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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_569/2024  
 
 
Arrêt du 5 mai 2025  
I  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux 
Hurni, Président, Kiss et May Canellas. 
Greffière : Mme Fournier. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Michael Biot, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représenté par Me Christian Bruchez, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
contrat de travail; convention collective de travail, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2024 par la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève (C/2668/2022 CAPH/72/2024). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA (ci-après: l'employeuse) a pour but social notamment les prestations au sol, l'embarquement et le débarquement d'avions, le fret, le chargement et le déchargement au sol des avions et toutes autres opérations relatives au trafic aérien.  
La société a été fondée en... sous la raison sociale C.________ SA/D.________ AG et constituait une filiale de E.________. 
Elle compte trois succursales en Suisse ("stations"). 
E.________ est devenue, en mars 1997, la société holding F.________ SA, et A.________ SA demeurée l'une de ses filiales. Suite à la déconfiture du groupe F.________ SA en octobre 2001 (" grounding "), les sociétés A.________ SA et G.________ SA ont été vendues.  
 
A.b. B.________ (ci-après: l'employé), ressortissant français, né le..., domicilié en France, a été initialement engagé par E.________ à compter du 1er février 1988 en qualité de contrôleur de fret, par contrat de travail à durée indéterminée. Les rapports de travail étaient soumis au contrat collectif de travail conclu entre E.________, la Fédération suisse du personnel des services publics (VPOD/SSP) et la Société suisse des employés de commerce (SSEC).  
Après la création de F.________ SA, les rapports de travail ont été repris par G.________ SA. 
Le 1er janvier 2005, les rapports de travail ont été transférés à A.________ SA. Le taux d'activité de l'employé était maintenu à 100%. Les rapports de travail demeuraient soumis au contrat collectif de travail et l'employé était affilié à la Prévoyance Professionnelle (...). 
L'employé est membre du Syndicat des services publics (SSP-VPOD). 
 
A.c. Au cours de l'année 2011, A.________ SA, succursale de Genève, et les syndicats SSP-VPOD et SEV-GATA ont négocié une "convention collective de travail pour le personnel avec salaire mensuel". Il s'agissait de remplacer la CCT du 1er janvier 2007. Ces négociations ont abouti et la nouvelle CCT est entrée en vigueur le 1er mars 2012 (CCT 2012). Valable jusqu'au 28 février 2015, la CCT 2012 a été régulièrement prolongée jusqu'au 31 décembre 2019.  
Selon son art. 2.1 let. b, la CCT 2012 fait partie intégrante du contrat de travail. 
Suite à une saisine, en décembre 2019, par les syndicats SSP-VPOD et SEV-GATA, de la Chambre des Relations collectives de travail (CRCT), les parties signataires sont convenues de prolonger la CCT 2012 jusqu'au 30 septembre 2020. 
En définitive, pour les travailleurs liés, la CCT 2012 restera en vigueur jusqu'au 31 mai 2021, date à laquelle elle sera remplacée par la CCT dite "de crise" conclue pour la durée du 1er juin 2021 au 28 février 2022. 
 
A.d. La CCT 2012 contient un article 6.3 intitulé "Repos compensatoire pour le personnel travaillant selon des horaires entre 20h.00 et 6h.00", lequel est assorti du préambule suivant : "Dès l'âge de 50 ans révolus, les heures de travail effectuées entre 20h.00 et 6h.00 sont comptabilisées et donnent droit à un repos compensatoire, nommé ci-après 'congé heures de nuit' dès qu'un minimum de 1'200 heures est atteint".  
Sous le titre "Détermination du droit", le ch. 6.3.1 contient un tableau qui permet de calculer les mois de congés afférents à un certain total d'heures travaillées entre 20h.00 et 6h.00 (dès 50 ans révolus). La lettre c précise que "[l]e collaborateur peut bénéficier des mois de ce congé spécifique pendant la durée de l'activité professionnelle ou, en fonction du droit, au plus tard avant la retraite Prévoyance Professionnelle (...) ". 
Le ch. 6.3.2 CCT 2012 intitulé "Rémunération du repos compensatoire/ 'congé heures de nuit'" prévoit qu' "en règle générale, la rémunération équivaut à 80% du salaire de base mensuel calculé en fonction du taux d'activité exercé pendant les 96 mois précédant le 'congé heures de nuit' [...]". 
L'art. 6.3.3 CCT 2012 règle les "conditions applicables lorsque le 'congé heures de nuit' est pris pendant la durée de l'activité professionnelle" alors que l'art. 6.3.4 règle les "conditions applicables lorsque le 'congé heures de nuit' est pris à la fin de l'activité professionnelle", prévoyant notamment que (let. a) les rapports de travail sont (alors) maintenus jusqu'au début de la rente de la Prévoyance Professionnelle (...) et que (let. b) la rémunération est basée sur les conditions énoncées au paragraphe 6.3.2. 
L'art. 6.3 CCT 2012 correspond dans une large mesure à une disposition analogue déjà contenue dans la CCT 2007. Le "congé heures de nuit" s'ajoute à l'indemnisation - par un supplément de 25% du salaire horaire - des heures de travail de nuit effectuées entre 20h.00 et 6h.00 prévue par l'art. 6.2.1 CCT. 
 
A.e. En proie à des difficultés financières à la suite de la crise du Covid, l'employeuse a obtenu, dans la CCT dite "de crise" du 1er juin 2021, que l'art. 6.3 CCT 2012, c'est-à-dire le régime du "congé heures de nuit", fût supprimé.  
 
A.f. En 2020, l'employé touchait un salaire mensuel brut de 6'105 fr. 90 versé treize fois l'an, plus 200 fr. par mois à titre de "participation caisse maladie". Ce salaire sera porté à 6'437 fr. bruts par mois et versé treize fois l'an à compter du 1er janvier 2021.  
 
A.g. Par courrier du 4 janvier 2021, l'employeuse a adressé à l'employé un congé-modification. L'employé s'est vu proposer un nouveau contrat de travail prévoyant, à partir du 1er juillet 2021, un salaire mensuel de 5'376 fr. bruts, pour un horaire hebdomadaire porté à 41,25 heures et sans plus aucun treizième salaire. Il s'est vu impartir un délai au 28 janvier 2021 pour accepter par écrit ces nouvelles conditions d'emploi, faute de quoi ses rapports de travail seraient résiliés dans un second temps.  
L'employé n'a pas donné son accord. 
 
A.h. Le 18 janvier 2021, il s'est vu communiquer un décompte établi par l'employeuse relatif à ses heures de nuit. Selon ce décompte, il avait, au 31 décembre 2020, 1'470 heures de nuit à son actif, ce qui lui donnait droit à sept mois de repos compensatoire. Le décompte précisait que ceci correspondait à une "indemnité congé heures de nuit" de 5'301 fr. 85 par mois (80% du salaire effectif de 6'427 fr. 30 + 200 fr.).  
 
A.i. Le 21 janvier 2021, l'employé est tombé malade. Il demeurera en incapacité de travail à 100% jusqu'au 30 juillet 2021.  
 
A.j. Par courrier du 22 juillet 2021, l'employeuse lui a notifié la résiliation de ses rapports de travail, avec un préavis contractuel de quatre mois, pour l'échéance du 30 novembre 2021. L'employé a été libéré de son obligation de travailler durant le délai de congé.  
 
A.k. Par e-mail du 29 novembre 2021 adressé à l'employeuse, l'employé lui a demandé ce qu'étaient devenus ses sept mois d'heures de nuit, ajoutant que "selon [le secrétaire syndical SSP-Trafic aérien], celles-ci devaient [lui] être payées au plus tard avec [s]on dernier salaire". Par e-mail du 7 décembre 2021, l'employeuse lui répondra que "le principe du congé heures de nuit étant un droit à un repos compensatoire [...], il n'y a[vait] dès lors jamais aucun paiement de fait en relation avec des heures de nuit [...]". L'intervention du syndicat ne donnera pas davantage satisfaction à l'employé.  
 
B.  
 
B.a. Après l'échec d'une tentative de conciliation préalable, le 30 juin 2022, l'employé a saisi le Tribunal des prud'hommes de Genève d'une demande tendant notamment au paiement par l'employeuse de 35'992 fr. 88 bruts (6'427 fr. 30 x 80 % x 7 mois) avec intérêts, à titre d'indemnité pour "congé heures de nuit".  
Par jugement du 6 octobre 2023, le Tribunal des prud'hommes de Genève a débouté le demandeur de sa conclusion en paiement. 
 
B.b. Par arrêt du 19 septembre 2024, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève a admis l'appel de l'employé, annulé le premier jugement et condamné l'employeuse à verser à l'employé le montant de 35'992 fr. 88 bruts, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er décembre 2021. Ses motifs seront évoqués dans les considérants en droit du présent arrêt, dans la mesure utile à la discussion des griefs développés dans le recours.  
 
C.  
L'employeuse forme un recours en matière civile en concluant principalement à l'annulation de l'arrêt du 19 septembre 2024 et la confirmation du jugement du Tribunal des prud'hommes du 6 octobre 2023. 
Sa requête d'effet suspensif a été admise par ordonnance présidentielle du 22 novembre 2024. 
Dans sa réponse, l'employé conclut au rejet du recours. Dans la sienne, la cour cantonale s'en réfère à son arrêt. 
Les parties ont encore répliqué et dupliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF), prise sur appel par le tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF) dans une action en matière de droit du travail dont la valeur litigieuse est supérieure à 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le recours peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Eu égard, toutefois, à l'exigence de motivation qu'impose l'art. 42 al. 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 140 III 115 consid. 2). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2). Le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux que si le grief correspondant a été invoqué et motivé par la partie recourante conformément au principe de l'allégation (art. 106 al. 2 LTF; ATF 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1; 139 I 229 consid. 2.2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 143 I 310 consid. 2.2; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 140 III 264 consid. 2.3; 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 129 I 8 consid. 2.1). Il ne suffit pas qu'une appréciation différente puisse être tenue pour également concevable ou apparaisse même préférable (ATF 144 I 170 consid. 7.3; 142 II 369 consid. 4.3; 140 III 167 consid. 2.1). 
 
3.  
Le litige porte sur la somme prétendue par l'employé à titre de paiement de son "congé heures de nuit" qui fait l'objet du ch. 6.3 CCT 2012. 
La cour cantonale a considéré que l'art. 6.3 et ses sous-sections ne spécifiaient nulle part qu'à défaut d'avoir été pris en nature en temps utile le droit au "congé heures de nuit" serait périmé et son indemnisation exclue. S'agissait-il d'un silence qualifié, comme la recourante le soutenait, ou d'une lacune au sens propre qu'il lui appartenait de combler? Les juges cantonaux ont tranché en faveur de cette dernière option. 
Ils ont tout d'abord observé que la recourante n'avait pas produit les travaux préparatoires de la CCT 2012, alors qu'elle devait forcément détenir ces éléments en sa qualité de co-signataire. Elle n'avait pas non plus produit des éléments permettant de retenir une pratique constante confirmant sa lecture de l'art. 6.3 CCT 2012 et permettant d'affirmer que son interprétation serait partagée par ses partenaires signataires de la CCT. Un indice allait plutôt dans un sens inverse: lors de ses tentatives d'obtenir l'indemnisation de son "congé heures de nuit" à la fin des rapports de travail, l'employé avait bénéficié du concours du secrétaire syndical du syndicat SSP-Trafic aérien, co-signataire de la CCT 2012. 
Le but du "congé heures de nuit" résidait dans le souci, partagé par les parties signataires de la CCT 2012, d'accorder aux collaborateurs âgés de 50 ans au moins et ayant effectué, au fil du temps, au moins 1'200 heures de travail de nuit, un repos compensatoire dont la durée était fonction d'une formule mathématique précise. Ce repos compensatoire était rémunéré à 80% du salaire de base. Il s'agissait d'une prestation patronale, dans la droite ligne des "largesses" patronales convenues avec les syndicats de l'époque E.________. Il n'était pas soutenu qu'une exceptionnelle indemnisation de ce congé, en lieu et place de sa prise en nature (rémunérée), contreviendrait au sens et au but de la norme. Après avoir relevé que l'exercice en nature de ce droit dépendait en définitive non seulement du choix du travailleur, mais surtout du bon vouloir de l'employeur, les juges cantonaux ont observé que la CCT 2012 ne réglait pas le sort du "congé heures de nuit" lorsque le travailleur n'avait pas exercé son droit "en nature", que ce soit par choix personnel ou parce que son employeur n'y avait pas été favorable. Il n'était nulle part question dans le texte de la perte par déchéance du droit en cause, en ce sens qu'il ne serait pas indemnisé. Partant, il ne s'agissait pas d'un silence qualifié. Au contraire, le point aurait dû être réglé. Le texte présentait une lacune proprement dite qu'il incombait au juge de combler, par souci d'équité (art. 1 al. 2 CC). 
Les juges cantonaux se sont ensuite efforcés de combler cette lacune en procédant par analogie, avec des solutions adoptées dans des domaines voisins. Ils ont recouru pour ce faire à la jurisprudence relative à l'indemnisation des vacances que le travailleur n'avait pas pu prendre en nature avant la fin des rapports de travail. En définitive, ont-ils conclu, l'employé avait droit à l'indemnisation en espèces de ce "congé heures de nuit" qu'il n'avait pas pris avant le terme de son emploi. 
 
4.  
La recourante se plaint tout d'abord d'une violation de son droit à une décision motivée. La cour cantonale n'aurait pas consacré une ligne aux arguments développés dans sa réponse à l'appel selon lesquels le "congé heures de nuit" représenterait une faculté, respectivement un avantage en faveur des employés, et - si tant est qu'une analogie soit possible - elle devrait être tentée avec les congés usuels au sens de l'art. 329 al. 3 CO
 
4.1. Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 Cst. implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Le juge n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 134 I 83 consid. 4.1; arrêt 4A_400/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.7.3, non publié in ATF 146 III 265). La motivation peut pour le reste être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; arrêt 4A_555/2023 du 29 novembre 2024 consid. 3.2.1).  
 
4.2. In casu, l'arrêt cantonal retient que l'art. 6.3 CCT 2012 octroie à l'employé âgé de 50 ans au moins et ayant effectué au fil du temps au moins 1'200 heures de travail de nuit un droit à un congé rémunéré en nature. L'exercice en nature de ce droit dépend non seulement du choix du travailleur, mais aussi et surtout du bon vouloir de l'employeur. Ceci répond-t-il au grief de la recourante, selon lequel ce droit représente une faculté/un avantage octroyé à l'employé ? Selon la compréhension de la Cour de céans, assurément. L'on ne voit guère d'ailleurs ce qu'il faudrait y ajouter pour contenter la recourante. Quant au parallèle que celle-ci voudrait tracer avec les congés usuels, il est vrai que l'arrêt cantonal est muet sur la question. Cela étant, il serait vain de renvoyer l'affaire à la cour cantonale pour qu'elle expose les raisons qui militent contre ce parallèle, celles-ci étant suffisamment évidentes comme cela sera démontré (cf. infra consid. 7).  
 
5.  
La recourante fait grief à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire dans l'établissement des faits, respectivement dans l'appréciation des preuves. 
 
5.1. La recourante entend voir rectifié l'état de fait pour englober de plus amples déclarations de partie (H.________ ayant été entendue à titre de partie), respectivement de témoins, que celles qui figurent en toutes lettres dans l'arrêt attaqué. Cela étant, lorsque la cour cantonale évoque certaines de ces déclarations, il ne faut pas y voir un fait. Dès lors, il ne sert à rien de réclamer qu'elles soient complétées ou intégralement retranscrites dans l'arrêt.  
 
5.2. La recourante a apparemment allégué en procédure avoir interpellé l'employé afin qu'il prenne son "congé heures de nuit" en nature sous peine de perte du droit. La cour cantonale s'est déclarée dubitative, relevant que si - par hypothèse - l'employé avait réellement été interpellé oralement à ce sujet, ceci aurait certainement déclenché une réaction de sa part, dans la mesure où il semblait être parti de l'idée qu'il avait le choix entre la prise en nature dudit congé ou son indemnisation. Ce faisant, les juges cantonaux n'ont pas versé dans l'arbitraire. Les preuves que la recourante convoque au soutien de sa thèse n'accablent pas la cour cantonale. Ainsi, H.________ a été entendue en qualité de partie et non de témoin. I.________, pour sa part, a certes déclaré que "le demandeur s'est adressé à plusieurs personnes de [s]on équipe RH dont [lui-même] concernant le congé heures de nuit. [Il] demandait qu'il soit indemnisé en espèces alors qu'il s'agit d'une compensation. Cela lui a été dit et même envoyé par email". Quant à J.________, elle a confirmé "qu'à plusieurs reprises le demandeur a été rendu attentif au fait que le congé heures de nuit ne donnait pas droit à un versement, mais donnait droit à un repos". Il est toutefois légitime de se demander de quelle manière ces informations ont été délivrées au demandeur, et notamment s'il lui a bien été précisé que le droit de prendre ce repos compensatoire s'éteindrait au terme des rapports de travail s'il n'était pas exercé auparavant - ce qui ne ressort pas avec une telle clarté de ces témoignages. Quoi qu'il en soit, cet élément est intervenu dans l'arrêt attaqué uniquement pour justifier que la question de la violation du droit d'être entendu invoquée par le demandeur puisse rester indécise et non pour trancher entre un silence qualifié ou une lacune au sens propre de la CCT 2012.  
 
5.3. La recourante voudrait voir reconnu le fait qu'elle avait une pratique constante par rapport à ses employés, confirmant sa lecture de l'art. 6.3 CCT 2012. Cela étant, le fait que le témoin I.________ ait déclaré qu'il n'y ait, à sa connaissance, jamais eu de versement en espèces au titre de "congé heures de nuit" n'en apporte pas la démonstration flagrante - pas plus d'ailleurs que le texte de l'art. 6.3 CCT 2012 ou l'état de fait à la base de l'arrêt du Tribunal des prud'hommes du 16 août 2013 qui concernait une autre employée de la recourante - et, d'ailleurs, pour que ce fait ait une quelconque portée juridique, encore eût-il fallu que cette compréhension fût partagée par les autres parties signataires de cette convention, ce qui n'est pas allégué.  
 
5.4. Finalement, il n'y a pas matière à rectification de l'état de fait déterminant au chapitre de la "faculté" qu'il faudrait lire à l'art. 6.3 CCT 2012, puisque d'une part le débat porte bien plutôt sur l'extinction du droit à l'issue des rapports contractuels faute d'exercice en nature pendant la durée de ceux-ci et d'autre part, puisque la manière dont il faut interpréter la disposition susdite est une question de droit (et non de fait).  
 
6.  
La recourante dénonce encore une violation de l'art. 8 CC. À son sens, il appartenait à l'employé d'alléguer qu'il avait exercé la "faculté" de bénéficier d'un "congé heures de nuit" pendant les rapports de travail et de le démontrer. Il ne revenait pas à la recourante de prouver que l'employé avait renoncé à l'exercice de ce congé. 
Elle perd de vue que les considérants que la cour cantonale a consacrés à l'hypothétique renonciation de l'intimé à l'exercice de son "congé heures de nuit", respectivement à son indemnisation, ne servaient qu'à expliquer les raisons pour lesquelles l'éventuelle violation du droit d'être entendu de ce dernier - un grief qu'il avait formulé dans son appel - pouvait demeurer indécise (cf. arrêt attaqué, p. 16). Le moyen de la recourante ne la mène donc nulle part. 
 
7.  
Finalement, la recourante croit déceler dans l'arrêt cantonal une violation de l'art. 357 CO. Elle estime que la cour cantonale s'est fourvoyée dans l'interprétation qu'elle a livrée de l'art. 6.3 CCT 2012: le "congé heures de nuit" représenterait une faculté offerte aux collaborateurs dont le but était de permettre à ceux d'entre eux qui avaient effectué un certain nombre d'heures de nuit et qui approchaient de l'âge de la retraite de bénéficier d'un repos supplémentaire, s'ils le souhaitaient et en faisaient usage. Une conversion en espèces serait exclue. Si une analogie devait être opérée, elle se concevrait uniquement avec les congés usuels - et non avec les jours de vacances de l'employé - ce qui signifie que ce dernier ne pourrait prétendre à une quelconque indemnisation s'il ne profitait pas concrètement de ces congés. 
 
7.1. Sauf disposition contraire de la convention collective de travail, les clauses relatives à la conclusion, au contenu et à l'extinction des contrats individuels de travail ont, pour la durée de la convention, un effet direct et impératif envers les employeurs et travailleurs qu'elles lient (art. 357 al. 1 CO). Elles sont appelées clauses normatives. Elles doivent être interprétées de la même manière qu'une loi (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1; arrêt 4A_248/2021 du 9 novembre 2021 consid. 4.1.1).  
D'après la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). On peut cependant s'écarter de cette interprétation s'il y a des raisons sérieuses de penser que le texte de la loi ne reflète pas la volonté réelle du législateur; de tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Lorsque plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions; le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique. Dans le domaine de l'interprétation des dispositions normatives d'une convention collective, il ne faut pas exagérer la distinction entre les règles sur l'interprétation des lois et les règles sur l'interprétation des contrats; la volonté des parties aux contrats individuels de travail et ce que l'on peut comprendre selon le principe de la bonne foi constituent également des moyens d'interprétation (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1; arrêt 4A_248/2021 précité consid. 4.1.1). 
L'interprétation de la loi peut conduire à la constatation d'une lacune. Une lacune authentique (ou proprement dite) suppose que le législateur s'est abstenu de régler un point alors qu'il aurait dû le faire et qu'aucune solution ne se dégage du texte ou de l'interprétation de la loi. En revanche, si le législateur a renoncé volontairement à codifier une situation qui n'appelait pas nécessairement une intervention de sa part, son inaction équivaut à un silence qualifié. Quant à la lacune improprement dite, elle se caractérise par le fait que la loi offre certes une réponse, mais que celle-ci est insatisfaisante. D'après la jurisprudence, seule l'existence d'une lacune proprement dite appelle l'intervention du juge, tandis qu'il lui est en principe interdit, selon la conception traditionnelle qui découle notamment du principe de la séparation des pouvoirs, de corriger les lacunes improprement dites, à moins que le fait d'invoquer le sens réputé déterminé de la norme ne constitue un abus de droit ou ne viole la Constitution (sur le tout: ATF 150 I 80 consid. 3.1; 149 III 117 consid. 3.1; 148 V 84 consid. 7.1.2; ATF 147 V 2 consid. 4.4.1; ATF 146 V 121 consid. 2.5; ATF 142 IV 389 consid. 4.3.1; ATF 139 I 57 consid. 5.2). 
Le comblement de lacunes se conçoit également s'agissant de conventions collectives de travail (ATF 133 III 213 consid. 5.2; dans ce sens, JEAN-FRITZ STÖCKLI/ROLAND A. MÜLLER/CHRISTIAN MADUZ, in Berner Kommentar, Obligationenrecht, Der Arbeitsvertrag, 2e éd. 2024, n. 120 ad art. 356 CO; FRANK VISCHER/ANDREAS C. ALBRECHT, Zürcher Kommentar, Obligationenrecht, Der Arbeitsvertrag, 4e éd. 2006, n. 126 ad art. 356 CO; ANNE MEIER, Commentaire romand, Code des obligations I, 3e éd. 2021, n. 18 ad art. 356 CO). 
 
7.2. En l'espèce, les parties s'accordent sur le fait que l'art. 6.3 CCT 2012, dans sa lettre ou dans son interprétation, ne règle pas ce qu'il en est lorsque l'employé ne peut pas faire usage de son droit aux "congés heures de nuit" en nature pendant la durée des rapports de travail. Pour la cour cantonale, il y a là une lacune au sens propre à combler en recourant à la solution dégagée en matière de vacances non prises au terme des rapports de travail (art. 329d al. 2 CO; ATF 106 II 152; 101 II 283). Pour la recourante en revanche, il s'agit d'un silence qualifié : rien n'est spécifié, car le droit s'éteint purement et simplement, sans indemnité aucune.  
La recourante se réfère au but du congé en question pour étayer son point de vue; en vain, car les vacances ont également pour but de permettre au travailleur de prendre du repos, ce qui n'empêche pas qu'elles soient indemnisées en espèces lorsqu'elles ne peuvent plus être accordées en nature. Elle semble prendre appui sur le texte de l'art. 6.3 CCT 2012, muet sur la question de l'indemnisation; mais c'est précisément là que se loge la lacune querellée. Elle prétend enfin que la situation serait plutôt assimilable aux congés usuels appréhendés par l'art. 329 al. 3 CO et dont le principe est lié à la nature de l'événement; toutefois, l'on ne voit guère en quoi le "congé heures de nuit" serait lié à un événement ou un autre, ancré à une date précise. Elle tente encore dans sa dernière écriture une analogie avec le congé de maternité, mais là aussi, il s'agit d'un congé lié à un événement déterminé qui n'a a priori rien de commun avec celui ici en cause. 
La seule question véritablement épineuse est en l'espèce de savoir si - compte tenu de l'analogie correctement opérée avec le droit aux vacances pour combler la lacune considérée - l'employeuse n'aurait pas pu imposer que le "congé heures de nuit" soit pris (à tout le moins en partie) durant les quatre mois durant lesquels elle a libéré l'employé de son obligation de travailler (cf. supra let. Aj) (ATF 128 III 271 consid. 4; arrêts 4A_319/2019 du 17 mars 2020 consid. 8; 4A_83/2019 du 6 mai 2019 consid. 4.1; 4A_183/2012 du 11 septembre 2012 consid. 4.4). Cela étant, la recourante ne soulève aucun argument de cette nature, si bien que le Tribunal fédéral n'a pas à entrer dans ces considérations. La recourante n'élève pas davantage de grief à l'encontre du calcul de l'indemnité contrebalançant le congé litigieux, de sorte que son examen se révèle tout aussi superflu.  
 
8.  
Somme toute, le recours doit être rejeté. Vu cette issue, la recourante supportera les frais judiciaires et versera à son adverse partie une indemnité à titre de dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre des prud'hommes. 
 
 
Lausanne, le 5 mai 2025 
 
Au nom de la I re Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Hurni 
 
La Greffière : Fournier