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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_299/2023  
 
 
Arrêt du 7 mai 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, 
Donzallaz, Hänni, Ryter et Kradolfer. 
Greffière : Mme Kleber. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Cyril Mizrahi, avocat, 
recourante, 
 
contre 
 
Université de Berne, 
intimé, 
 
Direction de l'instruction publique du Canton de Berne, Sulgeneckstrasse 70, 3005 Berne. 
 
Objet 
Test d'admission aux études de médecine vétérinaire; mesure de compensation des désavantages; octroi de temps supplémentaire 
 
recours contre le jugement du Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, du 30 mars 2023 (100.2022.77). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, née en 2002, est atteinte de dyslexie-dysorthographie. Le 31 janvier 2021, alors qu'elle effectuait sa troisième année de gymnase, elle s'est inscrite aux études de médecine vétérinaire de l'Université de Berne. 
Par arrêté du 24 février 2021, le Conseil-exécutif du canton de Berne a prononcé une restriction d'admission (numerus clausus) aux études en médecine, notamment vétérinaire, pour l'année académique 2021/2022 (arrêté 226/2021). En cas de numerus clausus, les candidats doivent passer le test d'aptitude aux études de médecine AMS (ci-après: le test AMS), qui a lieu une fois par an. Ce test est élaboré par le Centre pour le développement de tests et le diagnostic de l'Université de Fribourg (ci-après: le Centre pour le développement de tests), sur mandat de la Conférence suisse des hautes écoles (ci-après: la CSHE). Le test AMS est utilisé comme outil de sélection pour accéder aux études en médecine humaine, chiropractie, médecine vétérinaire et médecine dentaire dans les universités de Bâle, de Berne, de Fribourg, de Zurich, de Suisse italienne et à l'École polytechnique fédérale de Zurich. Il comprend en principe neuf groupes d'exercices accomplis les uns après les autres, nombre qui a été ramené à six groupes lors de la session 2021 en raison de l'épidémie de coronavirus. Le test AMS est un test d'aptitudes cognitives, qui évalue le raisonnement, la mémoire, la vitesse d'exécution, la représentation spatiale, la compréhension de textes, ainsi que l'utilisation de formules mathématiques. 
L'association "swissuniversities" (ci-après: swissuniversities), qui réunit les recteurs des hautes écoles suisses, s'occupe des aspects opérationnels du test AMS et attribue les places d'études en fonction des résultats obtenus à celui-ci. Deux valeurs sont déterminantes: le rang percentile du test (PT) et le rang moyen de tous les groupes d'exercices (RM). Les valeurs sont comparables d'une année à l'autre. Le PT est calculé sur la base des scores de tous les participants et indique quel pourcentage a obtenu un résultat moins bon ou égal à un candidat donné. Sur la base du PT, une valeur limite d'admission est fixée par discipline. Si le résultat du test est supérieur au seuil, une place d'études est attribuée. Au cas où le nombre de personnes qui atteignent exactement la valeur seuil ne correspond pas exactement au nombre de places d'études encore disponibles, une différenciation supplémentaire est effectuée à l'aide du RM, calculé pour chaque personne sur le rang moyen de tous les groupes d'exercices. 
Entre le 8 mars et le 20 mai 2021, des échanges ont eu lieu entre A.________ et swissuniversities concernant la possibilité d'obtenir un tiers de temps supplémentaire pour réaliser le test AMS, à titre de compensation de la dyslexie-dysorthographie de la candidate. À l'appui de sa requête, A.________ a fourni un rapport d'évaluation de sa logopédiste du 23 avril 2021 attestant de limitations pathologiques dans la lecture même silencieuse. 
 
B.  
Par décision du 6 juillet 2021, la Direction de l'Université de Berne a formellement rejeté la demande d'octroi d'un tiers de temps supplémentaire, mais a attribué à A.________ une place au calme dans la salle où devait se dérouler le test AMS. 
A.________ a réalisé le 9 juillet 2021 le test AMS. Elle a obtenu un PT de 10 et un RM de 759, alors que le PT minimal pour les places en médecine vétérinaire était de 51 et le RM maximal de 490. Par décision du 3 août 2021, la Direction de l'Université de Berne l'a informée que ses résultats ne lui permettaient pas d'obtenir pour l'année académique 2021/2022 une place à l'Université de Berne en médecine vétérinaire, ni dans une autre université exigeant ce test. 
Le 6 août 2021, A.________ a formé un recours contre la décision du 6 juillet 2021 et celle du 3 août 2021 auprès de la Direction de l'instruction publique et de la culture du canton de Berne (ci-après: la Direction de l'instruction), qui l'a rejeté par décision du 15 février 2022. 
A.________ a recouru contre la décision du 15 février 2022 auprès du Tribunal administratif du canton de Berne (ci-après: le Tribunal cantonal). Par jugement du 30 mars 2023, le Tribunal cantonal a rejeté le recours dans la mesure de sa recevabilité et mis les frais de la procédure, par 3'000 fr., à la charge de la recourante. 
 
C.  
Contre le jugement du 30 mars 2023, A.________ forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Elle conclut, sous suite de frais et dépens y inclus pour la procédure devant le Tribunal cantonal, à l'annulation du jugement attaqué, à l'annulation de la décision du 15 février 2022 de la Direction de l'instruction et à ce qu'il soit ordonné à l'Université de Berne et à la Direction de l'instruction de lui accorder un tiers de temps supplémentaire lors du test d'aptitude AMS. Subsidiairement, elle demande l'annulation du jugement entrepris et le renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision. 
Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer sur le recours et se réfère à son jugement. La Direction de l'instruction renonce à déposer une réponse. L'Université de Berne conclut au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. Le Bureau fédéral de l'égalité pour les personnes handicapées (BFEH) a renoncé à se déterminer. A.________ a répliqué, en maintenant ses conclusions. 
Délibérant en séance publique le 7 mai 2024, la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis le recours et renvoyé la cause au Tribunal cantonal. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 89 consid. 1; 144 II 184 consid. 1). 
 
1.1. Le litige porte sur le refus d'accorder à la recourante du temps supplémentaire pour réaliser le test AMS. Il ne concerne en revanche plus le refus d'attribuer à la recourante une place d'études en médecine vétérinaire pour l'année académique 2021/2022. Le Tribunal cantonal a en effet jugé le recours irrecevable sur ce point et cette irrecevabilité n'est pas remise en cause devant le Tribunal fédéral.  
La cause relève du droit public (art. 82 let. a LTF) et ne tombe sous le coup d'aucune des exceptions visées à l'art. 83 LTF. Elle échappe en particulier à la clause d'exclusion de l'art. 83 let. t LTF, à teneur de laquelle le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, notamment en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession, dès lors que n'est pas en cause l'évaluation des capacités de la recourante, mais l'octroi de temps supplémentaire pour compenser un désavantage (cf. ATF 147 I 73 consid. 1.2). 
 
1.2. Pour le surplus, le recours, dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par la recourante, destinataire de l'arrêt attaqué (art. 89 al. 1 let. a LTF).  
La qualité pour recourir suppose également un intérêt digne de protection, actuel et pratique, à l'annulation ou à la modification de la décision entreprise (cf. art. 89 al. 1 let. b et c LTF; ATF 142 I 135 consid. 1.3.1). En principe, l'intérêt digne de protection doit exister non seulement au moment du dépôt du recours, mais encore au moment où l'arrêt est rendu. Toutefois, le Tribunal fédéral fait exceptionnellement abstraction de l'exigence d'un intérêt actuel, lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle ne perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 146 II 335 consid. 1.3; 142 I 135 consid. 1.3.1 et les arrêts cités). Ces conditions sont remplies en l'espèce. En effet, la décision de restriction d'accès aux études de médecine, notamment vétérinaire, à l'Université de Berne est renouvelée d'année en année, de sorte qu'il est toujours nécessaire de se présenter au test AMS pour intégrer cette filiale. Comme l'a relevé le Tribunal cantonal, en raison de la succession des instances de recours, il n'est en outre pratiquement pas possible de statuer de manière définitive avant la tenue annuelle du test. Enfin, la question revêt un intérêt public de principe s'agissant de la compensation des désavantages dans l'accès aux études de médecine, notamment vétérinaire. 
Il convient donc d'entrer en matière sur le recours, sous réserve de la conclusion tendant à l'annulation de la décision du 15 février 2022 de la Direction de l'instruction, qui est irrecevable en raison de l'effet dévolutif du recours interjeté devant le Tribunal cantonal (ATF 136 II 101 consid. 1.2). 
 
2.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (cf. art. 95 let. a et b et 106 al. 1 LTF). Toutefois, en vertu de l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral ne connaît de la violation des droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 148 I 127 consid. 4.3). 
 
3.  
 
3.1. Le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF (ATF 148 I 127 consid. 4.3). Il y a notamment violation du droit lorsqu'un fait juridiquement pertinent n'a pas été établi (ATF 141 II 14 consid. 1.6; GRÉGORY BOVEY, in Commentaire de la LTF, 3e éd. 2022, no 36 ad art. 97 LTF; MARKUS SCHOTT, in Basler Kommentar Bundesgerichtsgesetz, 3e éd. 2018, no 19 ad art. 97 LTF). En vertu de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Les faits notoires peuvent en revanche être pris en considération d'office par le Tribunal fédéral (arrêt 2C_149/2023 du 22 novembre 2023 consid. 2.1 et les nombreux arrêts cités). Les informations librement accessibles sur des sites internet bénéficiant d'une empreinte officielle constituent des faits notoires (ATF 143 IV 380 consid. 1.2).  
 
3.2. En l'occurrence, on peut considérer de manière générale que les informations relatives au test AMS figurant sur des sites officiels tels que le site de swissuniversities (https://www.swissuniversities.ch/fr/) constituent des faits notoires, qui peuvent être pris en considération d'office.  
Savoir si la fiche d'information de swissuniversities d'avril 2023 intitulée "demande de compensation des désavantages/adaptation des conditions du test d'aptitudes aux études de médecine", produite en annexe au recours sans indication de lien internet officiel, est aussi un fait notoire peut demeurer indécis. En effet, les juges précédents se sont eux-mêmes référés à la version d'avril 2021 de ce document, qui avait été transmise à la recourante lorsqu'elle avait formulé sa demande, et les deux versions ne diffèrent pas. 
 
4.  
Le litige porte sur le refus d'octroyer à la recourante du temps supplémentaire au test AMS pour compenser sa dyslexie-dysorthographie. 
En substance, le Tribunal cantonal, suivant les arguments de l'Université de Berne, a confirmé le refus d'octroi de la mesure sollicitée au motif de la spécificité du test AMS en tant qu'outil d'évaluation du potentiel cognitif de base des candidats et candidates aux études de médecine, contrôlant notamment leur résistance au stress et aptitude à rendre un travail de qualité même sous la pression du temps. La vitesse d'exécution constituant une capacité clef examinée lors du test, afin de vérifier l'adaptabilité de potentiels futurs étudiants, une mesure de compensation portant sur le temps serait exclue. Selon les précédents juges, le caractère sélectif et concurrentiel du test AMS s'opposerait en outre à une adaptation des conditions horaires. Il s'avérerait impossible de déterminer objectivement dans quelle mesure un tiers de temps supplémentaire serait adéquat pour compenser le désavantage de la recourante dans chacun des sous-groupes d'exercices du test et un aménagement horaire reviendrait à la favoriser. Le Tribunal cantonal a enfin relevé que tout le monde ne possédait pas les compétences requises pour les études de médecine, connues pour leurs exigences élevées, et que la mesure demandée engendrerait des contraintes organisationnelles et logistiques qu'il ne fallait pas sous-estimer. 
 
5.  
La recourante reproche au Tribunal cantonal d'avoir méconnu les dispositions pertinentes relatives au droit de l'égalité des personnes handicapées. Elle invoque les art. 5 al. 1 à 3 et 24 de la Convention du 13 décembre 2006 relative aux droits des personnes handicapées, entrée en vigueur pour la Suisse le 15 mai 2014 (CDPH; RS 0.109), ainsi que l'art. 8 al. 2 Cst. 
 
5.1. Les principes suivants découlent de la CDPH.  
 
5.1.1. Aux termes de l'art. 5 CDPH, les États Parties reconnaissent que toutes les personnes sont égales devant la loi et en vertu de celle-ci et ont droit sans discrimination à l'égale protection et à l'égal bénéfice de la loi (al. 1), interdisent toutes les discriminations fondées sur le handicap et garantissent aux personnes handicapées une égale et effective protection juridique contre toute discrimination, quel qu'en soit le fondement (al. 2) et, afin de promouvoir l'égalité et d'éliminer la discrimination, prennent toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés (al. 3).  
L'art. 24 al. 5 CDPH prévoit que les États parties veillent à ce que les personnes handicapées puissent avoir accès, sans discrimination et sur la base de l'égalité avec les autres, à l'enseignement tertiaire général, à la formation professionnelle, à l'enseignement pour adultes et à la formation continue. À cette fin, ils veillent à ce que des aménagements raisonnables soient apportés en faveur des personnes handicapées. 
 
5.1.2. La jurisprudence récente retient que l'interdiction de la discrimination contenue dans la CDPH est directement applicable (ATF 149 I 41 consid. 7; 145 I 142 consid. 5.1; arrêts 8C_633/2021 du 14 avril 2022 consid. 4.2 et 6.2.2; 8C_390/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.3.2). Cela implique, en lien avec l'interdiction de la discrimination en ce qui concerne le droit à l'éducation consacré à l'art. 24 CDPH, que si l'État propose des offres de formation, il doit concevoir un accès non discriminatoire et ne doit exclure personne de leur fréquentation pour des motifs discriminatoires (message du Conseil fédéral du 19 décembre 2012 portant approbation de la Convention, FF 2013 601, p. 639, cité in ATF 149 I 41 consid. 7; 145 I 142 consid. 5.1).  
 
5.1.3. D'après la CDPH, la discrimination fondée sur le handicap comprend "toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le handicap qui a pour objet ou pour effet de compromettre ou réduire à néant la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, sur la base de l'égalité avec les autres, de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil ou autres" et "toutes les formes de discrimination, y compris le refus d'aménagement raisonnable" (art. 2 al. 4 CDPH). Le Tribunal fédéral a relevé que la portée de l'interdiction de la discrimination au sens de la CDPH n'allait pas au-delà de celle de l'art. 8 al. 2 Cst., en ce sens que, dans le contexte de la CDPH comme en lien avec l'art. 8 al. 2 Cst., un traitement différent en raison d'un handicap n'est pas constitutif de discrimination lorsqu'il est fondé sur une justification qualifiée (cf. arrêt 2C_121/2022 du 24 novembre 2022 consid. 5.4 et les arrêts cités; cf. infra consid. 5.2).  
 
5.1.4. À teneur de l'art. 2 al. 5 CDPH, les "aménagements raisonnables" (" angemessene Vorkehrungen "; " accomodamento ragionevole ") désignent "les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n'imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l'exercice, sur la base de l'égalité avec les autres, de tous les droits de l'homme et de toutes les libertés fondamentales". L'aménagement raisonnable est une mesure ponctuelle qui permet de corriger une inégalité factuelle à l'égard d'une personne handicapée dans un cas concret. Corrélativement, ne pas octroyer un aménagement raisonnable constitue une discrimination au sens de la Convention (cf. art. 2 al. 4 dernière phrase CDPH; cf. Comité des droits des personnes handicapées, Observation générale no 6 [2018] sur l'égalité et la non-discrimination, doc. NU CRPD/C/GC/6, par. 18, par. 23 ss [ci-après: observation générale no 6]; TAREK NAGUIB, in UNO-Behindertenrechtskonvention, Stämpfli Handkommentar, 2023, no 26 ss ad art. 2 CDPH; MORGANE VENTURA, Interdiction de la discrimination, droit d'accès et aménagements raisonnables: le point sur les droits des personnes en situation de handicap, RSDIE 2020, p. 681 ss, p. 685; ANNA NILSSON, Article 2, in The UN Convention on the Rights of Persons with Disabilites. A Commentary, Oxford 2018, p. 63 ss, p. 78 s). Pour ne pas violer l'interdiction de la discrimination, un refus d'aménagement doit reposer sur des critères objectifs (Comité des droits des personnes handicapées, Observation générale no 6, par. 27).  
 
5.1.5. De manière générale, un aménagement est raisonnable s'il est approprié (i.), à savoir possible, réalisable, mais aussi adéquat pour la personne, nécessaire (ii.), c'est-à-dire s'il répond à un besoin réel et ne va pas au-delà, et proportionné au sens strict (iii.) (cf. NILSSON, op. cit., p. 80 s.; NAGUIB, op. cit., no 27 s. ad art. 2 CDPH). Dans ce contexte, le coût de l'aménagement est un paramètre à prendre en compte (cf. ATF 141 I 9 consid. 4), mais il n'est pas nécessairement à lui seul décisif (VENTURA, op. cit., p. 686; NAGUIB, op. cit., no 28 ad art. 2 CDPH).  
L'aménagement raisonnable doit être distingué des "mesures spécifiques" destinées à accélérer ou à assurer l'égalité de fait et qui sont réservées à l'art. 5 al. 4 CDPH (cf. Comité des droits des personnes handicapées, observation générale no 6, par. 25; STUDER/PÄRLI/MEIER, in UNO-Behindertenrechtskonvention, Stämpfli Handkommentar, 2023, no 48 ad art. 5). Ces mesures, aussi appelées mesures spéciales ou mesures positives, sont collectives et en principe temporaires. Elles peuvent, selon leur type, impliquer un traitement préférentiel pour un groupe au détriment d'autres groupes, afin de tendre à une égalité de résultats (par ex: quotas rigides, d'où parfois le terme de "discrimination positive", cf. ATF 131 II 361), alors que l'aménagement raisonnable est une mesure corrective individuelle visant à éliminer une discrimination dans un cas donné (cf. ELEONOR KLEBER, La discrimination multiple, thèse 2015, p. 400 à 402 et les références citées). 
 
5.2. En droit interne, le cadre juridique est le suivant.  
 
5.2.1. Selon l'art. 8 al. 2 Cst., nul ne doit subir de discrimination du fait notamment d'une déficience corporelle, mentale ou psychique. Cette disposition interdit toute mesure étatique défavorable à une personne et fondée sur le handicap, si cette mesure ne répond pas à une justification qualifiée (ATF 145 I 142 consid. 5.2). Pour être justifiée, la mesure litigieuse doit poursuivre un intérêt public légitime et primordial, être nécessaire et adéquate et respecter dans l'ensemble le principe de la proportionnalité (ATF 147 I 89 consid. 2.1; 147 I 1 consid. 5.2; 145 I 73 consid. 5.1; 143 I 129 consid. 2.3.1). Par ailleurs, l'art. 8 al. 2 Cst. interdit non seulement la discrimination directe, mais également la discrimination indirecte. Il y a discrimination indirecte lorsqu'une réglementation, sans désavantager directement un groupe déterminé, défavorise particulièrement par ses effets et sans justification objective les personnes appartenant à ce groupe (ATF 145 I 73 consid. 5.1; 142 V 316 consid. 6.1.2; 126 II 377 consid. 6c; 124 II 409 consid. 7).  
L'art. 8 al. 2 Cst. ne confère pas un droit individuel, susceptible d'être invoqué en justice, à la réalisation de l'égalité dans les faits (ATF 143 V 114 consid. 5.3.2.1; 141 I 9 consid. 3.1; 135 I 161 consid. 2.3; 134 I 105 consid. 5). L'élimination des inégalités factuelles subies par les personnes handicapées incombe en effet au législateur, en vertu du mandat constitutionnel de l'art. 8 al. 4 Cst. (cf. ATF 141 I 9 consid. 3.1; 139 II 289 consid. 2.2.1; 134 I 105 consid. 3.1). En revanche, l'art. 8 al. 2 Cst. peut imposer la prise d'une mesure concrète individuelle en vue d'éliminer une discrimination. C'est notamment le cas, à certaines conditions, dans le domaine de la formation et en lien avec les examens (cf. ATF 141 I 9 consid. 4 [cours de soutien à l'école obligatoire]; cf. infra consid. 5.3). La notion de "compensation des désavantages" (" Nachteilsausgleich "; " Compensazione degli svantaggi "), employée dans ce contexte (cf. ATF 147 I 73 consid. 6.4; arrêt 2D_13/2021 du 11 mars 2022 consid. 5.2.4), correspond à la notion d'aménagement raisonnable au sens de la CDPH (cf. VINCENT MARTENET, in Commentaire romand de la Constitution, 2021, no 94 ad art. 8 Cst.; cf. aussi VENTURA, op. cit., p. 685; MIZRAHI/BOLKENSTEYN, Compensation des désavantages: questions et aspects juridiques, in Revue suisse de pédagogie spécialisée, 2/2020, p. 7 ss, p. 10; COPUR/NAGUIB, Bildung, in Diskriminierungsrecht, 2014, p. 81 ss, p. 107 à 110).  
 
5.2.2. Pour mettre en oeuvre le mandat constitutionnel de l'art. 8 al. 4 Cst., le législateur a adopté la loi fédérale du 13 décembre 2002 sur l'élimination des inégalités frappant les personnes handicapées (loi sur l'égalité pour les handicapés, LHand; RS 151.3; ATF 145 I 142 consid. 5.2). La LHand s'applique à "la formation et à la formation continue" (art. 3 let. f LHand), mais, conformément à la répartition des compétences, pas directement aux prestations de formation qui sont, à l'instar de la formation universitaire, du ressort des cantons (cf. art. 3 et 62 al. 1 Cst.; cf. arrêt 2D_7/2011 du 19 mai 2011 consid. 2.4; SCHEFER/HESS-KLEIN, Droit de l'égalité des personnes handicapées, 2013, p. 82). Hormis s'agissant des frais (cf. art. 10 LHand prévoyant la gratuité des procédures), la non-applicabilité de la LHand en matière de formation offerte par les cantons n'a toutefois pas d'incidence matérielle, car le niveau de protection de l'art. 8 al. 2 Cst. est équivalent à celui de la LHand (cf. à propos de l'enseignement de base, arrêt 2C_974/2014 du 27 avril 2015 consid. 3.4; cf. SCHEFER/HESS-KLEIN, op. cit., p. 82).  
 
5.3. En ce qui concerne plus spécifiquement les examens et, en particulier, l'examen d'entrée aux études de médecine vétérinaire en cause, les principes en matière d'égalité et de non-discrimination peuvent se résumer comme suit.  
 
5.3.1. En matière d'examens, la jurisprudence prend pour point de départ le principe d'égalité de traitement consacré à l'art. 8 al. 1 Cst., dont elle déduit le principe de l'égalité des chances (ATF 147 I 73 consid. 6.2). Le principe d'égalité des chances commande, dans la conception d'un examen, de prévoir des conditions d'examen autant que possible homogènes (ATF 147 I 73 consid. 6.2 et les références citées). Lors d'un examen écrit, la définition des tâches, le déroulement de l'examen, le matériel distribué, les explications spéciales et les indications avant ou pendant l'examen doivent être équivalentes pour toutes les candidates et tous les candidats (ATF 147 I 73 consid. 6.2). Des conditions identiques mettent en effet toutes les candidates et tous les candidats en mesure de fournir un résultat correspondant à leurs capacités effectives (ATF 147 I 73 consid. 6.2). Au contraire, des conditions différentes violent la garantie de l'égalité de traitement (ATF 147 I 73 consid. 6.2).  
Cela étant, le principe d'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. commande aussi, de jurisprudence constante, de traiter de manière différente les situations différentes (ATF 147 I 73 consid. 6.1 et les arrêts cités) et l'interdiction de la discrimination de l'art. 8 al. 2 Cst. prohibe, comme il a été vu (cf. supra consid. 5.2), tant les discriminations directes qu'indirectes. Ainsi, le principe d'égalité et l'interdiction de la discrimination consacrés à l'art. 8 Cst. imposent, dans certaines situations, de déroger à l'égalité formelle pour compenser les désavantages résultant d'un handicap, afin d'assurer une égalité effective avec les étudiants non handicapés (cf. ATF 147 I 73 consid. 6.3; arrêts 2D_13/2021 du 11 mars 2022 consid. 5.2.4; 2C_974/2014 du 27 avril 2015 consid. 3.4).  
Toutefois, on n'est en présence d'une violation du principe de l'égalité de traitement, respectivement de l'interdiction de la discrimination que si la mesure de compensation refusée dans un cas concret peut influencer ou a influencé de manière déterminante le résultat de l'examen (ATF 147 I 73 consid. 6.7). À cet égard, il est suffisant que, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le désavantage ait été propre à en influencer le résultat (ATF 147 I 73 consid. 6.7). 
 
5.3.2. La loi sur l'Université du canton de Berne du 5 septembre 1996 (LUni; RSB 436.11) prévoit à quelles conditions une restriction d'admission aux études de médecine, notamment vétérinaire, peut être prononcée (cf. art. 29c à f LUni; cf. aussi art. 15 ss de l'ordonnance bernoise du 12 septembre 2012 sur l'Université [OUni; RSB 436.111.1]), mais ne contient pas de dispositions particulières s'agissant de la compensation des désavantages lors du test AMS.  
 
5.3.3. Selon la jurisprudence, un numerus clausus restreignant l'accès aux études universitaires est admissible, pour autant qu'il soit prévu par une base légale formelle (cf. ATF 146 II 56 consid. 8.3.1) et que le principe d'égalité, ainsi que celui de l'interdiction de l'arbitraire soient respectés dans l'attribution des places (cf. ATF 125 I 173 consid. 3c). Les universités sont donc libres d'instaurer un examen d'entrée tel que le test AMS, mais elles demeurent tenues de respecter les exigences en matière de compensation des désavantages pour les personnes handicapées, lesquelles découlent directement du principe d'égalité et de l'interdiction de la discrimination. Le respect de l'égalité et de l'interdiction de la discrimination dans le cadre du test AMS apparaît d'autant plus crucial que les futurs étudiantes et étudiants en médecine et médecine vétérinaire sont sélectionnés uniquement en fonction des résultats obtenus à ce test (cf. supra point A en fait). Ils n'ont donc pas d'autre moyen d'accéder à ces études dans les universités pratiquant ce test. Il convient aussi de noter que la médecine vétérinaire n'est pas dispensée dans les universités romandes, de sorte qu'il n'y a pas d'autre possibilité en Suisse de poursuivre cette formation tertiaire que de réussir le test AMS.  
 
5.3.4. Pour prétendre à une mesure de compensation d'un désavantage lors d'un examen, la personne handicapée qui en a besoin doit avertir suffisamment tôt les autorités responsables de l'examen de son handicap (arrêt 2D_7/2011 du 19 mai 2011 consid. 5.4 et 5.5) et doit accompagner sa demande d'un certificat médical (cf. sur ces exigences formelles, TAREK PATWARI, Égalité de traitement et examens, Jusletter du 17 octobre 2022, par. 32 à 34; cf. aussi ATAF 2008/26 consid. 4.5). Matériellement, la mesure de compensation demandée ne doit pas entraver le but de l'examen ni procurer à la candidate ou au candidat un avantage (ATF 147 I 73 consid. 6.4.1 et 6.6). La mesure ne doit pas aboutir à l'impossibilité d'examiner certaines aptitudes requises pour la poursuite d'une formation ou l'exercice d'une profession (ATF 147 I 73 consid. 6.4; 122 I 130 consid. 3c/aa; arrêts 2C_974/2014 du 27 avril 2015 consid. 4.4.4 et 2D_7/2011 du 19 mai 2011 consid. 3.2). De nombreuses professions requièrent des qualités et des aptitudes que toutes les personnes ne possèdent pas dans la même mesure. Le simple fait que certaines personnes ne possèdent pas ces capacités, sans qu'il y ait faute de leur part, ne peut pas conduire à une réduction des exigences matérielles d'un examen (ATF 122 I 130 consid. 3c/aa; arrêt 2C_974/2014 du 27 avril 2015 consid. 4.4.4). De plus, le rétablissement de l'égalité des chances ne doit pas mener à une compensation excessive des désavantages, car cela entraînerait une violation de l'égalité des chances des autres candidats (cf. ATF 147 I 73 consid. 6.6).  
 
5.3.5. En principe, n'entrent ainsi en ligne de compte à titre de mesures compensatoires que des allégements de nature formelle des examens, tels une prolongation de la durée de l'examen, des pauses plus longues, des pauses supplémentaires, une division de l'épreuve en parties, le passage de l'examen en plusieurs étapes, des formes d'examens différentes, l'utilisation d'un ordinateur, ainsi que, pour les personnes malvoyantes, le grossissement des documents et, pour celles avec un handicap corporel, une place de travail adaptée (cf. arrêts 2C_974/2014 du 27 avril 2015 consid. 3.4; 2D_7/2011 du 19 mai 2011 consid. 3.2). C'est la nature de l'examen qui détermine quelles mesures de compensation doivent être ordonnées afin de rétablir l'égalité des conditions de départ, en fonction du handicap (cf. ATF 147 I 73 consid. 6.4.1). Par exemple, la question de savoir si des difficultés de lecture et d'écriture doivent être compensées en ne tenant pas compte des fautes dépend de ce que l'examen porte seulement sur des compétences spécialisées (la compensation est alors admissible), ou de ce que les capacités de lecture et d'écriture doivent être elles aussi contrôlées (la compensation est alors exclue) (cf. ATF 147 I 73 consid. 6.4.1). Il serait ainsi inadmissible d'autoriser un candidat à l'examen d'avocat qui a une peur pathologique de parler en public à passer son examen à huit clos, contrairement aux autres candidats, lorsque l'examen d'avocat doit justement démontrer que le candidat est capable de parler en public et plaider devant un tribunal (cf. ATF 147 I 73 consid. 6.4.1).  
 
5.4. En l'occurrence, il est établi dans le jugement entrepris que la recourante souffre de dyslexie-dysorthographie. La dyslexie et la dysorthographie font partie des troubles spécifiques du développement des acquisitions scolaires selon la classification statistique internationale des maladies et des problèmes de santé connexes (CIM-10, ch. F81) de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Ensemble, les deux troubles forment le trouble spécifique de la lecture (ch. F81 CIM-10). Il n'est pas contesté que ces troubles tombent sous la notion de handicap. Dans le cas de la recourante, celle-ci a établi, au moyen d'un rapport de sa logopédiste, non contesté par l'Université de Berne, que son trouble induisait notamment des limitations pathologiques en lecture, même silencieuse. Le test AMS est un examen écrit. Outre les données à lire, il comprend un groupe d'exercices intitulé "compréhension de textes" (cf. supra point A en fait). La recourante est partant désavantagée par sa dyslexie lors de la réalisation de ce test. Sur le principe, elle peut prétendre à une mesure de compensation du désavantage, afin de rétablir une situation initiale équivalente avec les autres candidats. Le fait que certaines parties du test AMS n'impliquent pas de lecture, souligné par l'Université de Berne, ne modifie en rien ce constat.  
A priori, une mesure de compensation du désavantage sous forme de temps supplémentaire est la mesure adéquate, puisque cela permettrait à la recourante de disposer d'un temps équivalent aux autres candidats proportionnellement à sa lenteur pathologique en lecture. Cette mesure d'aménagement est du reste une mesure courante de compensation en lien avec la dyslexie lors d'examens. L'Université de Berne ne conteste en particulier pas que ce type de mesure puisse être octroyé lors des examens annuels de médecine et médecine vétérinaire, ainsi que l'a relevé la recourante.  
 
5.5. Reste à examiner si des motifs s'opposent à l'octroi de temps supplémentaire dans le contexte spécifique du test AMS.  
 
5.5.1. Dans ses déterminations, l'Université de Berne souligne qu'une mesure de compensation du désavantage sous forme de temps supplémentaire n'est pas envisageable pour le test AMS, eu égard à la particularité de ce test en tant que test d'entrée aux études universitaires de médecine et médecine vétérinaire. La composante du temps constituerait une caractéristique essentielle, une "exigence technique" de cet examen et un allongement de la durée déjouerait partant le but réel de l'épreuve. Il serait en outre impossible de déterminer de manière globale la majoration de temps adaptée et nécessaire sans fausser les résultats du test. L'Université de Berne souligne par ailleurs qu'il y aurait des difficultés organisationnelles "évidentes" si un allongement de la durée d'épreuve était autorisé, compte tenu du caractère individualisé de la mesure qui devrait être accordée.  
 
5.5.2. Le but du test AMS est de prédire la réussite universitaire des candidats en évaluant leur potentiel cognitif de base (rapport du Conseil suisse de la science et de l'innovation du 21 novembre 2016 à l'attention de la CSHE sur la procédure d'admission aux études de médecine dans les universités avec numerus clausus, disponible sur: https://www.sbfi.admin.ch/sbfi/fr/home/services/publications/base-de- donnees-des-publications/numerus-clausus.html [consulté la dernière fois le 24 mai 2024]; ci-après: rapport CSSI 2016, p. 3). Le test AMS est un test d'aptitudes cognitives qui évalue des compétences importantes pour la réussite des études de médecine en Suisse (cf. https://www.swissuniversities.ch/fr/service/inscription-aux-etudes-de-medecine/test-daptitudes). Le test AMS n'évalue pas des connaissances, mais la capacité d'acquérir un nouveau savoir. Sont testés le raisonnement, la mémoire, la vitesse d'exécution, la représentation spatiale, la compréhension de textes ainsi que l'utilisation de formules mathématiques (cf. supra point A en fait).  
Depuis 1998, le Centre pour le développement de tests et le diagnostic (CTD) de l'Université de Fribourg organise le test AMS et en élabore le cadre scientifique (rapport CSSI 2016, p. 7). Depuis 2017, la CSHE prend en charge l'orientation générale du test et swissuniversities se charge des aspects opérationnels (rapport CSSI 2016, p. 7). 
 
5.5.3. Dans son jugement, le Tribunal cantonal a exposé que le Centre pour le développement de tests avait expliqué, dans une prise de position du 13 mai 2020 (sic) devant la Direction de l'instruction, que le test AMS comportait en partie des caractéristiques d'un examen d'entrée, lors duquel certaines compétences de départ étaient examinées et exigées de tous les étudiants en vue d'une formation de même niveau. Il consistait également en un test psychologique qui ne pourrait revêtir de validité suffisante que si les conditions standard posées à sa mise en oeuvre étaient strictement respectées. Le Centre pour le développement de tests avait également expliqué que, dès lors que la résistance au stress et l'aptitude à livrer un travail de qualité même sous la pression constituaient des compétences d'entrée importantes pour les études de médecine, les délais de traitement impartis pour les sous-tests individuels de l'AMS devaient être évalués de façon si resserrée qu'aucun candidat ne puisse traiter exhaustivement l'ensemble des tâches confiées. Ainsi, des différences de performances résultaient délibérément d'une meilleure ou moins bonne gestion du temps lors du traitement du test. Les délais de traitement du test AMS étant courts pour l'ensemble des candidats, une prolongation arbitraire de ces délais aurait pour conséquence de modifier le caractère du test et de ne plus permettre une comparaison des résultats entre les participants. De plus, il serait prouvé, selon le Centre pour le développement de tests, que "des modifications du temps de traitement dans les groupes de tâches individuels ne se répercute[raient] pas de manière linéaire sur les performances".  
 
5.5.4. Il résulte de ce qui précède que le test AMS a pour but de sélectionner les meilleurs futurs étudiants en médecine et médecine vétérinaire et teste, à cette fin, notamment leur résistance au stress, une rapidité d'exécution et une capacité à travailler sous pression. D'après le jugement entrepris, le handicap de la recourante affecte sa rapidité de lecture et non sa résistance au stress et sa capacité à travailler sous pression. Il n'apparaît donc pas d'emblée exclu, par rapport au but du test AMS tel que décrit ci-avant, d'accorder à celle-ci du temps supplémentaire pour compenser sa dyslexie. Il est souligné que la recourante ne demande pas à esquiver l'exigence de rapidité d'exécution lors du test AMS, mais à être soumise à la même contrainte que les autres proportionnellement à son handicap.  
C'est aussi le lieu de relever que le test AMS n'est en définitive qu'une étape vers l'exercice de la profession de médecin ou de médecin vétérinaire. Certes, le test AMS vise à vérifier une capacité à étudier la médecine et non une capacité à l'exercice de la médecine. Pour autant, le test AMS ne saurait être dissocié des qualités requises pour l'exercice de la profession à laquelle ces études préparent. Or, il est à cet égard significatif que l'octroi de temps supplémentaire en compensation de la dyslexie ne soit pas exclu aux examens annuels des facultés de médecine suisses et notamment à l'Université de Berne (cf. https://www.unibe.ch/universite/portrait > identité > égalité des chances; pour un autre exemple en Suisse romande: UniGE: https://www.unige.ch/sse/besoins-particuliers, sites consultés pour la dernière fois le 12 juin 2024). La possibilité d'octroyer de telles mesures de compensation lors des examens annuels démontre en effet que la rapidité en lecture n'est pas une condition indispensable à un exercice compétent de la profession particulièrement exigeante de médecin ou de vétérinaire. 
Dans son recours, la recourante souligne en outre que l'octroi de temps additionnel est une mesure de compensation de la dyslexie qui est accordée lors de tests de sélection des étudiants en médecine dans d'autres pays. Un survol des conditions d'entrée aux études de médecine à l'étranger permet de confirmer que plusieurs pays appliquant des tests comme outil de sélection de leurs futurs étudiantes et étudiants en médecine prévoient l'octroi de temps supplémentaire lors de ces tests comme mesure de compensation, notamment de la dyslexie (par ex. au test UCAT, pratiqué au Royaume-Uni [https://www.ucat.ac.uk]; au test GAMSAT, utilisé au Royaume-Uni, en Irlande, en Australie [https://gamsat.acer.org]; au test MedAT, utilisé en Autriche [cf. https://hochschulombudsstelle.at /publikationen > Tätigkeitsbericht 2019/20, 2020, p. 94 s. pour un exemple concret]; au test MCAT, pratiqué au Canada et aux États-Unis [cf. https://students-residents.aamc.org]; sites consultés pour la dernière fois le 12 juin 2024). S'il est certain que les conditions d'accès aux études de médecine diffèrent d'un pays à l'autre et que la portée d'une comparaison est partant d'emblée limitée, ces exemples tendent à démontrer que l'octroi de temps supplémentaire pour compenser un désavantage lié à la dyslexie n'est pas per se incompatible avec un test d'entrée visant à sélectionner les meilleurs futurs étudiants en médecine.  
 
5.5.5. En revanche, il convient de vérifier si, comme l'Université de Berne l'affirme, il est impossible de déterminer de manière objective un temps supplémentaire au test AMS, de sorte que l'octroi d'une mesure de compensation portant sur le temps déjouerait le but du test et avantagerait la personne qui en bénéficierait.  
Sur la base de l'arrêt attaqué, il n'est pas possible de se prononcer sur cette question. En effet, les précédents juges se sont entièrement référés à la prise de position du Centre pour le développement de tests sur ce point, sans exposer pour quel motif celle-ci serait probante, alors que ce centre élabore lui-même ce test. Les juges précédents n'ont pas fait état d'un rapport objectif, n'émanant pas des personnes impliquées dans la conception et l'organisation du test AMS, qui constaterait l'impossibilité d'accommoder la durée du test AMS pour tenir compte d'une lenteur en lecture relevant du handicap, sans déjouer le but de ce test ou fausser la comparabilité des résultats. À cet égard, la seule crainte qu'il puisse y avoir une surcompensation du désavantage faussant les résultats ne saurait suffire à refuser une mesure concrète visant à compenser un handicap prouvé affectant la rapidité de lecture. 
Il résulte de ce qui précède que le Tribunal fédéral n'est pas en mesure de se prononcer, car le jugement entrepris ne contient pas les faits pertinents. Il convient partant d'annuler le jugement entrepris et de renvoyer la cause au Tribunal cantonal (art. 107 LTF), afin que celui-ci ordonne une expertise impartiale et neutre visant à déterminer si une mesure de compensation sous forme d'octroi de temps supplémentaire déjouerait l'objectif du test AMS ou entraînerait, même en étant individualisée aux besoins de la recourante, une surcompensation du désavantage lié à sa dyslexie. Dans l'hypothèse où des aménagements sont possibles, il conviendra de les octroyer à la demande de la recourante si elle entend représenter le test AMS, en fonction de ses besoins spécifiques. 
 
6.  
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours dans la mesure où il est recevable. Le jugement du 30 mars 2023 du Tribunal administratif du canton de Berne est annulé. La cause est renvoyée au Tribunal administratif du canton de Berne dans le sens des considérants. 
Il est précisé que s'il apparaissait au terme de l'expertise que l'allocation de temps supplémentaire était incompatible avec la manière dont le test AMS est actuellement configuré, il appartiendrait aux autorités d'en tirer les conséquences au regard des principes d'égalité et de l'interdiction de la discrimination fondée sur le handicap susexposés. 
 
7.  
Aucun frais ne sera perçu (art. 66 al. 4 LTF). La recourante, qui obtient gain de cause avec l'aide d'un avocat, a droit à des dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF), à la charge du canton de Berne. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. Le jugement du 30 mars 2023 du Tribunal administratif du canton de Berne est annulé. 
 
2.  
La cause est renvoyée au Tribunal administratif du canton de Berne dans le sens des considérants. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Le canton de Berne versera à la recourante une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à l'Université de Berne, à la Direction de l'instruction publique et au Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, ainsi qu'au Bureau fédéral de l'égalité pour les personnes handicapées (BFEH). 
 
 
Lausanne, le 7 mai 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : E. Kleber