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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2D_21/2022  
 
 
Arrêt du 11 novembre 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Beusch. 
Greffière : Mme Jolidon. 
 
Participants à la procédure 
A.________, administratrice d'office de la succession 
de feu Madame B.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration fiscale cantonale du canton de Genève, 
rue du Stand 26, 1204 Genève, 
intimée. 
 
Objet 
Avance de frais, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, du 12 avril 2022 (A/740/2021-ICC). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par décision du 19 janvier 2021, l'Administration fiscale cantonale de la République et canton de Genève (ci-après: l'Administration fiscale) a rejeté la réclamation de A.________, qui agissait en qualité d'administratrice d'office de la succession de feue B.________, à l'encontre d'une décision en matière de droits de succession. 
 
A.________ a attaqué cette décision sur réclamation auprès du Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal de première instance), qui lui a imparti, le 2 mars 2021, un délai échéant le 1er avril 2021 pour procéder au paiement de l'avance de frais de 700 fr., sous peine d'irrecevabilité du recours. Cette avance a été créditée sur le compte dudit tribunal le 15 avril 2021. A la demande de celui-ci, A.________ a expliqué avoir versé la somme en cause le 14 avril 2021; le 8 mars 2021, elle avait envoyé un courrier à C.________ (ci-après: la banque), afin que l'avance de frais soit payée; la banque l'avait informée, par téléphone du 11 mars 2021, que le paiement ne pouvait être effectué en raison de la " mainmise fiscale " sur le compte bancaire, mais sans lui préciser que le solde était insuffisant pour effectuer le versement; par courriel du 22 mars 2021, A.________ avait alors demandé la levée de ladite mainmise sur le compte en cause à l'Administration fiscale, ce qui avait été accepté à concurrence de 700 fr.; le solde du compte étant toutefois insuffisant pour payer ce montant, la banque avait, sans l'en informer, contacté directement par téléphone l'Administration fiscale, le 1er avril 2021, pour demander la levée de la mainmise sur un autre compte, ce que l'Administration fiscale avait également accepté; la banque n'ayant toutefois pas reçu de courrier du fisc débloquant le second compte, elle avait informé A.________, par appel téléphonique du 13 avril 2021, que la levée de la mainmise devait être demandée par écrit à l'Administration fiscale, ce à quoi elle avait procédé le jour même. Le 14 avril 2021, la banque a finalement reçu la renonciation partielle du 7 avril 2021 de l'Administration fiscale et informé A.________ que le paiement allait être exécuté. 
 
Par jugement du 26 mai 2021, le Tribunal de première instance a déclaré le recours irrecevable, le paiement de l'avance de frais étant tardif. 
 
B.  
Par arrêt du 12 avril 2022, la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours de A.________ à l'encontre du jugement du 26 mai 2021 du Tribunal de première instance. Elle a examiné si l'intéressée avait été empêchée sans sa faute de verser l'avance de frais et s'il s'agissait d'un cas de force majeure. Elle a retenu que tel n'était pas le cas: la banque, qui devait procéder au paiement de l'avance de frais, était considérée comme l'auxiliaire de la partie recourante qui répondait donc du comportement de l'institution; A.________ avait certes entrepris les démarches en vue du versement auprès de la banque assez tôt, mais elle s'était reposée exclusivement sur celle-ci; en ne procédant pas personnellement au versement, elle avait pris le risque que l'avance de frais ne soit pas payée à temps; le fait qu'avant cet événement le paiement des factures n'avait jamais posé problème n'y changeait rien; finalement, A.________ n'expliquait pas la raison pour laquelle elle n'avait pas demandé une prolongation du délai au Tribunal de première instance. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de dépens, outre l'effet suspensif, d'annuler l'arrêt du 12 avril 2022 de la Cour de justice et le jugement du 26 mai 2021 du Tribunal de première instance, de dire que le délai pour le paiement de l'avance de frais doit être restitué et de renvoyer la cause audit tribunal, afin qu'il statue sur le fond, subsidiairement, de renvoyer le dossier à la Cour de justice pour une nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
L'Administration fiscale s'en rapporte à justice, tout en demandant à être, le cas échéant, exemptée des frais judiciaires. La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de l'arrêt attaqué. 
 
Par ordonnance du 6 juillet 2022, la Présidente de la IIe Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif. 
 
A.________ s'est encore prononcée en date du 19 août 2022. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 333 consid. 1). 
 
1.1. La voie de droit dépend du litige sur le fond, même si la décision attaquée repose exclusivement sur le droit de procédure (arrêt 2C_67/2022 du 17 février 2022 consid. 4.1 et les références citées). En l'occurrence, la procédure ayant mené à l'arrêt attaqué a pour origine une décision sur réclamation des autorités fiscales concernant les droits de succession, à la suite du décès de B.________, à savoir une cause de droit public (cf. art. 82 let. a LTF) qui ne tombe pas sous le coup d'une des exceptions mentionnées à l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est partant ouverte, ce qui entraîne l'irrecevabilité du recours constitutionnel subsidiaire formé par la recourante (cf. art. 113 LTF). La voie de recours erronée indiquée par celle-ci ne saurait lui nuire si son mémoire répond aux exigences légales du recours en matière de droit public (cf. ATF 138 I 367 consid. 1.1 et les arrêts cités).  
 
1.2. La recourante est l'administratrice d'office de la succession de feue B.________. Tant l'administrateur officiel que l'exécuteur testamentaire ont qualité pour ester en justice en leur propre nom dans les procès concernant la succession (arrêt 5C.171/2001 du 19 mars 2002 consid. 2b). En l'occurrence, il est dans l'intérêt de la succession que le Tribunal de première instance entre en matière sur le recours déposé à l'encontre de la décision sur réclamation en maitère de droits de succession et visant à réduire le montant de l'imposition. En conséquence, l'administratrice d'office, qui a participé à la procédure devant la Cour de justice, a qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF).  
 
1.3. Au surplus, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF), le présent recours dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par un tribunal supérieur de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), est recevable.  
 
1.4. Toutefois, la conclusion tendant à annuler le jugement du 26 mai 2021 du Tribunal de première instance est irrecevable. En effet, en raison de l'effet dévolutif complet du recours auprès de la Cour de justice (art. 67 et 69 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative [LPA/GE; RS/GE E 5 10]), l'arrêt de cette autorité se substitue aux prononcés antérieurs (ATF 136 II 539 consid. 1.2).  
 
2.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); il n'examine cependant la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante (cf. art. 106 al. 2 LTF); l'acte de recours doit, sous peine d'irrecevabilité, contenir un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques violés et préciser de façon circonstanciée en quoi consiste la violation (ATF 145 I 121 consid. 2.1; 142 V 577 consid. 3.2). Le recours peut faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 143 I 321 consid. 6.1). Pour statuer, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF
 
Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que la motivation de la décision critiquée soit insoutenable; encore faut-il que celle-ci se révèle arbitraire dans son résultat. En outre, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle adoptée par l'autorité intimée serait concevable, voire préférable (ATF 147 II 454 consid. 4.4; 145 II 32 consid. 5.1; 144 I 170 consid. 3 et les arrêts cités). 
 
3.  
La recourante invoque l'arbitraire de l'arrêt du 12 avril 2022 de la Cour de justice. Elle mentionne l'art. 16 al. 1 et 3 LPA/GE et soutient que le retard dans le paiement de l'avance de frais est à imputer à la banque, qui ne l'a pas contactée le jour de l'échéance du délai pour lui faire savoir que le solde du compte était insuffisant pour procéder au paiement de l'avance de frais et a directement appelé le fisc pour lui demander de lever la mainmise sur un autre compte. Cette façon de procéder, ajoutée aux perturbations de fonctionnement internes de la banque dues à la pandémie, constituerait un événement extraordinaire et imprévisible qui serait survenu en dehors de sa sphère d'activité. Elle pensait, de bonne foi, que le paiement avait pu être effectué. Elle estime également qu'en confirmant l'irrecevabilité de son recours, la Cour de justice a fait preuve de formalisme excessif. 
 
3.1.  
 
3.1.1. La procédure administrative devant les autorités cantonales n'est pas unifiée. L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de non-paiement relèvent du droit de procédure. Par conséquent, les cantons restent libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt 2C_797/2021 du 23 juin 2022 consid. 3.1 et les arrêts cités).  
 
L'art. 16 LPA/GE prévoit qu'un délai fixé par la loi ne peut pas être prolongé sauf cas de force majeure (al. 1). Le délai imparti par l'autorité peut être prolongé pour des motifs fondés si la partie en fait la demande avant son expiration (al. 2). La restitution pour inobservation d'un délai imparti par l'autorité peut être accordée si le requérant ou son mandataire a été empêché sans sa faute d'agir dans le délai fixé; la demande motivée doit être présentée dans les 10 jours à compter de celui où l'empêchement a cessé (al. 3). 
 
Selon l'art. 86 al. 1 LPA/GE, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables en fixant à cet effet un délai suffisant. Si l'avance n'est pas faite dans le délai imparti, elle déclare le recours irrecevable (art. 86 al. 2 LPA/GE). 
 
3.1.2. Le formalisme excessif (art. 29 al. 1 Cst.) est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 145 I 201 consid. 4.2.1; 142 IV 299 consid. 1.3.2). Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé.  
 
3.2. En l'espèce, la recourante ne conteste pas avoir omis de s'acquitter de l'avance de frais en faveur de l'autorité judiciaire dans le délai imparti. En outre, l'art. 86 LPA/GE ne prévoit pas l'octroi d'un délai supplémentaire si le versement n'a pas été opéré dans le délai (comme le fait l'art. 62 al. 3 LTF). Il s'ensuit qu'en confirmant le jugement du 26 mai 2021 du Tribunal de première instance, en tant que celui-ci déclarait irrecevable le recours pour cause de paiement tardif de l'avance de frais, les juges précédents n'ont pas fait preuve de formalisme excessif.  
 
3.3. Il reste à examiner si la Cour de justice a nié le cas de force majeure de façon soutenable. Selon la pratique cantonale genevoise, la recourante ne pouvait "être libérée de l'inobservation du délai" que si elle prouvait qu'aucune faute ne lui était imputable. Dans ce cadre, ladite pratique consiste à appliquer l'art. 16 al. 1 LPA/GE et la jurisprudence y relative par analogie. Selon celle-ci, tombent sous la notion de cas de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de la personne concernée et qui s'imposent à elle de façon irrésistible. A été considéré comme un cas de force majeure donnant lieu à la restitution d'un délai le fait qu'un détenu, qui disposait d'un délai de recours de trois jours, n'ait pu expédier son recours dans ce délai, du fait qu'il ne pouvait le poster lui-même et qu'en outre ce pli avait été soumis à la censure de l'autorité; le recourant qui se voyait impartir, par pli recommandé, un délai de quinze jours pour s'acquitter d'une avance de frais alors que le délai de garde pour retirer le pli en question était de sept jours, de sorte qu'il ne restait qu'une semaine au justiciable pour s'exécuter. En revanche, ne constituent pas des cas de force majeure une panne du système informatique du mandataire du recourant l'ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal ni une erreur de codage interbancaire commise par la banque de la société recourante (pour les références des arrêts cantonaux: cf. arrêt attaqué consid. 2b).  
 
3.4. Comme l'ont, à juste titre, indiqué les juges cantonaux, la recourante n'a pas tardé à requérir de la banque le versement de l'avance de frais. Cela étant, l'institution l'a informée, en date du 11 mars 2021, du fait que le compte était bloqué en raison de la " mainmise fiscale ", sans toutefois préciser que le montant disponible sur le compte ne couvrait pas la totalité du montant de l'avance de frais. Si la recourante a alors entrepris les démarches nécessaires auprès du fisc, afin de libérer la somme requise, elle ne s'est pas inquiétée, par la suite, du sort du paiement, comme son devoir de diligence l'imposait. Le fait que, jusqu'à ce moment-là, elle n'avait jamais rencontré de difficultés pour effectuer des paiements ne constitue pas une raison justifiant l'absence de contact avec la banque, afin de s'assurer que le versement litigieux avait été effectué. La recourante allègue encore qu'il était du devoir de la banque de la contacter, lorsque celle-ci a constaté que le montant disponible sur le compte était insuffisant: cet élément n'excuse toutefois pas l'inaction de l'intéressée. Ce d'autant plus que, de par sa fonction et profession d'avocate, elle connaissait l'importance du respect du délai et les conséquences d'un paiement tardif. De toute façon, il importe peu de savoir si ces événements doivent être qualifiés d'imprévisibles au sens de la jurisprudence cantonale. En effet, comme l'ont retenu de façon soutenable les juges précédents, que le retard dans le paiement de l'avance de frais soit imputable au plaideur lui-même, à son mandataire ou à la banque chargée du paiement, le comportement fautif doit être imputé à la partie elle-même (ATF 114 Ib 67 consid. 2 et 3).  
 
3.5. Il s'ensuit qu'en considérant que la recourante n'avait pas été empêchée d'agir en temps utile sans faute de sa part, les juges précédents ne sont pas tombés dans l'arbitraire.  
 
4.  
Au regard des considérants qui précèdent, le présent recours, traité comme recours en matière de droit public, doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il ne sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours, traité comme recours en matière de droit public, est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'Administration fiscale et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section. 
 
 
Lausanne, le 11 novembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : E. Jolidon