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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_844/2020  
 
 
Arrêt du 10 juin 2021  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Escher et Marazzi. 
Greffier : M. Braconi. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Simone Zurwerra, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Office des poursuites de la Sarine, avenue de Beauregard 13, 1700 Fribourg. 
 
Objet 
saisie d'un avoir de prévoyance du pilier 3a, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, en qualité d'Autorité de surveillance, du 30 septembre 2020 
(105 2020 109 & 111). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Dans le cadre de poursuites introduites contre A.________, l'Office des poursuites de la Sarine a procédé le 3 mars 2020 à une saisie de salaire de 6'550 fr. par mois, plus l'entier du 13ème salaire. 
Le poursuivi ayant cessé son activité salariée, une révision de la saisie a été mise en oeuvre et des renseignements complémentaires ont été requis; le 9 juin 2020, l'intéressé a indiqué à l'Office qu'il allait clôturer le 22 juin 2020 un compte de prévoyance 3a, dont l'avoir serait versé sur son compte bancaire. Par avis du 12 juin 2020, l'Office a saisi cette créance. 
 
B.  
Le 11 août 2020, l'Office a établi un nouveau procès-verbal de saisie, qui mentionne la saisie de l'avoir du 3ème pilier A à concurrence de la somme de 35'656 fr. 50; le calcul du minimum d'existence du poursuivi et de son épouse fait état de la rente AVS de celui-là (= 2'015 fr.) et du revenu de celle-ci (= 910 fr. 95), ainsi que du minimum vital du couple de 3'793 fr. 20 (2'612 fr. 24 + 1'180 fr. 96). 
Le 24 août 2020, le poursuivi a porté plainte contre le procès-verbal de saisie, concluant à l'annulation de la saisie de l'avoir de prévoyance 3a et à la constatation de l'absence de bien mobilier saisissable. 
Statuant le 30 septembre 2020, la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg a rejeté la plainte. 
 
C.  
Par acte expédié le 12 octobre 2020, le poursuivi exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral: principalement, il conclut à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants; subsidiairement, il conclut en bref à l'annulation de la saisie du montant provenant de son compte de prévoyance 3ème pilier A et à l'octroi de l'assistance judiciaire totale pour la procédure cantonale. Il sollicite le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale. 
Invités à répondre, la cour cantonale n'a pas d'observations à formuler, alors que l'Office ne s'est pas déterminé. 
 
 
D.  
Par ordonnance du 6 novembre 2020, le Président de la Cour de céans a attribué l'effet suspensif au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours a été déposé à temps (art. 100 al. 2 let. a LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par une autorité de surveillance en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF) statuant en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). Il est recevable quelle que soit la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). Le poursuivi, qui a été débouté par la juridiction précédente, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. En l'espèce, la cour cantonale a considéré qu'il n'y avait pas lieu de trancher la question de savoir si le capital de prévoyance en cause était ou non relativement saisissable selon l'art. 93 LP. Il apparaît que l'Office a omis de tenir compte dans le procès-verbal de saisie litigieux de la rente LPP versée au poursuivi, qui s'élève à 22'835 fr. 60 par an (= 1'902 fr. 95 par mois) et dont la saisie du 3 mars 2020 ( cf. supra, let. A) faisait mention. Si l'on ajoute cette rente LPP à la rente AVS de l'intéressé (= 2'015 fr.) et au revenu de son épouse (= 910 fr. 95), le couple dispose dès lors d'un revenu mensuel total de 4'828 fr. 90 pour couvrir ses charges (= 3'793 fr. 20). Ce dernier montant étant inférieur aux revenus cumulés des conjoints, qui leur permettent donc d'honorer " largement " leurs charges indispensables, il s'ensuit que, en admettant même que l'" avoir de prévoyance 3a " litigieux ne soit que relativement saisissable, la somme perçue à ce titre peut être saisie en totalité.  
 
2.2. Le recourant se plaint à cet égard d'une violation de son droit d'être entendu découlant de l'art. 29 al. 2 Cst.; en bref, il expose avoir été surpris par une argumentation qui n'a jamais été soulevée auparavant et sur laquelle il n'a jamais pu prendre position.  
 
2.3.  
 
2.3.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. confère au justiciable, entre autres prérogatives, le droit de s'exprimer sur tous les éléments importants avant qu'une décision ne soit rendue quant à sa situation juridique. En revanche, cette disposition constitutionnelle ne comporte pas, en principe, le droit de se prononcer sur l'appréciation juridique des faits ni, plus généralement, sur l'argumentation juridique à retenir, de sorte que l'autorité n'a pas à soumettre aux parties, pour prise de position, le raisonnement qu'elle envisage de suivre. Ce droit doit être toutefois reconnu lorsqu'elle entend fonder sa décision sur un motif juridique qui n'a jamais été évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties ne s'est prévalue, ni ne pouvait supputer la pertinence (ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les arrêts cités).  
 
2.3.2. En l'occurrence, la plainte a pour objet le procès-verbal de saisie établi le 11 août 2020. Or, la motivation de la cour cantonale repose, de son propre aveu, sur un poste dont l'Office a " omis de tenir compte " et qui, partant, ne figurait pas dans cet acte. Cela étant, le procès-verbal litigieux était incomplet quant aux éléments à prendre en considération dans le calcul de la quotité saisissable (JEANDIN/SABETI : in : Commentaire romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 19 ad art. 112 LP), de sorte qu'il appartenait à l'autorité cantonale d'enjoindre à l'Office d'y remédier. La manière de procéder des juges précédents était de nature à surprendre le recourant, tant il est vrai qu'il n'avait pas à compter sur l'éventualité de se voir opposer un argument tiré d'une mesure viciée.  
L'admission du grief ne scelle toutefois pas le sort du recours, puisqu'il laisse intact le raisonnement des juges précédents, qu'il leur suffirait de reprendre textuellement dans leur nouvelle décision. Sous cet angle, le renvoi en instance cantonale n'apparaît que comme une vaine formalité aboutissant à allonger inutilement la procédure. 
 
2.4.  
 
2.4.1. Sous couvert d'indécision quant à la qualification du capital versé au recourant, la juridiction cantonale a en réalité posé le principe qu'un capital de prévoyance - même relativement saisissable - peut être saisi " en totalité " si les (autres) ressources cumulées du débiteur et de son épouse permettent d'acquitter " leurs charges indispensables ". Pareille position est préconisée par OCHSNER : la rente viagère annuelle qui peut être acquise grâce au capital servi par la caisse de prévoyance ( infra, consid. 2.4.2) pourrait être entièrement saisie lorsque d'autres revenus saisissables couvrent déjà le minimum vital du débiteur ( op. cit., n° 65 in fine ad art. 93 LP).  
 
2.4.2. Cette solution ne correspond toutefois pas à la jurisprudence de la Cour de céans, encore rappelée récemment (arrêt 5A_338/2019 du 23 septembre 2019). Les prestations versées - comme ici - en raison du départ à la retraite sont relativement saisissables (art. 93 al. 1 LP), règle qui s'applique aussi lorsque la prestation est servie sous forme de capital. Comme on ne peut pas imposer au débiteur d'acheter une rente avec l'avoir de vieillesse, l'Office doit calculer la rente à laquelle donne droit ce capital; celui-ci n'est alors saisissable qu'à concurrence de cette rente annuelle, qui se calcule en fonction de sa durée et de l'espérance de vie du bénéficiaire. Si le minimum vital du débiteur est couvert par ses autres revenus et par une partie de la rente acquise fictivement avec la prestation en capital, la part de la rente excédant le minimum vital est saisissable à hauteur de sa valeur d'estimation durant une année (arrêt précité consid. 6.2.1, avec la jurisprudence citée). Ces principes trouvent application aux prestations du 3e pilier A, qui sont relativement saisissables au sens de l'art. 93 LP après la survenance de l'évènement assuré (ATF 121 III 285 consid. 1b in fineet 3, avec les références).  
Certes, le Tribunal fédéral n'exclut pas par principe la saisie complète d'un capital LPP, réservant la situation où l'attitude du débiteur dénote son intention de ne pas affecter ce montant à des fins de prévoyance (arrêt 5A_338/2019 précité consid. 6.2.1 et 6.4, avec les citations). En raison des prémisses inexactes de son raisonnement juridique, la cour cantonale ne s'est pas prononcée à ce sujet; sa décision ne comporte aucune constatation permettant de trancher la question, en particulier sur la volonté (interne) du recourant (ATF 138 III 411 consid. 3.4 et les arrêts cités). La modicité des revenus du couple ( supra, consid. 2.1) ne plaide pas nécessairement - comme l'affirme le recourant - en faveur d'une affectation à l'entretien futur, le capital en cause ne couvrant pas même les charges d'une année; il pourrait être destiné à des achats dont l'utilité n'est pas démontrée ( cf. sur ce critère: arrêt 5A_338/2019 précité consid. 6.4). En revanche, le fait que l'avoir de prévoyance ait été versé sur le compte bancaire de l'intéressé n'est pas déterminant en soi (ATF 115 III 45 consid. 1c).  
 
2.4.3. En définitive, il appartiendra à l'autorité cantonale de compléter ses constatations dans le sens qui précède. Suivant le résultat de ses investigations, elle pourra soit confirmer la saisie intégrale de l'avoir de prévoyance litigieux, soit inviter l'Office à procéder au calcul de la rente viagère annuelle, conformément à la jurisprudence précitée, et à établir un nouveau procès-verbal de saisie, incluant la rente LPP que perçoit le débiteur ( supra, consid. 2.1).  
 
2.5. Compte tenu de l'issue du recours, il appartiendra aussi à la cour cantonale de statuer à nouveau sur la requête d'assistance judiciaire du recourant.  
 
3.  
Vu ce qui précède, le présent recours est admis, l'arrêt attaqué annulé aux chiffres I et II de son dispositif et la cause renvoyée à la juridiction précédente pour nouvelle décision (art. 107 al. 2 LTF). Les dépens de la procédure incombent à l'État de Fribourg (art. 68 al. 1 LTF; ATF 138 IV 157 consid. 2.4), à l'exclusion des frais (art. 66 al. 4 LTF). Partant, la requête d'assistance judiciaire du recourant est sans objet (ATF 133 I 234 consid. 3). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt attaqué annulé aux chiffres I et II de son dispositif et l'affaire renvoyée à la juridiction précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est sans objet. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Une indemnité de 1'500 fr., à payer au recourant à titre de dépens, est mise à la charge de l'État de Fribourg. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à l'Office des poursuites de la Sarine et à la Chambre des poursuites et faillites du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 10 juin 2021 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
Le Greffier : Braconi