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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1158/2021  
 
 
Arrêt du 14 juillet 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales Jacquemoud-Rossari, Présidente, van de Graaf et Koch. 
Greffière : Mme Klinke. 
 
Participants à la procédure 
Ministère public du canton de Vaud, Le Procureur général adjoint, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
recourant, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par Me Benjamin Schwab, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Fixation de la peine (viol), 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 2 juillet 2021 
(n° 243 PE20.004825-VWT/SOS). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 2 mars 2021, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois a reconnu A.________ coupable de viol et l'a condamné à une peine privative de liberté de cinq ans, sous déduction de la détention subie avant jugement (ch. I). Son expulsion du territoire suisse à vie a été ordonnée (ch. IV). A.________ a été condamné au paiement immédiat à B.________ d'une indemnité pour tort moral de 10'000 fr., les conclusions civiles de cette dernière étant rejetées pour le surplus (ch. VI). 
 
B.  
Statuant sur appel de A.________ par jugement du 2 juillet 2021, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a partiellement admis en ce sens que la peine privative de liberté a été ramenée à quatre ans (sous déduction de la détention subie ainsi que d'un jour en raison des deux jours de détention subis dans des conditions illicites). Pour le surplus, le jugement de première instance a été confirmé. 
En substance, les faits retenus par la cour cantonale sont les suivants. 
 
B.a. B.________ a fait la connaissance de A.________ en 2018, dans un hôtel où ils avaient tous les deux été placés par les services sociaux. La première avait alors des problèmes orthopédiques et nécessitait de l'aide.  
 
Le 13 mars 2020, vers 17h00, A.________ a accueilli B.________ à son domicile à U.________. Il s'était engagé à l'héberger temporairement. Une fois arrivée dans l'appartement avec ses valises, B.________ a demandé à pouvoir se coucher sur le lit pour se reposer, ce que le premier a accepté. Par la suite, sans dire mot, il s'est dirigé vers elle, alors qu'elle était allongée sur son côté gauche et faisait face à la pièce. Il a alors tenté de l'embrasser. B.________ a esquivé en tournant la tête. Il l'a ensuite poussée de sa main sur son épaule droite de telle sorte qu'elle s'est retrouvée couchée sur le dos. Il s'est étendu à côté d'elle et a ôté son pantalon et son sous-vêtement d'une main, tout en exerçant une pression sur le thorax de sa victime pour la maintenir sur le dos avec son autre avant-bras. B.________ lui a demandé répétitivement d'arrêter, en le suppliant par les termes suivants: "s'il te plaît, s'il te plaît, ne me fais pas ça, je suis déjà passée par là". Toujours sans dire mot et faisant fi des supplications, A.________ s'est alors placé à califourchon sur elle. Il a déboutonné et descendu la fermeture éclair de son pantalon tandis que la victime se débattait. Après avoir baissé son pantalon, il a tenté de faire de même avec la culotte de la victime, qu'elle a essayé de retenir. La culotte s'est déchirée. A.________ a alors tenté d'écarter les jambes de B.________, qui s'est débattue en le repoussant de ses mains et en hurlant. Il a alors pris ses bras pour les mettre au-dessus de sa tête et lui a écarté les cuisses par la force des genoux. Il s'est ensuite décalé vers le bas pour lui lécher le vagin dans l'intention de le lubrifier. A ce moment-là, B.________ a tenté de le repousser avec ses mains qu'il venait de lâcher et il lui a à nouveau saisi les bras. Elle a crié encore plus fort dans l'espoir que le voisinage l'entende. A.________ a alors lâché une des mains de la victime au moment de la pénétrer et a placé son autre main sur sa bouche pour étouffer les cris. Voyant qu'elle ne pouvait plus rien faire, puisqu'il l'avait pénétrée, B.________ a cessé de crier et A.________ a retiré la main de sa bouche. Elle est restée immobile tandis qu'il faisait quelques allers-retours dans son vagin puis s'est retiré sans éjaculer. Alors que la victime voulait se rhabiller, A.________ l'a tirée en arrière sur le lit pour qu'elle reste allongée à côté de lui. A sa demande, elle lui a encore montré les cicatrices sur son sein et elle a ensuite pu se rhabiller.  
 
Il ressort de plusieurs certificats médicaux que, depuis les faits, B.________ souffre de crises d'agoraphobie et d'un syndrome de stress post-traumatique. Elle a déposé plainte et s'est constituée partie civile le 14 mars 2020. 
 
B.b. Né en Syrie en 1971, pays dont il est ressortissant, A.________ y a effectué sa scolarité et a suivi une formation en électricité et en agriculture. Il a quitté son pays en raison du conflit qui a causé la mort d'une partie de sa famille. Il est arrivé en Suisse en décembre 2014 comme réfugié. Affecté au canton de Vaud, il y a vécu depuis lors et a travaillé dans diverses activités non qualifiées. Au moment des faits, il était sans emploi et inscrit à l'ORP. Il percevait 1'000 fr. des services sociaux. Il n'a pas de famille en Suisse. Célibataire, il n'a pas d'enfant. Son permis de séjour en Suisse n'a pas été révoqué.  
 
B.c. Selon l'extrait de son casier judiciaire, A.________ a été condamné le 1er septembre 2016 à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, avec sursis durant deux ans (révoqué en 2017) et une amende de 300 fr. pour voies de fait, dommages à la propriété et menaces. Le 16 décembre 2016, il a été condamné à une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr. l'unité, pour conduite d'un véhicule automobile sans le permis de conduire requis. Le 19 décembre 2017, une peine privative de liberté de 18 mois a été prononcée pour lésions corporelles simples, violation de domicile et dénonciation calomnieuse. L'expulsion de A.________ a été ordonnée pour une durée de trois ans.  
 
C.  
Le Ministère public du canton de Vaud forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement cantonal s'agissant de la peine. Il conclut à la réforme du jugement en ce sens que l'appel de A.________ est rejeté et le jugement de première instance confirmé, les frais d'appel étant mis à la charge du prénommé. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
En application de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF, l'accusateur public a qualité pour former un recours en matière pénale. 
 
Savoir quelle autorité au sein d'un canton constitue l'accusateur public est une question qui doit se résoudre à l'aune de la LTF. Lorsqu'il existe un ministère public compétent pour la poursuite de toutes les infractions sur l'ensemble du territoire, seule cette autorité aura la qualité pour recourir au Tribunal fédéral. En revanche, savoir qui, au sein de ce ministère public, a la compétence de le représenter est une question d'organisation judiciaire, soit une question qui relève du droit cantonal (ATF 142 IV 196 consid. 1.5.2; arrêt 6B_1308/2020 du 5 mai 2021 consid. 1 non publié in ATF 147 IV 241). 
 
Dans le canton de Vaud, l'art. 27 al. 2 de la loi du 19 mai 2009 sur le Ministère public (LMPu/VD; RS/VD 173.21) dispose que le procureur général ou ses adjoints sont seuls compétents pour saisir le Tribunal fédéral. 
 
En l'espèce, le mémoire de recours est signé par le Procureur général adjoint du canton du Vaud. Le recours est donc recevable. 
 
2.  
Le recourant conteste la quotité de la peine infligée, qu'il juge exagérément clémente et insuffisamment motivée. Il conclut au prononcé d'une peine privative de liberté de cinq ans, comme celle fixée en première instance. 
 
2.1.  
 
2.1.1. Selon l'art. 190 al. 1 CP, celui qui, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel, sera puni d'une peine privative de liberté de un à dix ans.  
 
2.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).  
 
La culpabilité doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. A ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6 p. 66 s. et les références citées). Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation de la peine. Le Tribunal fédéral n'intervient que lorsque l'autorité cantonale a fixé une peine en dehors du cadre légal, si elle s'est fondée sur des critères étrangers à l'art. 47 CP, si des éléments d'appréciation importants n'ont pas été pris en compte ou, enfin, si la peine prononcée est exagérément sévère ou clémente au point de constituer un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 p. 319). L'exercice de ce contrôle suppose que le juge exprime, dans sa décision, les éléments essentiels relatifs à l'acte ou à l'auteur dont il tient compte, de manière à ce que l'on puisse constater que tous les aspects pertinents ont été pris en considération et comment ils ont été appréciés, que ce soit dans un sens aggravant ou atténuant (art. 50 CP; ATF 144 IV 313 consid. 1.2 p. 319). Le juge peut passer sous silence les éléments qui, sans abus du pouvoir d'appréciation, lui apparaissent non pertinents ou d'une importance mineure. La motivation doit justifier la peine prononcée, en permettant de suivre le raisonnement adopté. Un recours ne saurait toutefois être admis simplement pour améliorer ou compléter un considérant lorsque la décision rendue apparaît conforme au droit (arrêts 6B_1498/2020 du 29 novembre 2021 consid. 4.1.1 non publié in ATF 147 IV 505; cf. ATF 144 IV 313 consid. 1.2 p. 319; 136 IV 55 consid. 5.6 p. 61). 
 
2.2. La cour cantonale a considéré que les éléments retenus par les premiers juges étaient adéquats. Elle a ainsi relevé l'appréciation selon laquelle l'intimé avait profité de la situation de détresse et de la confiance de sa victime pour arriver à ses fins, précisant qu'il savait que la victime avait des problèmes psychologiques et physiques, ainsi que des soucis de logement. Le tribunal de première instance avait en outre retenu à charge que l'intimé n'avait eu de cesse de nier les faits incriminés et de changer de version, qu'il avait dénigré la victime, qu'il n'avait fait preuve d'aucun remords ni d'aucune prise de conscience et qu'il n'avait eu aucun mot en faveur de sa victime, qu'il avait accablée jusqu'à la fin des débats en bafouant sa dignité tout au long de l'instruction. Les antécédents de l'intimé ont également été pris en compte. A décharge, sa situation personnelle difficile a été évoquée.  
 
La cour cantonale a néanmoins considéré que la peine privative de liberté de cinq ans paraissait un peu trop lourde car, dans sa quotité, elle correspondait plutôt à la sanction d'un viol aggravé au sens de l'art. 190 al. 3 ou 200 CP. Or, aucune de ces circonstances aggravantes n'était réalisée en l'espèce. L'intimé avait usé de sa force physique sans cruauté particulière. Retenant que la culpabilité n'en restait pas moins lourde, elle a arrêté à quatre ans la quotité de la peine privative de liberté. 
 
2.3. La cour cantonale a exposé les éléments essentiels relatifs à l'acte et à l'auteur dont elle a tenu compte afin de fixer la peine. Cette motivation est suffisante dès lors que l'on peut constater les aspects qui ont été jugés pertinents et pris en considération dans un sens aggravant ou atténuant. Le simple fait que la motivation concernant la peine tienne en une vingtaine de lignes ne saurait emporter une violation de l'art. 50 CP.  
 
En tant que le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir établi un parallèle avec des sanctions concernant d'autres infractions pour qualifier la culpabilité, d'avoir omis certains éléments pertinents pour la fixation de la peine et de s'être écartée de celle fixée en première instance, ses griefs relèvent de la critique relative à la fixation de la peine examinée infra.  
 
2.4. Le recourant se plaint du fait que la cour cantonale aurait qualifié la culpabilité de l'intimé de "lourde" plutôt que de "très lourde", contrairement aux juges de première instance, et aurait, à tort, tenu compte de l'absence de cruauté particulière ou d'action en commun, alors que ces éléments relèvent de l'infraction de viol aggravé, dont la fourchette est par nature différente.  
 
L'autorité d'appel dispose d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (cf. art. 398 al. 2 CPP), sur les points attaqués (art. 404 al. 1 CPP), en l'espèce notamment la quotité de la peine prononcée en première instance dans le cadre de l'appel de l'intimé. L'autorité précédente devait ainsi examiner librement, en sa qualité de juridiction d'appel, les critères posés par l'art. 47 CP et fixer la peine en conséquence. Elle n'avait pas à expliquer spécifiquement pour quels motifs elle prononçait une peine différente de celle ordonnée en première instance. S'il était certes peu approprié d'évoquer les sanctions prononcées en cas de viol aggravé (cf. art. 190 al. 3 et 200 CP) en relevant que ces circonstances aggravantes n'étaient pas réalisées en l'espèce, la cour cantonale ne s'y est référée que pour qualifier la quotité de la peine arrêtée par le jugement de première instance d'un peu trop sévère. Elle n'y a pas fait référence pour fixer à nouveau la peine et n'en a pas tenu compte comme élément à décharge. Le recourant ne démontre ainsi pas que la cour cantonale se serait fondée sur des critères étrangers à l'art. 47 CP
 
Le recourant reproche également à la cour cantonale de ne pas avoir tenu compte du comportement de l'intimé lors des débats d'appel, au cours desquels il avait notamment prétendu que la plaignante l'avait violé, et non l'inverse, ses déclarations ayant engendré une crise de décompensation de la victime qui a dû quitter la salle d'audience. Or ces propos et réaction figurent expressément dans le jugement entrepris (cf. pp. 3 et 4) et la cour cantonale a tenu compte, en se référant au raisonnement des premiers juges, du fait que l'intimé n'avait eu de cesse de nier les faits incriminés, de dénigrer la plaignante, l'ayant accablée jusqu'à la fin des débats en bafouant sa dignité tout au long de l'instruction. Ces éléments pertinents pour fixer la quotité de la peine n'ont dès lors pas été omis, étant rappelé que le comportement spécifique de l'intimé lors des débats ne devait pas nécessairement apparaître dans le considérant relatif à la fixation de la peine, dès lors que le jugement forme un tout et qu'on admet que le juge garde à l'esprit l'ensemble des éléments qui y figurent (cf. notamment arrêts 6B_38/2021 du 14 février 2022 consid. 5.3.1; 6B_906/2019 du 7 mai 2020 consid. 2.3; 6B_111/2015 du 3 mars 2016 consid. 2.7, non publié in ATF 142 IV 196). La cour cantonale n'a pas ignoré un élément pertinent pour fixer la quotité de la peine mais l'a apprécié librement, ainsi qu'elle est autorisée à le faire. 
 
Au vu des éléments retenus à charge et à décharge dans les circonstances d'espèce, la fixation d'une peine privative de liberté de quatre ans, au dessous de la moitié de la fourchette légale, peut certes apparaître clémente, elle ne l'est toutefois pas exagérément au point de constituer un abus du large pouvoir d'appréciation accordé à la cour cantonale. Le grief de violation de l'art. 47 CP est infondé. 
 
3.  
Le recours doit être rejeté. Conformément à l'art. 66 al. 4 LTF, il sera statué sans frais. Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimé qui n'a pas été invité à procéder (art. 68 al. 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 14 juillet 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Klinke