Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_232/2024
Arrêt du 3 octobre 2024
I
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Kiss, juge présidant, Rüedi et May Canellas.
Greffier: M. O. Carruzzo.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Serge Vittoz, avocat,
recourant,
contre
1. B.________,
2. C.________,
tous deux représentés par Mes David Casserly et Nicolas Zbinden, avocats,
intimés.
Objet
arbitrage international en matière de sport,
recours en matière civile contre la sentence rendue le 18 mars 2024 par le Tribunal Arbitral du Sport (CAS 2022/A/9157).
Faits :
A.
A.a. A.________ (ci-après: A.________) est un club professionnel de football, membre de la Fédération Ivoirienne de Football (FIF), elle-même affiliée à la Fédération Internationale de Football Association (FIFA).
B.________ est un joueur de football professionnel ivoirien (ci-après: le joueur ou le footballeur), né en décembre 2002.
C.________ (ci-après: C.________) est une équipe de football professionnelle affiliée à la Fédération Norvégienne de Football (FNF), laquelle est membre de la FIFA.
A.b. A.________ prétend avoir conclu le 14 novembre 2017 un contrat d'entraînement avec le joueur, en vertu duquel ce dernier n'avait droit à aucune rémunération.
A.________ soutient qu'un contrat de travail de durée déterminée échéant le 31 juillet 2022 aurait été conclu avec le footballeur en date du 31 juillet 2019. À teneur dudit contrat, ce dernier devait toucher un salaire mensuel de 63'000 francs CFA. Les signatures prétendument apposées par le joueur - encore mineur à ce moment-là -, sa mère ainsi que le président du club figuraient au pied du contrat.
Par convention du 31 juillet 2019, A.________ a prêté le footballeur à un autre club ivoirien pour une saison.
Le 9 janvier 2020, C.________ a fait savoir à A.________ qu'il souhaitait que le joueur vienne visiter ses installations sportives pour une durée de deux mois.
Le 8 mars 2020, le footballeur s'est rendu à C.________ mais a dû retourner prématurément en Côte d'Ivoire en raison de la crise liée au coronavirus.
Le 31 mai 2020, A.________ a supprimé l'enregistrement du footballeur dans le système de régulation des transferts de la FIFA ("Transfer Matching System").
Le 29 juin 2020, la mère du joueur a écrit à la FIF pour dénoncer le contrat de travail prétendument conclu le 31 juillet 2019, dont ni son fils ni elle n'avaient connaissance.
Le 10 août 2020, A.________ a signé un contrat de mandat en faveur de D.________ pour lui permettre de le représenter, à titre exclusif, en vue d'un éventuel transfert du joueur au club français E.________.
Le 14 août 2020, le joueur et sa mère auraient prétendument signé un contrat avec F.________ et D.________ afin de les autoriser à les représenter dans l'optique d'un potentiel transfert du footballeur au E.________. Ledit contrat expirait le 10 octobre 2020. Il était revêtu de plusieurs signatures manuscrites censées avoir été apposées par le joueur, sa mère et D.________.
A.c. Le 30 octobre 2020, la mère du joueur a saisi la Commission du Statut du Joueur de la FIF (ci-après: la CSJ FIF) aux fins de contester la validité du contrat de travail prétendument conclu le 31 juillet 2019.
Par décision du 23 décembre 2020, la CSJ FIF a considéré qu'il y avait un doute quant à l'authenticité de la supposée signature du joueur apposée sur ledit contrat et a annulé celui-ci.
A.________ a contesté cette décision auprès de la Commission d'appel de la FIF.
A.d. Le 4 janvier 2021, A.________ a signé un contrat en vue du transfert du joueur au E.________. Le club français n'a toutefois pas signé ledit contrat.
Le 29 janvier 2021, le footballeur a conclu un contrat de travail avec C.________ déployant ses effets à partir du 22 décembre 2020 jusqu'au 31 décembre 2024.
Le 2 février 2021, la FIFA a délivré un certificat de transfert international ("International Transfer Certificate") autorisant le joueur à s'enregistrer auprès de la FNF.
A.e. Le 16 mars 2021, A.________ a saisi la Chambre de Résolution des Litiges (CRL) de la FIFA d'une demande dirigée notamment contre le joueur et C.________ en vue d'obtenir le paiement de divers montants au titre d'indemnité de formation et de perte de revenus.
Le 12 juillet 2021, la FIFA a formulé une "proposition contraignante" ("binding proposal") dans laquelle elle a considéré que C.________ devait payer à A.________ un montant supérieur à 70'000 euros (EUR), intérêts en sus, au titre d'indemnité de formation du joueur. C.________ a réglé ledit montant le 14 juillet 2021.
A.f. Le 29 avril 2022, A.________ a assigné le footballeur et C.________ devant la CRL FIFA en vue d'obtenir le paiement d'un montant de 5'165'000 EUR pour rupture injustifiée du contrat de travail ainsi que de la somme de 286'100 EUR au titre de solde de l'indemnité de formation.
Par décision du 6 septembre 2022, la CRL FIFA a rejeté cette demande dans la mesure où elle était recevable.
B.
Le 21 septembre 2022, A.________ a appelé de cette décision auprès du Tribunal Arbitral du Sport (TAS).
Conformément au souhait exprimé par les parties, un arbitre unique a été désigné par le TAS.
Le 2 décembre 2022, l'appelant a transmis au TAS un exemplaire de la décision rendue le 9 novembre 2022 par la Commission d'appel de la FIF. Dans ladite décision, l'autorité d'appel, se fondant sur une expertise graphologique (ci-après: l'expertise graphologique ivoirienne), a considéré que les signatures apposées sur le contrat de travail du 31 juillet 2019 étaient authentiques, raison pour laquelle il convenait de réformer la décision attaquée devant elle.
Dans leur réponse du 20 mars 2023, le footballeur et C.________ ont conclu au rejet de l'appel.
Le 15 juin 2023, l'arbitre a tenu une audience à Lausanne.
Par sentence finale du 18 mars 2024, l'arbitre a rejeté l'appel et confirmé la décision attaquée. Les motifs qui étayent cette décision seront examinés plus loin dans la mesure utile à la compréhension des griefs dont celle-ci est la cible.
C.
Le 19 avril 2024, A.________ (ci-après: le recourant) a formé un recours en matière civile aux fins d'obtenir l'annulation de cette sentence.
Au terme de leur réponse commune, le joueur et C.________ (ci-après: les intimés) ont conclu au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
Le TAS a renoncé à formuler des observations sur le recours, la sentence étant à son avis suffisamment explicite.
Le recourant a déposé une réplique spontanée, suscitant le dépôt d'une duplique de la part des intimés.
Considérant en droit :
1.
D'après l'art. 54 al. 1 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Lorsque cette décision a été rendue dans une autre langue (ici l'anglais), il utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant le TAS, celles-ci se sont servies de l'anglais, tandis que, dans les mémoires qu'elles ont adressés au Tribunal fédéral, elles ont employé le français respectant ainsi l'art. 42 al. 1 LTF en liaison avec l'art. 70 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.; RS 101; ATF 142 III 521 consid. 1). Conformément à sa pratique, le Tribunal fédéral rendra, par conséquent, son arrêt en français.
2.
Le recours en matière civile est recevable contre les sentences touchant l'arbitrage international aux conditions fixées par les art. 190 à 192 de la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP; RS 291), conformément à l'art. 77 al. 1 let. a LTF.
Le siège du TAS se trouve à Lausanne. Aucune des parties n'avait son siège respectivement son domicile en Suisse au moment déterminant. Les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont donc applicables (art. 176 al. 1 LDIP).
3.
Qu'il s'agisse de l'objet du recours, de la qualité pour recourir, du délai de recours ou des conclusions prises par le recourant, aucune de ces conditions de recevabilité ne fait problème en l'espèce. Rien ne s'oppose, dès lors, à l'entrée en matière. Demeure réservé l'examen de la recevabilité, sous l'angle de leur motivation, des moyens invoqués par l'intéressé.
4.
4.1. Le recours en matière d'arbitrage international ne peut être formé que pour l'un des motifs énumérés de manière exhaustive à l'art. 190 al. 2 LDIP. Le Tribunal fédéral n'examine que les griefs qui ont été invoqués et motivés conformément à l'art. 77 al. 3 LTF. Cette disposition institue le principe d'allégation (
Rügeprinzip) et consacre une obligation analogue à celle que prévoit l'art. 106 al. 2 LTF pour le grief tiré de la violation de droits fondamentaux ou de dispositions de droit cantonal et intercantonal (ATF 134 III 186 consid. 5). Les exigences de motivation du recours en matière d'arbitrage sont accrues. La partie recourante doit donc invoquer l'un des motifs de recours énoncés limitativement et montrer par une argumentation précise, en partant de la sentence attaquée, en quoi le motif invoqué justifie l'admission du recours (arrêt 4A_244/2023 du 3 avril 2024 consid. 4.1 destiné à la publication et les références citées). Les critiques appellatoires sont irrecevables (arrêt 4A_65/2018 du 11 décembre 2018 consid. 2.2).
4.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits constatés dans la sentence attaquée (cf. art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter d'office les constatations des arbitres, même si les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ou en violation du droit (cf. l'art. 77 al. 2 LTF qui exclut l'application de l'art. 105 al. 2 LTF). Les constatations du tribunal arbitral quant au déroulement de la procédure lient aussi le Tribunal fédéral, qu'elles aient trait aux conclusions des parties, aux faits allégués ou aux explications juridiques données par ces dernières, aux déclarations faites en cours de procès, aux réquisitions de preuves, voire au contenu d'un témoignage ou d'une expertise ou encore aux informations recueillies lors d'une inspection oculaire (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées; arrêts 4A_54/2019 du 11 avril 2019 consid. 2.4; 4A_322/2015 du 27 juin 2016 consid. 3 et les références citées).
La mission du Tribunal fédéral, lorsqu'il est saisi d'un recours en matière civile visant une sentence arbitrale internationale, ne consiste pas à statuer avec une pleine cognition, à l'instar d'une juridiction d'appel, mais uniquement à examiner si les griefs recevables formulés à l'encontre de ladite sentence sont fondés ou non. Permettre aux parties d'alléguer d'autres faits que ceux qui ont été constatés par le tribunal arbitral, en dehors des cas exceptionnels réservés par la jurisprudence, ne serait plus compatible avec une telle mission, ces faits fussent-ils établis par les éléments de preuve figurant au dossier de l'arbitrage (arrêt 4A_140/2022 du 22 août 2022 consid. 4.2). Cependant, le Tribunal fédéral conserve la faculté de revoir l'état de fait à la base de la sentence attaquée si l'un des griefs mentionnés à l'art. 190 al. 2 LDIP est soulevé à l'encontre dudit état de fait ou que des faits ou des moyens de preuve nouveaux sont exceptionnellement pris en considération dans le cadre de la procédure du recours en matière civile (ATF 138 III 29 consid. 2.2.1 et les références citées).
5.
Dans un premier moyen, le recourant, invoquant l'art. 190 al. 2 let. d LDIP, dénonce une violation de son droit d'être entendu. Il reproche à l'arbitre d'avoir omis de prendre en considération plusieurs éléments de fait, de preuve et de droit qu'il avait invoqués au cours de la procédure d'arbitrage qui étaient de nature à influer sur le sort du litige.
5.1. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 182 al. 3 et 190 al. 2 let. d LDIP, un devoir minimum pour le tribunal arbitral d'examiner et de traiter les problèmes pertinents. Ce devoir est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le tribunal arbitral ne prend pas en considération des allégués, arguments, preuves et offres de preuve présentés par l'une des parties et importants pour la sentence à rendre (ATF 142 III 360 consid. 4.1.1 et les références citées). Il incombe à la partie soi-disant lésée de démontrer, dans son recours dirigé contre la sentence, en quoi une inadvertance des arbitres l'a empêchée de se faire entendre sur un point important. C'est à elle d'établir, d'une part, que le tribunal arbitral n'a pas examiné certains des éléments de fait, de preuve ou de droit qu'elle avait régulièrement avancés à l'appui de ses conclusions et, d'autre part, que ces éléments étaient de nature à influer sur le sort du litige (ATF 142 III 360 consid. 4.1.1 et 4.1.3). Si la sentence passe totalement sous silence des éléments apparemment importants pour la solution du litige, c'est aux arbitres ou à la partie intimée qu'il appartiendra de justifier cette omission dans leurs observations sur le recours. Ceux-ci pourront le faire en démontrant que, contrairement aux affirmations du recourant, les éléments omis n'étaient pas pertinents pour résoudre le cas concret ou, s'ils l'étaient, qu'ils ont été réfutés implicitement par le tribunal arbitral (ATF 133 III 235 consid. 5.2).
Au demeurant, le grief tiré de la violation du droit d'être entendu ne doit pas servir, pour la partie qui se plaint de vices affectant la motivation de la sentence, à provoquer par ce biais un examen de l'application du droit de fond (ATF 142 III 360 consid. 4.1.2 et les références citées).
5.2. En premier lieu, le recourant reproche à l'arbitre d'avoir ignoré son argument selon lequel les intimés avaient adopté un comportement contradictoire, puisqu'ils avaient fait valoir devant la CRL FIFA que la décision prise le 23 décembre 2020 par la CSJ FIF ne pouvait pas être revue par l'organe juridictionnel de la FIFA, avant de soutenir devant le TAS que la décision rendue le 9 novembre 2022 par la Commission d'appel de la FIF ne liait en aucune manière ce dernier.
En deuxième lieu, l'intéressé fait grief à l'arbitre d'avoir omis de traiter l'argument selon lequel le TAS ne pouvait pas revoir la décision prise par la Commission d'appel de la FIF - laquelle était devenue définitive et exécutoire vu l'absence d'appel interjeté à l'encontre de celle-ci - ni réexaminer les moyens de preuve recueillis dans le cadre de cette procédure et, singulièrement, l'expertise graphologique ivoirienne.
En troisième et dernier lieu, le recourant se plaint de ce que l'arbitre n'a pas tenu compte de l'argument selon lequel les intimés avaient fait preuve de mauvaise foi en s'opposant, par tous les moyens, à la mise en oeuvre de l'expertise graphologique ivoirienne.
5.3. L'argumentation présentée par le recourant n'emporte pas la conviction de la Cour de céans.
Dans la sentence attaquée, l'arbitre a correctement exposé l'argument central de l'intéressé selon lequel la décision de la Commission d'appel de la FIF était devenue définitive et exécutoire, raison pour laquelle le TAS ne pouvait pas revoir cette dernière ni l'expertise graphologique ivoirienne (sentence, n. 102, 9ème tiret: "... The AC FIF Decision [la décision de la Commission d'appel de la FIF] - which defeats all of Respondents' arguments - is now final and binding and the CAS cannot rule again on the matter, as the Player and the Mother should have appealed to local courts [which they did not]..."). Il a également fait état de la thèse prônée par les intimés, lesquels estimaient que l'arbitre pouvait apprécier librement la portée de la décision prise par la Commission d'appel de la FIF et de l'analyse graphologique ivoirienne, dans la mesure où l'art. R57 du Code de l'arbitrage en matière de sport (ci-après: le Code) confère au TAS un pouvoir d'examen illimité tant en fait qu'en droit (sentence, n. 106, 7ème tiret: "Notwithstanding the AC FIF Decision, and in accordance with Article 8 of the Swiss Civil Code, it is A.________'s burden to prove the existence of any alleged contract concluded with the Player. On the basis of Article R57 of the CAS Code and the
de novo powers granted by such provision, the Sole Arbitrator has full and unrestricted discretion to make his own assessment of the AC FIF Decision and the Handwriting Analysis on which it relies. In any case, such decision cannot be relied upon to adjudicate the present dispute..."). Lors de l'examen des mérites de l'appel, l'arbitre a visiblement épousé la thèse défendue par les intimés. Il s'est en effet référé expressément à la disposition réglementaire invoquée par eux (art. R57 du Code) et a souligné qu'il jouissait d'un pouvoir d'examen illimité (sentence, n. 143), ce qui l'a conduit à réexaminer librement la valeur probante de l'analyse graphologique ivoirienne. Il appert ainsi de la motivation retenue par l'arbitre que celui-ci a considéré que l'art. R57 du Code l'autorisait à revoir librement les tenants et aboutissant de cette affaire, raison pour laquelle il a visiblement estimé ne pas être lié par la décision prise la Commission d'appel de la FIF. L'arbitre a donc écarté, à tout le moins de manière implicite, l'argument invoqué à cet égard par le recourant, étant précisé ici que ce dernier ne saurait obtenir des explications détaillées sur chaque aspect du raisonnement tenu par l'arbitre. Que la décision à laquelle a abouti l'arbitre sur le problème considéré soit juridiquement fondée ou non importe peu sous l'angle du moyen pris de la violation du droit d'être entendu. Aussi est-ce en vain que l'intéressé, sous le couvert d'une prétendue atteinte à son droit d'être entendu, discute de la portée exacte à donner à l'art. R57 du Code.
Au vu de la solution retenue par l'arbitre, le point de savoir si les intimés ont effectivement adopté une attitude contradictoire en soutenant devant la CRL FIFA que celle-ci ne pouvait pas revoir la décision prise par la CSJ FIF n'a manifestement eu aucune influence sur le sort du litige, étant donné que l'arbitre a estimé, à tout le moins implicitement, ne pas être lié par les décisions des organes juridictionnels de la FIF. En tout état de cause, sur le vu des explications fournies par le recourant, on ne saurait reprocher aux intimés d'avoir adopté une attitude incompatible avec les règles de la bonne foi. D'une part, la situation a évolué sur le plan factuel entre le moment où la CSJ FIF a statué et celui où les intimés ont déposé leur réponse à l'appel introduit devant le TAS, puisque la Commission d'appel de la FIF a entre-temps annulé la décision attaquée devant elle. Aussi n'est-il guère surprenant que les intimés aient changé leur fusil d'épaule. D'autre part, affirmer qu'un organe juridictionnel d'une fédération internationale ne puisse pas revoir la décision prise par celui d'une autre association sportive ne signifie pas encore qu'il en irait forcément de même pour un véritable tribunal arbitral, tel le TAS. L'attitude procédurale des intimés n'apparaît ainsi pas incompatible avec les règles de la bonne foi.
Pour le reste, le recourant fait grief à l'arbitre d'avoir fait fi de son argument selon lequel les intimés s'étaient opposés par tous les moyens à la mise en oeuvre de l'expertise graphologique ivoirienne, en refusant notamment de produire des documents originaux et contemporains contenant leur signature. Or, semblable reproche repose sur des prémisses de fait qui ne ressortent nullement des faits constatés dans la sentence attaquée. Quoi qu'il en soit, on relèvera que la violation du droit d'être entendu dénoncée par le recourant n'a manifestement pas eu les conséquences que celui-ci lui prête. Dans sa sentence, l'arbitre n'a pas nié l'existence d'un contrat de travail valablement conclu le 31 juillet 2019, en motivant exclusivement sa décision par l'absence de force probante de l'analyse graphologique ivoirienne. Il s'est au contraire fondé sur un faisceau d'éléments pour aboutir à la solution retenue par lui. Il a ainsi notamment relevé qu'aucun témoin cité par les parties n'avait pu confirmer avoir vu les intimés signer le contrat litigieux, constaté que le prêt conclu le même jour ainsi que la licence du joueur ne contenaient pas la signature de celui-ci ni celle de sa mère, et souligné que le passeport FIFA du footballeur daté du 9 juin 2020 n'indiquait pas que ce dernier était contractuellement lié au recourant. L'arbitre a également observé que le contrat prétendument conclu le 31 juillet 2019 prévoyait une rémunération mensuelle de 63'000 francs CFA, mais que le recourant n'avait fourni aucune preuve établissant le paiement effectif des salaires au footballeur. Il a également pointé du doigt divers éléments qui semblaient démontrer le caractère arbitraire de l'analyse graphologique ivoirienne. Enfin et surtout, l'arbitre a estimé qu'une simple observation des différentes signatures présentées par les parties permettait de conclure que la signature prétendument apposée par la mère du joueur sur le contrat litigieux n'était pas authentique. À cet égard, il a constaté que les trois signatures reconnues comme authentiques par la mère du footballeur se terminaient par un trait dirigé vers le bas, alors que le trait pointait vers le haut sur celle figurant au pied du contrat litigieux. En outre, l'arbitre unique a remarqué que les signatures apposées sur le contrat litigieux semblaient hésitantes et n'étaient pas fluides, contrairement aux signatures reconnues comme authentiques par la mère du footballeur. Au terme de son analyse reposant sur un ensemble d'éléments concordants, l'arbitre a ainsi conclu que le contrat litigieux n'était pas valide, faute d'avoir été signé par la représentante légale du footballeur, qui était encore mineur le 31 juillet 2019 (sentence, n. 143-150).
Au vu de ce qui précède, le grief examiné ne peut qu'être rejeté dans la mesure où il est recevable.
6.
Dans un second moyen, le recourant, dénonçant une violation du principe de la bonne foi et de celui de la prohibition de l'abus de droit, soutient que la sentence querellée est incompatible avec l'ordre public (art. 190 al. 2 let. e LDIP).
6.1. Une sentence est incompatible avec l'ordre public si elle méconnaît les valeurs essentielles et largement reconnues qui, selon les conceptions prévalant en Suisse, devraient constituer le fondement de tout ordre juridique (ATF 144 III 120 consid. 5.1; 132 III 389 consid. 2.2.3). On distingue un ordre public procédural et un ordre public matériel.
6.1.1. Une sentence est contraire à l'ordre public matériel lorsqu'elle viole des principes fondamentaux du droit de fond au point de ne plus être conciliable avec l'ordre juridique et le système de valeurs déterminants (ATF 144 III 120 consid. 5.1; 132 III 389 consid. 2.2.1). Qu'un motif retenu par un tribunal arbitral heurte l'ordre public n'est pas suffisant; c'est le résultat auquel la sentence aboutit qui doit être incompatible avec l'ordre public (ATF 144 III 120 consid. 5.1). L'incompatibilité de la sentence avec l'ordre public, visée à l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, est une notion plus restrictive que celle d'arbitraire (ATF 144 III 120 consid. 5.1; arrêts 4A_318/2018 du 4 mars 2019 consid. 4.3.1; 4A_600/2016 du 29 juin 2017 consid. 1.1.4). Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable (ATF 137 I 1 consid. 2.4; 136 I 316 consid. 2.2.2 et les références citées). Pour qu'il y ait incompatibilité avec l'ordre public, il ne suffit pas que les preuves aient été mal appréciées, qu'une constatation de fait soit manifestement fausse ou encore qu'une règle de droit ait été clairement violée (arrêts 4A_116/2016 du 13 décembre 2016 consid. 4.1; 4A_304/2013 du 3 mars 2014 consid. 5.1.1; 4A_458/2009 du 10 juin 2010 consid. 4.1). L'annulation d'une sentence arbitrale internationale pour ce motif de recours est chose rarissime (ATF 132 III 389 consid. 2.1).
6.1.2. Il y a violation de l'ordre public procédural lorsque des principes de procédure fondamentaux et généralement reconnus ont été violés, conduisant à une contradiction insupportable avec le sentiment de la justice, de telle sorte que la décision apparaît incompatible avec les valeurs reconnues dans un État de droit (ATF 141 III 229 consid. 3.2.1; 140 III 278 consid. 3.1; 136 III 345 consid. 2.1).
6.2. Premièrement, le recourant reproche aux intimés d'avoir adopté un comportement contradictoire, en faisant valoir, lors de la procédure arbitrale, des allégations incompatibles avec celles formulées devant la CRL FIFA quant à la possibilité de revoir la décision rendue par les organes juridictionnels de la FIF.
Deuxièmement, l'intéressé fait grief aux intimés d'avoir fait preuve d'une attitude incompatible avec les règles de la bonne foi en s'opposant par tous les moyens à la mise en oeuvre de l'expertise graphologique ivoirienne.
Troisièmement, le recourant soutient que l'arbitre aurait enfreint le principe de la bonne foi, en considérant que cette expertise graphologique était arbitraire, sous prétexte que celle-ci ne se fondait pas sur des documents contemporains contenant la signature de la mère du footballeur, alors que celle-ci avait refusé de prêter son concours à la réalisation de ladite expertise. Il reproche également à l'arbitre d'avoir lui-même jugé que la signature litigieuse n'était pas authentique sur la base d'une simple observation de celle-ci.
6.3. Il sied d'emblée de souligner que la motivation du grief laisse fortement à désirer, de sorte que l'on peut sérieusement douter de sa recevabilité, vu l'art. 77 al. 3 LTF. Les quelques paragraphes que le recourant consacre à sa démonstration ne constituent en effet pas une motivation digne de ce nom visant à établir l'existence d'une prétendue contrariété à l'ordre public. Au demeurant, le recourant assoit en partie ses critiques sur des faits s'écartant de ceux constatés dans la sentence attaquée.
Quoi qu'il en soit, le recourant, sous le couvert d'une prétendue contrariété à l'ordre public, se borne à faire valoir une nouvelle fois les critiques qu'il a déjà formulées sous l'angle du moyen pris de la violation de l'art. 190 al. 2 let. d LDIP. Son argumentation ne résiste toutefois pas à l'examen et on peut reprendre ici,
mutatis mutandis, les considérations déjà émises précédemment. Pour le reste, l'intéressé s'en prend, en pure perte, à l'appréciation des preuves disponibles opérée par l'arbitre, ce qui n'est pas admissible.
En tout état de cause, l'argumentation développée par le recourant ne permet nullement de démontrer que le résultat auquel a abouti l'arbitre, sur la base des faits constatés souverainement par lui, serait contraire à l'ordre public matériel, ce qui scelle le sort du moyen considéré. Celui-ci n'apparaît dès lors pas fondé, si tant est qu'il soit recevable.
7.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens aux intimés, créanciers solidaires ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 32'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera aux intimés, créanciers solidaires, une indemnité de 37'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au Tribunal Arbitral du Sport (TAS).
Lausanne, le 3 octobre 2024
Au nom de la I re Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant : Kiss
Le Greffier : O. Carruzzo