte tenu des limites relativement élevées posées par la jurisprudence à propos de l'impossibilité de mettre en valeur la capacité résiduelle de travail de personnes d'un certain âge (cf. arrêt 9C_188/2019 du 10 septembre 2019 consid. 7.3 et les références). Quant à l'ATF 145 V 209 cité par le recourant, il ne lui est d'aucun secours puisqu'il porte sur la mise en oeuvre de mesures de réadaptation dans la situation - différente du cas d'espèce - dans laquelle il y a une réduction ou une suppression d'une rente d'invalidité d'un assuré de plus de 55 ans. Enfin, on ne saurait reprocher à l'autorité précédente une violation du droit d'être entendu du recourant, dès lors que l'arrêt entrepris est suffisamment motivé en ce qui concerne l'exigibilité de l'activité adaptée. Ce grief s'avère ainsi également mal fondé. 
 
5.  
 
5.1. Le recourant fait ensuite grief à la cour cantonale de ne pas avoir déterminé le revenu sans invalidité de manière concrète et précise, en procédant à une analyse des comptes de son entreprise. Sans les atteintes à sa santé, le chiffre d'affaires - en augmentation entre 2011 et 2014 - aurait continué de progresser pour aboutir à un bénéfice supérieur à 170'000 fr. En outre, les juges cantonaux auraient retenu de manière insoutenable qu'il avait, malgré son handicap, réalisé en 2015 un chiffre d'affaires supérieur à celui réalisé auparavant. L'incapacité de travail aurait en effet débuté en mai 2015 et n'aurait donc pas déployé tous ses effets sur le résultat de l'exercice de l'année en question. En revanche, elle aurait causé une diminution constante du chiffre d'affaires dès 2016. La juridiction cantonale n'aurait ainsi pas été fondée à retenir que le revenu sans invalidité n'aurait pas pu dépasser 111'784 fr. 35.  
 
5.2. S'agissant de la détermination du revenu sans invalidité, soumise à un examen limité du Tribunal fédéral (cf. consid. 1 et 2.3 supra), le recourant se limite à substituer sa propre appréciation des preuves à celle de l'instance précédente, sans démontrer en quoi celle-ci aurait versé dans l'arbitraire. Quoi qu'en dise le recourant, les premiers juges ont établi de manière convaincante et motivée le revenu sans invalidité. Sur la base d'un revenu de 63'493 fr. 25 réalisé avant l'atteinte à la santé, ils ont retenu de manière convaincante que le revenu sans invalidité n'aurait pas pu atteindre 111'784 fr. 35 au degré de la vraisemblance prépondérante. Par ailleurs, le revenu sans invalidité dont se prévaut le recourant, fondé sur une progression constante du bénéfice net, est purement hypothétique et n'est pas étayé par les éléments qu'il avance. Il convient donc d'écarter son grief.  
 
6.  
Enfin, l'argumentation du recourant relative à l'abattement de 25 % qu'il y aurait lieu d'effectuer sur le revenu d'invalide résultant des données de l'ESS, concerne essentiellement la motivation subsidiaire de l'arrêt entrepris (cf. consid. 4.2 supra). En conséquence, elle ne doit pas être examinée plus avant, puisqu'il n'y a pas lieu de s'écarter des constatations de la juridiction cantonale quant à l'absence de perte de gain du recourant au regard du revenu moyen réalisé malgré son handicap dans la profession habituelle, compte tenu de certains aménagements. 
 
7.  
Ensuite de ce qui précède, le recours est mal fondé. 
 
8.  
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la IIe Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 1er septembre 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Stadelmann 
 
Le Greffier : Ourny