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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
8C_612/2018  
 
 
Arrêt du 11 octobre 2019  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, 
Heine et Boinay, Juge suppléant. 
Greffière : Mme Fretz Perrin. 
 
Participants à la procédure 
1.       Réseau santé et social de la Gruyère,                     Service social, rue de Lécheretta 24, 1630 Bulle, 
2.       Etat de Fribourg, Service de l'action sociale,              route des Cliniques 17, 1700 Fribourg, 
tous les deux représentés par Me Daniel Känel, avocat,        
recourants, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par Me Alain Ribordy, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Aide sociale (condition de recevabilité), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Ire Cour des assurances sociales, du 20 juillet 2018 (605 2017 93, 605 2017 98). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.________, né en 1968, de nationalité portugaise, a séjourné et travaillé en Suisse depuis le mois de juin 2010. En raison d'un accident, il a cessé de travailler depuis le 28 mai 2014 et a touché des prestations de l'assurance-accidents jusqu'au 18 janvier 2015. Le Service social de la Gruyère, soit pour lui la Commission sociale, lui a alloué des prestations d'aide matérielle à partir du mois d'avril 2015 jusqu'au mois de décembre 2016 (voir les décisions des 5 mai 2015, 30 juin 2015, 21 décembre 2015 et 5 juillet 2016). 
Le 4 janvier 2017, le Service de la population et des migrants du canton de Fribourg (ci-après: le SPoMi) a informé A.________ qu'il envisageait de ne pas renouveler son permis L et de le renvoyer de Suisse. Par décisions des 7 mars, 24 mars et 11 avril 2017, le Service de l'action sociale du canton de Fribourg (ci-après: le SASoc) a accordé à l'intéressé des prestations d'aide sociale limitées à une aide d'urgence pour la période de janvier à mai 2017. Par courrier du 28 mars 2017, le requérant a demandé au SASoc de confirmer que la décision du 7 mars 2017 était nulle, subsidiairement annulée et d'inviter le Service social de la Gruyère à rétablir l'aide matérielle précédemment accordée. 
Par "décision sur réclamation" du 6 avril 2017, le SASoc a nié le droit de A.________ à une aide matérielle conventionnelle, mais reconnu le droit à une aide d'urgence. Par lettre du 10 avril 2017, le Service social de la Gruyère a constaté que le SASoc était bien l'autorité compétente pour définir et accorder l'aide matérielle au requérant dès le mois de janvier 2017. 
 
B.  
 
B.a. A.________ a recouru devant la I  re Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg contre le prononcé du SASoc du 6 avril 2017, en concluant à son annulation (conclusion n° 1). Il a en outre demandé à la cour de constater que le refus du Service social de la Gruyère de rendre une décision relative à sa demande d'aide matérielle constituait un déni de justice formel (conclusion n° 2) et d'ordonner à ce dernier de rétablir l'aide sociale matérielle en sa faveur dès le 1 er janvier 2017 (conclusion n° 3).  
Le 13 novembre 2017, A.________ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour (permis B) valable jusqu'au 9 septembre 2019. 
 
B.b. Par lettres des 13 mars 2018 et 11 mai 2018, le recourant a modifié la conclusion n° 3 de son recours en ce sens que la Commission sociale devait lui octroyer ainsi qu'à son épouse l'aide matérielle ordinaire, y compris le loyer d'un appartement de trois pièces dans la région de Bulle selon les normes d'aide sociale, ainsi que l'aide personnelle nécessaire pour trouver le logement en question et pour présenter une demande de prestations complémentaires. Il a précisé qu'il allait certes percevoir une somme de 115'355 fr. 25 de son assureur perte de gain maladie mais vu ses lacunes en français et un revenu mensuel ne dépassant pas 568 fr. (rente d'invalidité), une aide matérielle et personnelle restait nécessaire, sans quoi il ne pourrait pas trouver un logement pour lui-même et son épouse.  
 
B.c. Par jugement du 20 juillet 2018, la juridiction cantonale a joint les recours (ch. I). Elle a constaté que le recours contre la décision sur réclamation du 6 avril 2017 était sans objet (ch. II). Le recours pour défaut de décision était sans objet en tant qu'il portait sur la question de l'aide matérielle allouée dès le 1 er janvier 2017 (ch. III). Pour le surplus, il était partiellement admis en ce sens que la Commission sociale (Service social de la Gruyère) avait refusé à tort de rendre une décision sur la demande d'aide personnelle. La cause devait être renvoyée à cette dernière pour qu'elle statue sur cette demande (ch. IV).  
 
C.   
Le Service social de la Gruyère et le SASoc interjettent un recours en matière de droit public contre ce jugement dont ils demandent l'annulation. Ils concluent, sous suite de frais et dépens, à la modification des ch. II et IV du dispositif du jugement attaqué, en ce sens que le recours contre la décision sur réclamation du 6 avril 2017 et le recours pour défaut de décision sont rejetés, dans la mesure où ils sont recevables. 
L'intimé conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. La cour cantonale a renoncé à se déterminer sur le recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 144 V 280 consid. 1 p. 283; 141 II 113 consid. 1 p. 116). 
 
2.   
Les recours au Tribunal fédéral sont recevables contre les décisions qui mettent fin à la procédure (décisions finales; art. 90 LTF), les décisions partielles (art. 91 LTF) et les décisions préjudicielles ou incidentes aux conditions prévues par les art. 92 et 93 LTF. Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de procédure. En tant que cour suprême, le Tribunal fédéral ne doit en principe s'occuper qu'une seule fois d'un procès, et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif (ATF 144 III 253 consid. 1.3 p. 253; 141 III 80 consid. 1.2 p. 81). 
 
2.1. Constitue une décision finale au sens de l'art. 90 LTF celle qui met définitivement fin à la procédure, qu'il s'agisse d'une décision sur le fond ou d'une décision qui clôt l'affaire pour un motif tiré des règles de procédure (ATF 141 III 395 consid. 2.1 p. 397; 135 III 566 consid. 1.1 p. 568).  
 
2.2. Aux termes de l'art. 91 LTF, traitant des décisions partielles, le recours est recevable contre toute décision qui statue sur un objet dont le sort est indépendant de celui qui reste en cause (let. a) ou qui met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts (let. b). La décision partielle au sens de l'art. 91 let. a LTF est une variante de la décision finale visée par l'art. 90 LTF. La jurisprudence la définit comme la décision par laquelle le juge statue de manière définitive sur une partie de ce qui est demandé, qui aurait pu être jugée indépendamment des autres prétentions formulées. Cette indépendance implique donc d'une part que la prétention tranchée ait pu faire l'objet d'un procès séparé, d'autre part que la décision attaquée tranche de manière définitive d'une partie du litige (ATF 141 III 395 consid. 2.4 p. 398; 135 III 212 consid. 1.2 p. 216 ss).  
 
2.3. Hormis les décisions mentionnées à l'art. 92 al. 1 LTF, une décision préjudicielle ou incidente peut être entreprise immédiatement si elle peut causer un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (art. 93 al. 1 let. b LTF). Par préjudice irréparable, on entend le dommage juridique qu'une décision finale, même favorable au recourant, ne ferait pas disparaître complètement (ATF 135 II 30 consid. 1.3.4 p. 36; 134 III 426 consid. 1.3.1 p. 430; 133 III 629 consid. 2.3.1 p. 632 et les arrêts cités). Lorsqu'il n'est pas manifeste que l'une des conditions (alternatives) d'entrée en matière prévues à l'art. 93 LTF soit remplie, il appartient au recourant de la démontrer ou du moins de l'alléguer, faute de quoi le recours est déclaré irrecevable (ATF 141 III 395 consid. 2.5 p. 400; 141 III 80 consid. 1.2; 136 IV 92 consid. 4 p. 95; arrêt 2C_1054/2017 du 15 mai 2018 consid. 1.2).  
 
3.  
 
3.1. En tant qu'il déclare sans objet le recours contre la décision sur réclamation du 6 avril 2017 (ch. II du dispositif) ainsi que le recours pour défaut de décision dans la mesure où il porte sur la question de l'aide matérielle allouée dès le 1 er janvier 2017 (ch. III du dispositif), l'arrêt querellé met fin à la procédure et constitue ainsi une décision finale partielle (art. 91 LTF). En revanche, en tant qu'il admet partiellement le recours pour défaut de décision parce que la Commission sociale a refusé à tort de rendre une décision sur la demande d'aide personnelle et qu'il renvoie la cause à cette dernière pour statuer sur cette demande (ch. IV du dispositif), le jugement entrepris doit être qualifié de décision incidente au sens de l'art. 93 LTF.  
 
3.2.  
 
3.2.1. Les premiers juges ont expliqué qu'au vu du montant de 108'544 fr. 80 (plus intérêts) perçu par l'intimé au titre d'indemnités journalières perte de gain maladie, ce dernier était en mesure de rembourser ses dettes d'aide sociale et de subvenir à son entretien et à celui de son épouse tant pour la période concernée par les recours qu'à tout le moins pour l'avenir proche. Par conséquent, en tant qu'ils portaient sur la question de son droit à une aide matérielle dès le 1 er janvier 2017, les recours de l'intimé devant la juridiction cantonale étaient devenus sans objet. En revanche, en tant qu'il portait sur la demande d'aide personnelle, le recours de l'intimé n'était pas sans objet. Il y avait lieu de déterminer l'autorité compétente pour l'octroi d'une telle prestation. Selon les premiers juges, l'intimé étant domicilié dans le canton de Fribourg, il appartenait à la Commission sociale du Service social de la Gruyère de rendre une décision relative à l'aide personnelle nécessaire pour trouver un logement dans la région de Bulle et pour présenter une demande de prestations complémentaires.  
 
3.2.2. S'agissant de la question du renvoi de la cause à la Commission sociale pour qu'elle statue sur la demande d'aide personnelle, les recourants n'exposent pas en quoi les conditions de l'ouverture d'un recours immédiat selon l'art. 93 al. 1 let. a LTF seraient réalisées, comme il leur appartenait de le faire (cf. consid. 2.3 supra). Par ailleurs l'existence d'un préjudice irréparable ne fait pas d'emblée aucun doute. Quant aux conditions de l'art. 93 al. 1 let. b LTF, elles ne sont manifestement pas remplies. Partant, en tant qu'il porte sur le ch. IV du dispositif, le recours en matière de droit public se révèle manifestement irrecevable (art. 108 al. 1 let. b LTF).  
Le recours n'est pas davantage recevable en tant qu'il porte sur le ch. II du dispositif de l'arrêt querellé. Pour fonder leur grief, les recourants se bornent à affirmer, sans autre développement ni recours à une disposition légale, qu'"il était erroné de considérer que le recours visant la compétence du SASoc était devenu sans objet, dans la mesure où cette question a bien du être tranchée par le Tribunal cantonal". Il ne s'agit pas d'une argumentation satisfaisant aux exigences de motivation découlant des art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF. Sur ce point également, le recours est irrecevable en vertu de l'art. 108 al. 1 let. b LTF
 
4.   
Ensuite de ce qui précède, il convient de déclarer irrecevable le recours, sans qu'il soit au demeurant nécessaire d'examiner la qualité pour recourir des recourants, laquelle est contestée par l'intimé. Les recourants qui succombent doivent supporter les frais judiciaires solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Ils verseront en outre des dépens à l'intimé qui s'est déterminé sur le recours (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est irrecevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.   
Une indemnité de 2800 fr., à payer à titre de dépens à l'intimé, est mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, I  re Cour des assurances sociales.  
 
 
Lucerne, le 11 octobre 2019 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : Fretz Perrin