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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_531/2021  
 
 
Arrêt du 18 juillet 2022  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Hohl, Présidente, Kiss, Niquille, Rüedi et May Canellas. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participantes à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Thierry Sticher, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Poste CH SA, 
représentée par Me Valentine Gétaz Kunz, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
contrat de travail; notion d'établissement en cas de licenciement collectif (art. 335d CO), 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 2 septembre 2021 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (P318.048912-210689 438). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. En avril 2001, A.________ (ci-après: la travailleuse, la demanderesse ou la recourante) a été engagée auprès de Poste CH SA (ci-après: l'employeuse, la défenderesse ou l'intimée).  
À partir du 1er janvier 2007, elle a exercé la fonction de collaboratrice de vente pour l'unité " RéseauPostal et vente " de l'employeuse au sein de l'office de poste sis à U.________. Cette unité, ultérieurement renommée " RéseauPostal ", gère tous les offices de poste, appelés " filiales " et généralement gérés par un " responsable filiale ". Les filiales sont regroupées en secteur de filiales. 
 
A.b. En 2015, les contrats de travail des collaborateurs de l'employeuse ont, suite à l'entrée en vigueur d'une nouvelle convention collective de travail, été modifiés avec effet au 1 er janvier 2016. La modification visait une plus grande flexibilité des horaires de travail.  
 
A.c. Le 29 mai 2015, la travailleuse a signé un nouveau contrat pour un taux d'activité de 40 %. En 2015, elle a perçu un revenu mensuel brut de 2'299 fr. 15, versé treize fois l'an.  
 
A.d. Le 15 décembre 2017, la direction du secteur de filiales de V.________ a tenu une séance avec le responsable de la filiale de U.________ et l'ensemble des collaborateurs de celle-ci. Cette séance avait pour but de planifier les vacances pour l'année 2018 et de réorganiser les services de la filiale afin de mettre en place des horaires flexibles et variables pour tenir compte des besoins de la clientèle. Lors de cette séance, la travailleuse a indiqué qu'en raison de ses obligations familiales, elle n'était pas en mesure d'accepter le nouvel horaire flexible proposé qui impliquait de travailler parfois le mercredi.  
Le 20 décembre 2017, un entretien personnel a eu lieu avec la travailleuse afin d'essayer de trouver une solution. 
Le 16 janvier 2018, un second entretien a eu lieu. 
 
A.e. Par courrier du 16 janvier 2018, l'employeuse a résilié le contrat de la travailleuse pour le 30 avril 2018, sous réserve de modification, celle-ci ayant la possibilité d'accepter un nouveau contrat qui précisait que, " soumise au modèle des horaires de travail selon plan d'affectation[, elle] fourni[rai]t le temps de travail convenu conformément à la planification des affectations, dans le cadre de la CCT Poste CH SA ".  
Le 24 janvier 2018, la travailleuse s'est opposée à son licenciement, au motif que celui-ci était discriminatoire envers les femmes et ne respectait pas les procédures en lien avec les licenciements collectifs et, partant, qu'il était abusif. 
Le 9 février 2018, l'employeuse a contesté le caractère discriminatoire et le non-respect des conventions ou de la loi fédérale du 13 mars 1964 sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (LTr; RS 822.11). 
 
B.  
Après que la conciliation a échoué (complètement selon l'art. 105 al. 2 LTF), la travailleuse a déposé sa demande auprès du Tribunal de prud'hommes de l'arrondissement de l'Est vaudois le 13 novembre 2018. En substance, elle a conclu, à titre préjudiciel, à ce qu'il soit constaté que la notion d'établissement au sens de l'art. 335d CO correspondait, au sein de l'employeuse, à l'unité " RéseauPostal " prise au niveau suisse et à ce que l'employeuse soit condamnée à lui verser la somme de 29'889 fr. à titre de licenciement abusif. 
Selon la défenderesse, la filiale litigieuse est une filiale dite en exploitation propre, plus précisément une filiale avec conduite qui est gérée par un responsable de filiale. Selon elle, chacune de ses filiales, avec ou sans conduite, constitue un établissement. 
Sur requête des parties, la procédure a été limitée à la condition de l'établissement prévue à l'art. 335d al. 1 CO. Par jugement du 3 juillet 2019, le tribunal a dit qu'au sein de l'employeuse, la filiale en exploitation propre devait être considérée comme un établissement selon cette disposition. 
Par arrêt du 18 octobre 2019, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a déclaré irrecevable l'appel interjeté par la travailleuse à l'encontre de ce jugement. 
Par jugement du 1 er avril 2021, le tribunal a rejeté la demande.  
Par arrêt du 2 septembre 2021, la Cour d'appel civile a rejeté l'appel formé par la travailleuse contre ce jugement. 
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui a été notifié le 17 septembre 2021, la demanderesse a formé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral le 13 octobre 2021. En substance, elle conclut, avec requête d'effet suspensif, à ce que l'arrêt entrepris soit annulé et, principalement, à ce que la cause soit renvoyée à la cour cantonale pour instruction complémentaire et, subsidiairement, à ce que l'arrêt attaqué soit réformé, en ce sens qu'il lui soit octroyé une somme de 29'889 fr. à titre d'indemnité pour licenciement abusif. 
L'intimée conclut au rejet du recours et de la requête d'effet suspensif. 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt et s'en remet à justice quant à la requête d'effet suspensif. 
Par ordonnance présidentielle du 10 novembre 2021, la requête d'effet suspensif a été rejetée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence, notamment sa compétence matérielle et fonctionnelle (art. 29 al. 1 LTF). 
Depuis le 26 juin 2013, La Poste Suisse SA est une société anonyme de droit public qui regroupe trois sociétés, dont l'employeuse. Les rapports de travail des collaborateurs de l'employeuse sont soumis aux art. 319 ss CO, ainsi qu'à la convention collective de travail Poste CH SA (ci-après: la CCT) applicable pour les collaborateurs membres d'un syndicat signataire et, pour les autres collaborateurs, sur la base du contrat individuel de travail (art. 1.1 CCT). Les différends entre l'employeur et les collaborateurs sont de la compétence des tribunaux civils ordinaires (art. 2.31 al. 2 CCT). 
Aux termes du contrat individuel de travail de la travailleuse, la CCT fait partie intégrante dudit contrat (complètement selon l'art. 105 al. 2 LTF). Les tribunaux ordinaires sont donc compétents pour statuer sur le présent litige, conformément à l'art. 2.31 al. 2 CCT. Par conséquent, la Ire Cour de droit civil est compétente fonctionnellement pour statuer sur recours contre les décisions rendues en première instance par le Tribunal des prud'hommes et en deuxième instance par la Cour d'appel civile. 
 
2.  
Interjeté dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 et art. 45 al. 1 LTF) par la demanderesse, qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur appel par le tribunal supérieur du canton de Vaud (art. 75 LTF) dans une affaire civile de droit du travail (art. 72 al. 1 LTF) dont la valeur litigieuse dépasse 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est en principe recevable. 
 
3.  
 
3.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1). 
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
Le complètement de l'état de fait ne relève pas de l'arbitraire; un fait non constaté ne peut pas être arbitraire, c'est-à-dire constaté de manière insoutenable. En revanche, si un fait omis est juridiquement pertinent, le recourant peut obtenir qu'il soit constaté s'il démontre qu'en vertu des règles de la procédure civile, l'autorité précédente aurait objectivement pu en tenir compte et s'il désigne précisément les allégués et les offres de preuves qu'il lui avait présentés, avec référence aux pièces du dossier (art. 106 al. 2 LTF; ATF 140 III 86 consid. 2; arrêt 4A_53/2021 du 21 septembre 2021 consid. 2.1 et les arrêts cités). 
 
3.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2). Il n'est en revanche pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4).  
 
3.3. La recourante sollicite le complètement de l'état de fait sur quatre points. Bien qu'elle fasse référence aux pièces produites, elle ne désigne pas les allégués correspondants que contiendraient ses écritures, de sorte que la Cour de céans ne peut constater si la cour cantonale aurait pu ou non tenir compte des faits litigieux.  
Son grief doit ainsi être déclaré irrecevable. 
 
4.  
La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir retenu que l'office de poste de U.________ était un établissement au sens de l'art. 335d CO. Selon elle, c'est au contraire l'unité " RéseauPostal " s'étendant à toute la Suisse qui constitue un tel établissement, de sorte que le seuil prévu par cette disposition est potentiellement atteint et que la procédure en matière de licenciement collectif pourrait être applicable. Dans la mesure où dite procédure n'a pas été respectée, elle considère que son licenciement pourrait être abusif conformément à l'art. 336 al. 2 let. c CO. Elle fait par ailleurs grief à la cour cantonale d'avoir pris en compte la jurisprudence européenne en interprétant l'art. 335d CO
 
4.1. Selon l'art. 336 al. 2 let. c CO, est abusif le congé donné par l'employeur sans respecter la procédure de consultation prévue par l'art. 335f CO pour les licenciements collectifs.  
L'art. 336a al. 3 CO dispose qu'en cas de congé abusif au sens de l'art. 336 al. 2 let. c CO, l'indemnité ne peut s'élever au maximum qu'au montant correspondant à deux mois de salaire du travailleur. L'art. 2.30.6.3 al. 2 CCT prévoit toutefois qu'en cas de licenciement abusif, l'indemnité maximale correspond à douze salaires mensuels. 
 
4.2. La cour cantonale a, d'une part, relevé que les premiers juges s'étaient en premier lieu fondés sur le droit suisse pour apprécier la notion d'établissement, en examinant tout d'abord l'historique de l'adoption de la disposition légale topique puis la jurisprudence fédérale et les auteurs de doctrine suisse et qu'ils ne se sont inspirés de la jurisprudence européenne qu'à titre subsidiaire et afin de conforter leur résultat. Par ailleurs, la demanderesse n'avait pas expliqué de manière convaincante la raison pour laquelle le tribunal n'aurait pas pu s'inspirer de la jurisprudence européenne, le fait que la directive européenne sur laquelle la législation suisse s'était basée ait été modifiée à deux reprises ne permettant pas d'exclure d'emblée un regard croisé avec dite jurisprudence.  
D'autre part, la cour cantonale a considéré que le critère déterminant pour que la filiale litigieuse pût être qualifiée d'établissement au sens de l'art. 335d CO était qu'elle pût bénéficier d'une certaine marge de manoeuvre. Or, tel était le cas en l'espèce, dans la mesure où la filiale disposait d'un ensemble de travailleurs, d'une structure organisationnelle et de compétences propres et où elle pouvait gérer seule, en vue d'exécuter ses tâches, la majeure partie de ses affaires, comme la gestion courante de ses employés, les commandes en matériel, la comptabilité de l'office et la sécurité. N'était en outre pas décisif au regard de la notion d'établissement le fait que la filiale litigieuse ne bénéficiait pas d'une entière autonomie, qu'elle dépendait sur plusieurs points de l'unité " RéseauPostal ", qu'elle faisait partie d'un groupe de filiales et qu'il existait, dans la mesure où certains employés pouvaient être amenés à en remplacer d'autres dans d'autres filiales, un rapport de collaboration entre les différentes filiales de l'intimée. La cour cantonale a retenu qu'une autonomie juridique, financière ou administrative n'était pas nécessaire et que la filiale litigieuse était une structure organisée, dotée en personnel, en moyens matériels et immatériels qui permettaient d'accomplir les objectifs de travail et que c'était donc à bon droit que les premiers juges avaient retenu qu'elle constituait un établissement au sens de la disposition précitée. 
Au vu du fait que la filiale litigieuse n'employait, au moment du licenciement de la travailleuse, que six travailleurs et un apprenti, la cour cantonale a jugé que les conditions prévues à l'art. 335d CO n'étaient pas réalisées, que l'employeuse n'avait dès lors pas besoin de suivre la procédure de licenciement collectif et que le congé n'était pas abusif au sens de l'art. 336 al. 2 let. c CO. 
 
4.3. La recourante soutient, d'une part, qu'il ne serait pas admissible de se référer à des jurisprudences étrangères rendues après l'adoption d'une disposition légale, se réfère à l'ATF 145 III 405 ( recte : 409) et considère que la cour cantonale s'est inspirée de deux arrêts européens postérieurs à l'adoption du paquet Eurolex selon lesquels le fait que les licenciements ne sont pas décidés par le directeur de l'unité de production n'est pas pertinent pour qualifier celle-ci d'établissement au sens de la directive européenne applicable.  
D'autre part, elle considère, premièrement, que, pour respecter le but et l'esprit de l'art. 335d CO, le critère de proximité géographique des différentes succursales doit être pris en compte pour qualifier l'ensemble, formant un réseau, d'établissement. Elle invoque qu'il ressortirait de l'instruction qu'il n'existait pas, sauf très rare exception, d'office de poste dépassant le seuil de 20 personnes et que l'interprétation de la cour cantonale aurait pour conséquence de priver l'ensemble du personnel des offices de l'intimée de la possibilité de se défendre collectivement pour atténuer les effets sociaux, dans un contexte local, du licenciement d'un grand nombre de travailleurs. Il serait par ailleurs contraire au principe d'égalité prévu à l'art. 8 Cst. de dire que la procédure en matière de licenciement collectif s'appliquerait aux seuls offices de poste employant plus de 20 personnes à l'exclusion de tous les autres. 
Deuxièmement, la recourante soutient qu'il faut prendre en compte la dépendance structurelle d'entités afin de déterminer si elles constituent conjointement un établissement. Tel serait le cas en l'espèce au vu du fait que la filiale litigieuse ne peut fonctionner seule, dans la mesure où la distribution du courrier et des colis n'est possible que par le réseau de triage, de distribution et d'acheminement qui ne s'effectue pas à la filiale. 
Troisièmement, la recourante considère que l'impossibilité pour la filiale de gérer le nombre de son personnel, d'établir le contrat ou le salaire, de fixer l'horaire de son équipe, de choisir les locaux, de commander librement le matériel, de définir des objectifs et d'avoir sa propre comptabilité démontre qu'une filiale ne dispose pas de l'autonomie ou de l'indépendance structurelle suffisante pour être considérée comme un établissement propre. 
Partant, la recourante argue que c'est l'ensemble du " RéseauPostal " qui doit être qualifié d'établissement au sens de l'art. 335d CO
 
4.4. En tant que l'intimée reproche à la cour cantonale de ne pas avoir examiné et motivé la question d'un motif non inhérent à la personne - soit une autre condition de l'art. 335d CO -, sans même se prévaloir de façon motivée (art. 106 al. 2 LTF) de la violation de l'art. 29 al. 2 Cst., son grief est irrecevable. L'intimée n'a pas davantage invoqué que la cour cantonale aurait violé son droit d'être entendue en n'examinant pas la question de savoir si l'art. 336a CO serait de nature absolument impérative au sens de l'art 361 al. 1 CO et si la CCT ne saurait donc y déroger; la Cour de céans ne saurait donc examiner cette question (art. 42 al. 2 LTF).  
Sur requête des parties, la procédure a été limitée, en première instance déjà, à la question de savoir si l'office de U.________ est un établissement au sens de l'art. 335d CO (cf. supra consid. B). La Cour de céans doit ainsi se limiter à l'examen de cette question.  
 
5.  
Seule peut et doit être examinée ici la question de savoir si l'office de poste de U.________, filiale de l'intimée, est un établissement au sens de l'art. 335d CO
 
5.1. Aux termes de l'art. 335d CO, on entend par licenciement collectif les congés donnés dans une entreprise par l'employeur dans un délai de 30 jours pour des motifs non inhérents à la personne du travailleur et dont le nombre est au moins égal à 10 dans les établissements employant habituellement plus de 20 et moins de 100 travailleurs (ch. 1), de 10 % du nombre des travailleurs dans les établissements employant habituellement au moins 100 et moins de 300 travailleurs (ch. 2) ou égal à 30 dans les établissements employant habituellement au moins 300 travailleurs (ch. 3).  
 
5.2. La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte se prête à plusieurs interprétations, s'il y a de sérieuses raisons de penser qu'il ne correspond pas à la volonté du législateur, il convient de rechercher sa véritable portée au regard notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique) (ATF 147 III 78 consid. 6.4; 138 III 166 consid. 3.2; 136 III 283 consid. 2.3.1; 135 III 640 consid. 2.3.1). Lorsqu'il est appelé à interpréter une loi, le Tribunal fédéral adopte une position pragmatique en suivant ces différentes interprétations, sans les soumettre à un ordre de priorité (ATF 147 III 78 consid. 6.4; 137 III 344 consid. 5.1; 133 III 257 consid. 2.4; 131 III 623 consid. 2.4.4 et les références citées).  
 
5.3. L'unité déterminante pour établir si les seuils prévus à l'art. 335d CO sont atteints est celle de l'" établissement " (" Betrieb ", " stabilimento "), mentionnée aux ch. 1 à 3 de cette disposition, et ce bien que l'art. 335d i.i. CO se réfère à la notion d'" entreprise " (" Betrieb ", " azienda ").  
Selon la doctrine, il faut entendre par établissement une structure organisée, dotée en personnel, en moyens matériels et immatériels qui permettent d'accomplir les objectifs de travail. Lorsqu'un employeur possède plusieurs établissements qui font partie de la même entreprise, l'existence d'un éventuel licenciement collectif se détermine dans chaque établissement, et non pas au niveau de l'entreprise (ATF 137 III 27 consid. 3.2 et les références citées). 
De nombreux auteurs s'accordent sur le fait qu'un établissement doit disposer d'une certaine autonomie mais que celle-ci n'a pas besoin d'être financière, économique, administrative ou juridique et sur le fait qu'il n'est pas nécessaire que l'établissement ait la compétence de décider seul d'un licenciement collectif (JEAN CHRISTOPHE SCHWAAB, Le licenciement collectif, 2018, p. 41; FACINCANI/SUTTER, Arbeitsvertrag, 2021, no 47 ad art. 335d CO p. 582; STREIFF/VON KAENEL/RUDOLPH, Arbeitsvertrag, 7e éd. 2012, no 8 ad art. 335d CO p. 949; SARA LICCI, Die Massenentlassung im schweizerischen Recht, 2018, p. 77 s. n. 121; WYLER/HEINZER, Droit du travail, 4e éd. 2019, p. 670; PHILIPPE CARRUZZO, Le contrat individuel de travail, 2009, p. 502 n. 3). 
 
5.4. Dans le contexte de l'interprétation de l'art. 335d CO, il convient d'examiner les buts ayant présidé à l'adoption de cette norme.  
D'une part, comme le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de le mentionner, la réglementation relative aux licenciements collectifs a été introduite afin de rapprocher le droit suisse de l'acquis communautaire en général et, en particulier, de la Directive 75/129/CEE du 17 février 1975 (ATF 137 III 27 consid. 3.2; 132 III 406 consid. 2.4; REHBINDER/STÖCKLI, Berner Kommentar, 2014, no 1 ad art. 335d CO; LIENHARD MEYER, Die Massenentlassung, 1999, p. 21; GABRIEL AUBERT, Die neue Regelung über Massenentlassungen und den Übergang von Betrieben, PJA 1994 p. 699). 
Cette directive prévoyait, comme critère objectif permettant de définir le licenciement collectif, qu'un nombre minimum de congés fussent donnés pendant une période déterminée. Les États membres avaient le choix entre deux options. La première correspond à l'art. 335d CO adopté par le législateur suisse; elle contient un critère relatif. Selon la seconde possibilité, il y a licenciement collectif lorsque, indépendamment du nombre de travailleurs habituellement employés dans l'établissement concerné, au moins 20 congés sont signifiés dans une période de 90 jours; le critère retenu est donc absolu (ATF 137 III 27 consid. 3.2). 
S'agissant de ce choix, le Message du Conseil fédéral précise que, " si un employeur est propriétaire de plusieurs entreprises, il faudra prendre en considération le nombre de congés prononcés dans chacune d'entre elles et non pas tenir compte de ceux qui interviennent dans l'ensemble de ses entreprises. Ainsi, 10 congés étalés sur une période de 90 jours dans chacune des trois usines appartenant au même employeur ne constituent pas un licenciement collectif au sens du projet. Cette solution accorde à l'employeur titulaire de plusieurs entreprises une plus grande souplesse dans la gestion de son personnel. " (Message I du 27 mai 1992 sur l'adaptation du droit fédéral au droit de l'EEE [Message complémentaire I au message relatif à l'Accord EEE], FF 1992 I 403 ch. 4.3.2 ad art. 335d). 
D'autre part, l'adoption de ces règles en matière de licenciement collectif vise notamment à empêcher la survenance d'événements inattendus pour le marché du travail en évitant qu'un nombre important de travailleurs au profil similaire ne perdent leur emploi dans un court laps de temps et dans la même région et que, par conséquent, la recherche d'emploi ne s'en trouve compliquée et la durée de la période de chômage n'en soit prolongée (STREIFF/VON KAENEL/RUDOLPH, op. cit., no 2 ad art. 335d CO; ROLAND A. MÜLLER, Die neuen Bestimmungen über Massenentlassungen, ArbR 1995 p. 106 s. [cité: MÜLLER, Massenentlassungen]; REHBINDER/STÖCKLI, op. cit., no 2 ad art. 335d CO; SCHWAAB, op. cit., p. 40; AUBERT, op. cit., p. 700; MEYER, op. cit., p. 37). La procédure de licenciement collectif n'intervenant que lorsqu'un nombre important de travailleurs est visé, elle ne concerne pas les petites structures (cf. art. 335d ch. 1 CO). 
 
5.5. Le Tribunal fédéral a jusqu'ici laissé ouverte la question de savoir si, comme certains auteurs le suggèrent, la notion d'établissement doit être étendue lorsque des établissements sont proches au point de constituer un seul lieu d'exploitation (ATF 137 III 27 consid. 3.2).  
La doctrine est divisée sur cette question. 
Une partie des auteurs plaide en faveur d'une comptabilisation commune des congés donnés dans des établissements distincts mais proches géographiquement; selon ces auteurs, les établissements font, en effet, partie du même marché du travail et les congés donnés produisent les mêmes conséquences économiques et sociales que des congés donnés dans un seul établissement (AUBERT, op. cit., p. 701; SCHWAAB, op. cit., p. 43; CHRISTIAN BRUCHEZ, in Commentaire du contrat de travail, 2013, no 12 ad art. 335d CO; THOMAS GEISER, in Stellenwechsel und Entlassung, 2e éd. 2012, p. 94 n. 3.53; le même, in Sanierung der AG, 2e éd. 2003, p. 178; ROLAND A. MÜLLER, Die Arbeitnehmervertretung, 1999, p. 293 s.; MÜLLER, Massenentlassungen, p. 119).  
Une partie importante de la doctrine conteste toutefois cette interprétation, qui n'est selon elle couverte ni par la lettre de la loi ni par l'intention du législateur telle qu'explicitée dans le Message du Conseil fédéral (cf. supra consid. 5.4); selon elle, des établissements faisant partie de la même personne morale sont distincts, même s'ils sont proches d'un point de vue géographique ou de par l'activité concernée (FACINCANI/SUTTER, op. cit., no 49 ad art. 335d CO; PORTMANN/RUDOLPH, in Basler Kommentar, 7e éd. 2020, no 6 ad art. 335d CO; STREIFF/VON KAENEL/RUDOLPH, op. cit., no 8 ad art. 335d CO; WYLER/HEINZER, ibid.; REHBINDER/STÖCKLI, op. cit., no 13 ad art. 335d CO; ADRIAN STAEHELIN, Zürcher Kommentar, 4e éd. 2014, no 3 ad art. 335d CO; LICCI, op. cit., p. 76 n. 119; ISABELLE WILDHABER, Das Arbeitsrecht bei Umstrukturierungen, 2011, p. 276; MEYER, op. cit., pp. 64-66). MEYER souligne qu'une telle comptabilisation commune de plusieurs établissements peut conduire à un changement de seuil et, donc, à une augmentation du nombre de licenciements nécessaires afin que la procédure de licenciement collectif soit applicable (MEYER, op. cit., p. 65).  
 
5.6. Il ressort de cette interprétation historique et téléologique que chaque office de poste - qui est une filiale - est un " établissement " au sens de l'art. 335d CO, à savoir une structure organisée, qui est dotée en personnel, en moyens matériels et immatériels qui permettent d'accomplir les objectifs de travail et qui bénéficie d'une certaine autonomie, sans que cette autonomie ne doive être financière, économique, administrative, juridique ou ne nécessite la compétence de décider seule d'un licenciement collectif.  
Les licenciements prononcés dans des établissements proches d'un point de vue géographique doivent donc être comptabilisés séparément. Cette interprétation correspond notamment à la volonté du législateur de protéger le marché du travail en cas de licenciement collectif tout en accordant à l'employeur une grande souplesse dans la gestion de son personnel. Une interprétation littérale de l'art. 335d CO ne fait que confirmer ce résultat, dans la mesure où la loi ne prévoit pas que les licenciements prononcés dans des établissements distincts mais proches devraient être comptabilisés ensemble. 
 
5.7. Les griefs de la recourante doivent dès lors être rejetés.  
D'une part, contrairement à ce que la recourante soutient, des établissements proches d'un point de vue géographique ne sauraient être comptabilisés ensemble. Par ailleurs, l'art. 335d CO n'exige pas qu'une entité dispose d'une pleine autonomie et d'une totale indépendance structurelle et qu'elle ait la compétence de décider seule d'un licenciement collectif pour pouvoir être qualifiée d'établissement au sens de cette disposition. Le principe d'égalité n'est par ailleurs pas violé par le fait que certaines filiales atteignent le seuil fixé à l'art. 335d CO et d'autres non; il est dans la nature de règles générales et abstraites de fixer des seuils qui conduisent à traiter différemment des situations différentes. 
Selon les constatations de l'arrêt attaqué, l'office litigieux dispose d'un ensemble de travailleurs, d'une structure organisationnelle et de compétences propres et peut gérer seul, en vue d'exécuter ses tâches, la majeure partie de ses affaires, comme la gestion courante de ses employés, les commandes en matériel, la comptabilité de l'office et la sécurité. Certes, le responsable de cet office ne dispose pas du pouvoir décisionnel quant au nombre de postes nécessaires pour son office, au choix des travailleurs et à la gestion de leurs horaires et de leurs vacances puisque ces éléments sont mis en place par lui en collaboration avec le responsable d'exploitation et/ou le responsable de secteur, de façon à allouer efficacement les ressources humaines. Il n'en demeure pas moins que l'office litigieux bénéficie d'une relative autonomie et ce bien qu'il fasse partie d'un groupe de filiales entre lesquelles il existe un rapport de collaboration. 
Partant, c'est à bon droit que la cour cantonale a considéré que la filiale de U.________ constitue un établissement et qu'elle a refusé d'admettre que les éventuels licenciements prononcés dans d'autres filiales au sein de l'unité " RéseauPostal " de l'intimée dussent être ici pris en compte. 
D'autre part, au vu de l'évolution du droit européen dans ce domaine (cf. notamment la Directive 98/59/CE du Conseil du 20 juillet 1998 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs [JO L 225 du 12 août 1998 p. 16]), la question de l'admissibilité de la prise en compte de la jurisprudence européenne postérieure à l'entrée en vigueur de l'art. 335d CO peut ici rester ouverte, dans la mesure où le législateur n'a pas clairement exprimé sa volonté de continuer à adapter le droit suisse au droit de l'Union européenne (BRUCHEZ, op. cit., no 3 ad art. 335d CO; STAEHELIN, op. cit., no 1 ad art. 335d CO; cf. toutefois le Message du 8 septembre 2010 relatif à une modification de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite [droit de l'assainissement], FF 2010 5914 ad art. 335i CO, qui parle d'" analogie à la directive CE no 92/56 ") et où l'interprétation de cette disposition sur la seule base du droit suisse conduit au résultat auquel les instances précédentes sont parvenues en interprétant le droit suisse et en examinant le droit européen. 
 
6.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
Les frais judiciaires et les dépens seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 1'250 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 18 juillet 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
Le Greffier : Douzals