Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1C_521/2024
Arrêt du 7 janvier 2025
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Haag, Président,
Müller et Merz.
Greffier : M. Alvarez.
Participants à la procédure
A.________, représentées par Me Laurence Casays, avocate,
recourantes,
contre
B.________,
intimé,
Commune de Crans-Montana, Administration communale, avenue de la Gare 20, 3963 Crans-Montana,
Conseil d'État du canton du Valais, place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion.
Objet
Autorisation de construire,
recours contre l'arrêt de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais du 4 juillet 2024 (A1 23 158).
Faits :
A.
B.________ est propriétaire de la parcelle n
o 530, plan n
o 6, de la Commune de Crans-Montana (secteur Montana). Ce bien-fonds est colloqué en zone 4 "zone de l'ordre dispersé - densité 0.6" selon l'art. 39.1 du règlement intercommunal sur les constructions (ci-après: RIC) homologué par le Conseil d'État du canton du Valais le 11 février 1998.
Le 24 décembre 2021, le prénommé a mis à l'enquête publique un projet portant sur la réalisation d'un garage et d'un nouveau hall d'entrée le reliant à la maison déjà édifiée sur cette parcelle. Une servitude de non-bâtir grevant le fonds voisin n
o 299 en faveur de la parcelle n
o 530 et de la commune a été constituée dans le but de justifier une dérogation de la distance aux limites.
Le 23 janvier 2022, A.________, propriétaires de la parcelle voisine n
o 300, se sont opposées au projet. Par décision du 20 avril 2022, le conseil communal a écarté l'opposition et délivré le permis de construire. Le 23 mai 2022, A.________ ont formé recours contre cette décision au Conseil d'État, qui l'a partiellement admis par décision du 19 juillet 2023. La décision municipale était annulée uniquement dans la mesure où la commune n'avait pas tenu compte de l'accroissement de la surface brute de plancher utile (ci-après: SBPU) résultant du couloir d'accès; le dossier lui était renvoyé pour analyser cette question (cf. décision du Conseil d'État consid. 6, p. 5 s.). En revanche, en tant qu'il concernait le garage, le permis de construire était confirmé et déclaré immédiatement exécutoire (
ibid., consid. 7). Par arrêt du 4 juillet 2024, la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais a rejeté le recours formé par les prénommées contre cette décision.
B.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demandent principalement au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt attaqué en ce sens que leur recours cantonal contre la décision du Conseil d'État "en tant qu'elle autorise la construction du garage dès son entrée en force", et en tant qu'elle ordonne le renvoi à la commune "pour nouvelle décision sur le couloir d'accès à la villa" est admis, la cause étant renvoyée au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Subsidiairement, elles concluent au renvoi de la cause au Conseil d'État pour nouvelle décision. Elles requièrent également l'effet suspensif, accordé par ordonnance du 8 octobre 2024.
Le Tribunal cantonal, le Conseil d'État ainsi que la Commune de Crans-Montana renoncent à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 89 consid. 1; 144 V 280 consid. 1).
1.1. L'arrêt attaqué confirme le renvoi de la cause à la Commune de Crans-Montana pour qu'elle procède au contrôle de la conformité de l'accroissement de la SBPU entraîné par le couloir d'accès (hall d'entrée) projeté. Il revêt dans cette mesure un caractère incident. Or, selon l'art. 93 al. 1 LTF, les recours formés contre de telles décisions sont en principe irrecevables. En revanche, dans la mesure où il confirme le caractère immédiatement exécutoire du permis de construire s'agissant de la réalisation du garage, l'arrêt attaqué se comprend comme une décision finale susceptible de recours (cf. art. 90 al. 1 LTF). Il n'apparaît enfin pas d'emblée exclu que ce dernier aspect du projet puisse faire l'objet d'un procès distinct et que l'arrêt attaqué doive, pour cette raison, s'analyser comme une décision partielle immédiatement attaquable (cf. art. 91 let. a LTF; arrêt 5A_731/2019 du 30 mars 2021 consid. 1.4.1 non publié in ATF 147 III 365). Il n'y a cependant pas lieu de qualifier formellement l'arrêt attaqué, le recours devant en tout état de cause être déclaré irrecevable pour les motifs qui suivent.
1.2. A l'appui de leur pourvoi, les recourantes se plaignent d'arbitraire et mentionnent l'art. 23 de la loi cantonale sur les constructions du 15 décembre 2016 (LC; RS/VS 705.1) ainsi que l'art. 30.14 RIC.
1.2.1. Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours en matière de droit public ne peut pas être formé pour violation du droit cantonal (et communal) en tant que tel. Il est cependant possible de faire valoir que l'application du droit cantonal (et communal) est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 150 I 80 consid. 2.1; 147 I 433 consid. 4.2; 146 II 367 consid. 3.1.5) ou contraire à un droit fondamental (ATF 138 I 225 consid. 3.1; arrêt 9C_215/2020 du 28 mai 2021 consid. 3.1, non publié in ATF 147 V 312). Le grief de violation de droits fondamentaux et de dispositions de droit cantonal n'est cependant examiné par le Tribunal fédéral que s'il a été invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 I 62 consid. 3; 144 II 313 consid. 5.1). La partie recourante doit indiquer quelle disposition constitutionnelle a été violée et démontrer par une argumentation précise en quoi consiste la violation, sous peine d'irrecevabilité (cf. ATF 150 I 80 consid. 2.1; 138 I 232 consid. 3).
Aux termes de l'art. 23 al. 1 LC, lorsque les distances entre bâtiments, les distances aux limites et les indices ainsi que les autres facteurs dépendant de la surface de la parcelle ont été calculés, la surface ayant servi de base aux calculs ne peut plus être réutilisée en vue de constructions ultérieures. Quant à l'art. 30.14 RIC, d'une teneur peu ou prou similaire, il dispose que les surfaces ayant déjà servi à la détermination des distances ou de l'indice d'utilisation du sol pour une construction, ne pourront être utilisées à ces mêmes fins pour une autre construction, même après aliénation ou partage.
1.2.2. En l'occurrence, pour implanter le garage sur la parcelle n
o 530 - ici seul en cause à teneur du grief soulevé -, en dérogation aux distances aux limites, une servitude de non-bâtir a été établie sur la parcelle voisine n
o 299, sur une portion de 87 m
2 (figurée en vert sur le plan de servitude mis à jour le 8 juillet 2022). Le Tribunal cantonal a validé cette opération, estimant en particulier qu'il ne pouvait être déduit du rapport du 3 juillet 1978 relatif à l'hôtel Aïda, produit par les recourantes, que les possibilités de construire sur la parcelle n
o 299 seraient épuisées. La servitude de non-bâtir gravant le fonds n
o 299 pour garantir la distance aux limites du garage litigieux pouvait partant être constituée et s'avérait admissible au regard de la jurisprudence cantonale rendue en application de l'art. 23 LC (cf. en particulier arrêt cantonal ACDP A1 12 330 du 12 juillet 2013 consid. 3.2.3). Par ailleurs, que cette servitude de non-bâtir empiète sur la surface de la servitude de passage à pied et pour tous véhicules établie en faveur de la parcelle n
o 300 et grevant, pour une "infime partie", la parcelle n
o 299 n'était pas non plus rédhibitoire: outre que l'art. 23 LC ne précisait pas qu'une surface impactée par une servitude ne pourrait pas être réutilisée dans le cadre d'une construction ultérieure, cette "juxtaposition" n'apparaissait en soi pas problématique, la servitude de non-bâtir n'entravant pas la servitude de passage. Les recourantes ne faisant au surplus pas valoir une violation des distances entre bâtiments, c'était à bon droit que le Conseil d'État avait retenu que la constitution de cette servitude permettait d'autoriser le projet de garage en dérogation aux distances à la limite.
Aux termes d'une argumentation sommaire, les recourantes affirment pour leur part que si chaque "type de calcul" (distance et utilisation du sol) "répond[ait] à sa propre logique, les deux types de calculs, dans le cas d'espèce, ne [pouvaient] pas simplement être traités de manière hermétique, sans faire aucun lien entre eux". En d'autres termes, dès lors que le Conseil d'État avait renvoyé la cause à l'instance précédente pour réexaminer la question du hall d'entrée au motif que des cessions de densité à la charge de la parcelle n
o 530 avaient eu lieu au fil du temps (cf. décision du Conseil d'État consid. 6, p. 6), il aurait dû en être de même s'agissant de la problématique de la servitude de non-bâtir permettant au garage de déroger aux distances à la limite. Ce faisant, les recourantes se bornent cependant à opposer leur propre appréciation à celle de l'instance sans expliquer en quoi celle-ci serait arbitraire. Elles ne démontrent en particulier pas que la cour cantonale aurait apprécié arbitrairement le rapport précité du 3 juillet 1978 en retenant l'existence d'un potentiel constructible suffisant pour la constitution de la servitude litigieuse; elles ne soutiennent pas non plus que, malgré cette servitude, les distances à la limite définies par le RIC ne seraient pas respectées. En définitive et de manière générale, les recourantes n'expliquent aucunement en quoi le Tribunal cantonal aurait interprété et appliqué de manière indéfendable la jurisprudence cantonale et les dispositions pertinentes ni en quoi sa solution serait arbitraire.
1.3. Ainsi, dépourvu de motivation suffisante au regard des exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. aussi art. 42 al. 2 LTF), le recours doit être déclaré irrecevable. Succombant, les recourantes supportent les frais de justice ( art. 66 al. 1 et 4 LTF ). Il n'est pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF )
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais de justice, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge solidaire des recourantes.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Commune de Crans-Montana, au Conseil d'État du canton du Valais ainsi qu'à la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais.
Lausanne, le 7 janvier 2025
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Haag
Le Greffier : Alvarez