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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_474/2023  
 
 
Arrêt du 6 septembre 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, 
Donzallaz, Hänni, Ryter et Kradolfer. 
Greffier : M. Rastorfer. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Me Patrice Keller, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Conseil communal de Lucens, 
place de la Couronne 1, 1522 Lucens, 
représenté par Me Anny Kasser-Overney, avocate, 
intimé, 
 
Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine (DEIEP) du canton de Vaud, Secrétariat général, Rue Caroline 11, 1014 Lausanne, représenté par la Police cantonale du commerce, chemin des Boveresses 155, 1066 Epalinges. 
 
Objet 
Règlement communal sur l'exercice de la prostitution (contrôle abstrait), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour constitutionnelle, du 4 août 2023 (CCST.2023.0003). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ Sàrl (ci-après: la Société) est propriétaire de la parcelle n° xxx de la commune de Lucens (ci-après: la Commune) sise U.________, ainsi que des bâtiments érigés sur cette parcelle. Jusqu'à la mi-2022, la Société exploitait dans ses locaux de Lucens un home pour des personnes ayant des troubles psychiatriques.  
 
A.b. Par publication officielle du 19 novembre 2021, la Municipalité de la Commune (ci-après: la Municipalité) a mis à l'enquête publique un projet de changement d'affectation de la zone adjacente à la parcelle de la Société, visant à la faire passer de zone artisanale à zone mixte. La Société y a fait opposition et, durant la procédure d'examen, a fait part à la Municipalité de son souhait d'ouvrir, en lieu et place du home - condamné, selon elle, à cesser son activité en raison du projet sur la parcelle adjacente - un salon de prostitution. Le 31 mars 2022, après avoir été interpellée par la Municipalité quant au maintien ou non de son opposition, la Société a déclaré retirer celle-ci.  
 
A.c. La demande de permis de changement d'affectation des locaux de la Société a été mise à l'enquête publique en date du 5 octobre 2022. Il s'agissait d'octroyer la possibilité d'exploiter un salon de prostitution comprenant 14 chambres, un bar de 15 places, un salon, ainsi que 16 places de stationnement. En parallèle, la Société a requis l'autorisation cantonale nécessaire à l'ouverture d'un salon de prostitution.  
Durant l'enquête publique, la Municipalité a déclaré, par son syndic, qu'elle n'était pas du tout favorable à l'activité de salon de prostitution envisagée et a encouragé la population à faire opposition, soulignant que, plus il y aurait d'opposants, plus elle aurait d'arguments pour refuser le projet de la Société. Cette dernière s'est plainte au syndic de ces procédés, qui relevaient à son avis de la mauvaise foi, ce à quoi ledit syndic lui a répondu qu'un règlement sur la prostitution était à l'étude. Il a précisé que "[ledit] règlement, qui sera soumis au Conseil communal lors de sa séance du 12 décembre [2022], réglementera l'activité et interdira la prostitution de rue et les salons de massage, dans un périmètre défini de certains lieux, ce qui empêcherait de facto toute activité de ce type dans les locaux du [home]". 
 
A.d. Le 12 décembre 2022, le Conseil communal de la Commune a adopté le règlement communal sur l'exercice de la prostitution (ci-après: le Règlement), qui est entré en vigueur le 9 février 2023, soit lors de son approbation par la Cheffe du Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine du canton de Vaud (ci-après: le Département cantonal). Cette approbation a été publiée dans la Feuille des avis officiels du canton de Vaud le 3 mars 2023.  
 
A.e. Le 22 mars 2023, la Société a saisi la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la Cour constitutionnelle) d'une requête tendant à l'annulation du chapitre II, soit les art. 7 à 10, du Règlement.  
 
B.  
Par arrêt du 4 août 2023, la Cour constitutionnelle a rejeté la requête de la Société. Elle a en substance jugé que les dispositions contestées - et en particulier la création d'un périmètre d'exclusion de 100 mètres autour de certains lieux où la prostitution de salon était totalement interdite - ne violaient ni la liberté économique, ni le principe de l'égalité de traitement. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la Société demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt de la Cour constitutionnelle du 4 août 2023 et le chapitre II, soit les art. 7 à 10, du Règlement. Elle se plaint de violations de la liberté économique, de l'égalité de traitement et de l'interdiction de l'arbitraire. 
La Cour constitutionnelle se réfère à son arrêt. Le Conseil communal de la Commune et le Département cantonal se déterminent et concluent tous deux au rejet du recours. La Société a déposé des observations finales. 
 
D.  
Le 6 septembre 2024, la II e Cour de droit public du Tribunal fédéral a délibéré sur le présent recours en séance publique. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 333 consid. 1). 
 
1.1. Le Tribunal fédéral connaît par la voie du recours en matière de droit public des recours (dits abstraits) contre les actes normatifs cantonaux (art. 82 let. b LTF), dont font partie les actes normatifs édictés par les communes (cf. arrêts 2C_177/2022 du 17 novembre 2022 consid. 1.1; 2C_1149/2018 du 10 mars 2020 consid. 1.1; 1C_469/2008 du 26 mai 2009 consid. 1, non publié in ATF 135 I 233). Lorsque, comme dans le canton de Vaud (cf. art. 136 al. 2 let. a de la Constitution du canton de Vaud du 14 avril 2003 [Cst./VD; RS 131.231] et art. 3 al. 3 de la loi vaudoise du 5 octobre 2004 sur la juridiction constitutionnelle [LCJ/VD; BLV 173.32]), la conformité du droit communal au droit supérieur peut faire l'objet d'un contrôle abstrait devant une juridiction cantonale statuant en instance unique, les décisions prises par cette autorité peuvent être attaquées devant le Tribunal fédéral (cf. art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF en lien avec l'art. 87 al. 2 LTF), étant précisé que le recours au Tribunal fédéral n'en reste pas moins un recours contre un acte normatif, de sorte que les exceptions de l'art. 83 LTF ne s'appliquent pas (ATF 149 I 81 consid. 3.3.4 et les arrêts cités).  
En l'espèce, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) relative à un règlement communal (art. 82 let. b LTF) et peut donc en principe faire l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. 
 
1.2. L'art. 89 al. 1 LTF confère la qualité pour former un recours en matière de droit public à quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). Si l'acte attaqué est un acte normatif, l'intérêt personnel requis peut être simplement virtuel, de sorte qu'il suffit qu'il existe un minimum de vraisemblance que le recourant puisse se voir un jour appliquer les dispositions contestées; quant à l'intérêt digne de protection, il n'est pas nécessaire qu'il soit de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (cf. ATF 149 I 81 consid. 4.2; 148 I 160 consid. 1.4; 147 I 136 consid. 1.3).  
En l'occurrence, la recourante - société à responsabilité limitée inscrite au registre du commerce du canton de Vaud, qui dispose ainsi de la personnalité morale (cf. art. 779 al. 1 CO [RS 220]) et partant, de la capacité d'être partie, ainsi que de celle d'ester en justice - a déposé une demande d'autorisation visant à pouvoir ouvrir un salon de prostitution dans ses locaux sis sur le territoire de la Commune. Il faut dès lors admettre qu'elle est virtuellement et personnellement touchée par les dispositions du Règlement attaqué, en tant que celles-ci restreignent l'exercice de la prostitution de salon sur le territoire communal. Ayant pris part à la procédure devant l'autorité précédente, elle dispose par conséquent de la qualité pour recourir. 
 
1.3. Pour le surplus, interjeté dans les formes requises (art. 42 LTF) et en temps utile (art. 100 al. 1 LTF; l'art. 101 LTF ne s'appliquant pas en l'espèce; cf. ATF 148 I 160 consid. 1.5; arrêt 2C_688/2022 du 14 mars 2023 consid. 1.7), le recours est recevable.  
 
2.  
Dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes, le Tribunal fédéral examine librement la conformité de l'acte normatif attaqué aux droits fondamentaux, à condition que ceux-ci soient invoqués et motivés conformément aux exigences découlant de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 145 I 121 consid. 2.1). Lors de cet examen, il s'impose une certaine retenue, eu égard notamment aux principes découlant du fédéralisme et de la proportionnalité. Dans ce contexte, il est décisif que la norme mise en cause puisse, d'après les principes d'interprétation reconnus, se voir attribuer un sens compatible avec les dispositions du droit supérieur invoquées (ATF 149 I 81 consid. 3.3.6; 148 I 160 consid. 2). Le Tribunal fédéral n'annule dès lors une norme cantonale ou communale que lorsque celle-ci ne se prête à aucune interprétation conforme à la Constitution ou à d'autres instruments internationaux consacrant des droits fondamentaux auxquels la Suisse est partie (cf. ATF 145 I 73 consid. 2). Pour en juger, il faut notamment tenir compte de la portée de l'atteinte aux droits fondamentaux en cause, de la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante, ainsi que des circonstances concrètes dans lesquelles ladite norme sera appliquée (ATF 149 I 105 consid. 2.2; 148 I 160 consid. 2; arrêt 2C_810/2021 du 31 mars 2023 consid. 3.2, non publié in ATF 149 I 191). 
Le juge ne doit pas se borner à traiter le problème de manière purement abstraite. Il lui incombe au contraire de prendre en compte dans son analyse la vraisemblance d'une application conforme au droit supérieur. Les explications de l'autorité cantonale ou communale sur la manière dont elle applique ou envisage d'appliquer la disposition contestée doivent être prises en considération. Si une réglementation de portée générale apparaît comme défendable au regard des droits fondamentaux en cause dans des situations normales, telles que le législateur pouvait les prévoir, l'éventualité que, dans certains cas, son application puisse se révéler contraire aux droits fondamentaux ne saurait en principe justifier une intervention du juge au stade du contrôle abstrait des normes (ATF 148 I 160 consid. 2). 
 
3.  
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire (art. 9 Cst.) - ou en violation du droit au sens de l'art.95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 145 V 188 consid. 2). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (cf. ATF 145 I 26 consid. 1.3). 
 
3.1. En l'occurrence, la recourante conteste sous l'angle de l'arbitraire l'appréciation par la Cour constitutionnelle du plan de situation qu'elle a produit représentant visuellement les zones du territoire communal dans lesquelles l'exercice de la prostitution de salon serait totalement interdit selon le Règlement. Elle lui reproche à cet égard d'avoir retenu que l'implantation d'un salon en zone artisanale semblait partiellement possible, qualifiant ce raisonnement d'absurde. Elle lui fait aussi grief d'avoir considéré qu'une telle implantation restait également en grande partie possible en zone industrielle, alors qu'il s'agirait d'une activité commerciale et non pas industrielle ou artisanale au sens de l'art. 93 du règlement communal du 21 octobre 2013 sur le plan général d'affectation et la police des constructions de la Commune (ci-après: RPGA).  
Dans l'arrêt attaqué, l'autorité précédente a réfuté l'argumentation de la recourante fondée sur la prétendue impossibilité d'implanter un salon de prostitution sur l'ensemble du territoire communal pour deux motifs. D'une part, il ressortait visuellement du plan de situation fourni par la recourante qu'une partie de la zone artisanale n'était pas couverte par le périmètre d'interdiction de la prostitution de salon tel que prévu par le Règlement. D'autre part, toujours selon ledit plan, une implantation apparaissait également largement possible en zone industrielle. Le Conseil communal avait au demeurant laissé la porte ouverte à l'installation de salons de prostitution dans ladite zone, qui n'était pas à prépondérance d'habitat et où l'activité commerciale n'était pas exclue, puisque l'artisanat y était admis. Des entreprises ayant une telle activité y étaient d'ailleurs implantées. Enfin, la Municipalité conservait, conformément à l'art. 10 du Règlement, la possibilité d'octroyer des dérogations dans la zone à bâtir. Dans ces circonstances, la zone industrielle apparaissait pouvoir se prêter à l'exploitation d'un salon de prostitution. 
 
3.2. Les critiques de la recourante peuvent d'emblée être écartées. En effet, force est de constater que l'intéressée admet elle-même que, selon le plan qu'elle a fourni, certaines parcelles en zone artisanale ne sont pas incluses dans le périmètre d'exclusion du Règlement. Le fait que celles-ci soient rares et que la recourante ne disposerait, selon elle, que d'une portion de bâtiment pour exercer son activité, ne suffit pas à tenir la motivation des juges précédents pour insoutenable et ne saurait être qualifiée d'absurde. Quant au fait que l'implantation d'un salon de prostitution serait, selon la Cour constitutionnelle, également grandement possible en zone industrielle, cette appréciation n'apparaît pas non plus critiquable. En effet, toujours selon le plan de situation fourni, une partie importante de cette zone n'est pas comprise dans le périmètre d'interdiction prévu par le Règlement attaqué. L'exercice de la prostitution de salon dans une zone industrielle n'apparaît en outre pas exclu du seul fait qu'il s'agirait d'une activité commerciale. En effet, sous l'angle de l'aménagement du territoire, c'est avant tout le potentiel abstrait de nuisances que peut engendrer le type d'entreprise qui détermine sa conformité à la zone (cf. ALEXANDER RUCH, Commentaire pratique LAT: autorisation de construire, protection juridique et procédure, 2020, n° 84 et 85 ad art. 22 LAT). Le Conseil communal a du reste souligné que des entreprises ayant une activité commerciale étaient d'ores et déjà implantées en zone industrielle. Enfin, il n'est pas contesté que l'art. 10 du Règlement, lu en relation avec l'art. 25 RPGA, permet à la Municipalité d'accorder des dérogations dans la zone à bâtir. Dans ces conditions, il n'était pas manifestement insoutenable, pour les juges précédents, de considérer en fait qu'une implantation en zone industrielle apparaissait, selon les circonstances, possible.  
Il convient de préciser qu'il s'agit ici d'un contrôle abstrait et que le point de savoir si la recourante pourrait concrètement, en fonction du lieu qu'elle occuperait, bénéficier d'une autorisation ne fait pas l'objet de la procédure. 
 
4.  
Avant d'examiner les griefs au fond de la recourante, il sied d'exposer les dispositions du Règlement dont la recourante conclut à l'annulation. 
"[...]  
 
CHAPITRE II  
 
DE LA PROSTITUTION DE SALON  
Article 7  
Lieux d'interdiction totale  
Sont considérés notamment comme des endroits où la prostitution de salon est prohibée en permanence:  
a) les bâtiments principalement affectés à l'habitation ou situés dans des zones à prépondérance d'habitat, ainsi que dans un périmètre de 100 mètres aux abords de celles-ci;  
b) les bâtiments de toute nature se trouvant à moins de 100 mètres des lieux de culte, cimetières, bâtiments préscolaires, scolaires, structures d'accueil collectif pour la petite enfance, de formation professionnelle, homes, appartements protégés, hôpitaux.  
La Municipalité peut préciser, par voie d'arrêté, la liste des lieux où la prostitution de salon est prohibée. Elle peut également établir une carte des lieux concernés.  
Article 8  
Lieux d'interdiction partielle et temporaire  
Certains endroits peuvent ne pas convenir à l'exercice de la prostitution non en permanence mais à des horaires déterminés.  
Sont notamment considérés comme inappropriés à l'exercice de la prostitution de salon les bâtiments situés dans toutes les zones centrales, lorsque cette activité constitue une gêne pour les habitants, durant les jours de repos public entre 22h00 et 07h00.  
 
Article 9  
Affectation du local  
Tout local accueillant une activité de prostitution de salon doit être conforme à l'affectation (commerciale) de l'immeuble ou de la partie concernée de celui-ci.  
Conformément à l'article 93 LATC, la Municipalité peut procéder à des inspections périodiques pour vérifier la conformité des locaux et de leur affectation; d'office ou à la requête de la Police cantonale du commerce.  
Article 10  
Dérogations  
Dans la même mesure que le prévoit l'article 85 LATC, la Municipalité peut accorder des dérogations, pour autant que des circonstances objectives le justifient. L'octroi de dérogations ne doit pas porter atteinte à un autre intérêt public prépondérant ou à des intérêts prépondérants de tiers.  
Ces dérogations peuvent être accordées à titre temporaire ou définitif et être assorties de conditions et charges particulières. Elles peuvent être limitées à la personne de l'exploitant et retirées en cas de changement d'exploitant.  
[...]".  
 
 
5.  
La recourante invoque une violation de sa liberté économique (art. 27 Cst.) en lien avec l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Elle fait en substance grief à la Cour constitutionnelle d'avoir confirmé, selon elle de manière infondée et arbitraire, que l'art. 7 du Règlement était conforme à la liberté économique, et en particulier que les limites géographiques à l'exercice de la prostitution de salon qu'il imposait respectaient le principe de la proportionnalité. 
 
5.1. En tant que la recourante se plaint d'une décision arbitraire de l'autorité précédente, son grief n'a pas de portée propre par rapport à celui tiré de la violation de la liberté économique, de sorte que les critiques de l'intéressée seront examinées sous l'angle de celle-ci (cf. arrêt 2C_206/2017 du 23 février 2018 consid. 6.1), étant précisé que le Tribunal fédéral examine librement si le droit cantonal ou communal est conforme à l'art. 27 Cst.  
 
 
5.2. Invocable tant par les personnes physiques que morales, la liberté économique (art. 27 Cst.) protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 143 II 598 consid. 5.1; 143 I 403 consid. 5.6.1; 140 I 218 consid. 6.3). Les personnes exerçant la prostitution ou exploitant des établissements permettant son exercice peuvent de jurisprudence constante se prévaloir de la liberté économique (ATF 147 IV 73 consid. 7.3; 137 I 167 consid. 3.1; 111 II 295 consid. 2d; arrêt 2C_439/2023 du 26 janvier 2024 consid. 7.1 et les arrêts cités).  
Comme tout droit fondamental, la liberté économique peut être restreinte aux conditions de l'art. 36 Cst. Selon cette disposition, toute restriction d'un droit fondamental doit reposer sur une base légale (al. 1), être justifiée par un intérêt public prépondérant (al. 2) et respecter le principe de proportionnalité (al. 3). Celui-ci exige qu'une mesure soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude), que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité), et interdit toute limitation des droits individuels allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit) (cf. ATF 149 I 191 consid. 6 et 7.2; 147 I 393 consid. 5.3). S'agissant en particulier de la règle de la nécessité, l'atteinte ne doit pas aller au-delà de ce qui est indispensable du point de vue matériel, spatial, temporel et personnel pour atteindre le but d'intérêt public visé (cf. ATF 142 I 49 consid. 9.1 et les arrêts cités). Par spatial, il faut comprendre l'étendue du domaine d'application territorial où le droit fondamental peut ou ne peut pas être exercé librement (cf. JACQUES DUBEY, in Commentaire romand de la Constitution fédérale, 2021, n° 120 ad art. 36 Cst.). 
 
5.3. Dans son arrêt 2C_862/2015 du 7 juin 2016, le Tribunal fédéral s'est déjà interrogé sur la conformité au droit supérieur - en particulier à la liberté économique - d'une réglementation de la commune de Payerne interdisant en permanence la prostitution de salon dans des bâtiments principalement affectés à l'habitation ou situés dans des zones à prépondérance d'habitat. Il a en substance retenu qu'une telle limite géographique à l'exercice de la prostitution de salon - qui ne constituait pas une restriction grave à la liberté économique dès lors qu'elle ne consistait pas en l'interdiction pure et simple de l'activité de prostitution, qui pouvait s'exercer sur d'autres zones de la commune - remplissait les exigences de l'art. 36 Cst. D'une part, elle reposait sur une base légale suffisante. D'autre part, elle répondait à un intérêt de protection de l'ordre public, à savoir la préservation de la tranquillité, notamment nocturne, des habitants des zones où l'habitat est prépondérant face aux désagréments que provoquait inévitablement la prostitution de salon, tels que le bruit des clients arrivant en véhicule, pouvant se tromper et frapper à la mauvaise porte, faisant des allées et venues dans les couloirs des immeubles d'habitation ou discutant directement aux fenêtres avec les personnes pratiquant la prostitution. Enfin, elle était proportionnée, d'autres mesures moins incisives telles que l'insonorisation des locaux n'étant pas aptes à réduire l'ensemble des nuisances précitées et à atteindre l'intérêt public visé, de sorte que la concentration des salons en-dehors des zones à prépondérance d'habitat était nécessaire. Le Tribunal fédéral a toutefois relevé que le règlement, s'il n'excluait pas expressément la prostitution de salon sur le territoire communal, réduisait malgré tout considérablement les possibilités d'y exercer une telle activité. En effet, au vu du plan général d'affectation de la commune de Payerne, les zones restantes où la prostitution de salon demeurait en principe toujours possible étaient les zones urbaines dans lesquelles l'habitat n'était pas prépondérant, la zone de Vuary destinée aux activités agricoles et artisanales, ainsi que la zone industrielle, ce qui ne représentait en réalité que relativement peu de possibilités d'implantation. Le cumul des mesures de limitation sur la prostitution de salon pouvait ainsi aboutir, dans certaines circonstances, à une restriction excessive de la liberté économique. Toutefois, il n'était pas exclu que l'autorité chargée d'appliquer le règlement en fasse une interprétation conforme au droit supérieur, dès lors qu'elle avait la compétence de préciser la notion de zones à prépondérance d'habitat et d'accorder des dérogations dans les zones à bâtir. Dans ces circonstances, compte tenu de la retenue que s'imposait le Tribunal fédéral dans le cadre d'un contrôle abstrait des normes, il ne se justifiait pas d'annuler la réglementation attaquée, ce d'autant moins que les justiciables avaient la possibilité d'obtenir ultérieurement, par un contrôle concret de la norme, une protection juridique suffisante (cf. arrêt 2C_862/2015 précité consid. 5 à 8).  
 
5.4. Dans le présent cas d'espèce, le Règlement litigieux est calqué sur celui de la commune de Payerne examiné dans l'arrêt 2C_862/2015 précité. Toutefois, il s'en distingue sur un point fondamental, en ce qu'il prévoit une limitation géographique supplémentaire où la prostitution de salon est totalement interdite. S'agissant ainsi des lieux habitables où une telle activité est prohibée en permanence, alors que l'art. 7 par. 1 let. a du règlement payernois mentionnait seulement les bâtiments principalement affectés à l'habitation ou situés dans des zones à prépondérance d'habitat, l'art. 7 par. 1 let. a du Règlement attaqué étend l'interdiction à "un périmètre de 100 mètres aux abords de celles-ci". Quant aux autres lieux visés par l'art. 7 par. 1 let. b du règlement payernois, ils ne concernaient que les bâtiments situés "aux abords immédiats" des lieux de culte, cimetières, hôpitaux, etc., alors que l'art. 7 par. 1 let. b du Règlement litigieux s'étend aux bâtiments se trouvant "à moins de 100 mètres" desdits lieux. Pour le reste, les deux réglementations communales - et en particulier leur art. 8 prévoyant une mesure d'interdiction géographique partielle de la prostitution de salon, ainsi que leur art. 10 donnant à la Municipalité la possibilité d'accorder des dérogations - ont un contenu qui, pour l'essentiel, est identique.  
 
5.5. En l'occurrence, compte tenu des principes posés dans l'arrêt 2C_862/2015 précité (cf. consid. 4.3 et 5), il y a lieu d'admettre que la condition de la base légale suffisante est remplie, ce que la recourante ne conteste à juste titre pas. Il en va de même de celle de l'intérêt public, soit la protection de l'ordre et de la tranquillité publics - qui vise en premier lieu celle des résidents des immeubles d'habitation et des zones où l'habitat est prépondérant (cf. arrêts 2C_862/2015 précité consid. 6; 1C_499/2014 du 25 mars 2015 consid. 6.2.2) - face aux désagréments causés par la prostitution de salon, ce que la recourante ne remet pas non plus en cause. Cet intérêt ressort au demeurant de l'art. 2 par. 1 du Règlement, prévoyant que l'exercice de la prostitution, quelles qu'en soient les modalités, peut être interdit dans les endroits où il est de nature à troubler l'ordre et la tranquillité publics, à engendrer des nuisances ou à blesser la décence.  
 
5.6. En revanche, l'exigence de la proportionnalité suppose un examen détaillé au regard des limitations supplémentaires posées par le Règlement et de l'aménagement du territoire communal. En effet, il convient de se demander si la création d'une "zone tampon" absolue de 100 mètres autour des lieux dans lesquels la prostitution de salon est prohibée en permanence, ce qui a potentiellement pour effet d'étendre cette prohibition sur des zones où l'exercice de ce type de prostitution n'est en principe pas incompatible avec l'ordre public, telles que celles où l'habitat n'est pas prépondérant et où la jurisprudence a déjà admis que l'exercice de la prostitution de salon était admissible (cf. arrêt 2C_862/2015 précité consid. 7), reste compatible avec l'art. 36 al. 3 Cst.  
 
5.6.1. Sous cet angle, la recourante est en substance d'avis que la zone tampon de 100 mètres est trop restrictive. Selon elle, une interdiction totale de la prostitution de salon qui aurait été limitée aux abords immédiats des zones d'habitation et des lieux listés à l'art. 7 par. 1 let. b du Règlement - comme ce qui était prévu à Payerne - aurait constitué une mesure moins incisive qui aurait permis d'atteindre le but d'intérêt public visé, sans pour autant, par l'ajout d'une zone tampon de 100 mètres supplémentaires, exclure le territoire communal de milliers de mètres carrés pour l'implantation d'un salon. Quant à la possibilité d'obtenir une dérogation en vue d'implanter un salon dans la zone tampon litigieuse (cf. art. 10 du Règlement), celle-ci apparaissait illusoire, compte tenu de la position de la Municipalité qui avait d'ores et déjà "annoncé la couleur" en déclarant qu'une telle activité ne pourrait pas s'exercer à l'endroit projeté, cela même avant l'adoption du Règlement.  
 
5.6.2. Les juges précédents ont, pour leur part, considéré qu'une interdiction d'implantation des salons de prostitution "en limite" ou "aux abords immédiats" des zones à protéger des nuisances de la prostitution de salon ne permettait pas d'atteindre pleinement le but d'intérêt public poursuivi. Une distance suffisante par rapport aux zones à protéger pouvait raisonnablement être considérée comme nécessaire pour concrétiser la protection. Il n'y avait dès lors pas lieu de considérer que la mise en place d'une zone tampon violait le principe de la proportionnalité. Pour le reste, même si la dérogation prévue à l'art. 10 du Règlement avait une portée très limitée, selon l'interprétation qu'en ferait la Municipalité, une implantation demeurerait possible en zones artisanale et industrielle, ce qui suffisait à considérer le Règlement comme compatible avec la Constitution.  
 
5.6.3. A titre liminaire, il convient de relever que l'instauration d'une zone tampon autour d'une zone à protéger n'est en tant que telle pas contraire au principe de la proportionnalité (cf. avant tout en matière de protection de la biodiversité, ATF 124 II 19 consid. 3a). En ce sens, le fait de prévoir un périmètre d'exclusion de l'exercice de la prostitution de salon pour assurer la protection de certains lieux et zones contre les nuisances liées à cet exercice n'est, sur le principe, pas exclu, pour autant que le périmètre se limite à la surface nécessaire pour atteindre le but de protection poursuivi.  
 
5.6.4. Sous cet angle, la jurisprudence a retenu que le simple fait de concentrer des salons en dehors des quartiers où l'habitat est prépondérant - via l'interdiction totale de cette prostitution dans les bâtiments principalement affectés à l'habitation ou situés dans des zones à prépondérance d'habitat, ainsi que dans les abords immédiats d'autres lieux particuliers à protéger des nuisances de la prostitution - permettait d'ores et déjà d'atteindre le but de protection de l'ordre et de la tranquillité publics visé (cf. arrêt 2C_862/2015 précité consid. 7). L'ajout d'un périmètre d'exclusion de 100 mètres autour des lieux visés à l'art. 7 par. 1 du Règlement - périmètre qui ne peut raisonnablement pas être qualifié "d'abords immédiats" de ces lieux, ce que ni les juges précédents ni le Conseil communal ne contestent - ne s'avère ainsi a priori pas nécessaire pour atteindre le but d'intérêt public poursuivi, puisqu'il va au-delà de ce qui peut raisonnablement être exigé pour assurer la protection des lieux à protéger.  
 
5.6.5. A cela s'ajoute que le périmètre d'exclusion litigieux s'étend sur des portions du territoire communal constructible dans lesquelles il n'existe en principe aucun intérêt public à l'interdiction de l'exercice de la prostitution de salon.  
Il ressort en effet du plan de situation de la Commune fourni par la recourante, auquel la Cour constitutionnelle se réfère sans émettre de réserves à son sujet, que le rayon d'exclusion de 100 mètres englobe l'entier de la zone du centre (art. 48 ss RPGA), des zones de village B (art. 71 ss RPGA) et C (art. 74 ss RPGA), de la zone de moyenne densité (art. 81 ss RPGA), ainsi que des zones à développer par plans de quartier, soit celles du Pré du Muret (art. 102 RPGA) et de La Boutaz (art. 103 RPGA). Or, il s'agit-là de zones qui, de par leur destination, sont susceptibles de ne pas être dédiées de manière prépondérante à l'habitat et qui, si elles n'avaient pas été comprises dans la zone tampon, auraient pu entrer en ligne de compte pour accueillir des salons de prostitution selon la jurisprudence. On relèvera en outre que si la prostitution de salon demeure, comme on l'a vu (cf. supra consid. 3.2), possible en zone industrielle et en zone artisanale, qui par définition ne sont pas des zones destinées essentiellement à l'habitat où le repos nocturne présente une importance prépondérante, force est de constater que le rayon d'exclusion litigieux recouvre la grande partie de la zone artisanale et ne laisse qu'une portion congrue de celle-ci pour l'ouverture d'un salon. En définitive, la recourante se voit nier la possibilité de s'implanter dans des parts non négligeables du territoire communal où l'exercice de la prostitution ne serait pas de nature à troubler l'ordre et la tranquillité publics, et se voit confinée à une portion congrue de celle-ci, située avant tout en zone industrielle. Une telle restriction du territoire communal disponible apparaît d'autant moins proportionnée que, dans l'arrêt 2C_862/2015, la Cour de céans a retenu que des mesures de limitation géographiques qui laissaient pourtant plus de possibilités d'implantation que dans le présent cas d'espèce étaient susceptibles d'aboutir à une restriction excessive de la liberté économique (cf. arrêt 2C_862/2015 précité consid. 7.1.3). 
 
5.6.6. Pour le surplus, on observera que la mesure litigieuse prive l'art. 8 du Règlement de toute sa portée. Cette disposition prévoit en effet une interdiction partielle et temporaire dans certains lieux qui peuvent ne pas convenir à l'exercice de la prostitution non pas en permanence mais à des horaires déterminés, comme les bâtiments situés dans toutes les zones centrales de Lucens. Or, ces zones sont de toute façon incluses dans le périmètre d'exclusion prévu par l'art. 7 par. 1 du Règlement, où l'exercice de la prostitution de salon est interdit en permanence.  
 
5.6.7. En résumé, bien que l'exercice de la prostitution de salon ne soit pas exclu sur l'ensemble du territoire constructible communal, il faut admettre que, du point de vue spatial, la mesure prévue par l'art. 7 par. 1 du Règlement n'apparaît pas proportionnée, dès lors qu'une mesure moins incisive qu'une limite absolue de 100 mètres, à savoir une interdiction aux abords immédiats des zones à protéger, qui permet de tenir compte de la configuration des lieux et en particulier de ceux sans prépondérance d'habitat où la prostitution de salon n'est en principe pas de nature à troubler l'ordre et la tranquillité publics, suffirait pour atteindre le but recherché.  
 
5.7. Reste encore à examiner, compte tenu de la retenue que s'impose le Tribunal fédéral dans le cadre d'un contrôle abstrait, si la disposition litigieuse se prête à une interprétation conforme au droit supérieur, les explications de l'autorité compétente sur la manière dont elle applique ou envisage d'appliquer la disposition contestée devant à cet égard être prises en considération (cf. supra consid. 2).  
Sous cet angle, conformément à l'art. 10 du Règlement, il est vrai que la Municipalité peut accorder des dérogations s'agissant des lieux d'implantation des salons. Elle a d'ailleurs également, selon l'art. 7 par. 2 dudit Règlement, la compétence de préciser la notion de zones à prépondérance d'habitat. Ces deux instruments qui permettent à la Municipalité de déroger à la réglementation adoptée ne suffisent cependant pas à justifier un périmètre d'exclusion de 100 mètres de principe sous l'angle de la proportionnalité. En effet, si la possibilité d'installer des salons à titre exceptionnel peut théoriquement être accordée en tant que dérogation partout sur le territoire communal, il n'en demeure pas moins que la règle ordinaire d'interdiction comprend une zone hors secteur à prépondérance d'habitat de 100 mètres, à savoir une limite définie de manière claire et absolue qui, comme on l'a vu, va au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger les habitants. Partant, la seule interprétation conforme serait, pour la Municipalité, de faire fi de la règle des 100 mètres et d'examiner systématiquement si les demandes d'ouverture de salons situés dans la zone tampon risquent concrètement de porter atteinte à la tranquillité publique et, si tel n'est pas le cas, d'accorder une autorisation à titre de dérogation. Une telle situation revient au final à enlever toute portée à l'institution d'une zone tampon à titre réglementaire, cette dernière disposition devenant en quelque sorte l'exception par rapport au système dérogatoire qui devrait primer. Or, dans le cadre d'un contrôle abstrait, on ne saurait justifier un système ne remplissant pas l'exigence de la proportionnalité dans son principe par la possibilité d'accorder des dérogations systématiques. Au surplus, compte tenu de la position adoptée par la Municipalité quant à l'activité de prostitution de salon sur son territoire, à l'égard de laquelle elle s'est déclarée "pas du tout favorable", la vraisemblance d'une application conforme au droit supérieur de l'art. 7 par. 1 du Règlement en lien avec l'art. 10 dudit Règlement ne saute pas manifestement aux yeux. 
 
5.8. En conclusion, il faut retenir que l'art. 7 par. 1 let. a et b du Règlement, en tant qu'il prévoit un périmètre automatique et absolu de 100 mètres hors des zones protégées dans lequel la prostitution de salon est totalement interdite, est disproportionné et, partant, viole la liberté économique.  
Compte tenu de la retenue dont doit faire preuve le Tribunal fédéral dans le cadre du contrôle abstrait d'une norme cantonale ou communale (cf. supra consid. 2), l'annulation intégrale de l'art. 7 par. 1 du Règlement litigieux n'apparaît toutefois pas justifiée. Du moment que le problème réside dans la zone tampon d'exclusion de 100 mètres réservée par les let. a et b de cette disposition, l'annulation de cette réserve suffit pour que la norme litigieuse puisse être appliquée de manière conforme à la Constitution (cf. arrêt 2C_862/2015 précité consid. 7). Il appartiendra, le cas échéant, au législateur communal, et non pas à la Cour de céans, de déterminer s'il entend ajouter une limite similaire à celle admise dans la commune de Payerne concernant les abords immédiats des zones à protéger. 
 
6.  
Pour le surplus, la recourante a conclu à l'annulation des autres dispositions du chapitre II du Règlement litigieux, à savoir de ses art. 8 à 10, sans toutefois formuler la moindre critique à l'encontre de ceux-ci. Dépourvues de toute motivation (art. 106 al. 2 et 42 al. 2 LTF), ces conclusions sont donc irrecevables (cf. arrêt 2C_810/2021 du 31 mars 2023 consid. 1.4 et les arrêts cités, non publié in ATF 149 I 191). 
 
7.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être partiellement admis dans la mesure où il est recevable, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs soulevés par la recourante en lien avec l'art. 7 par. 1 du Règlement. La réserve prohibant en permanence la prostitution de salon dans une zone tampon de 100 mètres telle que prévue aux let. a et b de l'art. 7 par. 1 du Règlement est ainsi annulée. L'arrêt attaqué est annulé dans cette même mesure. 
 
8.  
La recourante, dont les conclusions tendant à l'annulation des art. 8 à 10 du Règlement litigieux ont été déclarées irrecevables, succombe dans une large mesure. Il y a partant lieu de mettre la moitié des frais judiciaires à sa charge (art. 66 al. 1 LTF). Ni l'intimé ni le Département cantonal ne peuvent en revanche pas se voir imposer de frais judiciaires, dès lors qu'ils ne défendent pas un intérêt patrimonial (art. 66 al. 1 et 4 LTF). Agissant par ailleurs dans l'exercice de leurs attributions officielles, ils n'ont pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). Ils verseront toutefois à la recourante une indemnité réduite à titre de dépens, solidairement entre eux (art. 68 al. 1 et 2 LTF; cf. arrêt 2G_2/2024 du 2 octobre 2024 consid. 3.2). La cause sera renvoyée à la Cour constitutionnelle pour qu'elle statue à nouveau sur les frais et dépens de la procédure antérieure (art. 67 et 58 al. 5 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable. La réserve prohibant en permanence la prostitution de salon dans une zone tampon de 100 mètres telle que prévue aux let. a et b de l'art. 7 par. 1 du Règlement est annulée. L'arrêt attaqué est annulé dans cette même mesure. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à raison de 1'000 fr. à la charge de la recourante. 
 
3.  
Une indemnité de 1'000 fr., à verser à la recourante à titre de dépens réduits, est mise à la charge de l'intimé et du Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine du canton de Vaud, solidairement entre eux. 
 
4.  
La cause est renvoyée à la Cour constitutionnelle pour qu'elle statue sur le sort des frais et dépens de la procédure antérieure. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante et de l'intimé, à la Police cantonale du commerce représentant le Département de l'économie, de l'innovation, de l'emploi et du patrimoine, ainsi qu'au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour constitutionnelle. 
 
 
Lausanne, le 6 septembre 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : H. Rastorfer