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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_63/2020  
 
 
Arrêt du 9 mars 2020  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président, 
Haag et Müller. 
Greffier : M. Tinguely. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Stefan Disch, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Office central du Ministère public du canton du Valais, case postale 2305, 1950 Sion 2. 
 
Objet 
Procédure pénale; vices de procédure affectant la clôture de l'instruction, art. 318 CPP
 
recours contre l'ordonnance du Tribunal cantonal 
du canton du Valais, Juge unique de la Chambre pénale, du 23 décembre 2019 (P3 19 276). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A la suite d'une dénonciation de B.________ datée du 19 décembre 2012, A.________ a fait l'objet depuis le 17 juillet 2013 d'une instruction pénale menée par l'Office central du Ministère public du canton du Valais. L'enquête a porté en particulier sur des infractions qui auraient été commises dans le cadre de la gestion de la société C.________ SA. 
 
B.  
 
B.a. Par acte d'accusation du 22 juillet 2019, le Ministère public a engagé l'accusation à l'encontre de A.________ devant le Tribunal du district de Sion pour les infractions de gestion déloyale (art. 158 ch. 1 CP), de faux dans les titres (art. 251 CP) et d'inobservation des prescriptions légales sur la comptabilité (art. 235 CP).  
 
B.b. Par acte du 2 août 2019 adressé au Tribunal du district de Sion, A.________ s'est prévalu de violations de l'art. 318 CPP par le Ministère public dans le contexte de sa mise en accusation, dès lors en particulier que cette autorité ne l'avait pas avisé de la prochaine clôture de l'instruction, ni informé au sujet de l'admission à la procédure d'une nouvelle partie plaignante et de la dénonciation d'une des protagonistes de l'affaire auprès des autorités pénales d'un autre canton. Il a fait valoir que, pour ces motifs, "l'acte d'accusation du 22 juillet 2019 ne [pouvait] être que nul, éventuellement annulé et le dossier renvoyé au Ministère public pour qu'il lui accorde un droit d'être entendu suffisant avant la clôture formelle de l'instruction". Son acte comportait enfin, à sa dernière page, la mention suivante: "Si vous deviez estimer que seule l'autorité de recours (Tribunal cantonal) est compétente pour constater la nullité ou annuler l'acte d'accusation, nonobstant la teneur de l'art. 324 al. 2 CPP, je vous prie expressément de considérer la présente comme un recours et de le transmettre à l'autorité compétente (art. 91 al. 4 CPP). La présente est de ce fait adressée dans le délai de l'art. 396 al. 1 CPP, soit dans les 10 jours dès réception par le soussigné de l'acte d'accusation".  
Par décision du 16 septembre 2019, la juge suppléante auprès du Tribunal du district de Sion a signifié à A.________ que l'examen effectué dans le cadre de l'art. 329 CPP ne justifiait pas de renvoyer l'accusation au Ministère public pour qu'il la complète ou la corrige. 
 
B.c. Le 7 octobre 2019, A.________ a demandé à la magistrate précitée que l'acte du 2 août 2019 soit "transmis sans délai au Tribunal cantonal pour valoir recours contre les actes du Ministère public".  
Le lendemain, la juge suppléante a informé A.________ qu'elle n'entendait pas donner suite à sa demande de transmission. 
 
B.d. Le 11 octobre 2019, A.________ a remis à la Chambre pénale du Tribunal cantonal valaisan une copie de son écriture du 2 août 2019, indiquant qu'elle valait recours "contre les actes du Ministère public dont la défense a[vait] pu prendre connaissance au plus tôt par la notification de l'acte d'accusation".  
Par ordonnance du 23 décembre 2019, la Chambre pénale a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté. 
 
C.   
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'ordonnance du 23 décembre 2019. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour qu'elle examine les griefs soulevés dans son acte de recours du 2 août 2019 s'agissant de sa mise en accusation. Il sollicite en outre l'octroi de l'effet suspensif en ce sens que "la validité de l'acte d'accusation reste à examiner par l'autorité cantonale et que l'instance ne saurait se poursuivre dans l'intervalle". 
Invitée à se déterminer, la cour cantonale a indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à formuler sur le recours, ni sur la requête d'effet suspensif. Le Ministère public a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif, sans pour autant se déterminer expressément sur le sort à réserver au recours. 
 
D.   
Par ordonnance du 24 février 2020, le Président de la Ire Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
L'ordonnance attaquée est une décision d'irrecevabilité prise en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF) dans le cadre d'une procédure pénale, le recours en matière pénale étant ainsi en principe ouvert (art. 78 ss LTF). 
De nature incidente, l'ordonnance entreprise ne met pas un terme à la procédure pénale. Le recours au Tribunal fédéral n'est donc en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Cela étant, lorsque le recours est formé contre une décision d'irrecevabilité, cette situation équivaut, sous l'angle de la recevabilité, à un déni de justice formel. Le recours sur ces points particuliers est donc ouvert indépendamment d'un préjudice irréparable (ATF 143 I 344 consid. 1.2 p. 346). Seule la question de la recevabilité du recours cantonal peut cependant être portée devant le Tribunal fédéral, ce qui exclut l'examen des griefs développés en lien avec le fond. 
Pour le surplus, l'auteur d'un recours déclaré irrecevable en instance cantonale a qualité, au sens de l'art. 81 LTF, pour contester ce prononcé (arrêt 1B_370/2019 du 4 octobre 2019 consid. 1.1). Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue par une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF). 
Partant, il y a lieu d'entreren matière. 
 
2.   
Le recourant conteste la tardiveté de son recours contre l'acte d'accusation du 22 juillet 2019, arguant qu'en vertu de l'art. 91 al. 4 CPP, l'autorité de première instance aurait dû transmettre à l'autorité de recours son acte du 2 août 2019, par lequel il faisait valoir que le Ministère public n'avait pas respecté les formalités de l'art. 318 CPP
 
2.1. Conformément à l'art. 91 al. 4 CPP, le délai de recours est réputé observé si l'acte de recours parvient au plus tard le dernier jour du délai à une autorité suisse non compétente. Celle-ci transmet alors l'écrit à l'autorité pénale compétente.  
Cette norme qui concrétise le principe selon lequel les délais sont considérés comme respectés si une partie dépose un acte en temps voulu auprès d'une autorité incompétente, a été reconnu par le Tribunal fédéral comme principe général de procédure découlant des règles de la bonne foi valant pour tous les domaines du droit (ATF 140 III 636 consid. 3.5 p. 641 s.; 121 I 93 consid. 1d p. 95 s.; 118 Ia 241 consid. 3c p. 243 s.; cf. pour la procédure devant le Tribunal fédéral, art. 48 al. 3 LTF; cf. ATF 130 III 515 consid. 4 p. 517). Ce principe permet d'éviter tout formalisme excessif et concrétise celui de l'interdiction du déni de justice (ATF 140 III 636 consid. 3.5 p. 641 s.). Pour trouver application, ce principe suppose que la saisine de l'autorité incompétente soit le résultat des doutes que la partie peut éprouver sur l'autorité compétente ou de fausses indications sur les voies de droit ou d'indications peu claires (arrêt 6B_1093/2015 du 28 juillet 2016 consid. 1.2 et les références citées). La jurisprudence a encore précisé que, de manière générale, ce principe ne saurait être invoqué par la partie qui s'adresse à une autorité qu'elle sait être incompétente (ATF 140 III 636 consid. 3.5 p. 641 s.; arrêts 6B_1093/2015 du 28 juillet 2016 consid. 1.2; 1B_39/2016 du 29 mars 2016 consid. 2.2). 
 
2.2. Il est rappelé qu'aux termes de l'art. 324 al. 2 CPP, l'acte d'accusation n'est pas sujet à recours. Ainsi, selon la jurisprudence, cette exclusion se justifie, d'une part, parce que l'acte d'accusation est examiné d'office et provisoirement par le tribunal du fond dès sa saisine (cf. art. 329 CPP) et, d'autre part, parce qu'il appartient à ce même tribunal de déterminer si les accusations portées contre le prévenu l'ont été à bon droit (cf. arrêts 1B_151/2019 du 10 avril 2019 consid. 4; 1B_669/2012 du 12 mars 2013 consid. 2.3.3; cf. également SCHUBARTH/GRAA, Commentaire romand, Code de procédure pénale, 2e éd., 2019, n° 7 ad art. 324 CPP; Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 p. 1258).  
Cela étant, en tant que le recourant se fonde sur l'arrêt 1B_59/2012 du 31 mai 2012 pour faire valoir qu'un acte d'accusation ne respectant pas les formes de l'art. 318 al. 1 CPP serait néanmoins annulable (cf. consid. 2.1.1), il est relevé que l'arrêt en question n'avait pas trait à l'examen du bien-fondé d'un acte d'accusation par l'autorité de recours, mais concernait une ordonnance de classement (cf. arrêt 1B_59/2012 précité consid. 1). 
Il est dès lors plus que douteux de retenir, comme l'a fait la cour cantonale (cf. ordonnance entreprise, p. 6), que l'acte d'accusation rendu le 22 juillet 2019 était un acte annulable par le dépôt d'un recours au sens des art. 393 ss CPP
 
2.3. Pour autant, il est relevé que la destinataire de l'écriture du 2 août 2019, en l'occurrence l'autorité de première instance, s'est estimée compétente et s'est effectivement prononcée, dans sa décision du 16 septembre 2019, sur les griefs développés par le recourant, en considérant, après un examen de l'acte d'accusation au sens de l'art. 329 al. 1 CPP, qu'il n'y avait pas matière à renvoi au Ministère public, ni dès lors implicitement au constat de la nullité ou à l'annulation de l'acte d'accusation. Elle a du reste rappelé qu'au regard de l'art. 324 al. 2 CPP, l'acte d'accusation ne pouvait pas faire l'objet d'un recours (cf. décision du 16 septembre 2019, p. 1). Dans ces circonstances, on ne voit pas que l'invitation du recourant contenue dans son acte du 2 août 2019, formulée à titre subsidiaire (cf. p. 5: "si vous deviez estimer que seule l'autorité de recours (Tribunal cantonal) est compétente pour constater la nullité ou annuler l'acte d'accusation, nonobstant la teneur de l'art. 324 al. 2 CPP, je vous prie de considérer la présente comme un recours et de le transmettre à l'autorité compétente"), devait conduire l'autorité de première instance à remettre l'acte en question à l'autorité de recours, en application de l'art. 91 al. 4 2 ème phrase CPP.  
De surcroît, il ne ressort pas de l'arrêt entrepris que le recourant ou son mandataire avait reçu, avant l'échéance du délai de recours de 10 jours (art. 396 al. 1 CPP), une confirmation de l'autorité saisie quant à une possible transmission de l'acte à l'autorité de recours au cas où elle devait s'estimer incompétente. Dès lors, il apparaît que le moyen choisi n'offrait aucune assurance au recourant que l'autorité de recours, qu'il estimait éventuellement compétente, serait saisie en temps utile, de sorte qu'il lui appartenait de s'adresser, afin de sauvegarder ses droits, directement à la cour cantonale (cf. arrêt 1B_39/2016 du 29 mars 2016 consid. 2.2.2), ce qu'il n'a fait que le 11 octobre 2019, soit manifestement au-delà du délai de l'art. 396 al. 1 CPP
 
2.4. Compte tenu de ces éléments, le recourant ne peut pas se prévaloir de l'art. 91 al. 4 CPP pour démontrer le dépôt en temps utile de son recours. La saisine de la Chambre pénale du Tribunal cantonal en date du 11 octobre 2019 est ainsi tardive et, partant, le recours cantonal est irrecevable. On ne voit pas, au vu des développements qui précèdent, que les principes de la bonne foi et de l'interdiction du formalisme excessif ont été violés. La juridiction précédente n'a ainsi pas violé le droit fédéral en déclarant irrecevable le recours déposé devant elle.  
 
3.   
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, fixés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Office central du Ministère public du canton du Valais et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Juge unique de la Chambre pénale. 
 
 
Lausanne, le 9 mars 2020 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Chaix 
 
Le Greffier : Tinguely