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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1111/2016, 6B_1179/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 9 mai 2018  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Jametti. 
Greffier : M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
6B_1111/2016 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
recourant, 
 
contre  
 
1. X.________, 
représenté par Me Romain Jordan, avocat, 
2. Y.________, 
représenté par Me Yaël Hayat, avocate, 
intimés, 
 
et 
 
6B_1179/2016 
X.________, 
représenté par Me Romain Jordan, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
intimé. 
 
Objet 
6B_1111/2016 
Infraction à l'art. 19 al. 1 LStup
 
6B_1179/2016 
Frais de la procédure, indemnité au titre des dépens, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 24 août 2016 (P/15819/2013 AARP/347/2016). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par deux ordonnances pénales du 18 mai 2015, valant acte d'accusation, il a été reproché à X.________ de s'être procuré, à Genève, le 21 septembre 2013 vers 00h15 à la rue A.________, deux boulettes de cocaïne, d'un gramme chacune, auprès de B.________ contre paiement de 200 fr., l'argent lui ayant été préalablement remis à cette fin par Y.________. Il était imputé à ce dernier d'avoir, dans les mêmes circonstances, acquis par le truchement de X.________, deux boulettes d'un gramme chacune pour la somme de 200 francs. 
 
Par jugement du 3 décembre 2015, le Tribunal de police du canton de Genève a reconnu les deux prévenus coupables d'infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants. Y.________ a été condamné à 45 jours-amende à 230 fr. l'unité, avec sursis pendant 3 ans ainsi qu'à 2070 fr. d'amende (peine de substitution de 9 jours de privation de liberté). X.________ a été condamné à 30 jours-amende à 140 fr. l'un, sous déduction d'un jour de détention avant jugement, avec sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à 840 fr. d'amende (peine privative de liberté de substitution de 6 jours). Les frais ont été mis à charge des intéressés par moitiés. 
 
B.   
Saisie d'appels par Y.________ et X.________, par arrêt du 24 août 2016, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a acquitté les deux prévenus et mis à charge de ceux-ci, par moitiés, les frais de la procédure de première instance. La cour cantonale a également débouté Y.________ et X.________ de leurs conclusions en indemnisation pour la première instance mais leur a accordé, respectivement, 4792 fr. 50 et 8914 fr. 50 à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de leurs droits de procédure en appel. La moitié des frais d'appel a été mise à la charge d'Y.________ et un quart à la charge de X.________, le solde demeurant à la charge de l'Etat. 
 
En bref, cet arrêt retient que les faits reprochés aux intéressés sont établis, de même que leur intention d'acquérir les stupéfiants. Toutefois, Y.________ voulait démontrer que tout citoyen pouvait facilement obtenir de la cocaïne dans les rues de Genève. X.________ avait agi dans l'unique but de réaliser un film de propagande, sans avoir l'intention de consommer ni de donner à consommer la drogue acquise. Il n'avait pas trop réfléchi à ce que l'acte d'achat représentait, sans doute sous l'emprise de l'admiration qu'il portait au leader du Mouvement C.________. Le comportement subséquent des intéressés, consistant à joindre les forces de l'ordre et à leur remettre la cocaïne, démontrait qu'ils n'avaient nulle intention de la consommer, de la vendre, voire de la remettre à autrui ou de l'abandonner dans la rue. La remise aux autorités avait pour but de la faire détruire tout en dénonçant le comportement du dealer dont ils avaient permis l'identification. Si le but principal de leur action était de dénoncer une situation jugée politiquement insatisfaisante, leur but secondaire était de " neutraliser pour l'exemple " un trafiquant ainsi que la drogue que celui-ci comptait écouler. Dans leur esprit, les intéressés avaient donc, certes naïvement et avec pour résultat un succès tout relatif, voulu agir contre le fléau du trafic de stupéfiants. 
 
C.   
Par actes des 29 septembre et 7 octobre 2016, le Ministère public genevois et X.________ forment chacun un recours en matière pénale contre la décision sur appel. Le premier conclut principalement à sa réforme en ce sens qu'Y.________ et X.________ soient condamnés, pour infraction à l'art. 19 al. 1 LStup, aux mêmes peines que celles prononcées en première instance. A titre subsidiaire, il demande que la décision querellée soit annulée et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. X.________ conclut à la réforme de la décision entreprise en ce sens que les frais de justice le concernant soient laissés à la charge de l'Etat et que l'indemnité pour l'exercice raisonnable de ses droits de procédure soit portée à 16'152 fr. 50. 
 
Invités à formuler des observations sur le recours 6B_1179/2016, la cour cantonale y a renoncé, cependant que le Ministère public genevois a conclu, par acte du 16 avril 2018, au rejet du recours. X.________, à qui ces observations ont été communiquées, a indiqué persister dans ses conclusions en renonçant toutefois à son grief relatif à l'application de l'art. 4 let. h du règlement genevois fixant le tarif des frais en matière pénale. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours du Ministère public genevois porte exclusivement sur la question du risque admissible appréhendé comme un fait justificatif, cependant que X.________ se fonde, notamment, sur cette notion pour contester la mise à sa charge d'une partie des frais de la procédure. Il s'ensuit que les deux recours, qui se rapportent à une même affaire et trouvent leur origine dans un même état de fait posent des questions juridiques, partiellement tout au moins, connexes. Il se justifie de les joindre et de statuer par un seul et même arrêt (art. 71 LTF et 24 PCF). 
 
2.   
Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel devant laquelle les faits établis en dernière instance cantonale peuvent être librement rediscutés. Il est lié par les constatations de faits de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), soit, pour l'essentiel, de manière arbitraire (art. 9 Cst.; voir sur cette notion: ATF 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375; 141 I 49 consid. 3.4 p. 53; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur de tels moyens, fondés sur la violation de droits fondamentaux, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368; 141 IV 249 consid.1.3.1 p. 253). 
 
3.   
Le Ministère public ne développe expressément aucun grief relatif aux faits. Il déclare au contraire - non sans contradiction (v. infra consid. 3.3.3 et 3.3.4) - se référer intégralement à ceux retenus par la décision querellée. Il est, en tout cas, constant que les intéressés ont acquis, puis détenu deux boulettes d'un gramme de cocaïne et qu'ils ont voulu acquérir et détenir ces stupéfiants, sans intention de les consommer ou remettre à des tiers. Le Ministère public reproche, en revanche, à la cour cantonale d'avoir acquitté les intimés au motif qu'ils n'avaient pas excédé le risque admissible. 
 
3.1. Aux ATF 117 IV 58 consid. 2b p. 61 s., le Tribunal fédéral a jugé, en se référant à la théorie dite du " risque admissible " qu'exposer les biens juridiques de tiers à des risques déterminés est en soi permis dans le domaine des infractions par négligence et qu'il ne doit pas en aller différemment de celui qui agit intentionnellement. Pour que l'auteur d'un délit de mise en danger abstraite soit punissable, il faut donc qu'il ait franchi les limites d'un risque acceptable. Le devoir de diligence n'est pas réduit pour autant. Ce n'est pas le fait qu'une erreur humaine est toujours possible que l'on entend ici privilégier. Ce dont on veut tenir compte c'est du fait que l'acceptation d'un certain risque est inhérente à toute entreprise. Plus celle-ci est utile et plus difficile est la mise en oeuvre des moyens permettant de parer à tout danger entrant dans les prévisions de la norme, moins le risque assumé apparaîtra répréhensible. Cela suppose une appréciation de l'ensemble des circonstances dans le cadre d'une pesée concrète mettant en balance l'intérêt et le risque de l'action.  
 
3.2. En l'espèce, la cour cantonale a constaté qu'une fois la drogue acquise, l'acheteur était immédiatement retourné vers le groupe de militants du Mouvement C.________ situé à quelques mètres de lui; aussitôt, l'un des membres du groupe avait contacté la police, à laquelle la drogue avait été remise et le vendeur dénoncé, avant d'être arrêté (arrêt entrepris, consid. 3.2 p. 10). Au plan subjectif, outre l'absence d'intention de consommer ou de remettre la drogue à des tiers, la cour cantonale a constaté qu'au-delà du but politique de l'action (dénoncer une situation jugée insatisfaisante) les intéressés avaient en vue de neutraliser pour l'exemple un trafiquant ainsi que la drogue que celui-ci comptait écouler (arrêt entrepris, consid. 3.2.1 p. 11). La volonté idéologique des intéressés se conjuguait ainsi avec celle de dénoncer concrètement à la police les agissements d'un vendeur de rue, en remettant aux forces de l'ordre la cocaïne acquise. Cet acte allait dans le même sens que le but protecteur visé par la LStup. Ce comportement n'avait pas eu pour effet, dans un premier temps, de participer effectivement au trafic (arrêt entrepris, consid. 3.2.2 p. 11). Le but politique du Mouvement C.________ était, tout au moins, aussi défendable que de faire disparaître de la drogue pour protéger son propre compagnon (cf. ATF 117 IV 58) et ne s'opposait donc pas à l'application de la théorie du risque admissible. Le fait d'avoir remis un billet de 200 fr. au vendeur ne permettait pas non plus de retenir que les intéressés avaient agi " contre la santé publique " au seul motif que l'argent serait vraisemblablement réinvesti dans le trafic. Il s'agissait, en effet, d'une simple supposition et le financement du trafic n'entrait de toute manière pas en ligne de compte en raison du caractère dérisoire du montant en cause (arrêt entrepris, consid. 3.2.2 p. 12). Quant au caractère suffisant des mesures prises, la cour cantonale a constaté que X.________ ne se trouvait qu'à quelques mètres des autres membres du Mouvement C.________, qu'il avait immédiatement réintégré le groupe après avoir conclu la transaction et que la drogue avait été remise dès que possible à la police, contactée quelques minutes après l'acquisition. Le risque qu'elle fût subtilisée par un tiers était extrêmement limité, d'autant qu'il paraissait très peu vraisemblable qu'un individu s'en prenne à un groupe fort d'une dizaine de membres pour un si maigre butin. Le risque apparaissait ainsi admissible nonobstant l'amateurisme de l'opération. Le fait qu'un membre du groupe avait demandé qui était en possession des boulettes de cocaïne (et non où celles-ci se trouvaient) ne suffisait pas non plus pour admettre l'existence d'un risque, compte tenu du nombre de participants présents et de la topographie des lieux. Cette remarque indiquait tout au plus que l'un des membres du groupe ignorait qui détenait concrètement la drogue. Les mesures prises permettaient ainsi d'éviter autant que possible le risque visé par la LStup, ce qui justifiait l'acquittement des intéressés (arrêt entrepris, consid. 3.2.2 p. 13).  
 
3.3. Le recourant conteste le caractère socialement utile de l'acte, d'une part, et la prépondérance de l'intérêt à l'action sur le risque, d'autre part.  
 
3.3.1. Sur le premier point, le Ministère public relève que la cocaïne a été acquise contre 200 fr., qui n'ont pas été retrouvés. Cet acte se distinguerait ainsi des deux cas dans lesquels la jurisprudence fédérale a tenu le risque pour admissible en relation avec le transport de stupéfiants, respectivement leur remise (ATF 120 IV 334 et 117 IV 58). Quelles que soient les motivations de l'auteur, l'achat de stupéfiants supposerait toujours une alimentation du trafic incompatible avec le but socialement utile qu'entend privilégier la théorie du risque admissible. En l'espèce, les trafiquants s'étaient, ensuite de la vente, trouvés enrichis des 200 francs; le trafic avait été encouragé. La cour cantonale n'avait, du reste, pas constaté que le but principal des intéressés revêtait une utilité sociale, en soulignant, au contraire, leurs fins égoïstes et la volonté de réaliser un coup médiatique à des fins de propagande politique. Si leur but avait été d'exclure que la drogue parvienne aux consommateurs, il leur aurait été loisible d'agir différemment.  
 
3.3.2. Dans la mesure où elle vise à dénier abstraitement tout intérêt social au comportement des prévenus (et à exclure d'emblée le bénéfice du risque admissible) en raison de sa nature même (l'acquisition de stupéfiants par opposition à la remise ou au transport de telles substances), cette critique est infondée. Il va en effet de soi que si un acte d'acquisition promeut, dans la règle, le trafic, il n'en va pas nécessairement de même lorsqu'un tel acte est réalisé en vue de faire arrêter un vendeur de rue et que ce but est atteint. A priori, l'interpellation, cas échéant publique, d'un vendeur de rue peut aussi déployer un effet dissuasif même s'il est très restreint ou avoir des incidences sur le démantèlement d'un réseau. En définitive, cette question ne peut être discutée dans l'absolu comme le voudrait le recourant. Sa solution dépend de l'ensemble des circonstances qui doivent être pesées pour apprécier si le risque est ou non demeuré admissible.  
 
Il en va de même du caractère politique des visées des intimés. Une telle motivation ne rend sans doute pas tout comportement intrinsèquement honorable et ne peut tout justifier (v. p. ex.: arrêt 6B_599/2015 du 25 février 2016 consid. 3). On ne saurait pourtant non plus nier d'emblée toute utilité sociale à un geste politiquement revendiqué au motif qu'il serait nécessairement emprunt d'égoïsme ou d'électoralisme. De telles approches sont étrangères à la conception même de la notion de risque admissible, qui suppose, bien au contraire, une pesée soigneuse de l'ensemble des circonstances (ATF 117 IV 58 consid. 2b, avant-dernier paragraphe  in fine, p. 62).  
 
Il s'ensuit que, comme l'a retenu à juste titre la cour cantonale, ni le comportement des intimés (acquisition et détention de stupéfiants) ni leurs fins (politiques) n'excluent d'emblée d'examiner s'ils ont ou non excédé le risque admissible au regard de l'ensemble des circonstances, englobant, en particulier, le fait que 200 fr. sont demeurés introuvables après l'interpellation. Il en va de même du point de savoir si les intéressés auraient pu agir différemment. 
 
3.3.3. Quant à la pesée des intérêts en présence, le recourant souligne l'amateurisme, la naïveté et le succès tout relatif de l'opération. Dans les circonstances qui prévalaient au moment des faits (achat effectué dans un quartier très festif et très fréquenté, à une heure où les rues sont particulièrement animées) il aurait été très vraisemblable qu'un tiers tente de s'emparer des boulettes, qui avaient passé de main en main sans que personne ne les mette en sécurité. Si la quantité de drogue était faible, elle n'en avait pas moins un intérêt pour les consommateurs en manque, qui auraient été notoirement nombreux à arpenter les rues du quartier en question. Les membres du groupe auraient, de surcroît, été accaparés par le tournage de la vidéo de propagande et peu attentifs à la localisation de la drogue, comme en témoignait la question " C'est qui qui a les boulettes? ". Les intéressés n'avaient mis en place aucune préparation ou définition des rôles ni pris aucune précaution concrète pour mettre la cocaïne en sécurité en attendant de la confier à la police. X.________ ignorait ce qu'Y.________ entendait faire de la drogue. Les boulettes étaient passées de main en main d'une dizaine de personnes et auraient été posées sur un mur selon l'une d'elles. Les intéressés avaient, en définitive, agi avec une telle désinvolture après avoir acquis la drogue qu'ils l'auraient rendue plus aisément disponible pour des consommateurs que si ces derniers avaient dû contacter un dealer et payer leur dose. Le recourant en conclut que l'entreprise des intimés présentait un risque important que la drogue devienne accessible à des consommateurs, risque supérieur à l'intérêt relatif de retirer deux boulettes de cocaïne du circuit. En jugeant que le risque était demeuré admissible, la cour cantonale aurait violé le droit fédéral.  
 
3.3.4. Ces développements du Ministère public recourant reposent, en grande part, sur des faits non constatés par la cour cantonale. Ainsi notamment lorsqu'il affirme que l'achat a été effectué dans un quartier très festif et très fréquenté, à une heure où les rues sont particulièrement animées et les consommateurs en manque nombreux, ou lorsqu'il allègue que les membres du groupe Mouvement C.________ étaient, après la vente, " accaparés " par le tournage de la vidéo, respectivement lorsqu'il laisse entendre que la drogue aurait pu se trouver, à un moment donné, sur un mur ou encore lorsqu'il déduit de la question " C'est qui qui a la boulette? " que les membres du groupe auraient été peu attentifs à la localisation de la drogue. Il n'y a pas lieu d'examiner plus avant cet argumentaire appellatoire, qui n'a pas sa place dans un recours en matière pénale (v. supra consid. 2). Que le recourant taxe certaines de ces circonstances - pourtant éminemment locales (par exemple le nombre des consommateurs en manque à l'heure et au lieu dit) - de " notoires " (v. sur cette notion: ATF 143 IV 380 consid. 1.1.1 p. 383) ne justifie pas une autre approche.  
 
Par ailleurs, en concluant que l'entreprise des intimés présentait un risque important que la drogue devienne accessible à des consommateurs et que ce risque était supérieur à l'intérêt relatif de retirer deux boulettes de cocaïne du circuit, le Ministère public recourant perd de vue que la drogue qui risquait - potentiellement -, de retourner en main d'un consommateur ou d'un vendeur, ne représentait guère que 2,2 grammes de cocaïne et qu'elle était précisément destinée d'emblée à être remise à des consommateurs. On ne perçoit donc pas en quoi l'intervention des intimés aurait accru ce risque. Bien au contraire, alors que le recourant soutient que de nombreux amateurs de cocaïne (certains en manque) fréquentaient les lieux, cette circonstance suggère que cette petite quantité de stupéfiants, si elle n'avait pas été acquise puis détenue par les intimés, aurait de toute manière été vendue à très bref délai à l'un ou l'autre de ces amateurs. L'intervention des intimés, aussi naïve et empreinte d'amateurisme fût-elle, paraît ainsi n'avoir pu que diminuer le risque que ces stupéfiants soient consommés, compte tenu aussi des circonstances relevées par la cour cantonale, soit le nombre des membres du groupe et la célérité avec laquelle la police avait été requise. L'appréciation de la cour cantonale selon laquelle ce risque demeurait admissible dans la perspective de retirer non seulement 2 grammes de cocaïne du circuit, mais aussi de mettre un vendeur de rue hors d'état de nuire n'est pas critiquable. Cela conduit au rejet du grief, partant du recours, dans la mesure où il est recevable. 
 
4.   
Dans le recours 6B_1179/2016, outre le grief auquel il a renoncé (v. supra consid. C, deuxième paragraphe  in fine) X.________ reproche à la cour cantonale une violation des art. 426, 428 et 429 CPP ainsi que des art. 1 ss LTVA en relation avec l'art. 429 CPP. Il mentionne aussi, dans ses développements les art. 6 et 10 CEDH, 29 al. 2 ainsi que 32 al. 1 Cst.  
 
Il convient, à titre préalable, de rappeler que pour être invoquée valablement devant le Tribunal fédéral, la violation de droits fondamentaux doit faire l'objet de griefs dûment motivés, contenant un exposé des faits essentiels et un exposé succinct des droits constitutionnels ou des principes juridiques tenus pour violés, précisant en quoi consiste la violation (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368). Il ne suffit donc pas, pour respecter ces exigences de recevabilité, d'affirmer, au détour d'un paragraphe relatif à la violation du droit fédéral de niveau infra-constitutionnel (art. 426, 429 et 430 CPP) : " la cour cantonale a violé le droit fédéral en ne tenant pas compte de l'art. 19a LStup et de l'art. 10 CEDH et de ses implications en matière de liberté d'expression, notamment dans le domaine politique " (mémoire de recours, p. 6), ou encore " Au regard de l'art. 10 CEDH - que le recourant a plaidé devant la cour cantonale sans que la question ne soit abordée dans l'arrêt attaqué [art. 29 al. 2 Cst.; art. 112 LTF] - comme du contexte électoral que connaissait Genève, une telle démarche était non seulement proportionnée mais également protégée par la liberté d'expression dont sont titulaires les partis politiques [et leurs membres] ", ni même d'asséner qu'un raisonnement serait " difficilement compréhensible (art. 29 al. 2 Cst.; art. 112 LTF) " (mémoire de recours p. 7). En effet, il n'incombe pas au Tribunal fédéral, saisi d'une argumentation mêlant des griefs relatifs à plusieurs normes de rangs différents de tenter de reconstituer des critiques recevables, mais au recourant, dûment assisté à cette fin par un mandataire, de présenter ses moyens de manière conforme aux réquisits légaux et jurisprudentiels. Dans la perspective la plus favorable au recourant, on examinera néanmoins, dans la suite, les violations du droit fédéral de niveau infra-constitutionnel répondant aux exigences de motivation ordinaires déduites de l'art. 42 al. 2 LTF
 
5.   
Le recourant soutient tout d'abord que la cour cantonale aurait dû envisager de l'acquitter de la contravention prévue par l'art. 19a al. 2 LStup, qui aurait, seule, pu entrer en considération, à l'exclusion de l'infraction réprimée par l'art. 19 al. 1 let. d LStup. 
 
Il est pour le moins douteux que le recourant dispose d'un intérêt juridiquement protégé à soulever un tel grief, soit qu'il soit habilité à recourir pour obtenir d'être acquitté d'une autre infraction que celle pour laquelle il a été jugé et libéré. Cette question souffre toutefois de demeurer indécise dans la mesure où le recourant n'a jamais été renvoyé en jugement sous la prévention de cette contravention. De surcroît, la cour cantonale a exclu l'intention du recourant de consommer des stupéfiants. L'application de l'art. 19a LStup qui privilégie précisément celui qui enfreint les règles protectrices en la matière en raison de sa propre consommation apparaît ainsi, de toute manière, d'emblée exclue. Le recourant objecte certes que son acte simulé était précisément celui d'un simple consommateur. Mais cela ne change rien au fait qu'il n'était pas consommateur de stupéfiants et n'avait pas l'intention d'en consommer. Il n'y a pas lieu d'examiner plus avant ces développements qui n'apparaissent pas pertinents. 
 
6.   
Le recourant conteste la mise à sa charge d'une partie des frais de la procédure (art. 426 CPP) et la réduction de l'indemnité qui lui a été accordée ensuite à raison de son acquittement (art. 430 CPP). 
 
6.1. La cour cantonale a correctement rappelé les principes généraux régissant ces questions. Il suffit de renvoyer à son arrêt (décision entreprise, consid. 4.2.1).  
 
 
6.2. Appliquant ces règles, la cour cantonale a jugé que l'acquittement des appelants ouvrait la voie à une indemnisation de leurs frais de défense, qui devait être admise dans son principe. L'indemnisation devait, en revanche, être réduite compte tenu du comportement hautement blâmable des intéressés. Il y avait là faute concomitante majeure dans la mesure où leurs actes à visée de propagande politique avaient contraint la police, puis le Ministère public, à des investigations qui eussent été évitables s'ils avaient agi avec davantage de discernement, autrement dit s'ils s'étaient abstenus. Ils avaient eu tort d'adopter un comportement réalisant les éléments objectifs et subjectifs du trafic de stupéfiants et de se servir des appareils policier et judiciaire à des fins égoïstes. Dans cette mesure, il se justifiait de ne pas entrer en matière sur les notes d'honoraires pour la procédure de première instance, tant leur comportement fautif était patent (arrêt entrepris, consid. 4.2.2 p. 15).  
 
6.2.1. Cette motivation ne permet pas de comprendre concrètement ce qui a été reproché aux intéressés dans le sens d'un comportement illicite et fautif qui ne serait pas entièrement appréhendé par le droit pénal. En effet, la réglementation quasi exclusive du droit pénal en matière de stupéfiants ne laisse guère de place à l'imputation des frais au motif d'un reproche purement civil (arrêt 6B_892/2008 du 7 avril 2009 consid. 3.2; cf. HANSPETER KÜNG in Peter Goldschmid/Thomas Maurer/Jürg Sollberger [Hrsg], Kommentierte Textausgabe zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2008, p. 423).  
 
6.2.2. Le Ministère public intimé objecte certes que X.________ aurait néanmoins violé une norme écrite du droit administratif, soit l'art. 11 al. 1 de l'Ordonnance sur le contrôle des stupéfiants (OCStup) du 25 mai 2011 (RS 812.121.1), ce qui rendrait son comportement illicite. Toutefois, aux termes de cette disposition, quiconque veut fabriquer, se procurer, négocier, importer, exporter ou remettre des substances soumises à contrôle, à l'exception des adjuvants chimiques, ou en faire le commerce doit obtenir préalablement une autorisation d'exploitation. Or, en l'espèce, comme on l'a vu (v. supra consid. 3.2), la décision querellée ne constate pas que le recourant aurait voulu à proprement parler se procurer ou négocier des stupéfiants, dès lors qu'il s'agissait d'emblée de remettre ceux acquis d'un dealer à la police. De surcroît, l'ordonnance en question régit l'importation, l'exportation, le transit et le commerce de substances soumises à contrôle et assure la disponibilité des substances soumises à contrôle à des fins médicales et pour la recherche (art. 1 al. 2 OCStup). On ne voit donc pas que l'activité politique des militants du Mouvement C.________ ait pu être soumise à une " autorisation d'exploitation " au sens de l'art. 11 al. 1 OCStup, qui habilite son titulaire à remettre et à distribuer des substances soumises à contrôle aux personnes mentionnées à l'art. 16 let. a à g OCStup. Enfin, le Ministère public intimé perd de vue, dans ses développements, que l'art. 19 let. d LStup réprime précisément le comportement de celui qui,  sans droit, possède, détient ou acquiert des stupéfiants ou s'en procure de toute autre manière. Il s'ensuit que l'illicéité du défaut de l'autorisation d'exploitation, en relation avec un acte d'acquisition, de possession ou de détention, ne peut être dissociée de l'illicéité résultant de l'art. 19 LStup. En d'autres termes, l'illicéité du comportement des intéressés résulte, quoi qu'en dise le Ministère public intimé, exclusivement de l'art. 19 LStup et non d'une éventuelle violation de règles administratives relatives au régime d'autorisation auquel sont soumis certains actes portant sur des stupéfiants.  
 
6.2.3. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'intimé, l'intervention de la police doit, en l'espèce, manifestement, être imputée, en première ligne, au comportement du revendeur de rue qui a été dénoncé par les membres du Mouvement C.________. Dans la suite, les forces de l'ordre se sont sans doute intéressées aussi au sort des boulettes de drogue acquises par ces militants et au comportement de ceux-ci. Il apparaît toutefois que la remise de la drogue aux autorités ainsi que le fait que ces partisans eux-mêmes avaient fait appel à la police afin de lui remettre les stupéfiants et dans l'espoir qu'un revendeur soit interpellé auraient dû permettre de lever très rapidement toute ambiguïté sur le fait que ces personnes n'entendaient ni consommer ni revendre les stupéfiants et poursuivaient, fût-ce maladroitement, des objectifs correspondant à ceux de la loi. De cette manière, les interventions subséquentes de la police et des autorités judiciaires auraient, sans doute - avantageusement - pu être évitées. Pour le surplus, la cour cantonale a aussi reproché aux membres du groupe d'avoir agi de manière égoïste à des fins de propagande politique. On recherche toutefois en vain dans l'arrêt querellé toute démonstration du caractère civilement illicite et fautif de cet aspect du comportement des intéressés, qui se résume, en définitive, à avoir fait appel à la police pour dénoncer une infraction à la LStup (fût-ce à des fins de propagande politique). Le seul reproche qui demeure, dès lors, est d'avoir acquis et détenu sans droit des stupéfiants, soit l'infraction pénale dont les intéressés ont été acquittés au motif que leur comportement demeurait licite. Cette infraction, qui n'a pas été retenue à leur charge, apparaît, partant, comme l'unique motif susceptible de justifier une restriction à leur liberté. Selon la jurisprudence la mise à charge des frais, respectivement la réduction des indemnités dues n'est pas admissible dans une telle hypothèse, en particulier lorsqu'est en jeu la liberté d'expression (v. ATF 116 Ia 162 consid. 2d/bb p. 174). Le grief doit être admis.  
 
6.3. Le recourant invoque encore la violation de l'art. 429 CPP en corrélation avec les art. 1 ss LTVA. En bref, il se plaint que la cour cantonale n'a pas inclus la TVA dans le montant de l'indemnité qu'elle lui a allouée au titre de l'activité de son conseil à l'audience d'appel.  
 
Le montant de l'indemnité due au recourant au titre de ses frais de défense nécessaires devant être fixé à nouveau dans son ensemble, soit pour tous les stades de la procédure, dès lors qu'il ne peut être réduit pour les motifs exposés ci-dessus, l'examen de ce grief apparaît prématuré. Il apparaît toutefois opportun de relever d'ores et déjà que l'on ne comprend pas les raisons pour lesquelles la cour cantonale a, d'une part, admis le montant de 7114 fr. 50 toutes taxes comprises pour la procédure d'appel (audience non comprise) mais s'est bornée à y ajouter 4 heures à 450 fr. hors taxes pour l'audience (v. arrêt entrepris, consid. C.c.a p. 6 et consid. 4.2.2 p. 15; courrier adressé le 26 avril 2016 par le conseil du recourant à la cour cantonale, dossier cantonal, pièce 15). 
 
7.   
Le Ministère public succombe dans la procédure 6B_1111/2016. Il est statué sans frais (art. 66 al. 4 LTF) ni dépens, les intimés n'ayant pas été invités à procéder. 
 
X.________ obtient partiellement gain de cause dans son recours 6B_1179/2016, qui est rejeté pour le surplus dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant supporte des frais réduits (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF) et peut prétendre des dépens réduits eux aussi (art. 68 al. 2 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Les causes 6B_1111/2016 et 6B_1179/2016 sont jointes. 
 
2.   
Le recours du Ministère public genevois dans la cause 6B_1111/2016 est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
3.   
Le recours de X.________ est admis partiellement. La décision querellée est annulée en tant qu'elle met à sa charge des frais et réduit les indemnités qui lui sont dues en tant que prévenu acquitté au motif qu'il avait " eu tort d'adopter un comportement remplissant les éléments objectifs et subjectifs du trafic de stupéfiants et de se servir des appareils policier et judiciaire à des fins égoïstes ". La cause est renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision sur ce point en tenant compte des considérants qui précèdent. Le recours est rejeté pour le surplus dans la mesure où il est recevable. 
 
4.   
Une part des frais judiciaires, arrêtée à 1500 fr., est mise à la charge de X.________, le solde étant laissé à la charge de l'Etat. 
 
5.   
L'Etat de Genève versera à X.________ la somme de 1500 fr. à titre de dépens pour la procédure fédérale. 
 
6.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 9 mai 2018 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
Le Greffier : Vallat