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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_711/2022  
 
 
Arrêt du 9 décembre 2022  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffier : M. Wiedler. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me François Hay, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Département de l'économie et de l'emploi de la République et canton de Genève, place de la Taconnerie 7, 1204 Genève, 
représenté par Me Gabriel Aubert, avocat. 
 
Objet 
Allocation d'aide extraordinaire destinée aux entreprises touchées par les mesures contre l'épidémie du Covid-19, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, en section, du 9 août 2022 (ATA/796/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société A.________ SA est une société anonyme inscrite depuis le 19 avril 1995 au registre du commerce de Genève, ayant pour but le commerce, l'importation et l'exportation de fourrures et pelleteries et de tous articles de mode et de fantaisie à l'usage de la clientèle féminine, ainsi que la création de tous modèles et la confection de tous articles de ces branches. 
 
B.  
Cette société a sollicité une aide financière pour cas de rigueur pour l'année 2021, en raison des pertes engendrées par l'épidémie de Covid-19, auprès du Département du développement économique, devenu depuis lors le Département de l'économie et de l'emploi de la République et canton de Genève (ci-après: le Département cantonal). 
Par décision du 26 février 2021, le Département cantonal a accordé une indemnité d'un montant de 9'311.83 fr. à la société A.________ SA. Il informait par ailleurs cette dernière qu'elle pouvait solliciter une aide financière extraordinaire supplémentaire cantonale pour cas de rigueur, laquelle avait été mise en place depuis sa demande initiale par la République et canton de Genève pour les entreprises qui ne remplissaient pas les conditions arrêtées par la Confédération pour bénéficier d'une aide financière ou qui n'étaient pas suffisamment indemnisées sur cette base. 
Le 31 octobre 2021, la société A.________ SA a déposé une demande dans ce sens. 
Par décision du 19 novembre 2021, le Département cantonal a octroyé une aide financière extraordinaire complémentaire pour cas de rigueur d'un montant de 36'729.90 fr. à la société A.________ SA. 
Par décision du 14 mars 2022, le Département cantonal a rejeté l'opposition formée par la société intéressée à l'encontre de sa décision du 19 novembre 2021. 
Par arrêt du 9 août 2022, la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours interjeté par la société A.________ SA contre la décision sur opposition du 14 mars 2022 du Département cantonal. 
 
C.  
La société A.________ SA dépose un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral. Elle conclut à la réforme de l'arrêt du 9 août 2022 de la Cour de justice, en ce sens qu'une aide financière pour cas de rigueur d'un montant de 106'552.80 fr. lui est allouée, subsidiairement à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au Département cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Département cantonal dépose des observations et conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt attaqué. La recourante persiste dans ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 IV 453 consid. 1). 
 
1.1. L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Portant sur l'octroi d'aides financières de l'Etat en lien avec l'épidémie de Covid-19, il s'agit d'une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Le recours en matière de droit public est donc en principe ouvert. Toutefois, un tel recours n'est pas recevable contre les décisions concernant des subventions auxquelles la législation ne donne pas droit (art. 83 let. k LTF).  
 
1.2. Le Tribunal fédéral a jugé récemment que les aides financières à fonds perdu accordées par les cantons aux entreprises dans le but de maintenir leur activité en relation avec l'épidémie de Covid-19 étaient des subventions au sens de l'art. 83 let. k LTF (arrêts 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 1.2; 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.2). L'aide financière dont la recourante conteste le montant alloué est fondée sur les art. 9 et 10 de la loi genevoise 12938 du 30 avril 2021 relative aux aides financières extraordinaires de l'Etat destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus pour l'année 2021 (ci-après: LAFE/GE-2021). A teneur de l'art. 3 al. 1 LAFE/GE-2021, cette aide financière extraordinaire consiste en une participation à fonds perdu de l'Etat de Genève destinée à couvrir les coûts fixes non couverts de l'entreprise, en raison de l'épidémie de Covid-19. Il s'agit donc bien d'une subvention au sens de la jurisprudence précitée.  
 
1.3. La recevabilité du recours en matière de droit public suppose dès lors un droit à la subvention.  
 
1.3.1. Selon la jurisprudence, il existe un droit à la subvention au sens de l'art. 83 let. k LTF lorsque la législation elle-même précise de manière suffisamment concrète les conditions d'octroi de la prestation, sans laisser à l'appréciation des autorités d'application le soin de déterminer si un montant sera ou non alloué (ATF 145 I 121 consid. 1.2; 138 II 191 consid. 4.2.4; arrêt 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.1). Il est sans importance que l'acte fondant le droit aux subventions soit une loi ou une ordonnance ou que la reconnaissance d'un droit découle de plusieurs actes, telles une loi et son ordonnance d'application (ATF 129 V 226 consid. 2.2; arrêts 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.1; 2C_403/2021 du 20 septembre 2021 consid. 1.3; 2C_69/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2.5.1). Si les conditions d'octroi sont suffisamment précises, il existe un droit à la subvention même si l'autorité dispose, dans le cadre de ces dispositions, d'une certaine marge de manoeuvre, notamment pour fixer le montant de l'aide (ATF 110 Ib 297 consid. 1; arrêt 2C_229/2015 du 31 mars 2016 consid. 1.2.2).  
 
1.3.2. Le fait que la norme applicable utilise la forme potestative ("Kann-Vorschrift") est un indice plaidant pour l'absence d'un droit à la subvention, même si une telle formule ne l'exclut pas dans tous les cas (ATF 129 V 226 consid. 2.2; 118 V 16 consid. 3a; arrêts 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.2; 2C_403/2021 du 20 septembre 2021 consid. 1.3; 2C_69/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2.5.1). Une subvention qui ne peut être octroyée que dans des limites budgétaires n'exclut pas l'existence d'un droit, même si pareille situation est un indice important en sens contraire (arrêts 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.2; 2C_403/2021 du 20 septembre 2021 consid. 1.3; 2C_69/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2.6; 2C_229/2015 du 31 mars 2016 consid. 1.2.2 et les références), car dans ce cas, l'octroi de la subvention est soumis à la souveraineté du Parlement en matière de budget (arrêts 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.2; 2C_403/2021 du 20 septembre 2021 consid. 1.3; 2C_69/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2.5.1).  
 
1.3.3. La LAFE/GE-2021 prévoit différentes aides financières pour les entreprises: certaines qui reprennent les conditions de l'ordonnance fédérale du 25 novembre 2020 concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l'épidémie de Covid- 19 (Ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020, OMCR 20; RS 951.262) et pour lesquelles le canton bénéfice d'une participation financière de la Confédération au sens de cette ordonnance (art. 7 s et 11 ss LAFE/GE-2021) et d'autres, purement cantonales, qui ne bénéficient pas du soutien financier de la Confédération, faute pour les entreprises concernées de remplir les critères de l'OMCR 20 (art. 9 et 10 LAFE/GE-2021). En l'espèce, le litige porte sur le montant alloué à la recourante sur la base des art. 9 et 10 LAFE/GE-2021. Il s'agit donc d'une indemnisation intégralement prise en charge par la République et canton de Genève, hors du champ d'application de l'OMCR 20.  
 
1.3.4. L'art. 9 al. 1 LAFE/GE-2021 est formulé de manière potestative "l'Etat de Genève peut octroyer sans participation financière de la Confé-dération des aides en faveur des entreprises (...) " (cf. également art. 14 et 17 du règlement du 5 mai 2021 d'application de la loi 12938 relative aux aides financières extraordinaires de l'Etat destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus, pour l'année 2021 [RAFE/GE-2021]), ce qui est un premier élément qui plaide en défaveur d'un droit à l'octroi d'une aide financière. De même, l'art. 10 al. 2 LAFE/GE-2021 prévoit que le budget prévu pour l'indemnisation cantonale est limité à 40'000'000 fr. pour l'année 2021, ce qui est également un indice important en défaveur du droit à une aide financière. L'exposé des motifs à l'appui des art. 9 et 10 LAFE/GE-2021 n'est d'aucun secours quant à la volonté du législateur, car il explique uniquement en quoi ces dispositions s'écartent, sur des points secondaires, du contenu de l'art. 12 de la loi genevoise 12863 du 29 janvier 2021 relative aux aides financières extraordinaires de l'Etat destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus pour l'année 2021 (aLAFE/GE-2021) (cf. Projet de loi 12938 du 21 avril 2021, p. 43 s). L'exposé des motifs à l'appui de l'art. 12 aLAFE/GE-2021, qui est pertinent en l'espèce car les art. 9 et 10 LAFE/GE-2021 ont repris le contenu de cette disposition, mentionne que l'aide complémentaire cantonale est prioritairement destinée aux plus petites structures (cf. Projet de loi 12863 du 20 janvier 2021, p. 31). La prioritisation des demandes d'aides financières voulue par le législateur cantonal implique un tri de celles-ci et sous-entend qu'il serait possible de ne pas donner suite à toutes les requêtes au vu du budget limité qui y est dévolu, ce qui corrobore les indices précédents selon lesquels il n'existe pas de droit aux aides financières cantonales fondées sur les art. 9 et 10 LAFE/GE-2021. S'agissant des art. 15 al. 4 LAFE/GE-2021 et 26 al. 4 RAFE/GE-2021, ils mentionnent certes que, lorsque les conditions d'octroi sont remplies, les demandes donnent lieu à l'attribution d'une aide financière. Cela n'est cependant pas suffisant pour déduire qu'il existerait un droit à une aide financière cantonale au sens précité. En effet, pour que les conditions d'octroi soient réalisées, il faut qu'il reste des fonds suffisants dans le budget de 40'000'000 fr. prévu par l'art. 10 al. 2 LAFE/GE-2021, étant rappelé que les petites entreprises sont les premières à qui ces fonds doivent profiter.  
 
1.4. Il découle de ce qui précède qu'il n'existe pas de droit à l'octroi d'une aide financière au sens des art. 9 et 10 LAFE/GE-2021. La recourante ne prétend d'ailleurs pas le contraire. Partant, la voie du recours en matière de droit public est exclue sous l'angle de l'art. 83 let. k LTF.  
 
2.  
Il convient dès lors d'examiner si le recours déposé devant le Tribunal fédéral remplit les conditions de recevabilité du recours constitutionnel subsidiaire, quand bien même la recourante n'a formé qu'un recours en matière de droit public. En effet, l'intitulé erroné de l'écriture ne nuit pas à son auteur, pour autant que les conditions de recevabilité du recours qui aurait dû être interjeté soient réunies (ATF 133 II 396 consid. 3.1). 
 
2.1. Selon l'art. 115 LTF, a qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b). L'intérêt juridiquement protégé requis par l'art. 115 let. b LTF peut être fondé sur le droit cantonal ou fédéral ou directement sur un droit fondamental particulier (cf. ATF 140 I 285 consid. 1.2; 135 I 265 consid. 1.3; arrêts 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 2.1; 2C_200/2017 du 14 juillet 2017 consid. 1.2.3).  
 
2.2. La notion d'intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 115 al. 1 let. b LTF est étroitement liée aux motifs de recours prévus par l'art. 116 LTF, en ce sens que la partie recourante doit être titulaire d'un droit constitutionnel dont elle invoque une violation (ATF 140 I 285 consid. 1.2; 135 I 265 E. 1.3; arrêt 2C_200/2017 du 14 juillet 2017 consid. 1.2.3). Le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux que dans la mesure où un tel grief a été soulevé de manière claire et précise dans le recours (cf. art. 106 al. 2 en relation avec l'art. 117 LTF); des exigences de motivation qualifiées s'appliquent à cet égard (cf. ATF 145 I 121 consid. 2.1; 137 II 305 consid. 3.3; arrêt 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 2.1).  
 
2.3. Dans la mesure où la recourante invoque, à l'appui de son recours, exclusivement une application arbitraire du droit cantonal, elle n'est pas légitimée, faute de droit à l'octroi de la subvention litigieuse, à déposer un recours constitutionnel subsidiaire, car elle ne jouit pas d'un intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 115 let. b LTF à demander l'annulation de l'arrêt attaqué (ATF 138 I 305 consid. 1.3; 133 I 185 consid. 3 ss; arrêt 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 2.2).  
 
2.4. En conséquence, la voie du recours constitutionnel subsidiaire n'est pas non plus ouverte.  
 
3.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. 
Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe (cf. art. 66 al. 1 et al. 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au mandataire du Département de l'économie et de l'emploi ainsi qu'à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative. 
 
 
Lausanne, le 9 décembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. Wiedler