Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_581/2024
Arrêt du 11 avril 2025
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni.
Greffier : M. Jeannerat.
Participants à la procédure
A.A.________,
c/o ADARS, B.________,
représenté par ADARS,
agissant par B.________,
recourant,
contre
Office cantonal de la population et des migrations du canton de Genève, route de Chancy 88, 1213 Onex.
Objet
Refus de renouvellement de l'autorisation de séjour et renvoi de Suisse,
recours contre l'arrêt de la Chambre administrative, 2e section, de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 8 octobre 2024 (ATA/1176/2024).
Faits :
A.
A.A.________, né en 1978, est ressortissant des États-Unis. Le 30 juin 2017, il a épousé à Genève une ressortissante française au bénéfice d'un permis d'établissement en Suisse et demandé, en date du 13 juillet 2017, la délivrance d'une autorisation de séjour au titre de regroupement familial. Il a alors été mis au bénéfice d'un permis de séjour pour regroupement familial valable jusqu'au 7 juillet 2023.
Dans l'intervalle, le 17 juillet 2019, A.A.________ a adressé à l'Office fédéral de la population et des migrations du canton de Genève (ci-après: l'Office cantonal) un formulaire d'annonce de changement d'adresse. Sous la rubrique "
Le changement d'adresse concerne-t-il le conjoint (e) /partenaire? " était cochée la case "non" et sous celle "
Si non, s'agit-il d'une séparation? " était cochée la case "oui".
Le 28 avril 2020, A.A.________ et son épouse ont conclu une convention de divorce de laquelle il ressortait qu'ils s'étaient séparés le 21 juin 2019 et que chacun des époux s'était alors constitué un domicile séparé. Le 22 septembre 2020, le Tribunal civil de première instance du canton de Genève a prononcé leur divorce.
B.
Par décision du 21 septembre 2023, l'Office cantonal a refusé le renouvellement de l'autorisation de séjour de A.A.________ et a prononcé son renvoi.
A.A.________ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève contre cette décision. Par jugement du 5 mars 2024, ledit tribunal a rejeté le recours.
A.A.________ a alors recouru auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: la Cour de justice) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce qu'il soit ordonné à l'Office cantonal de renouveler son autorisation de séjour. La Cour de justice a rejeté ce recours par arrêt du 8 octobre 2024.
C.
A.A.________ (ci-après: le recourant), représenté par l'Association de défense des Africains résidant en Suisse (ADARS), laquelle agit par l'intermédiaire de B.________, dépose un recours au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 8 octobre 2024 de la Cour de justice. Requérant à titre préalable l'octroi de l'effet suspensif à son recours, le recourant demande, sur le fond, l'annulation de l'arrêt attaqué et, cela étant fait, qu'il soit ordonné à l'Office cantonal de renouveler son titre de séjour.
Par ordonnance du 22 novembre 2024, la Présidente de la Cour de céans a admis la requête d'effet suspensif.
Le même jour, le recourant a déposé un nouveau mémoire de recours au contenu identique au précédent, mais accompagné de l'arrêt attaqué et d'une procuration.
Aucun échange d'écritures n'a été ordonné.
Considérant en droit :
1.
1.1. Dirigé contre une décision rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF), le présent recours doit être traité comme un recours en matière de droit public, quand bien même le recourant ne l'a pas désigné comme tel. L'art. 83 let. c ch. 2 LTF dispose certes que cette voie de droit n'est pas ouverte contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Toutefois, le recourant, en tant qu'ex-époux d'une ressortissante française disposant d'un permis d'établissement en Suisse, peut prétendre de manière plausible à un droit potentiel au renouvellement de son titre de séjour en vertu de l'art. 50 al. 1 let. a LEI (cf. infra consid. 4.1), de sorte que la présente cause échappe à la clause d'irrecevabilité susmentionnée.
1.2. Le présent recours en matière de droit public est enfin dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue par une autorité judiciaire cantonale supérieure (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Il a, pour le surplus, été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF) par le destinataire de l'arrêt attaqué, lequel jouit sans conteste d'un intérêt digne de protection à sa modification (art. 89 al. 1 LTF). Il est partant recevable.
2.
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la violation de droits fondamentaux, ainsi que celle de droits constitutionnels cantonaux ou du droit intercantonal, que si de tels griefs sont invoqués et motivés par la partie recourante, c'est-à-dire s'ils sont expressément soulevés et exposés de façon claire et détaillée dans le mémoire de recours (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 141 I 36 consid. 1.3; 135 III 232 consid. 1.2). Quant à un éventuel grief de violation du droit cantonal - non constitutif d'un droit constitutionnel -, il ne peut pas être soulevé devant le Tribunal fédéral. En revanche, il est toujours possible de faire valoir que l'application du droit cantonal est arbitraire ou qu'elle constitue une violation du droit fédéral (cf. ATF 142 II 369 consid. 2.1; 140 III 385 consid. 2.3).
En l'occurrence, compte tenu de ce qui précède, la Cour de céans n'examinera pas les griefs du recourant en tant que celui-ci affirme que la Cour de justice aurait violé les art. 28 et 41 de la loi genevoise sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA/GE; RSGE E 5 10) en rendant l'arrêt attaqué. Comme on vient de le dire, il n'est pas possible d'invoquer une mauvaise application du droit cantonal devant le Tribunal fédéral, du moins sans invoquer simultanément une violation du principe de l'interdiction de l'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou d'une autre norme de droit fédéral, ce que ne fait pas le recourant en lien avec les deux dispositions susmentionnées. Au demeurant, les griefs en question - consistant à reprocher à la Cour de justice de n'avoir pas admis que lui et son épouse avaient continué de former un couple après juin 2019 comme ils l'avaient déclaré ainsi que d'autres témoins - ne sont de toute façon pas propres à influencer l'issue du litige. Le point de savoir si le recourant et son ex-épouse sont restés proches après l'abandon de leur vie commune n'est en effet nullement déterminant en la cause, comme on le verra encore (cf. infra consid. 4.2).
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6; 139 II 373 consid. 1.6).
3.
Le recourant affirme que la Cour de justice aurait constaté les faits de manière manifestement inexacte. Il reproche plus précisément à l'autorité précédente d'avoir retenu arbitrairement qu'il s'était "séparé" de son épouse dès le moment où il avait emménagé dans un autre appartement qu'elle en juin 2019. Il affirme que lui et son ex-épouse n'ont à cette époque déposé aucune requête de séparation de corps ni demandé aucune mesure protectrice de l'union conjugale qui démontrerait qu'ils auraient eu l'intention de se séparer avant que leur divorce ne soit prononcé fin 2020.
Une telle critique tombe cependant à faux. Selon la jurisprudence, il n'y a arbitraire dans l'établissement des faits ou l'appréciation des preuves que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 148 I 127 consid. 4.3; 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 241 consid. 2.3.1). Or, dans l'arrêt attaqué, contrairement à ce que semble penser le recourant, la Cour de justice s'est en réalité contentée de constater que lui et son épouse avaient cessé de résider ensemble au mois de juin 2019 et qu'ils avaient dès lors vécu séparés à partir de cette date, conformément à ce que l'intéressé avait lui-même déclaré à différentes occasions. Quoi que celui-ci prétende, l'autorité précédente n'a ainsi jamais retenu qu'à ce moment-là, le couple aurait déjà eu l'intention de se séparer définitivement et qu'il projetait déjà de divorcer à terme, de sorte que l'on ne voit pas qu'elle ait établi arbitrairement les faits de la cause sur ces points, qu'elle a de fait laissés indécis. Quant à la question de savoir si, au moment de trancher la question du renouvellement de l'autorisation de séjour du recourant, le Tribunal cantonal aurait dû tenir compte de la prétendue volonté de celui-ci de continuer à mener une vie de couple avec son épouse et de n'entamer aucune démarche juridique formalisant leur vie séparée avant de divorcer fin 2020, elle ne relève pas d'un éventuel établissement arbitraire des faits, mais du contrôle de l'application du droit, auquel il sera procédé ci-après.
4.
Le recourant soutient que la Cour de justice aurait dû prolonger son autorisation de séjour en application de l'art. 50 al. 1 let. a LEI en raison de son mariage d'une durée de plus de trois ans avec une ressortissante française titulaire d'une autorisation d'établissement en Suisse.
4.1. L'art. 50 LEI - que ce soit dans sa version actuelle ou celle en vigueur jusqu'au 31 décembre 2024 (RO 2024 713) - envisage deux hypothèses dans lesquelles le conjoint d'une personne étrangère titulaire d'une autorisation d'établissement conserve le droit à la prolongation de l'autorisation de séjour initialement délivrée au titre du regroupement familial à la suite de son mariage, ce malgré la dissolution de la famille. Le premier cas de figure - qui est prévu à l'art. 50 al. 1 let. a LEI et qui est le seul invoqué par le recourant - suppose que l'union conjugale ait duré au moins trois ans et que l'intégration du conjoint regroupé soit réussie au sens des critères définis à l'art. 58a LEI. Ces deux conditions sont cumulatives (ATF 140 II 289 consid. 3.5.3; 136 II 113 consid. 3.3.3). Selon la jurisprudence, la période minimale de trois ans d'union conjugale - comme première condition
sine qua non à l'application de l'art. 50 al. 1 let. a LEI - commence à courir dès le début de la cohabitation effective des époux en Suisse et s'achève au moment où ceux-ci cessent de faire ménage commun (ATF 140 II 345 consid. 4.1). La limite des trois ans est absolue et s'applique même s'il ne manque que quelques jours pour atteindre la durée des trente-six mois exigés par l'art. 50 al. 1 let. a LEI (cf. ATF 137 II 345 consid. 3.1.3; arrêt 2C_1048/2022 du 22 mars 2023 consid. 4.2). Une exception à l'exigence du ménage commun peut à la rigueur être admise en application de l'art. 49 LEI lorsque la communauté familiale est maintenue et que des raisons majeures justifient l'existence de domiciles séparés (cf. ATF 140 II 345 consid. 4.4; aussi arrêt 2C_112/2020 du 9 juin 2020 consid. 4.5). La décision de "vivre ensemble séparément" ("
living apart together ") en tant que telle, sans résulter d'autres motifs, ne constitue en revanche pas, de jurisprudence constante, une raison majeure au sens de la disposition précitée, ni ne peut être décomptée comme une période d'union conjugale au sens de l'art. 50 al. 1 let. a LEI (cf. arrêts 2C_590/2023 du 8 mai 2024 consid. 4 et 2C_52/2022 du 15 février 2022 consid. 2.1.2 et les jurisprudences antérieures citées).
4.2. En l'occurrence, la Cour de justice a constaté, d'une manière qui lie la Cour de céans (cf. art. 105 al. 1 LTF), que le recourant et son ex-épouse, qui vit en Suisse au bénéfice d'un permis d'établissement, avaient cessé d'habiter ensemble en juin 2019, soit environ deux ans après leur mariage en Suisse. Eu égard à ce constat, on ne voit pas qu'il puisse être reproché à l'autorité précédente d'avoir conclu que la vie commune du couple avait duré moins de trois ans et qu'une prolongation de l'autorisation de séjour du recourant ne pouvait dès lors pas entrer en ligne de compte en application de l'art. 50 al. 1 let. a LEI. Comme on vient de le voir, en exigeant une union conjugale de trois ans au moins entre la personne étrangère et son ex-conjoint établi en Suisse comme condition préalable au renouvellement de l'autorisation de séjour malgré la dissolution du mariage, cette disposition envisage non seulement un mariage d'une telle durée minimale, mais également une vie commune d'une période similaire, ce qui signifie que les époux concernés doivent vivre sous le même toit en Suisse durant au moins trois ans, ce qui n'est pas le cas du recourant et de son ex-épouse. Il s'ensuit qu'il importe peu en l'espèce que ces derniers n'aient pas voulu entamer des démarches judiciaires de protection de l'union conjugale, de séparation de corps ou de divorce après le déménagement hors du domicile conjugal du premier ou que les intéressés n'aient peut-être, dans un premier temps, pas exclu de revivre un jour ensemble. Ces éléments ne suffisent en principe pas à prolonger la durée de l'union conjugale au sens de la LEI et à octroyer des droits aux conjoints en application de cette loi. Le législateur a sur ce point volontairement adopté une solution différente de celle qu'il a pu mettre en place dans d'autres domaines du droit où une simple séparation de fait après mariage n'empêche pas forcément de conférer certains droits ou obligations aux époux (cf. art. 255 CC et art. 24 de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants [LAVS; RS 831.10]), de sorte que le recourant ne peut rien tirer en sa faveur de ces réglementations; on remarquera du reste qu'il était de toute façon déjà divorcé lorsque son autorisation de séjour est arrivée à échéance et qu'il en a demandé la prolongation.
4.3. L'intéressé ne se prévaut enfin d'aucune raison majeure au sens l'art. 49 LEI susceptible de justifier des exceptions à l'exigence de ménage commun. Prétendre s'être séparé de son épouse de manière "
usuelle dans un contexte COVID ou même les maris avaient peur de côtoyer leur femme, de surcroît aide-soignante comme [son épouse] " ne constitue en tout cas pas une telle raison majeure au sens de la jurisprudence relative à cette disposition (cf. supra consid. 4.1) et exposée de manière claire dans l'arrêt attaqué, auquel il peut être renvoyé sur ce point (art. 109 al. 3 LTF).
4.4. Il en résulte que le recours est mal fondé en tant qu'il invoque une violation de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, étant précisé que l'autre hypothèse de droit à la prolongation de l'autorisation de séjour après dissolution de l'union conjugale, prévue à l'art. 50 al. 1 let. b LEI, n'entre pas en ligne de compte s'agissant du recourant, qui ne prétend pas le contraire dans ses écritures.
5.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, manifestement infondé, selon la procédure simplifiée de l'art. 109 LTF.
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, à l'Office cantonal de la population et des migrations du canton de Genève, à la Chambre administrative, 2e section, de la Cour de justice de la République et canton de Genève et au Secrétariat d'État aux migrations.
Lausanne, le 11 avril 2025
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
Le Greffier : E. Jeannerat