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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_142/2022  
 
 
Arrêt du 14 juillet 2022  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux Jametti, Juge présidant, Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Maîtres Olivier Peter et Valérie Debernardi, Avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Procédure pénale; refus de nomination d'un avocat d'office, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République 
et canton de Genève du 17 février 2022 
(ACPR/118/2022 - P/20110/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Figurent sur le casier judiciaire suisse de A.________ - ressortissant d'un pays africain né en 1997, sans domicile connu, ni emploi -, sept condamnations depuis le 11 mars 2019 pour des oppositions aux actes de l'autorité et des infractions à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20). 
Il a notamment été condamné le 16 juin 2021 par la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après : la Chambre pénale d'appel et de révision) à une peine privative de liberté de six mois, à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à 30 fr. et au paiement d'une amende de 600 fr., pour conduite sans permis, faux dans les certificats, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, lésions corporelles simples, dommages à la propriété, entrée illégale, séjour illégal, opposition aux actes de l'autorité, utilisation frauduleuse d'un ordinateur d'importance mineure et contravention à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants et les substances psychotropes (LStup; RS 812.121). 
Le 27 septembre 2021, le Tribunal d'application des peines et mesures (ci-après : TAPEM) a accordé à A.________ la liberté conditionnelle, le solde de la peine étant d'un mois et 28 jours; un délai d'épreuve d'une année a été fixé. 
 
B.  
A la suite d'une plainte pénale déposée le 6 octobre 2021, il est reproché à A.________ d'avoir, au domicile de la partie plaignante à Genève, le 5 octobre 2021, dérobé une bague Dolce Gabbana, une valise et un t-shirt de la marque Diesel; d'avoir persisté à séjourner, entre le 29 septembre 2021 et le 7 janvier 2022, sur le territoire suisse sans les autorisations et les ressources nécessaires pour ce faire; et d'avoir, le 7 janvier 2022, détenu 1,4 g de haschich destiné à sa consommation personnelle. Entendu par la police le 7 janvier 2022, le prévenu a expliqué avoir été hébergé par la partie plaignante à la suite de sa sortie de prison; celle-ci lui avait donné le t-shirt car il n'avait pas de vêtement. A.________ a indiqué avoir mis la bague, qui traînait, à son doigt et avoir pris la valise pour y mettre ses affaires quand la partie plaignante lui avait demandé de partir. Il a déclaré être disposé à rendre la bague. 
Par ordonnance pénale du 8 janvier 2022, le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après : le Ministère public) a reconnu A.________ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP), d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b LEI et de contravention à l'art. 19a ch. 1 LStup; la libération conditionnelle accordée le 27 septembre 2021 par le TAPEM a été révoquée et A.________ a été condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de trois mois, sous déduction d'un jour de détention avant jugement subi, ainsi qu'au paiement d'une amende de 100 francs. 
Le 13 janvier 2022, le prévenu a formé opposition contre cette ordonnance et requis l'octroi de l'assistance judiciaire, compte tenu de son indigence. Par ordonnance du jour suivant, le Ministère public a rejeté cette demande, considérant que la cause ne présentait pas de difficultés juridiques ou factuelles particulières; la cause était en outre de peu de gravité, la peine ne dépassant pas quatre mois. 
 
C.  
Le 17 février 2022, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après : la Chambre pénale de recours) a rejeté le recours déposé par A.________ contre cette décision. 
 
D.  
Par acte du 15 mars 2022, A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant à son annulation et à la désignation de l'avocate Valerie Debernardi en tant que défenseur d'office avec effet au 13 janvier 2022. A titre subsidiaire, il demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente. En tout état de cause, il sollicite la renonciation à la perception de frais judiciaires et à l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Le Ministère public a conclu au rejet du recours, en se référant à son ordonnance du 14 janvier 2022. Quant à l'autorité précédente, elle a renoncé à formuler des observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Conformément à l'art. 78 LTF, une décision relative à la défense d'office dans une cause pénale peut faire l'objet d'un recours en matière pénale. Le recourant, prévenu et auteur de la demande de désignation d'un défenseur d'office, a qualité pour recourir (art. 81 al. 1 LTF). Selon la jurisprudence, le refus de désigner un avocat d'office au prévenu est susceptible de lui causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF s'il devait s'avérer que tel n'est pas le cas (ATF 140 IV 202 consid. 2.2 p. 205). Pour le surplus, le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF
Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Invoquant en particulier l'art. 6 ch. 1 et 3 CEDH, ainsi que l'art. 14 par. 3 du Pacte ONU II, le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir considéré que, malgré ses antécédents, la cause serait de peu de gravité, dès lors notamment que la peine encourue ne dépasserait pas la limite fixée à l'art. 132 al. 3 CPP. Selon le recourant, la situation juridique en lien avec l'infraction de séjour illégal serait "loin d'être claire, au vu de [sa] situation administrative particulière" - laquelle devrait être clarifiée - et de ses liens avec la Suisse, où résidait sa fille de trois ans. 
 
2.1. A teneur de l'art. 132 al. 1 let. b CPP, la direction de la procédure ordonne une défense d'office si le prévenu ne dispose pas des moyens nécessaires et que l'assistance d'un défenseur est justifiée pour sauvegarder ses intérêts. La défense d'office aux fins de protéger les intérêts du prévenu se justifie notamment lorsque l'affaire n'est pas de peu de gravité et qu'elle présente, sur le plan des faits ou du droit, des difficultés que le prévenu seul ne pourrait pas surmonter (art. 132 al. 2 CPP). En tout état de cause, une affaire n'est pas de peu de gravité lorsque le prévenu est passible d'une peine privative de liberté de plus de quatre mois ou d'une peine pécuniaire de plus de 120 jours-amende (art. 132 al. 3 CPP).  
Les critères énoncés par l'art. 132 al. 1 let. b, 2 et 3 CPP reprennent largement la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d'assistance judiciaire rendue sur la base des art. 29 al. 3 Cst. et 6 ch. 3 let. c CEDH (ATF 143 I 164 consid. 3.5 p. 174). Si les deux conditions mentionnées à l'art. 132 al. 2 CPP doivent être réunies cumulativement, il n'est pas exclu que l'intervention d'un défenseur soit justifiée par d'autres motifs (comme l'indique l'adverbe "notamment"), en particulier dans les cas où cette mesure est nécessaire pour garantir l'égalité des armes ou parce que l'issue de la procédure pénale a une importance particulière pour le prévenu, par exemple s'il encourt une révocation de l'autorisation d'exercer sa profession ou s'il risque de perdre la garde de ses enfants (arrêt 1B_194/2021 du 21 juin 2021 consid. 3.1). La désignation d'un défenseur d'office peut ainsi s'imposer, selon les circonstances, lorsque le prévenu encourt une peine privative de liberté de quelques semaines à quelques mois si, à la gravité relative du cas, s'ajoutent des difficultés particulières du point de vue de l'établissement des faits ou des questions juridiques soulevées, qu'il ne serait pas en mesure de résoudre seul. En revanche, lorsque l'infraction n'est manifestement qu'une bagatelle, en ce sens que son auteur ne s'expose qu'à une amende ou à une peine privative de liberté de courte durée, la jurisprudence considère que l'auteur n'a pas de droit constitutionnel à l'assistance judiciaire (ATF 143 I 164 consid. 3.5 p. 174; arrêt 1B_591/2021 du 12 janvier 2022 consid. 2.1). 
Pour évaluer si l'affaire présente des difficultés que le prévenu ne pourrait pas surmonter sans l'aide d'un avocat, il y a lieu d'apprécier l'ensemble des circonstances concrètes. La nécessité de l'intervention d'un conseil juridique doit ainsi reposer sur des éléments objectifs - tenant principalement à la nature de la cause - et sur des éléments subjectifs, fondés sur l'aptitude concrète du requérant à mener seul la procédure (arrêt 1B_591/2021 du 12 janvier 2022 consid. 2.1 et les arrêts cités). 
S'agissant de la difficulté objective de la cause, à l'instar de ce qu'elle a développé en rapport avec les chances de succès d'un recours (cf. ATF 139 III 396 consid. 1.2 p. 397; 129 I 129 consid. 2.3.1 p. 135 s.), la jurisprudence impose de se demander si une personne raisonnable et de bonne foi, qui présenterait les mêmes caractéristiques que le requérant mais disposerait de ressources suffisantes, ferait ou non appel à un avocat (ATF 140 V 521 consid. 9.1 p. 537). La difficulté objective d'une cause est admise sur le plan juridique lorsque la subsomption des faits donne lieu à des doutes, que ce soit de manière générale ou dans le cas particulier. Pour apprécier la difficulté subjective d'une cause, il faut tenir compte des capacités du prévenu, notamment de son âge, de sa formation, de sa plus ou moins grande familiarité avec la pratique judiciaire, de sa maîtrise de la langue de la procédure, ainsi que des mesures qui paraissent nécessaires, dans le cas particulier, pour assurer sa défense, notamment en ce qui concerne les preuves qu'il devra offrir (arrêt 1B_591/2021 du 12 janvier 2022 consid. 2.1 et les arrêts cités). 
 
2.2. En l'occurrence, l'autorité précédente a rappelé, à juste titre, que le Ministère public, dans son ordonnance pénale, avait révoqué la libération conditionnelle accordée au recourant et fixé une peine d'ensemble à trois mois de peine privative de liberté. La motivation de cette ordonnance pénale permet également de considérer que le Ministère public ne paraît pas avoir omis de prendre en considération les antécédents du recourant au moment de fixer le type et la quotité de la peine (cf. la mention de son casier judiciaire et le rappel des principes entrant en considération pour procéder à cette appréciation). Aucun élément ne permet ainsi de retenir que, sur un plan objectif, la peine encourue - serait-elle aggravée par le tribunal de première instance - dépasserait le seuil fixé à l'art. 132 al. 3 CPP. Cette limite ne saurait d'ailleurs être atteinte en additionnant les différentes peines prononcées antérieurement à l'encontre du recourant notamment en lien avec des infractions en matière d'entrée illégale et/ou de séjour illégal en Suisse; elles concernent au demeurant des périodes de commission différentes (cf. les dates indiquées dans le casier judiciaire).  
La cour cantonale a ensuite examiné les circonstances particulières du cas d'espèce, retenant que les faits et dispositions légales étaient clairement circonscrits - ce que ne remet pas en cause le recourant - et ne présentaient aucune difficulté de compréhension ou d'application. Le recourant ne conteste pas non plus avoir pu s'exprimer à leur égard, ayant notamment reconnu avoir pris les biens litigieux tout en expliquant, selon son appréciation, le contexte entourant les faits dénoncés. Lors de cette audition, le recourant était en outre assisté par l'avocate Debernardi; or, celle-ci n'a alors pas requis sa désignation en tant qu'avocate d'office et/ou formulé des réquisitions de preuve, notamment afin d'étayer les déclarations du recourant relatives à une demande d'autorisation de séjour en cours depuis 2012 auprès de l'Office cantonal de la population et des migrants (ci-après : OCPM; cf. le procès-verbal p. 4); elle ne le fait d'ailleurs pas non plus devant le Tribunal fédéral. En tout état de cause, si une demande a été déposée (cf. dans ce sens les constatations du jugement de la Chambre pénale d'appel et de révision dans son arrêt du 16 juin 2021 consid. 5.4 p. 26), l'obtention du dossier administratif ne requiert aucune compétence particulière de la part du recourant. 
Au vu des considérations susmentionnées, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en confirmant le rejet de l'assistance judiciaire prononcé par le Ministère public le 14 janvier 2022. 
 
3.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (cf. art. 64 al. 1 LTF). Son recours n'était pas d'emblée dénué de chances de succès et, si la question de l'indigence a été laissée ouverte dans l'arrêt attaqué, la consultation du dossier permet de retenir l'indigence du recourant, lequel est sans emploi. Partant, cette requête doit être admise pour la procédure fédérale. Il y a lieu de désigner Me Valerie Debernardi en tant qu'avocate d'office du recourant pour la procédure fédérale et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF), ni alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est admise. Me Valerie Debernardi est désignée comme avocate d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la Caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 14 juillet 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Jametti 
 
La Greffière : Kropf