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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_303/2024  
 
 
Arrêt du 10 octobre 2024  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Bovey et De Rossa. 
Greffier : M. Piccinin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Mathieu Azizi, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Conservatrice du Registre foncier de la Sarine, rue Joseph-Piller 13, 1700 Fribourg. 
 
Objet 
inscription du légataire d'un immeuble agricole, 
 
recours contre l'arrêt de la I e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg du 9 avril 2024 (101 2024 29). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Feu B.________, né en 1933, veuf, avait un fils unique, C.________, né en 1971 et sous curatelle de portée générale.  
 
A.b. Le 29 mars 2018, B.________ a conclu un pacte successoral avec D.________, né en 1945, par le ministère de Me A.________, notaire à Fribourg. Il ressort de cet acte que B.________ institue son fils comme héritier unique de toute sa succession et qu'il lègue à D.________ l'immeuble art. (..) RF U.________, sis en zone agricole. Le legs était motivé par la volonté du disposant de permettre à son fils de continuer à vivre dans la maison paternelle, sous l'égide et avec le soutien du légataire, avec la famille duquel s'est nouée une relation de confiance et d'amitié.  
Par acte notarié du 12 avril 2018, B.________ a concédé à son fils un droit d'habitation gratuit et viager sur l'immeuble art. (...) RF U.________. 
Le 16 octobre 2020, toujours sous le ministère de Me A.________, B.________ a conclu un pacte successoral complémentaire avec D.________. Ce pacte prévoit notamment que le disposant lègue les immeubles art. (...), (...), (...), (...), (...) et (...) RF U.________, également sis en zone agricole, institue son fils comme héritier unique de toute sa succession, mais le renvoie toutefois à sa réserve, la quotité disponible permettant d'acquitter les legs en faveur de D.________, et institue celui-ci comme héritier unique de toute sa succession en cas de prédécès de son fils. Il prévoit en outre, à titre de charge grevant les legs, que le légataire doit acquitter la réserve de l'héritier par paiement en espèces, compte tenu de la valeur officielle des immeubles, le cas échéant fixée par l'autorité compétente, dans un délai de trois mois à compter du décès du disposant. 
 
A.c. B.________ est décédé le 16 novembre 2021. Les deux pactes successoraux ont été ouverts le 21 décembre 2021 devant la Justice de paix de la Sarine par Me A.________, qui est l'exécuteur testamentaire désigné.  
Le 22 décembre 2021, D.________ a accepté les legs en sa faveur. Le 22 novembre 2022 a été établi le certificat d'héritiers de B.________; son fils est son unique héritier. 
Les 9 et 13 février 2023, l'héritier et le légataire ont passé une convention ayant notamment pour objet la fixation de la valeur d'attribution des immeubles légués, la reprise de la dette hypothécaire existante et le paiement de la réserve héréditaire. D.________ a ensuite versé le montant convenu sur le compte-clients de Me A.________. 
 
B.  
 
B.a. Par réquisition du 6 mars 2023, Me A.________ a demandé à la Conservatrice du Registre foncier de la Sarine (ci-après: la Conservatrice) d'inscrire le légataire en qualité de nouveau propriétaire unique des immeubles à lui légués.  
Par décision du 18 juillet 2023, la Conservatrice a rejeté la réquisition d'inscription de D.________ comme propriétaire, au motif que les immeubles en cause sont sis en zone agricole et que l'inscription d'un légataire nécessite une autorisation de l'Autorité foncière cantonale. 
 
B.b. Le 18 août 2023, Me A.________ a interjeté recours contre la décision précitée auprès de l'Autorité de surveillance du registre foncier.  
Par décision du 27 novembre 2023, dite autorité a confirmé le rejet de la réquisition d'inscription du légataire comme propriétaire. 
 
B.c. Statuant par arrêt du 9 avril 2024, la I e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg a rejeté le recours déposé par Me A.________ le 29 janvier 2024 contre la décision du 27 novembre 2023 de l'Autorité de surveillance du registre foncier.  
 
C.  
Par acte posté le 13 mai 2024, Me A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité. Il conclut à la modification du dispositif de la décision du 27 novembre 2023 en ce sens que son recours du 18 août 2023 est admis, qu'ordre est donné à la Conservatrice d'inscrire D.________ en qualité de propriétaire des immeubles formant les art. (...), (...), (...), (...), (...), (...) et (...) du registre foncier de la Commune de U.________, que les frais de la procédure de recours sont mis à la charge de l'État de Fribourg et qu'une indemnité de 1'000 fr. lui est allouée à titre de dépens. 
Des déterminations n'ont pas été requises. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La décision entreprise, qui confirme le rejet d'une réquisition d'inscription au registre foncier, est une décision finale (art. 90 LTF), rendue par un tribunal cantonal supérieur statuant sur recours (art. 75 LTF) en application de normes de droit public, dans une matière connexe au droit civil (art. 72 al. 2 let. b. ch. 2 LTF; ATF 144 III 310 consid. 1.1), de nature pécuniaire (ATF 144 III 310 consid. 1.1), dont la juridiction précédente a constaté que la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant a succombé devant la juridiction précédente et est particulièrement touché par le rejet de la réquisition d'inscription en sa qualité de notaire qui a instrumenté les actes sur la base desquels dite réquisition est demandée et a un intérêt digne de protection à la modification de l'arrêt attaqué (arrêt 5A_518/2017 du 20 avril 2018 consid. 1.2 et les références citées, non publié in ATF 144 III 310 précité); il jouit ainsi de la qualité pour recourir (art. 76 al. 1 let. a et b LTF). Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et en la forme prévue par la loi (art. 42 al. 1 LTF), le recours est donc en principe recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits constitutionnels que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 149 III 81 consid. 1.3; 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 145 IV 154 consid. 1.1).  
En l'espèce, la partie " Rappel des faits " du recours (p. 5 à 8) sera ignorée en tant que les éléments qui y sont exposés s'écartent de ceux contenus dans l'arrêt attaqué et que le recourant n'invoque, ni a fortiori ne démontre, leur établissement arbitraire et que leur correction influerait sur le sort de la cause. 
 
3.  
Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., sous l'aspect du droit à une décision motivée. 
Il reproche en substance à la cour cantonale de s'être limitée à se référer à l'arrêt 2C_735/2021 du 11 mars 2022 dans lequel le Tribunal fédéral avait refusé de reconnaître au légataire la position d'héritier au sens de l'art. 62 let. a LDFR en mentionnant qu'il ne lui appartenait pas de réviser cette jurisprudence. Il expose que dite autorité n'a pas examiné de manière approfondie si les circonstances de l'espèce commandaient une autre solution, balayant ainsi ses arguments sans plus ample examen. Il rappelle qu'en vertu de l'art. 1 al. 3 CC, les autorités judiciaires doivent, pour prendre leur décision, s'inspirer des solutions consacrées par la doctrine et la jurisprudence. Selon le recourant, compte tenu de la complexité de la question juridique litigieuse soulevée qui faisait l'objet d'un nombre très limité de décisions de justice, la cour cantonale aurait dû se pencher sur la note de MICHEL MOOSER qu'il avait produite pour examiner si la jurisprudence précitée devait être confirmée ou s'il convenait de s'en distancier. 
Quoi qu'en dise le recourant, il n'apparaît pas que la cour cantonale aurait violé son droit d'être entendu, sous l'aspect du droit à une décision motivée (sur ce point, cf. ATF 147 IV 409 consid. 5.3.4; 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2; 139 V 496 consid. 5.1 et les références). On ne voit en effet pas que dite autorité aurait omis sans raison de prendre en compte les arguments présentés en appel. Au contraire, comme l'indique le recourant dans son grief, il apparaît que la cour cantonale a rejeté le recours au motif que la position défendue par le recourant s'écartait de la jurisprudence du Tribunal fédéral. Aussi, le recourant, qui conteste d'ailleurs l'application de cette jurisprudence dans la suite de son recours en soulevant un grief de violation de l'art. 62 let. a LDFR (cf. infra consid. 4), confond le défaut de motivation, qui relève du droit d'être entendu, avec le désaccord que la motivation présentée a suscité chez lui et qui relève du fond (ATF 145 III 324 consid. 6.1). 
Infondé, le grief de violation de l'art. 29 al. 2 Cst. doit être rejeté. 
 
4.  
Le recourant estime que la cour cantonale a contrevenu à l'art. 62 let. a LDFR en considérant qu'un légataire devait disposer d'une autorisation pour acquérir un bien agricole. 
 
4.1. Selon l'art. 61 al. 1 LDFR, celui qui entend acquérir une entreprise ou un immeuble agricole doit obtenir une autorisation. L'acquisition d'un tel bien est en principe soumise à autorisation. Des exceptions à l'obligation d'autorisation sont prévues à l'art. 62 LDFR. N'est notamment pas soumise à autorisation l'acquisition par succession et par attribution de droit successoral (art. 62 let. a LDFR).  
 
4.1.1. Dans l'arrêt 2C_735/2021 du 11 mars 2022, consid. 3.4 (publié in RNRF 2023 p. 80 et résumé en français in Not@lex 2023 p. 41), le Tribunal fédéral a jugé que l'acquisition d'une entreprise ou d'un immeuble agricole par un légataire n'était pas exemptée d'autorisation. Il a motivé sa position en relevant que la notion d'acquisition " par succession " de l'art. 62 let. a LDFR devait être comprise comme le transfert de la succession du défunt aux héritiers au sens de l'art. 560 CC, lesquels acquièrent de plein droit l'ensemble de la succession au décès du défunt. Le fait qu'aucune autorisation n'était requise en cas d'acquisition par succession était justifié non seulement par des considérations de politique familiale, mais aussi parce que le transfert de propriété a lieu de par la loi et qu'un refus d'autorisation est de fait exclu. Toujours selon cet arrêt, la notion d'acquisition " par attribution de droit successoral " s'entendait comme le transfert de la propriété d'un objet de la succession de la communauté héréditaire à un héritier dans le cadre du partage successoral, le terme " attribution " (en allemand: Zuweisung; en italien: attribuzione) se trouvant dans d'autres dispositions légales, en particulier aux art. 612 et 612a CC et art. 11 ss et 21 LDFR. L'absence d'autorisation en cas d'acquisition " par attribution de droit successoral " reposait également sur des considérations de politique familiale. Dans la mesure où le legs ne confère pas au bénéficiaire la qualité d'héritier mais une créance contre les héritiers tendant à la délivrance de l'objet légué (art. 484 al. 1 CC), le légataire n'acquérait ni " par succession " ni " par attribution de droit successoral " au sens de l'art. 62 let. a LDFR. Des objectifs de politique familiale, tels que ceux qui sous-tendaient l'art. 62 let. a LDFR, ne plaidaient pas non plus en faveur d'une exemption de l'obligation d'autorisation pour l'acquisition par legs. De même, contrairement au transfert de propriété qui intervient de plein droit lors d'une succession, aucun problème ne se posait en ce qui concerne un possible refus d'autorisation.  
 
4.1.2. Comme mentionné dans cet arrêt, l' Obergericht du canton d'Uri avait déjà jugé ainsi dans un arrêt V 04 19 du 11 mars 2005, consid. 4e (résumé in RNRF 2008 p. 195 ss et DC 2007 p. 178). BEAT STALDER (in Das bäuerliche Bodenrecht, 2e éd. 2011, no 7 ad art. 62 LDFR) soutenait quant à lui une position contraire. Selon cet auteur, il importe peu que l'attribution se fasse sous la forme d'une institution d'héritier ou d'un legs. Compte tenu de la dispense légale d'autorisation pour toutes les attributions successorales, il ne se justifie pas de distinguer les legs à titre gratuit des legs à titre onéreux, en refusant la dispense d'autorisation à ces derniers; une autorisation doit néanmoins être exigée dans les cas où l'attribution par legs à titre onéreux vise à contourner la procédure d'autorisation (art. 2 al. 2 CC).  
L'arrêt 2C_735/2021 a été commenté par la doctrine. FRANZ A. WOLF (Erwerbsbewilligung gemäss BGBB und Vorkaufsfall beim Vermächtnis, Jusletter du 13 juin 2022, n. 15) estime que la solution retenue par le Tribunal fédéral est fondée, même si elle limite en fin de compte la liberté de disposer pour cause de mort des immeubles agricoles. NADINE FEUERSTEIN (Die Stellung des Vermächtnisnehmers im Bäuerlichen Erbrecht, Communications de droit agraire (CDA) 2/2022 p. 117 ss, spéc. p. 134 s.) relève que si cette solution est certes compréhensible, elle a pour conséquence pratique que le disposant qui, à sa mort, souhaite transmettre des immeubles agricoles à une personne qui ne peut pas obtenir une autorisation doit désormais instituer cette personne héritière et lui attribuer les immeubles par une règle de partage, ce qui n'est pas judicieux. PIUS KOLLER (Das Vermächtnis als Vorkaufsfall, successio 2024 p. 221 ss, spéc. p. 227) considère que l'absence de dispense d'autorisation pour les légataires s'écarte de la lettre de la loi, dans la mesure où le legs constitue une attribution de nature successorale et que, contrairement à l'art. 216c al. 2 CO, l'art. 62 let. a LDFR n'exige pas que l'attribution soit faite à un héritier. L'exception faite par cette dernière disposition a pour but de permettre une transmission illimitée au sein de la famille proche, le Message du Conseil fédéral ne se prononçant pas sur la question de savoir si le bénéficiaire doit être un héritier ou un légataire. Étant donné qu'un héritier institué peut acquérir sans autorisation la propriété d'objets agricoles en dehors de la famille, il ne se justifie pas de traiter différemment le légataire; la manière dont est attribué un bien n'a aucune influence sur les relations familiales. Ainsi, selon cet auteur, limiter la liberté de disposer par legs ne correspond pas à la volonté du législateur. 
 
4.2. La cour cantonale a relevé que même si l'on peut s'interroger sur les raisons pour lesquelles un legs n'avait pas été qualifié d'attribution de droit successoral, l'arrêt 2C_735/2021 était clair et univoque et il n'était pas décisif qu'il ne soit pas publié aux ATF. Un légataire n'avait pas la position d'héritier, de sorte qu'il ne pouvait pas bénéficier de l'une des dispenses d'autorisation prévues par l'art. 62 let. a LDFR. À aucun moment, il n'était question de distinguer en fonction des motivations ayant présidé à l'institution du legs, ni en fonction du caractère gratuit ou onéreux de celui-ci. L'opinion contraire de STALDER n'avait pas été ignorée par le Tribunal fédéral, mais n'avait pas été retenue. Il devait en aller de même de l'avis similaire de MOOSER, exprimé dans sa note du 6 août 2018. Au demeurant, il n'était pas établi in casu que B.________ eût l'intention d'attribuer les immeubles en cause à D.________ à titre gratuit, ce dernier devant reprendre les dettes hypothécaires, assumer l'entretien et les réparations nécessaires, et acquitter en espèces la réserve héréditaire du fils du défunt. Ainsi, la cour cantonale a considéré que, dans ces conditions, vu la jurisprudence du Tribunal fédéral qu'il ne lui appartient pas de réviser, l'on ne pouvait reprocher à l'Autorité de surveillance du registre foncier d'avoir violé l'art. 62 let. a LDFR en retenant que le légataire d'un immeuble agricole ne pouvait se prévaloir de cette disposition légale, et il n'était pas pertinent que celui-ci aurait éventuellement pu être héritier unique si le fils était décédé avant son père. Il était également sans incidence que, dans la situation soumise au Tribunal fédéral, le legs avait peut-être été constitutif d'un abus de droit, tandis que dans le cas présent le défunt aurait eu l'objectif de procéder à une planification successorale globale et de protéger les intérêts de son fils.  
 
4.3. Le recourant soutient qu'il faudrait retenir que l'acquisition en partage (art. 634 CC), le cas échéant par la personne désignée par le disposant (art. 19 LDFR), est de toute façon dispensée de l'autorisation, du fait que les héritiers deviennent, par l'effet du décès et de par la loi (art. 560 al. 1 CC), propriétaires communs (art. 602 al. 2 CC) des biens du défunt, et que l'acquisition par un propriétaire commun échappe au régime de l'autorisation selon l'art. 62 let. c LDFR. Selon le recourant, l'interprétation retenue dans l'arrêt 2C_735/2021 reviendrait à considérer que le législateur aurait réglé le même cas de figure, à savoir l'acquisition dans le cadre d'un partage successoral et par des propriétaires communs, dans deux dispositions différentes. Dès lors que l'acquisition d'un immeuble par un hoir dans le cadre d'un partage tombait sous le coup de l'art. 62 let. c LDFR, l'"attribution de droit successoral" au sens de l'art. 62 let. a LDFR visait une autre hypothèse. Par cette locution, le législateur "semblait clairement" se référer à la situation du légataire qui acquiert indirectement un bien de la succession. À la lumière de la note de MOOSER, il fallait constater "indéniablement" que l'interprétation donnée à l'art. 62 let. a LDFR par l'arrêt 2C_735/2021 n'était pas conforme au texte et à la systématique de la loi. Dans cet arrêt, il était manifeste que les parties étaient convenues d'un legs en raison de l'impossibilité de transférer l'entreprise agricole entre vifs. Le Tribunal fédéral aurait ainsi dû rejeter le recours au motif que le transfert par legs constituait un abus de droit (art. 2 al. 2 CC), comme l'envisageait STADLER dans le commentaire de la LDFR. Les circonstances étaient différentes dans le cas d'espèce puisque le legs s'inscrivait dans une planification successorale globale, tenant compte de la présence d'un héritier unique, fils du disposant, sans descendance, faisant l'objet d'une curatelle de portée générale et dont il avait été demandé au légataire, ami de la famille, de veiller à son bien-être. Les dispositions pour cause de mort prévoyaient par ailleurs que le légataire répondait des dettes et charges de la succession, comme un héritier universel, et qu'il deviendrait le seul héritier du disposant en cas de prédécès du fils du disposant. Il n'était donc aucunement question ici de détourner les normes de protection de la LDFR. Le recourant ajoute qu'il aurait suffi que le disposant institue le légataire en qualité de seul héritier et le charge de désintéresser l'héritier réservataire pour que l'exception de l'art. 62 let. a LDFR s'applique. Or, c'était indirectement ce que le disposant avait fait en prévoyant que le légataire devait s'acquitter de la réserve héréditaire de son fils moyennant paiement en espèce. Ainsi, il fallait "préciser" la jurisprudence en distinguant en fonction des motivations ayant présidé à l'institution du legs et empêcher uniquement les acquisitions abusives conformément à la position défendue par STALDER.  
 
4.4. Le Tribunal fédéral ayant déjà tranché la question litigieuse, l'argumentation développée par le recourant s'apparente à une demande de changement de jurisprudence.  
 
4.4.1. Un changement de jurisprudence ne se justifie, en principe, que lorsque la nouvelle solution procède d'une meilleure compréhension de la ratio legis, repose sur des circonstances de fait modifiées ou répond à l'évolution des conceptions juridiques; sinon, la pratique en cours doit être maintenue. Un changement doit par conséquent reposer sur des motifs sérieux et objectifs qui, dans l'intérêt de la sécurité du droit, doivent être d'autant plus importants que la pratique considérée comme erronée, ou désormais inadaptée aux circonstances, est ancienne (ATF 150 II 105 consid. 5.8; 145 III 303 consid. 4.1.2; 145 I 227 consid. 4; 144 V 72 consid. 5.3.2; 142 V 112 consid. 4.4 et les références).  
 
4.4.2. La critique du recourant ne permet pas de considérer que ces conditions sont remplies en l'espèce.  
Dans l'arrêt 2C_735/2021, le Tribunal fédéral n'a pas examiné si le disposant avait commis un abus de droit en léguant son domaine agricole. Il a rejeté le recours au motif qu'une acquisition par legs d'une entreprise ou d'un immeuble agricole n'entrait pas dans le champ d'application de l'art. 62 let. a LDFR. Pour ce faire, il a interprété les notions d'acquisition "par succession" et "par attribution de droit successoral" à la lumière du texte et de la systématique de la loi, en s'appuyant sur d'autres dispositions de la LDFR et du Code civil. Il s'est également fondé sur le but poursuivi par le législateur, en rappelant que l'exception faite aux héritiers de se voir attribuer une entreprise ou un immeuble agricole sans en être personnellement exploitant était dictée par des motifs de politique familiale. En tant que le recourant soutient que, dans cet arrêt, le Tribunal de céans aurait dû rejeter le recours en retenant l'abus de droit et que l'interprétation qui a été donnée à l'art. 62 let. a LDFR serait contraire au texte et à la systématique de la loi, il ne fait que présenter son propre point de vue, sans parvenir à démontrer son bien-fondé et, partant, qu'il procéderait d'une meilleure compréhension de la loi. Son argument selon lequel l'acquisition d'un immeuble par un hoir dans le cadre d'un partage tombait déjà sous le coup de l'art. 62 let. c LDFR pour en déduire que le législateur "semblait clairement" se référer au légataire par la locution "attribution de droit successoral" de l'art. 62 let. a LDFR ne prend appui sur aucun élément objectif. En particulier, il ne résulte pas du Message du Conseil fédéral du 19 octobre 1988 concernant la LDFR (FF 1988 III p. 972 s., ad art. 63) que telle était la volonté du législateur. Au contraire, il apparaît qu'à la lecture du Message, le but poursuivi par ces deux dispositions n'était pas le même: l'exception de l'art. 62 let. a LDFR était prévue afin de permettre la transmission de génération en génération d'un domaine "dans le cadre étroit de la famille" même si le reprenant ne l'exploite pas personnellement, alors que l'exception en faveur d'un propriétaire commun ou d'un copropriétaire de l'art. 62 let. c LDFR était justifiée par le fait que ces transferts conduisent à une "réduction désirable" d'ayants droit au profit d'un seul propriétaire. Par ailleurs, comme relevé à juste titre dans l'arrêt attaqué, la référence du recourant à l'avis "éclairé" opposé de STALDER n'apparaît pas décisive, dans la mesure où il est antérieur à l'arrêt 2C_735/2021 et qu'il en a été tenu compte dans cet arrêt. Cet avis repose sur la seule lettre de l'art. 62 let. a LDFR; il ne procède pas d'une interprétation systématique au regard des autres dispositions de la LDFR ni ne prend en compte le but de la loi; du reste, STALDER (op. cit., no 6 ad art. 62 LDFR) relève que la dispense d'autorisation d'un héritier qui n'est pas exploitant à titre personnel s'écarte du but poursuivi par le droit public en la matière (cf. en particulier art. 1 let. b LDFR) en raison des concessions faites en matière de politique familiale et MOOSER observe dans sa note que l'acquisition fondée sur un legs par un tiers étranger à la famille ne répond pas à un tel objectif. Ne sont pas non plus déterminantes les considérations selon lesquelles il aurait suffi au disposant d'instituer le légataire héritier et que c'était indirectement ce qu'il avait fait ou qu'en cas de prédécès du fils, le légataire serait devenu héritier, étant donné que le recourant admet que la volonté du disposant était bel et bien de léguer les immeubles agricoles à D.________ si son fils lui survivait et que les dispositions pour cause de mort ont été exécutées en ce sens. C'est au surplus en vain que le recourant se prévaut de la différence entre les circonstances du cas d'espèce et celles de l'arrêt 2C_735/2021. De simples considérations subjectives du disposant ayant présidé à l'attribution par legs ne sauraient conduire à étendre la portée de l'art. 62 let. a LDFR définie par le Tribunal fédéral après avoir cherché le sens véritable de cette norme. Finalement, les possibles conséquences pratiques évoquées par FEUERSTEIN de devoir recourir à une institution d'héritier ne constituent pas un motif suffisant au sens des principes susrappelés (cf. supra consid. 4.4.1) pour justifier un revirement de jurisprudence. Il en va de même de l'interprétation divergente de l'art. 62 let. a LDFR défendue par KOLLER. À l'instar de la position de STALDER, celle de KOLLER se base en partie sur une interprétation littérale de la notion d'"attribution de droit successoral" qui ne prend pas en compte les autres dispositions de la LDFR, ainsi que sur la volonté du législateur de permettre une libre attribution des immeubles agricoles par dispositions pour cause de mort. Or, comme déjà relevé, il résulte du Message du Conseil fédéral que cette volonté d'élargir la liberté du disposant n'est pas sans limite, mais s'inscrit "dans le cadre étroit de la famille". 
Il s'ensuit que le grief du recourant doit être rejeté. 
 
5.  
En définitive, le recours est rejeté, aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à la Conservatrice du Registre foncier de la Sarine et à la I e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 10 octobre 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
Le Greffier : Piccinin