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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_998/2021  
 
 
Arrêt du 12 mai 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Beusch. 
Greffier : M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Maître Fabrice Kuhn 
et Maître Olivier Thévoz, Avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée, Schwarztorstrasse 50, 3003 Berne. 
 
Objet 
Taxe sur la valeur ajoutée (1er trimestre 2011 - 
4e trimestre 2014) : taxation par voie d'estimation, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 3 novembre 2021 (A-1558/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société A.________ Sàrl (ci-après : la contribuable), dont le siège est à U.________, a pour but « l'exploitation de snack et saveur du sud, principalement des spécialités orientales, le commerce d'une ou plusieurs boucheries-charcuterie et de tout assortiment de produits à base de viande hallal en Suisse, d'un service traiteur; importation et commerce de boissons et produits alimentaires; service de restauration, organisation de manifestations et exploitations de salles de banquets ». 
Elle est immatriculée au registre des assujettis TVA depuis le 10 février 2009. 
A l'occasion d'un contrôle dans les locaux de la contribuable en date des 17 et 18 août 2016 et portant sur les périodes fiscales s'étendant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2014, l'Administration fédérale des contributions (ci-après : l'AFC) a constaté des anomalies dans la comptabilité de la contribuable, relevant des erreurs dans la détermination du droit à la déduction de l'impôt préalable tant en faveur de la contribuable qu'en faveur de l'AFC. Elle a par conséquent reconstitué les chiffres d'affaires par voie d'estimation. 
Le 12 février 2019, suite à divers échanges de courriers, l'AFC a rendu une décision formelle pour les périodes fiscales précitées, fixant le montant des reprises TVA dues par la recourante à 40'752 fr. plus intérêts moratoires dès le 31 août 2013 (échéance moyenne). 
Par courrier du 15 mars 2019, la contribuable a déposé une réclamation contre la décision rendue le 12 février 2019 par l'AFC concluant, à l'annulation du point n° 1.1 de la notification d'estimation portant sur la correction d'impôt au titre du redressement du chiffre d'affaires pour 56'815 fr. et au remboursement par l'AFC du montant de 16'063 fr. dû à titre de correction de la déduction de l'impôt préalable (point n° 2.1 de la même notification d'estimation). 
Par décision sur réclamation du 12 février 2020, l'AFC a admis partiellement la réclamation de la contribuable et réduit le montant des reprises fiscales à 29'915 francs. Cette réduction résultait de l'application par l'AFC d'un coefficient d'expérience de marge brute pour le calcul estimatif du chiffre d'affaires du secteur restaurant-snack de 53,2% en lieu et place du taux de 60% retenu dans sa décision initiale du 12 février 2019. Elle résultait du tableau suivant : 
 
Période fiscale  
2011  
2012  
2013  
2014  
Impôt dû sur Ch.A.  
72'240  
80'547  
89'386  
81'330  
Corr. due au contrôle.  
11'178  
19'287  
15'984  
10'366  
Corr. due par décision.  
- 2'627  
- 3'029  
- 3'004  
- 2'177  
Total impôt dû  
80'791  
96'805  
102'366  
89'519  
 
 
 
 
 
Déd. de l'imp. préal. déclarée  
34'602  
31'938  
44'453  
54'527  
Corr. due au contrôle  
8'905  
8'433  
- 957  
- 318  
Corr. due par décision  
0  
0  
0  
0  
Total déd. imp. préal. autorisée  
43'507  
40'371  
43'495  
54'209  
Montant créance fisc. par pér.  
37'284  
56'434  
58'871  
35'310  
Diff. entre impôt dû et déclaré  
- 354  
7'825  
13'937  
8'507  
Total en faveur de l'AFC  
 
 
 
29'915  
 
 
 
B.  
Par recours du 16 mars 2020 auprès du Tribunal administratif fédéral, la contribuable a conclu à l'annulation de la décision du 12 février 2020. Plus spécifiquement, elle a conclu principalement à ce qu'il soit constaté qu'elle ne doit aucun complément de TVA pour les périodes fiscales 2011 à 2014 et qu'elle a droit à un remboursement de 16'063 fr. à titre de correction en sa faveur de la déduction de l'impôt préalable; subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée à l'AFC pour qu'elle redéfinisse un taux de marge applicable au secteur restaurant-snack de la recourante qui se situe, selon elle, nettement en dessous de 53,2%. 
 
C.  
Par arrêt du 3 novembre 2021, le Tribunal administratif fédéral a rejeté le recours que la contribuable avait interjeté contre la décision rendue le 12 février 2020 par l'AFC. L'estimation de l'AFC n'étant critiquable ni dans son principe ni quant à son résultat, la décision entreprise devait être confirmée. 
 
D.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la contribuable demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt rendu le 3 novembre 2021 par le Tribunal administratif fédéral et de constater qu'elle ne doit aucun supplément de TVA pour les périodes fiscale 2011 à 2014. Subsidiairement, elle conclut à que l'AFC redéfinisse, sur renvoi, un taux de marge qui se situe nettement au-dessous de 53,2%. 
Le Tribunal administrait fédéral renonce à déposer des observations sur recours. Après avoir signalé la prescription des créances d'impôt pour l'année 2011 et informé que le nouveau montant de la créance fiscale s'élevait à 30'269 fr. au lieu de 29'915 fr. en raison des effets de la prescription sur l'excédent d'impôt préalable en faveur de la contribuable, l'AFC conclut au rejet du recours sous suite de frais et dépens. La contribuable n'a pas répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), émanant du Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) ne tombant pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte. Déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF) par la destinataire de l'acte attaqué qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'il faut lui reconnaître la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF), le recours en matière de droit public est recevable. 
 
2.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (art. 95 let. a et b et 106 al. 1 LTF), sous réserve des exigences de motivation figurant à l'art. 106 al. 2 LTF. Il n'est toutefois pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui. Eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés, sauf en présence d'une violation du droit évidente (cf. ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 140 III 86 consid. 2; aussi arrêt 2C_630/2018 du 7 août 2018 consid. 3.1). 
 
3.  
Le Tribunal fédéral examine la conformité au droit fédéral et international de l'arrêt attaqué en se fondant sur les faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 142 II 355 consid. 6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 141 IV 369 consid. 6.3). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF). 
En l'occurrence, la recourante présente un exposé des faits de la cause sans se référer aux conditions de l'art. 97 al. 1 LTF. Une telle façon de procéder - en tant qu'elle remet en question les faits retenus dans l'arrêt attaqué comme devant une autorité d'appel - ne répond pas aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF et est, partant, inadmissible devant le Tribunal fédéral. Les diverses critiques que la recourante formule au travers de son mémoire de recours à l'encontre de l'établissement des faits opéré par le Tribunal administratif fédéral ne seront ainsi pas examinées (cf. arrêts 2C_110/2019 du 9 décembre 2019 consid. 2 et 2C_872/2015 du 1er août 2016 consid. 2). Le Tribunal fédéral traitera les violations du droit alléguées par la recourante à la seule lumière des faits constatés dans l'arrêt attaqué. 
 
4.  
Le litige porte sur le principe de la taxation par estimation, ainsi que sur l'estimation du chiffre d'affaires, en particulier sur la marge brute retenue par l'autorité intimée pour reconstituer ce chiffre pour les périodes fiscales allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2014. 
 
5.  
La loi fédérale du 12 juin 2009 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA, RS 641.20) et son ordonnance d'exécution du 27 novembre 2009 (OTVA, RS 641.201) sont entrées en vigueur le 1er janvier 2010. Le présent litige porte sur des périodes fiscales postérieures à cette date; la LTVA et l'OTVA sont par conséquent seules applicables, tant au fond qu'en ce qui concerne la procédure (cf. art. 112 et 113 LTVA). 
 
I. Prescription  
 
6.  
L'art. 42 al. 6 LTVA prévoit que le droit de taxation se prescrit dans tous les cas par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pendant laquelle la créance est née. La prescription du droit de taxer survenue en cours de procédure devant le Tribunal fédéral doit être prise en considération d'office (ATF 138 II 169 consid. 3.2. et 3.4; arrêt 2C_263/2020 du 10 décembre 2021 consid. 6 prévu pour la publication). En l'espèce la droit de taxation s'est éteint pour la période fiscale 2011. 
La paralysie complète du droit de fixer la créance fiscale prévue par l'art. 42 al. 6 LTVA vaut pour l'ensemble de la créance fiscale, c'est-à-dire non seulement pour la fixation de la part d'impôt soustraite, mais également pour la part d'excédent de l'impôt préalable relative à la période fiscale prescrite. En conséquence, la conclusion de l'autorité intimée tendant à ce que le montant de la créance fiscale soit fixé à 30'269 fr. est rejetée. 
 
II. Choix de la taxation par voie d'estimation  
 
7.  
 
7.1. Dans le système de la TVA prévaut le principe de l'auto-taxation : la taxation et le paiement de l'impôt sont en principe assurés par vis-à-vis de l'Administration fédérale dans le délai légal prévu, et en la forme prescrite, la créance fiscale (art. 71 al. 1 LTVA). Il doit tenir ses livres comptables de manière à ce que tous les faits importants pour la détermination de l'assujettissement, le calcul de l'impôt et celui de l'impôt préalable déductible puissent y être constatés aisément et de manière sûre (art. 70 al. 1 LTVA).  
 
7.2. La jurisprudence a déjà souligné que l'activité de restauration, telle que celle qui est proposée par le recourant, est une activité dans laquelle les contre-prestations se font le plus souvent par le biais de paiements en liquide. Dans ce cas de figure, il est attendu du contribuable qu'il tienne avec rigueur son livre de caisse en y inscrivant systématiquement les mouvements de liquidités et en en vérifiant quotidiennement le contenu. Celui qui exploite une entreprise dont l'activité présente des mouvements intensifs de liquidités et qui n'effectue pas de contrôle quotidien de sa caisse, ni ne tient avec rigueur un livre de caisse, accepte qu'il en résulte une imposition fixée par estimation (cf. arrêts 2C_885/2019 du 5 mars 2020 consid. 5.2; 2C_530/2019 du 23 janvier 2020 consid. 4.3.1; 2C_261/2019 du 15 août 2019 consid. 2.3.1 et les références; 2C_950/2015 du 11 mars 2016 consid. 4.3 et les références).  
 
7.3. Selon l'art. 79 al. 1 LTVA, si les documents comptables font défaut ou sont incomplets, ou que les résultats présentés par l'assujetti ne correspondent manifestement pas à la réalité, l'Administration fédérale procède, dans les limites de son pouvoir d'appréciation, à une taxation par estimation. L'Administration fédérale a le droit et le devoir de procéder à une estimation des chiffres d'affaires ainsi que de l'impôt et de l'impôt préalable dans le cadre de son pouvoir d'appréciation (taxation par voie d'estimation) dans deux hypothèses : premièrement, lorsque la personne assujettie n'a pas observé son devoir d'enregistrer et de conserver les pièces ou lorsque les éléments nécessaires à la taxation ne ressortent pas de ses livres comptables et documents ou lorsque la comptabilité, pour d'autres raisons (formelles), n'offre aucune garantie quant à sa véracité; deuxièmement, lorsque les résultats découlant de la comptabilité, même tenue correctement du point de vue formel, ne correspondent manifestement pas à la réalité (arrêts 2C_885/2019 du 5 mars 2020 consid. 5.3; 2C_530/2019 du 23 janvier 2020 consid. 4.1.3; 2C_595/2016 du 11 janvier 2017 consid. 3.2.3; 2C_1077/2012 du 24 mai 2014 consid. 2.2).  
 
7.4. Le Tribunal fédéral examine librement (art. 95 let. a LTF) si les conditions d'une taxation par estimation sont remplies (arrêts 2C_29/2021 du 5 octobre 2021 consid. 3.1.3; 2C_715/2013 du 13 janvier 2014 consid. 3.2).  
 
7.5. En l'espèce, l'instance précédente a constaté, avec l'autorité intimée, l'absence de journal de caisse, des irrégularités grossières du compte « Caisse » ainsi que des ajustements de plusieurs centaines de milliers de francs en relation avec les caisses enregistreuses. Ainsi, le solde du compte « Caisse » était souvent négatif, conduisant la fiduciaire de la recourante à comptabiliser à plusieurs reprises des ajustements dudit compte pour un montant total de 140'600 fr. au moyen de l'écriture « Caisse » (au débit) à « Chiffre d'affaires » (au crédit). De même, les relevés des émetteurs de cartes de crédit pour les ventes encaissées par le biais de ce moyen de paiement ne concordaient pas avec les recettes encaissées par cartes de crédit et enregistrées sur les caisses enregistreuses selon les bandes de contrôle de celles-ci. Ces deux éléments permettaient déjà à eux seuls de considérer la comptabilité de la recourante comme dénuée de force probante (comme l'a déjà jugé le Tribunal fédéral dans ses arrêts 2C_82/2014 du 6 juin 2014 consid. 4.2; 2A.693/2006 du 26 juillet 2007 consid. 4.2), si bien que l'Administration fédérale était fondée à procéder à une estimation du chiffre d'affaires de la société et l'instance précédente a confirmé à juste titre ce principe.  
 
7.6. Réitérant le grief qu'elle avait déjà formulé devant l'instance précédente, la recourante objecte que sa fiduciaire avait corrigé les problèmes de comptabilisation soulevés par l'AFC lors de son contrôle en procédant à des ajustements, dans le cadre ordinaire de l'établissement des comptes annuels, qui ont eu pour effet d'augmenter son chiffre d'affaires imposable et attesté que la comptabilité ajustée permettait d'avoir une « vision chronologique correcte et complète des transactions liées à la gestion des activités représentées par les ventes tant de la boucherie que du snack ». Cette objection est inopérante, comme l'a jugé à bon droit l'instance précédente. En effet, avec une telle argumentation, la recourante n'explique pas pourquoi le compte de caisse accusait un solde négatif (créditeur), alors que, par nature, son solde est nécessairement débiteur (arrêts 2C_885/2019 du 5 mars 2020 consid. 5.5; 2A.693/2006 du 26 juillet 2007 consid. 4.2). Au surplus, elle n'expose pas non plus concrètement en quoi l'instance précédente aurait violé l'interdiction de l'arbitraire en refusant d'accorder un caractère probant à une expertise privée ajustant le solde du compte « Caisse », alors que ces ajustements ne reposent sur aucune pièce comptable.  
Comme l'Administration fédérale était fondée à procéder à une estimation du chiffre d'affaires de la société pour ces motifs déjà, il n'est pas nécessaire d'examiner si la deuxième hypothèse prévue par l'art. 79 al. 1 LTVA est également remplie. 
 
III. Méthode de taxation par voie d'estimation  
 
8.  
Il reste à examiner si l'instance précédente pouvait confirmer l'estimation par l'autorité de taxation du chiffre d'affaires de la recourante. 
 
8.1. Le Tribunal fédéral examine avec un plein pouvoir de cognition si l'instance précédente a utilisé une méthode d'évaluation appropriée (arrêts 2C_29/2021 du 5 octobre 2021 consid. 3.1.3; 2C_812/2013/2C_813/2013 du 28 mai 2014 consid. 2.4.2; 2C_715/2013 du 13 janvier 2014 consid. 3.2). Toutefois, le Tribunal fédéral accorde aux autorités fiscales une certaine marge d'appréciation dans le choix de la méthode d'évaluation, raison pour laquelle le Tribunal fédéral s'impose une certaine retenue dans son contrôle à cet égard (cf., en matière d'impôts directs, les arrêts 2C_548/2020 du 3 mai 2021 consid. 3.2.3; 2C_495/2017 / 2C_512/2017 du 27 mai 2019 consid. 10.1, in : RDAF 2019 II p. 547).  
 
8.2. Lorsqu'elle procède à une estimation du chiffre d'affaires, l'autorité de taxation doit tenir compte des conditions particulières prévalant dans l'entreprise en cause; elle doit s'appuyer sur des données plausibles et aboutir à un résultat s'approchant le plus possible de la réalité, comme le prescrit l'art. 79 al. 1 LTVA en exigeant que l'Administration fédérale procède dans les limites de son pouvoir d'appréciation. Elle doit tenir compte de toutes les circonstances dont elle a connaissance. En ce sens, elle doit certes procéder à une estimation prudente, mais n'est cependant pas tenue, en cas de doute, de retenir les hypothèses les plus favorables à l'assujetti. Au contraire, il s'agit d'éviter que l'assujetti qui a rempli son devoir de collaboration ne soit tenu de payer des impôts plus élevés que celui dont un contrôle ultérieur de la comptabilité est impossible pour des motifs qui lui sont imputables. La violation de devoirs de procédure ne doit pas être récompensée (arrêts 2C_885/2019 du 5 mars 2020 consid. 6.1; 2C_530/2019 du 23 janvier 2020 consid. 4.1.4; 2C_595/2016 du 11 janvier 2017 consid. 3.2.4; 2C_1077/2012 du 24 mai 2014 consid. 2.3).  
 
8.3. En l'occurrence, l'instance précédente a constaté, en comparant le total des charges directes liées à l'achat de marchandises au total du chiffre d'affaires au net, que les coûts d'achat des marchandises pour chaque période contrôlée n'avaient pas varié. En conséquence, l'autorité intimée pouvait estimer les marges brutes séparément pour chacune des deux activités de la recourante, l'activité de boucheries-épicerie et l'activité de snack-restaurant : pour la première activité, sur un total de 36 types de produits vendus, la marge moyenne s'élevait 29,43%; pour la deuxième activité, un coefficient d'expérience fondé sur un échantillon national a été fixé à 60% dans un premier temps, puis, à 53,2%, pour tenir compte des critiques émises par la recourante dans sa réclamation. Enfin, l'addition des deux marges obtenues, soit celle de la partie boucheries-épicerie et celle de la partie snack-restaurant, sous la rubrique « Total marges brutes calculées » permettait d'établir le montant de marges brutes selon la comptabilité de la recourante. Après répartition du montant ainsi obtenu entre le taux normal et le taux réduit sur la base de la comptabilité de la recourante et addition des montants de TVA en découlant, l'autorité intimée était arrivée à un montant total d'impôt de 45'078 fr. 09. Réduit de l'impôt préalable supplémentaire en faveur de la recourante de 16'062 fr. 92, le montant de la créance fiscale totale pour les périodes 2011 à 2014 s'élevait finalement à 29'915 fr. 17.  
La recourante s'oppose à l'estimation confirmée par l'instance précédente. 
 
8.4. En premier lieu, invoquant l'art. 29 al. 2 Cst. et l'art. 29 PA, elle se plaint de son droit d'être entendue en ce que l'autorité précédente n'aurait pas expliqué pour quels motifs elle s'écartait des expertises produites en procédure, sinon parce qu'il s'agissait d'expertises privées (mémoire de recours, ch. 31 p. 11). Ce grief doit être rejeté.  
Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique et d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 145 I 167 consid. 4.1; 142 III 48 consid. 4.1.1). L'autorité peut renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités). 
En l'occurrence, la recourante indique elle-même que l'instance précédente a considéré que les expertises comportaient des incohérences et des inexactitudes. Il s'ensuit que l'instance précédente n'a pas écarté les expertises privées produites par la recourante uniquement parce qu'elles avaient une origine privée. Il ressort du reste de l'arrêt attaqué que cette dernière a examiné les rapports en cause (cf. arrêt attaqué consid. 4.3.1 et 4.3.2). 
 
8.5. La recourante soutient ensuite que l'instance précédente a mal apprécié le contenu des expertises, s'agissant notamment des prix de certaines marchandises, marchandises qui n'auraient au surplus pas été attribuées à la bonne activité pour calculer la marge. L'instance précédente aurait également critiqué, parmi d'autres éléments, le fait que les fiches de calcul établies par l'expert étaient basées sur une quantité de produits carnés supérieure aux pratiques et usages de la branche, considérant que ces quantités étaient par définition invérifiables. La recourante en conclut qu'aucun élément concret ne permet de douter que les constatations des deux experts seraient inexactes. En résumé, tous les griefs formulés par la recourante à l'encontre de la méthode d'estimation choisie par l'autorité intimée sont dirigés contre l'appréciation par l'instance précédente des preuves que sont les expertises déposées par la recourante.  
La recourante perd de vue à cet égard que l'appréciation des preuves par l'instance précédente ne peut faire l'objet que d'un grief de violation de l'interdiction de l'arbitraire. En effet, selon la jurisprudence, il n'y a lieu de sanctionner l'appréciation des preuves par l'instance précédente que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (cf. ATF 136 III 552 consid. 4.2). 
En l'occurrence, la recourante n'invoque pas l'interdiction de l'arbitraire dans l'appréciation des preuves ni n'expose concrètement en quoi l'instance précédente aurait apprécié de manière insoutenable les expertises produites, de sorte que ses griefs ne répondent pas aux exigences de motivation accrues en matière de violation des droits constitutionnels posées par l'art. 106 al. 2 LTF (cf. consid. 3). En conséquence, les critiques de la recourante relatives à l'estimation de la marge brute par l'instance précédente, qui ne concernent que l'appréciation des expertises, ne peuvent être examinées. Il s'ensuit que l'allégation du caractère manifestement erroné de la taxation par estimation ne peut pas l'être non plus, la recourante n'ayant pas formulé ni développé d'autres griefs à cet égard. Le recours doit par conséquent être rejeté sur ce point également. 
 
9.  
En confirmant le droit de procéder à une taxation par estimation et la méthode d'estimation du chiffre d'affaires de la recourante au moyen d'une marge brute de 53,2%, l'instance précédente n'a pas violé le droit fédéral. 
 
10.  
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission partielle du recours. L'arrêt rendu le 3 novembre 2021 est annulé en ce qui concerne la créance de l'autorité intimée pour la période fiscale 2011. Il est confirmé pour le surplus. 
N'obtenant que partiellement gain de cause, la recourante doit supporter une partie des frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas perçu de frais judiciaires auprès de l'autorité intimée puisque l'admission partielle du recours repose sur la survenance de la prescription durant la procédure devant le Tribunal fédéral (arrêt 2C_263/2020 du 10 décembre 2021 consid. 7). Pour la même raison, les dépens à allouer à la recourante (art. 68 al. 1 et 2 LTF) seront pris en charge par la Caisse du Tribunal fédéral. Etant donné que la prescription de la créance fiscale de la période fiscale 2011 n'était pas encore acquise au moment où l'arrêt attaqué a été rendu et que, sans la survenance de la prescription, le recours aurait également dû être rejeté pour la période fiscale 2011, il convient de renoncer à une nouvelle répartition des frais et indemnités en instance précédente (arrêts 2C_263/2020 du 10 décembre 2021 consid. 7; 2C_562/2020 du 21 mai 2021 consid. 14.2). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. L'arrêt rendu le 3 novembre 2021 est annulé en ce qui concerne la créance de l'autorité intimée pour la période fiscale 2011. Il est confirmé pour le surplus. 
 
2.  
Les frais de justice réduits, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Une indemnité de dépens réduite, arrêtée à 1'500 fr., à la charge de la Caisse du Tribunal fédéral, est allouée à la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, à l'Administration fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la valeur ajoutée, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 12 mai 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : Dubey