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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_89/2022  
 
 
Arrêt du 20 septembre 2022  
I  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Hohl, Présidente, Rüedi et May Canellas. 
Greffière: Monti. 
 
Participants à la procédure 
E.________, 
représenté par Me Patrick Spinedi, avocat, 
défendeur et recourant, 
 
contre  
 
T.________, 
représentée par Me Eric Cerottini, avocat, 
demanderesse et intimée. 
 
Objet 
contrat de travail; travail sur appel; congé-représailles, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 
10 décembre 2021 par la Cour d'appel civile du 
Tribunal cantonal du canton de Vaud 
(n° 580; P319.040075-210896). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. E.________ est un médecin psychologue pratiquant dans un cabinet de groupe à... (VD).  
Le 18 juillet 2017, il a engagé T.________ dès le 1er août 2017 aux conditions suivantes: 
 
--..) 
3.1 L'Employé est engagé, sous la responsabilité directe de l'Employeur, en qualité de psychologue-psychothérapeute en psychothérapie déléguée, en charge de tous les patients qui lui auront été confiés par l'Employeur. 
4. TAUX D'ACTIVITÉ ET DURÉE HEBDOMADAIRE DU TRAVAIL 
4.1 Le taux d'activité de l'Employé est variable selon les besoins du cabinet. 
4.2 La durée hebdomadaire du Travail est variable selon les besoins du cabinet. 
(...) 
7. SALAIRE DE BASE 
7.1 (...) Le salaire horaire brut [est] fixé à 80 CHF/heure. 
(...) 
7.3 Le salaire est versé au Prorata du paiement des factures effectives." 
L'employée n'était donc payée que si la facture du patient était honorée. Des déductions pour les frais de facturation étaient pratiquées sur la somme encaissée. Le solde était partagé par moitié entre l'employeur et la travailleuse. 
 
A.b. A réception du premier relevé de facturation au début du mois d'octobre 2017, l'employée a interpellé son employeur; elle considérait que la répartition des montants ne correspondait pas à ce qui avait été convenu. L'intéressé l'a renvoyée à la comptable, laquelle a expliqué que les dix premières minutes d'une consultation facturée étaient consacrées à l'étude du dossier et revenaient au cabinet. Le 13 novembre 2017, l'employée s'est plainte auprès de l'employeur et lui a demandé de faire corriger la répartition des montants auprès de l'organisme d'encaissement des factures.  
Le 13 février 2018, l'intéressé a accordé un entretien à l'employée et trois autres collaborateurs qui dénonçaient aussi des irrégularités dans le système de rémunération. Entendue dans le présent procès, l'une de ces personnes a évoqué un désaccord manifeste avec l'employeur, qui avait réagi de façon colérique aux doléances émises, mais avait tout de même décidé de rectifier les salaires, à titre rétroactif et pour l'avenir. 
Le 21 février 2018, il a demandé à l'organisme d'encaissement d'opérer une modification de la répartition sous son compte et celui de T.________, à raison de 50 % chacun. 
Le même jour, il a proposé à la prénommée un nouveau contrat de travail qui prévoirait une entrée en fonction au 1er janvier 2018 et instituerait un nouveau temps d'essai, ainsi qu'une indexation du salaire selon les modifications du point TarMed. 
Le 24 février 2018, l'employée a dit préférer un avenant et ne pas vouloir modifier son salaire; ou du moins attendait-elle des simulations qui lui permettraient de réaliser la portée de l'indexation. Elle a aussi proposé au médecin qu'il explique à son père la manière dont il envisageait de fixer le salaire; les deux hommes pourraient ainsi rechercher une manière claire de formuler le contrat. 
X.________ était alors juge suppléant au Tribunal fédéral. 
L'employée avait déjà mentionné celui-ci dans un échange de correspondances avec la comptable. En effet, dans un courriel du 25 janvier 2018, elle s'était réservé le droit de dénoncer d'éventuelles erreurs relatives à son décompte salarial 2017 et avait précisé adresser une copie à " Monsieur X.________, juge fédéral suppléant ".  
 
A.c. Dès février 2018, l'employeur a cessé d'attribuer de nouveaux patients à la travailleuse.  
Le 13 juin 2018, il lui a remis en mains propres un courrier lui signifiant son congé pour le 30 septembre 2018. Il l'a libérée sur-le-champ de son obligation de travailler. 
Dans l'attestation fournie à la Caisse de chômage le 18 septembre 2018, il a justifié le licenciement par le fait que le profil de l'employée ne correspondait plus au poste. 
L'employée s'est opposée au congé par courrier du 27 septembre 2018 et a offert ses services. Elle a émis des doutes quant au véritable motif du licenciement, qu'elle estimait lié aux prétentions élevées en lien avec son contrat. 
Le 5 octobre 2018, l'employeur a justifié sa décision par le fait que leur collaboration était "compliquée, peu constructive et ne pouvait s'inscrire dans la durée"; l'employée avait créé une ambiance de méfiance et de franche hostilité qui était devenue insupportable. La situation n'avait fait qu'empirer et le lien de confiance s'était définitivement rompu, au point qu'il s'était vu obligé de se séparer d'elle. Le motif indiqué à la Caisse de chômage devait être compris dans le sens suivant: le "profil psychologique" de l'employée , "c'est-à-dire [sa] personnalité (menaçante, méfiante) [...] ne correspond (ait) pas aux conditions pour une bonne collaboration dans l'activité de psychothérapie déléguée, laquelle se bas[ait] sur un lien de confiance indéfectible".  
 
B.  
 
B.a. Le 25 mars 2019, T.________ a assigné en conciliation son ex-employeur devant le Tribunal des prud'hommes de l'arrondissement de l'Est vaudois. Elle a ensuite déposé une demande en paiement de 29'999 fr. nets, exigeant d'une part un complément de salaire pour le manque à gagner subi au cours des relations contractuelles, d'autre part une indemnité pour licenciement abusif.  
L'employeur a pris des conclusions reconventionnelles par 80'555 fr. 20. Il entendait se faire dédommager pour les pertes consécutives au départ de plusieurs psychologues, que l'employée avait soi-disant poussés à la démission. Il a finalement ramené ses prétentions à 29'999 fr. 
Statuant le 3 mai 2021, le tribunal prud'homal a alloué à la demanderesse un solde salarial de 24'941 fr. 20, sous déduction des charges sociales, cumulé avec une indemnité de 5'057 fr. 80 nets pour le licenciement abusif. Il a rejeté la demande reconventionnelle. 
 
B.b. Le Tribunal cantonal vaudois, plus précisément sa Cour d'appel civile, a confirmé cette décision. Ses motifs seront présentés plus loin, dans la mesure utile à la discussion des griefs (consid. 4.2, 4.3 et 5.1 infra).  
 
C.  
L'employeur interjette un recours en matière civile. Il demande au Tribunal fédéral de débouter l'employée de toutes ses prétentions. 
Aucun échange d'écritures n'a été ordonné. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes au délai de recours (art. 100 al. 1 LTF) et à la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a, 53 al. 1 et 74 al. 1 let. a LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Le recourant peut objecter qu'ils ont été constatés de façon manifestement inexacte (c'est-à-dire arbitraire) ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF. Sa critique doit cependant cibler des éléments susceptibles d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
S'il veut contester l'appréciation des preuves, il soulèvera le grief d'arbitraire en expliquant de façon circonstanciée en quoi la décision serait entachée d'un tel vice. Du moment qu'il brandit un droit constitutionnel - la protection contre l'arbitraire (art. 9 Cst.) -, il doit satisfaire au principe d'allégation (consid. 2.2 infra; ATF 140 III 264 consid. 2.3 p. 266; 133 II 249 consid. 1.4.3 p. 255).  
 
2.2. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), que l'autorité de céans applique d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, l'art. 42 LTF requiert un recours motivé (al. 1 et 2), si bien que le Tribunal fédéral peut se contenter de traiter les moyens soulevés, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 140 III 115 consid. 2 p. 116). Des exigences plus strictes entourent le grief de violation des droits constitutionnels: le principe d'allégation ( Rügeprinzip, principio dell'allegazione) impose d'indiquer quel droit constitutionnel a été violé, en expliquant par le menu où se niche le vice (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.2; 133 II 396 consid. 3.2).  
 
3.  
Il est admis qu'un contrat de travail a lié les parties, avant que l'employeur le résilie le 13 juin 2018 pour le 30 septembre suivant. Le litige porte, d'une part, sur le différentiel de salaire réclamé par l'employée ( infra consid. 4) et, d'autre part, sur le caractère abusif du congé ( infra consid. 5). Les prétentions reconventionnelles de l'employeur, rejetées par la Cour d'appel, n'en font désormais plus partie.  
 
4.  
L'employeur conteste devoir un solde salarial de 24'941 fr. 20. Il dénonce une violation des art. 324 et 326 CO
 
4.1. L'employée s'est plainte de ne pas avoir reçu du travail en suffisance. Elle a établi le salaire moyen (7'914 fr. 30) touché durant les mois où l'entente était encore bonne (septembre à décembre 2017) et a conclu qu'elle aurait dû percevoir 110'800 fr. 20 sur toute la durée du contrat (7'914 fr. 30 x 14 mois). N'ayant recueilli que 85'859 fr. bruts, elle a réclamé le différentiel (24'941 fr. 20).  
 
4.2. L'autorité précédente a lu dans les clauses 3.1, 4.1 et 4.2 du contrat (let. A.a supra) la marque claire d'un travail sur appel, aménagé dans le seul intérêt de l'employeur. Un tel système, où l'employeur pouvait déterminer unilatéralement, en fonction de ses propres besoins, la durée du travail et la rétribution de l'employée, était proscrit par les art. 324 al. 1 et 326 CO. L'employeur ne pouvait pas refuser subitement les services du travailleur et le priver de toute rémunération. Il restait débiteur du salaire lorsqu'il ne procurait plus au travailleur, qui était disposé à en prendre, du travail en suffisance. Le motif du refus - économique ou non - importait peu.  
En l'occurrence, le motif invoqué n'était pas même vraisemblable; il ne méritait de toute façon aucune protection. La collaboratrice n'avait soi-disant pas la maturité suffisante pour pratiquer sa fonction, défaut qui se serait révélé au moment où elle avait fait intervenir son père dans leur relation professionnelle. Il était pourtant légitime de demander conseil à un juriste, fût-il son propre père. Au demeurant, s'il jugeait sa collaboratrice trop immature, l'employeur aurait dû non seulement renoncer à lui confier de nouveaux patients, mais aussi lui retirer ceux qu'elle suivait déjà, ce qu'il n'avait pas fait. Il avait bien plutôt appliqué une mesure de rétorsion contre une employée qui tentait de faire valoir ses droits. Aussi avait-elle droit à un salaire calculé d'après la moyenne des rémunérations perçues pendant la période où elle recevait du travail en quantité suffisante. Pour le surplus, le calcul retenu par le tribunal prud'homal n'était pas litigieux. 
 
4.3. La Cour d'appel a souverainement constaté en fait que l'employeur avait cessé d'attribuer de nouveaux patients à l'employée dès février 2018, ce qu'il ne remet pas en cause, à tout le moins pas de manière conforme aux réquisits légaux ( supra consid. 2). Il explique avoir agi ainsi car les compétences de l'employée ne lui paraissaient pas suffisantes. Rien, dans le jugement cantonal, ne permet toutefois d'aller dans son sens. Il reproche encore à l'employée d'avoir "adopté un comportement visant à l'intimider et à exercer une pression à son encontre", en déclarant ouvertement avoir pris conseil auprès de son père, alors juge fédéral suppléant. Il omet toutefois de soulever le grief d'arbitraire en l'adjoignant d'une motivation circonstanciée. De toute façon, l'autorité précédente a expliqué de manière convaincante que cette simple référence, certes loin d'être "idéale", n'était pas de nature à intimider l'employeur. Sachant qu'il avait subitement privé sa collaboratrice de nouveaux patients après qu'elle eut émis des prétentions découlant de son contrat et disputé les modifications suggérées, il est particulièrement malvenu de prétendre avoir été victime d'une intimidation.  
L'analyse juridique développée dans l'arrêt attaqué ne prête pas le flanc à la critique. 
L'autorité précédente a dûment exposé la jurisprudence topique concernant le travail sur appel (ATF 125 III 65 consid. 3b; 124 III 249 consid. 2a; arrêt 4A_534/2017 du 27 août 2018 consid. 4.1 et 4.3) et l'a correctement appliquée au cas d'espèce. 
N'en déplaise au recourant, elle n'a pas détourné le propos de l'ATF 125 III 65. Il résulte de cet arrêt que l'employeur peut tomber sous le coup de l'art. 324 al. 1 CO (même) lorsque la demeure tient à des motifs économiques (consid. 5 p. 69). Le législateur n'a pas voulu permettre à l'employeur de déterminer unilatéralement, en fonction de ses propres besoins, la durée du travail et la rétribution du travailleur (consid. 5 p. 70). La Cour d'appel n'a pas trahi ces préceptes en concluant que l'employeur devait procurer du travail en quantité suffisante à l'employée ou payer son salaire - que le motif de son refus ait une cause économique ou non. Pour le surplus, l'on se référera à l'arrêt attaqué, qui explique à satisfaction de droit pour quelles raisons les griefs repris dans le cadre du présent recours sont inopérants (cf. art. 109 al. 3 LTF). Concernant la thématique du salaire convenable, le recourant n'explique d'ailleurs pas où résideraient les failles de la motivation proposée par la cour cantonale. 
En bref, c'est à tort que l'employeur a cru détenir un pouvoir absolu sur le revenu de l'intimée, en cessant dès février 2018 de lui attribuer de nouveaux patients. Et les juges d'appel n'ont pas outrepassé les limites du droit fédéral en exigeant qu'il verse la différence avec le salaire que l'employée aurait dû toucher en se basant sur la période durant laquelle elle avait reçu suffisamment de patients. La méthode de calcul appliquée n'est pas contestée. 
 
5.  
Au chapitre du licenciement abusif, l'employeur dénonce une violation de l'art. 8 CC et de l'art. 336 CO
 
5.1. La Cour d'appel a retenu un congé abusif pour les raisons suivantes:  
Dans un premier temps, l'employeur avait soutenu s'être séparé de sa collaboratrice parce qu'elle ne correspondait plus au poste. Dans son appel, il lui reprochait d'avoir recouru aux conseils de son père, juriste de profession et juge fédéral suppléant, pour faire valoir ses prétentions. 
Le fait de prendre conseil dans une matière que l'on ne maîtrise pas - fût-ce auprès de son père - était, au contraire, un signe de maturité. L'employée avait simplement révélé, en toute transparence, qu'elle s'était renseignée sérieusement sur ses droits avant de conclure que la proposition de l'employeur n'était pas conforme et devait être rediscutée. En réalité, le licenciement était un congé-représailles visé par l'art. 336 al. 1 let. d CO. 
 
5.2. La règle précitée déclare abusif le congé donné par une partie (ici l'employeur) parce que l'autre partie (en l'occurrence l'employée) fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail. On parle à cet égard de congé-représailles.  
Pour retenir une telle hypothèse, il faut déterminer le motif réel du congé - opération qui relève du fait. Il importe peu que la prétention existe ou non. Il suffit que celui qui l'invoque puisse de bonne foi penser qu'elle est fondée (ATF 136 III 513 consid. 2.3 et 2.4). La bonne foi est présumée (art. 3 al. 1 CC). Les prétentions émises doivent avoir joué un rôle causal dans la décision de licencier. Déterminer s'il existe un rapport de causalité naturelle est une question de fait (ATF 136 III 513 consid. 2.6). 
 
5.3. Dans le passage résumé ci-dessus, la Cour d'appel a laissé entendre qu'elle voyait dans les prétentions émises par l'employée la cause véritable du congé. S'il devait subsister un léger doute quant au motif retenu, il est définitivement levé à lecture d'un autre chapitre, dans lequel la Cour a clairement interprété le refus de fournir des nouveaux clients comme une "mesure de rétorsion face à une employée qui tent[ait] de faire valoir ses droits".  
L'employeur conteste ce motif en se plaçant sous l'angle du fardeau de la preuve. La Cour d'appel a toutefois rappelé les préceptes topiques et les a correctement appliqués, contrairement à ce qui est insinué. 
En réalité, c'est l'appréciation portée sur les preuves qui déplaît au recourant, lequel souhaiterait imposer sa propre lecture. Il n'a aucune chance d'y parvenir dans la mesure où il s'abstient de taxer l'appréciation d'arbitraire et de fournir une motivation détaillée, dispensant ainsi l'autorité de céans d'entrer en matière. De toute façon, on ne voit guère où pourrait se loger l'arbitraire (sur cette notion, voir entre autres ATF 144 III 145 consid. 2; 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2). 
Quant au montant de l'indemnité pour licenciement abusif, il n'est pas spécifiquement remis en cause. 
Cette seconde salve de griefs doit donc aussi être rejetée et avec elle, le recours dans son entier. 
 
6.  
Les frais de la présente procédure doivent être mis à la charge du recourant dès lors qu'il a succombé (art. 66 al. 1 LTF). 
Se pose la question du tarif applicable. Faut-il se fonder: 
 
- sur le tarif ordinaire de l'art. 65 al. 2 et al. 3 let. b LTF, 
ou 
- sur le tarif réduit de l'art. 65 al. 4 let. c LTF, prévoyant un émolument compris entre 200 fr. et 1'000 fr., fixé "indépendamment de la valeur litigieuse", dans les conflits "résultant de rapports de travail, pour autant que la valeur litigieuse ne dépasse pas 30'000 fr."? 
Est déterminante la valeur litigieuse à l'ouverture de l'action (arrêts 4A_123/2020 du 30 juillet 2020 consid. 7; 4A_613/2010 du 25 janvier 2011 consid. 8; THOMAS GEISER, in Basler Kommentar, 3e éd. 2018, n° 22 i.f. ad art. 65 LTF).  
Jadis, le calcul de cette valeur relevait de l'art. 343 al. 2 aCO, inséré dans le chapitre consacré au contrat de travail (arrêt précité 4A_613/2010 consid. 8). Il prescrivait de prendre en compte le seul montant de la demande principale, "sans égard aux conclusions reconventionnelles". 
Désormais, le CPC exempte de frais judiciaires ce type de conflit (art. 114 let. c CPC) mais ne contient pas de règle spécifique sur la valeur litigieuse. Aussi faut-il se référer aux art. 91 ss CPC (cf. GEISER, ibidem).  
L'art. 94 CPC traite du cas où la demande principale se double d'une demande reconventionnelle. L'alinéa 1 contient la règle générale - quoi que puisse faire accroire la version française, formulée de façon maladroite (DENIS TAPPY, in Commentaire romand, 2e éd. 2019, nos 1, 2a et 17 ad art. 94 CPC) : 
(...) la valeur litigieuse se détermine d'après la prétention la plus élevée ". [italiques insérées par le Tribunal fédéral]  
L'alinéa 2 énonce une règle spéciale: 
 
"Lorsque les demandes reconventionnelle et principale ne s'excluent pas, leurs valeurs litigieuses respectives sont additionnées pour déterminer les frais." [italiques insérées par le Tribunal fédéral]  
Dans notre problématique (valeur litigieuse déterminante pour les frais de procédure devant le Tribunal fédéral), faut-il prendre en compte la valeur la plus élevée des actions (art. 94 al. 1; soit ici 29'999 fr. pour l'une et l'autre), ou additionner les deux (art. 94 al. 2; en l'occurrence 2 x 29'999 fr., soit 59'998 fr.), puisque les deux demandes ne s'excluent pas? 
Dans un premier réflexe, l'on pourrait être tenté d'appliquer l'art. 94 al. 2 CPC, qui est spécifiquement conçu pour les frais (dans ce sens MARTIN STERCHI, in Berner Kommentar, 2012, n° 8c ad art. 113-114 CPC, suivi par BEATRICE VAN DE GRAAF, in Kurzkommentar ZPO, 2 e éd. 2014, n° 3 ad art. 94 CPC).  
Cependant, la doctrine majoritaire critique cette solution qui permet au défendeur de supprimer la gratuité du litige (art. 114 let. c CPC) par le biais de la reconvention. Aussi prescrit-elle d'appliquer la règle générale de l'art. 94 al. 1 CPC et de prendre en compte la valeur la plus élevée des deux demandes (voir les explications circonstanciées de PATRICIA DIETSCHY-MARTENET, Procédure civile et droit du travail, in Les procédures en droit du travail, 2020, p. 21 s. et p. 24; DU MÊME AUTEUR, Les conflits de travail en procédure civile suisse, 2011, n. 487 [ci-après: DIETSCHY, Conflits de travail]; dans le même sens CHRISTIAN KÖLZ, in Kurzkommentar ZPO, 3 e éd. 2021, n° 5 ad art. 94 CPC; TAPPY, op. cit., n° 7 ad art. 114 CPC; PETER DIGGELMANN, in ZPO Schweizerische Zivilprozessordnung, [Brunner et alii éd.], 2e éd. 2016, n° 3 ad art. 94 CPC; CLAUDE SCHRANK, Das Schlichtungsverfahren nach der Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2015, n. 262).  
Cette opinion convainc. Elle est conforme au but de protection sociale poursuivi par les art. 114 let. c CPC et 65 al. 4 let. c LTF et évite, à l'instar de l'ancien art. 343 al. 2 aCO, que le défendeur déjoue la gratuité voulue par le législateur (cf. SCHRANK, ibidem; ATF 143 III 506 consid. 3.2.2) - étant précisé que celui-là ne peut pas émettre une prétention supérieure à 29'999 fr. (ATF 143 III 506 consid. 3.2.4 en lien avec les art. 224 al. 1 et 243 al. 1 CPC; DIGGELMANN, ibidem; STERCHI, op. cit., n° 8c i.f. ad art. 113-114 CPC; DIETSCHY, Conflits de travail, op. cit., n. 487).  
Tel est d'ailleurs la solution adoptée sans ambages par les deux instances vaudoises, qui ont sobrement indiqué renoncer à percevoir des frais (art. 114 let. c CPC). 
Tout bien considéré, l'émolument pour la présente procédure sera fixé à 1'000 fr., dans la limite du tarif spécial de l'art. 65 al. 4 let. c LTF. 
Enfin, la partie adverse ne saurait prétendre à des dépens dès lors qu'elle n'a pas eu à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, fixés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 20 septembre 2022 
 
Au nom de la I re Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
La Greffière : Monti