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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_219/2022  
 
Ordonnance du 31 mai 2022 
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme la Juge fédérale 
Aubry Girardin, Présidente. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
5. E.________, 
6. F.________, 
7. G.________, 
recourantes, 
toutes représentées par Me Hrant Hovagemyan, avocat, 
 
contre  
 
Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, 
Eigerstrasse 65, 3003 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Assistance administrative (CDI CH-RU), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 21 février 2022 (A-232/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 30 octobre 2018, l'autorité compétente russe (ci-après: l'autorité requérante) a adressé une demande d'assistance administrative internationale en matière fiscale à l'Administration fédérale des contributions (ci-après: l'Administration fédérale), fondée sur l'art. 25a de la Convention du 15 novembre 1995 entre la Confédération suisse et la Fédération de Russie en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (RS 0.672.966.51; ci-après: CDI CH-RU), concernant la société russe A.________ (ci-après: la Société). L'autorité requérante y exposait que la Société avait versé des dividendes à des sociétés chypriotes sur trois comptes bancaires ouverts en Suisse auprès de la banque H.________ AG (ci-après: la Banque) et qu'elle avait prélevé à cette occasion un impôt à la source de 5%, conformément à la convention de double imposition liant la Fédération de Russie et Chypre. L'autorité requérante doutait toutefois que ces sociétés chypriotes soient les véritables bénéficiaires économiques de ces dividendes et demandait partant à l'Administration fédérale une série de renseignements sur les comptes bancaires concernés pour la période allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, afin d'identifier les bénéficiaires économiques de ces dividendes et, le cas échéant, de réévaluer le pourcentage d'impôt à la source dû par la Société. 
 
B.  
Par décision finale du 10 décembre 2019 notifiée à la Société, ainsi qu'aux sociétés B.________, C.________, D.________, E.________, F.________ et à G.________, l'Administration fédérale a accordé l'assistance administrative à l'autorité requérante. 
La Société, ainsi que B.________, C.________, D.________, E.________, F.________ et G.________ ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral, concluant, principalement, à son annulation, subsidiairement, à son annulation et au rejet de la demande d'assistance administrative du 30 octobre 2018, plus subsidiairement, à son annulation et à ce que le Tribunal administratif fédéral dise que les seuls renseignements qui peuvent être transmis sont l'existence des comptes, à l'exclusion de toute autre information. 
Le Tribunal administratif fédéral a statué par arrêt du 21 février 2022. Il a estimé que les conditions de l'octroi de l'assistance administrative étaient remplies et que la décision finale du 10 décembre 2019 de l'Administration fédérale devait partant être confirmée, sous réserve du fait qu'elle avait été notifiée à tort à B.________, car cette entité n'avait plus d'existence à ce moment-là (consid. 5.6.5 de l'arrêt). En conséquence, le Tribunal administratif fédéral a partiellement admis le recoursen ce sens et l'a rejeté pour le surplus dans la mesure de sa recevabilité (chiffre 1 du dispositif), enjoignant à l'Administration fédérale de préciser que les informations transmises ne pourraient être utilisées qu'à l'encontre de la Société et dans le cadre d'une procédure fiscale, conformément à l'art. 25a CDI CH-RU (chiffre 2 du dispositif). 
 
C.  
La Société, C.________, D.________, E.________, déclarant agir aussi pour le compte de la société B.________ qui a cessé d'exister, F.________ et G.________ ont formé un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 21 février 2022 du Tribunal administratif fédéral. Elles concluent, principalement, à son annulation et à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet de la demande d'assistance administrative du 30 octobre 2018, plus subsidiairement, à son annulation, sous réserve du chiffre 2 de son dispositif, et au renvoi de la cause au Tribunal administratif fédéral pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Elles font principalement valoir que la demande doit être rejetée, parce que la transmission de renseignements à la Fédération de Russie serait contraire à l'ordre public (cf. art. 25a par. 3 let. c CDI CH-RU) dans le contexte actuel de la guerre en Ukraine, dès lors que les bénéficiaires économiques de la Société seraient de nationalité ukrainienne. 
A titre préalable, les recourantes demandent notamment que l'effet suspensif soit accordé à leur recours et que la procédure soit suspendue "jusqu'à ce que la guerre en Ukraine prenne fin, et que soient connus, à l'issue de la guerre, le sort de la Fédération de Russie, et celui de l'Ukraine, vis-à-vis des nations du monde, y compris vis-à-vis de la Suisse". 
 
D.  
La guerre en Ukraine dont les recourantes se prévalent dans leur recours fait référence à l'intervention militaire de la Fédération de Russie en Ukraine initiée le 24 février 2022. Ces actes ont donné lieu à une série de mesures au plan international et en Suisse, qui peuvent être résumées comme suit. 
 
D.a. Le 23 février 2022, l'Union européenne a arrêté un premier ensemble de sanctions à l'encontre de la Fédération de Russie, visant à réagir à la décision de cet Etat de reconnaître comme entités indépendantes les régions de Donetsk et de Louhansk en Ukraine, ainsi que la décision qui s'en est suivie d'y envoyer des troupes russes. Ces mesures comprennent des sanctions ciblées visant 351 membres de la Douma d'État russe et 27 personnes supplémentaires, des restrictions applicables aux relations économiques avec les régions de Donetsk et de Louhansk et des restrictions de l'accès de la Fédération de Russie aux marchés et services financiers de l'Union européenne.  
Le 25 février 2022 et à la suite de l'agression militaire de la Fédération de Russie en Ukraine qui avait débuté la veille, l'Union européenne a arrêté un deuxième ensemble de sanctions à l'encontre de la Fédération de Russie. Elle a gelé les avoirs de Vladimir Poutine, son président, et de Sergueï Lavrov, son ministre des affaires étrangères, imposé des mesures restrictives à l'encontre des membres du Conseil national de sécurité de la Fédération de Russie et des autres membres de la Douma d'État russe qui avaient soutenu la reconnaissance des républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk. Elle a aussi décidé d'un ensemble de mesures individuelles et économiques qui couvrent les secteurs de la finance, de l'énergie, des transports et des technologies, ainsi que la politique des visas. 
L'Union européenne a encore prononcé d'autres sanctions et mesures les 2, 9, 10 et 15 mars, et les 8 et 21 avril 2022 (cf. les informations figurant sur le site internet du Conseil européen et du Conseil de l'Union européenne, https://www.consilium.europa.eu/fr/ et, notamment, le document présentant la chronologie des mesures prises, consultable à l'adresse https://www.consilium.europa.eu/fr /policies/sanctions/restrictive-measures-against-russia-over-ukraine/history-restrictive-measures-against-russia-over-ukraine/). 
 
D.b. Des mesures ont aussi été prises par le Conseil de l'Europe. Ainsi, le 25 février 2022, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a suspendu la Fédération de Russie de ses droits de représentation en vertu de l'art. 8 du Statut du Conseil de l'Europe du 5 mai 1949 et, le 16 mars 2022, suivant l'avis de l'Assemblée parlementaire du 15 mars 2022, décidé que la Fédération de Russie cessait d'être membre du Conseil de l'Europe à compter du même jour, étant précisé que, le 15 mars 2022, la Fédération de Russie avait informé la Secrétaire Générale de son retrait du Conseil de l'Europe conformément au Statut du Conseil de l'Europe et de son intention de dénoncer la Convention européenne des droits de l'homme (cf. les décisions CM/Del/Dec (2022) 1426ter/2.3 et CM/Del/Dec (2022) 1428ter/2.3, consultables sur le site du Conseil de l'Europe à l'adresse https://www.coe.int/fr/web/portal/home).  
Le 25 février 2022, le Conseil de l'OCDE a décidé de clôturer le processus d'adhésion avec la Fédération de Russie et, le 8 mars 2022, de suspendre la participation de cet Etat aux organes de l'OCDE (documents consultables à l'adresse https://www.oecd.org/fr/ pays/russie/). 
Les 1eret 4 mars 2022, la Cour européenne des droits de l'homme (ci-après: CourEDH) a pris des mesures provisoires urgentes concernant les opérations militaires russes sur le territoire ukrainien, à la suite de la demande déposée par le gouvernement ukrainien le 28 février 2022 (requête n° 11055/22, Ukraine c. Russie (X)). Elle y a appelé le gouvernement russe à s'abstenir de lancer des attaques militaires contre les personnes civiles et les biens de caractère civil et à assurer immédiatement la sécurité des établissements de santé, du personnel médical et des véhicules de secours sur le territoire attaqué ou assiégé par les soldats russes (documents consultables sur le site internet de la CourEDH https://www.echr.coe.int/Pages/home.aspx?p=home&c=fre).  
Le 22 mars 2022, la CourEDH a déclaré qu'en application de l'art. 58 CEDH, la Fédération de Russie cesserait d'être une Haute Partie contractante à la CEDH à compter du 16 septembre 2022 (déclaration consultable à l'adresse https://echr.coe.int/Documents/Resolution _ECHR_cessation_membership_Russia_CoE_FRA.pdf). 
 
D.c. Le 7 avril 2022, l'Assemblée générale des Nations Unies a suspendu la Fédération de Russie du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies.  
 
D.d. En Suisse, le Conseil fédéral a annoncé, le 28 février 2022, qu'au vu de l'intervention militaire de la Fédération de Russie qui se poursuivait en Ukraine, il avait décidé de reprendre les paquets de sanctions que l'Union européenne avait édictées les 23 et 25 février 2022, en soulignant l'existence de "graves violations du droit international public" (communiqué de presse du 28 février 2022 du Département fédéral des affaires étrangères, consultable à l'adresse https://www.eda.admin.ch/eda/fr/dfae/dfae/aktuell/news.html). A cet effet, l'ordonnance du Conseil fédéral du 27 août 2014 instituant des mesures en lien avec la situation en Ukraine a été abrogée et remplacée par l'ordonnance du 4 mars 2022 du même nom (RO 2022 151).  
Le 13 avril 2022, le Conseil fédéral a repris le paquet de sanctions prononcées par l'Union européenne le 8 avril 2022 et modifié en conséquence l'ordonnance du 4 mars 2022 précitée (RO 2022 260). Cette ordonnance a encore été modifiée avec effet au 4 mai 2022 (RO 2022 270). 
Par ailleurs, le Ministère public de la Confédération et l'Office fédéral de la justice ont annoncé à la presse les 22 et 23 mars 2022 que l'entraide judiciaire pénale avec la Russie était suspendue jusqu'à nouvel ordre en raison de la situation en Ukraine (cf. l'article "Die Schweiz setzt Rechtshilfe an Russland aus", publié dans le journal Neue Zürcher Zeitung le 23 mars 2022 et disponible en ligne à l'adresse https://www.nzz.ch/, ainsi que l'article "Avec la guerre en Ukraine, le parquet fédéral change son fusil d'épaule", publié le 25 mars 2022 dans le journal Le Temps et disponible en ligne à l'adresse https://www.letemps.ch/, ce dernier reprenant une information publiée le 23 mars 2022 par le média en ligne Gotham City https://gothamcity.ch/). 
Quant au Tribunal pénal fédéral, il a refusé d'accorder l'entraide pénale à la Russie en raison de l'attaque russe en Ukraine dans des décisions des 13 et 17 mai 2022 et partant déclaré sans objet les requêtes de suspensions de procédure formulées dans plusieurs affaires (décisions RR.2021.91, RR.2.21.239 et RR.2021.84, consultables sur le site https://www.bstger.ch/fr/home/index). 
 
D.e. Pour ce qui concerne le sort de l'échange de renseignements en matière fiscale avec la Fédération de Russie, le Département fédéral des finances a répondu, le 30 mars 2022, à une question correspondante posée par le journal Le Temps que le Forum mondial de l'OCDE n'avait pas encore décidé d'une suspension de l'échange automatique d'informations avec la Russie et que la Suisse déciderait de la marche à suivre à la lumière des développements et de la situation qui prévaudraient en septembre, l'échange automatique ayant lieu chaque an à cette période (article du 30 mars 2022 intitulé "Incertitude sur l'avenir de l'échange automatique de renseignements avec la Russie", consultable sur le site internet du journal susmentionné). Le Département fédéral des finances n'a en revanche pas communiqué de position s'agissant de l'échange de renseignements sur demande avec la Russie, fondé sur l'art. 25a CDI CH-RU.  
 
E.  
Dans la présente procédure, l'Administration fédérale s'en est remise à l'appréciation du Tribunal fédéral, tant sur le sort à réserver à la demande de suspension de la procédure que sur le point de savoir si la transmission de renseignements à l'autorité requérante doit être considérée comme contraire à l'ordre public. Le Tribunal administratif fédéral s'en tient en revanche à son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
A titre provisionnel, les recourantes ont requis l'effet suspensif. Comme le recours en matière d'assistance administrative internationale en matière fiscale a un effet suspensif de par la loi en vertu de l'art. 103 al. 2 let. d LTF, la requête correspondante des recourantes est sans objet. La présente ordonnance a donc pour unique objet de statuer sur la demande de suspension de la procédure figurant également dans le recours. 
 
2.  
Dans le contexte de l'assistance administrative internationale en matière fiscale, une requête de suspension de la procédure ne doit être examinée que si les conditions pour entrer en matière sur le recours sont remplies (arrêts 2C_901/2020 du 5 novembre 2021 consid. 3; 2C_319/2021 du 30 avril 2021 consid. 2). En l'occurrence, le point de savoir si l'assistance administrative peut être accordée à la Fédération de Russie dans le contexte actuel de la guerre en Ukraine soulève une question juridique de principe (art. 84a LTF) et relève aussi du cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF, applicable par le renvoi de l'art. 84a LTF. Il convient donc d'entrer en matière sur la requête. 
 
2.1. La suspension d'une procédure peut entrer en conflit avec le principe de célérité qui découle de l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 130 V 90 consid. 5; arrêt 2C_814/2019 du 21 avril 2020 consid. 3.1). Dans le domaine de l'assistance administrative internationale en matière fiscale, l'obligation de conduire la procédure avec diligence découle aussi de l'engagement international pris par la Suisse de ne pas retarder l'échange de renseignements, afin de ne pas nuire à son efficacité (dans le contexte de l'assistance administrative sur demande avec la Russie, cf. le chiffre 7 let. e 2e phrase du Protocole de la CDI CH-RU), ainsi que du droit interne suisse, qui prévoit que les procédures d'assistance administrative doivent être menées avec diligence (art. 4 al. 2 de la loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative en matière fiscale [LAAF; RS 651.1; cf. l'arrêt 2C_804/2019 du 21 avril 2020 consid. 1.1.3 et 3.4). Le Tribunal fédéral en a conclu que la suspension d'une procédure d'assistance administrative internationale en matière fiscale supposait des circonstances exceptionnelles (arrêt 2C_804/2019 du 21 avril 2020 consid. 3.4 et 3.5).  
 
2.2. Le juge amené à statuer sur une demande de suspension de la procédure doit procéder à la pesée des intérêts des parties (ATF 119 II 386 consid. 1b; arrêts 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 3.1; 5A_263/2021 du 18 mai 2021 consid. 3.1). A cet égard, le Tribunal fédéral a relevé que, dans le domaine de l'assistance administrative internationale en matière fiscale, le principe de diligence servait en premier lieu les intérêts de la Suisse à un fonctionnement correct de l'assistance administrative vis-à-vis des Etats requérants, et non pas les intérêts des contribuables visés par une demande (ATF 142 II 218 consid. 2.5.1; cf. aussi l'arrêt 2C_804/2019 du 21 avril 2020 consid. 3.3).  
 
2.3. Pour se prononcer sur la demande de suspension de la présente procédure, il convient donc de procéder à une pesée des différents intérêts en présence, en prenant en compte d'office les développements exposés dans la partie "Faits" sous let. D. Il s'agit en effet de faits notoires (sur cette notion, cf. arrêt 2C_569/2018 du 27 mai 2019 consid. 3.2 non publié in ATF 145 II 303, mais in Pra 2020/33 p. 331).  
 
2.3.1. La suspension de la procédure est à l'évidence dans l'intérêt des recourantes, qui l'ont expressément requise. Il ressort par ailleurs des formulaires A figurant au dossier qu'à tout le moins une partie des bénéficiaires économiques des comptes bancaires concernés par la demande d'assistance russe du 30 octobre 2018 sont des personnes physiques de nationalité ukrainienne et domiciliées en Ukraine, comme le relèvent les recourantes. Ces personnes ont aussi un intérêt à ce que la procédure soit suspendue.  
 
2.3.2. Dans le contexte international dans lequel le cas d'espèce s'inscrit, il faut aussi tenir compte de l'intérêt de la Suisse. Il importe en effet que les positions respectives des différentes autorités fédérales vis-à-vis de la Fédération de Russie paraissent cohérentes les unes par rapport aux autres, en vue de garantir une certaine unité de l'ordre juridique et d'éviter des contradictions qui ne seraient pas compréhensibles (cf. ATF 143 II 506 consid. 3.1).  
En l'occurrence, suspendre la présente procédure permettrait d'être en accord avec la décision prise par le Ministère public de la Confédération de suspendre les procédures d'entraide judiciaire pénale avec la Russie jusqu'à nouvel ordre au vu de la situation en Ukraine, ainsi qu'avec les mesures prises par le Conseil fédéral. Du reste, l'Administration fédérale s'est remise à l'appréciation du Tribunal fédéral sur la question de la suspension de la procédure et ne s'est donc pas opposée à cette mesure (supra let. E). 
A cela s'ajoute que la Suisse est membre d'organisations internationales qui ont exclu la Fédération de Russie (Conseil de l'Europe; CourEDH) ou qui ont suspendu sa participation (OCDE; Conseil des droits de l'homme des Nations Unies) en raison de la situation en Ukraine. Suspendre la présente procédure permettrait ainsi d'assurer une certaine cohérence avec ces mesures, étant rappelé que l'art. 25a CDI CH-RU est calqué sur un Modèle de Convention qui a été établi par l'OCDE. 
Une suspension reviendrait également à assurer de facto en matière d'échange de renseignements sur demande le même traitement que celui réservé à l'échange automatique de renseignements, puisqu'aucune information n'est transmise automatiquement par la Suisse à la Russie avant le mois de septembre (cf. supra D.e). 
Enfin, suspendre la procédure est une mesure qui permettrait de tenir compte de l'évolution de la situation, avant de rendre une décision définitive sur le fond qui paraît, dans le domaine de l'assistance administrative internationale en matière fiscale, prématurée en l'état. Le fait que le Tribunal pénal fédéral ait fait un autre choix les 13 et 17 mai 2022 (supra let. D.d), en refusant de suspendre les procédures pour statuer sur le fond et refuser l'entraide judiciaire en matière pénale à la Russie (arrêts R.R 2021.84; RR 2021.91; RR 2021.239 et RR.2021.246), n'est pas en contradiction avec la présente approche s'agissant de procédures dont les enjeux sont différents. 
La solution de la suspension va certes à l'encontre du principe de célérité que la Suisse s'est engagée à respecter, mais elle permet en l'état de préserver les engagements internationaux pris par la Suisse par la CDI applicable, sans préjuger du sort de la demande d'assistance administrative du 30 octobre 2018. 
Compte tenu des éléments qui précèdent, il convient de donner suite à la requête des recourantes tendant à la suspension de la procédure. 
 
3.  
Par conséquent, la Présidente de la Cour de céans, en application de l'art. 32 al. 1 LTF, suspend la présente procédure pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 30 septembre 2022. Après cette date, il conviendra d'examiner à la lumière de l'ensemble des circonstances qui prévaudront à ce moment-là si la procédure doit être reprise. 
 
 
Par ces motifs, la Présidente ordonne :  
 
1.  
La demande de suspension de la procédure 2C_219/2022 est admise. 
 
2.  
La procédure est suspendue pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 30 septembre 2022. Après cette date, la situation sera réexaminée à la lumière de l'ensemble des circonstances qui prévaudront à ce moment-là. 
 
3.  
La présente ordonnance est communiquée au mandataire des recourantes, à l'Administration fédérale des contributions, Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 31 mai 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : S. Vuadens