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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_683/2024  
 
 
Arrêt du 11 avril 2025  
I  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Hurni, Président, Kiss et Denys. 
Greffier : M. Botteron. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Me Hüsnü Yilmaz, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représenté par Me Julien Liechti, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
mainlevée provisoire, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2024 par la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (C/26268/2023 ACJC/1473/2024). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 17 octobre 2011, B.________ (ci-après l'intimé) et C.________ Sàrl (désormais A.________ Sàrl, ci-après la recourante) ont conclu une convention de mise en gérance libre portant sur des locaux dont le premier cité est locataire et appartenant à une société immobilière dont il est actionnaire. Selon cette convention, l'intimé, propriétaire du fonds de commerce du restaurant "xxx", confiait au gérant l'exploitation dudit restaurant équipé. Le montant mensuel du loyer était de 3'000 fr. et celui de la gérance libre de 3'000 fr. Ce dernier montant a été réduit à 2'000 fr. par avenant au contrat du 1er juin 2013.  
 
A.b. La recourante ne s'est pas régulièrement acquittée des montants dus. Le 30 juin 2023, elle a contesté la convention de mise en gérance libre au motif que le restaurant n'était pas prêt à être exploité et qu'elle avait procédé à de nombreux investissements. Le contrat devait dès lors plutôt être qualifié de sous-bail à loyer commercial. Elle souhaitait obtenir un bail à loyer commercial, cesser le paiement des prétendus fermages et obtenir le remboursement des montants payés à tort. Le 20 juillet 2023, l'intimé a mis en demeure la recourante de lui verser une somme totale de 180'293 fr. à titre d'arriérés de loyers et fermages pour 2012 à 2022 (167'900 fr.) et pour 2023 (12'393 fr.) dans un délai de 60 jours, faute de quoi son bail serait résilié en application de l'art. 282 CO. Le 21 septembre 2023, compte tenu de l'absence de paiement effectué à l'échéance du délai imparti, l'intimé a résilié le bail à ferme pour le 31 octobre 2023 au moyen du formulaire officiel.  
 
A.c. Par demande déposée devant Le Tribunal des baux et loyers le 29 janvier 2024, à la suite de l'échec de la tentative de conciliation, la recourante a conclu à ce qu'il soit constaté que le bail à ferme conclu avec l'intimé était nul, à ce que ce dernier soit condamné à lui rembourser la somme de 527'000 fr. à titre de remboursement des sommes versées à titre de loyer et fermage, à ce que l'existence d'un bail à loyer soit constatée et à ce que le loyer soit fixé à un montant maximum de 1'500 fr. Elle a soutenu que le restaurant ne comportait pas de cuisine agencée et qu'elle avait financé divers agencements, de sorte que la convention signée ne remplissait pas les conditions d'un bail à ferme. La résiliation de la convention n'était pas valable car l'intimé n'avait aucune légitimation active ni passive, de sorte que le congé était inefficace, voire nul.  
 
A.d. Le 13 octobre 2023, sur requête de l'intimé, l'Office des poursuites a notifié à la recourante un commandement de payer, poursuite n°..., portant sur la somme de 141'103 fr. 50 avec intérêts à 5 % l'an dès le 15 novembre 2020, réclamée à titre "d'arriérés de loyers portant sur plusieurs montants impayés ou partiellement payés depuis le 1er janvier 2018 (date moyenne pour les intérêts). La recourante y a formé opposition. Le 30 novembre 2023, l'intimé a requis la mainlevée de cette opposition. Il a exposé que les arriérés s'élevaient à 26'000 fr. pour 2018, 5'500 fr. pour 2019, 23'000 fr. pour 2020, 29'710 fr. 85 pour 2021, 16'892 fr. 65 pour 2022 et 40'000 fr. pour 2023. Il a notamment produit avec sa requête une copie du contrat du 17 octobre 2011.  
 
B.  
Par jugement du 22 avril 2024, le Tribunal de première instance du canton de Genève a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n°.... 
Par arrêt du 21 novembre 2024, la Chambre civile de la Cour de justice de la République et canton de Genève a rejeté le recours de A.________ Sàrl. 
 
C.  
Celle-ci forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que la requête de mainlevée provisoire est rejetée; subsidiairement elle conclut à l'annulation. 
L'intimé conclut, avec suite de frais et dépens, au rejet du recours. La cour cantonale se réfère à son arrêt. 
Les parties ont répliqué et dupliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), par la partie qui a succombé en instance cantonale (art. 76 al. 1 LTF), contre une décision rendue en matière de poursuite pour dettes et de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF), soit une décision finale au sens de l'art. 90 LTF puisqu'elle met fin à l'instance (ATF 134 III 115 consid. 1.1), et prise sur recours par un tribunal supérieur (art. 75 LTF), dont la valeur litigieuse s'élève à plus de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, compte tenu de l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine pas, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, mais uniquement celles qui sont soulevées devant lui, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 86 consid. 2, 115 consid. 2). Il ne traite donc pas les questions qui ne sont plus discutées par les parties (ATF 140 III 86 consid. 2). Il n'examine pas non plus les griefs qui n'ont pas été soumis à l'instance cantonale précédente (principe de l'épuisement des griefs, ATF 147 III 172 consid. 2.2; 143 III 290 consid. 1.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). "Manifestement inexactes" signifie ici "arbitraires" (ATF 143 I 310 consid. 2.2). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF. La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 140 III 264 consid. 2.3).  
Il est observé que la recourante procède à une présentation personnelle des faits, sans articuler de la sorte un quelconque grief recevable. 
 
3.  
 
3.1. En vertu de l'art. 82 LP, le créancier dont la poursuite se fonde sur une reconnaissance de dette constatée par acte authentique ou sous seing privé peut requérir la mainlevée provisoire (al. 1); le juge la prononce si le débiteur ne rend pas immédiatement vraisemblable sa libération (al. 2). La procédure de mainlevée provisoire, ou définitive, est une procédure sur pièces (Urkundenprozess), dont le but n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Le juge de la mainlevée examine uniquement la force probante du titre produit par le poursuivant, sa nature formelle, et lui attribue force exécutoire si le poursuivi ne rend pas immédiatement vraisemblables ses moyens libératoires (ATF 145 III 160 consid. 5.1; 142 III 720 consid. 4.1). Un contrat bilatéral ne vaut reconnaissance de dette que si le poursuivant a rempli ou garanti les obligations légales ou contractuelles exigibles avant le paiement dont il requiert le recouvrement, ou au moment de ce paiement, c'est-à-dire s'il a exécuté ou offert d'exécuter sa propre prestation en rapport d'échange (ATF 145 III 20 consid. 4.1.1).  
Le poursuivi n'a pas à apporter la preuve absolue (ou stricte) de ses moyens libératoires, mais seulement à les rendre vraisemblables, en principe par titre (art. 254 al. 1 CPC; ATF 145 III 20 consid. 4.1.2; 142 III 720 consid. 4.1). Le point de savoir si le poursuivi a rendu vraisemblable sa libération ressortit à l'appréciation des preuves (arrêts 4A_645/2023 du 25 janvier 2024 consid. 3.2.1; 5A_446/2018 du 25 mars 2019 consid. 4.2). 
 
3.2. La cour cantonale a relevé que la recourante se référait régulièrement à la procédure pendante devant le tribunal des baux pour tenter de démontrer qu'elle n'était pas débitrice du montant en poursuite et qu'elle perdait ainsi de vue que le but de la procédure de mainlevée provisoire n'était pas de constater la réalité d'une créance, mais l'existence d'un titre exécutoire: le juge de la mainlevée examinait donc uniquement la force probante du titre produit.  
Pour la cour cantonale, le contrat qui lie les parties vaut titre de mainlevée. La recourante n'a pas contesté qu'elle ne s'était pas acquittée des loyers réclamés en vertu de la convention du 17 octobre 2011. Les affirmations péremptoires de la recourante, parfois difficiles à suivre, relatives notamment à l'impossibilité pour l'intimé d'être locataire alors qu'il est par ailleurs actionnaire de la société propriétaire ne permettaient en tout état de cause pas de considérer que le contrat du 17 octobre 2011 ne constituait pas un de titre de mainlevée valable. La recourante soutenait en outre que l'intimé n'avait pas mis à disposition les équipements nécessaires à l'exploitation d'un restaurant pour lesquels elle devrait payer un fermage. Exposant que la recourante ne s'était pas plainte pendant douze ans du fait que les équipements fournis ne permettaient pas l'exploitation du restaurant, la cour cantonale a retenu que celle ci n'apportait aucun élément propre à rendre vraisemblable que tel serait le cas. 
 
3.3. Pour l'essentiel, la recourante se limite à reproduire l'argumentation qu'elle avait exposée dans son recours cantonal. Cette manière de procéder est irrecevable (ATF 140 III 115 consid. 2). Quoi qu'il en soit, la recourante ne conteste pas en tant que tel que le contrat passé vaut titre de mainlevée. Elle n'établit aucun arbitraire dans l'appréciation de la cour cantonale selon laquelle la recourante n'avait pas établi la vraisemblance de la non-titularité du bail de l'intimé, respectivement la vraisemblance de l'insuffisance de l'équipement. La cour cantonale n'a pas violé l'art. 82 LP en considérant le contrat de gérance libre comme un titre de mainlevée provisoire et en ne tenant pas pour vraisemblable les moyens libératoires invoqués.  
 
4.  
La recourante invoque encore la compensation avec la créance de quelque 500'000 fr. qu'elle fait valoir devant le tribunal des baux en raison des loyers et fermages indus qu'elle aurait payés. 
 
4.1. Le poursuivi peut faire échec à la mainlevée en rendant immédiatement vraisemblable sa libération (art. 82 al. 2 LP). Il peut se prévaloir de tous les moyens de droit civil - exceptions ou objections - qui infirment la reconnaissance de dette (ATF 145 III 20 consid. 4.1.2; 142 III 720 consid. 4.1), en particulier la compensation au sens des art. 120 ss CO; il doit alors établir, au degré de la vraisemblance, le principe, l'exigibilité et le montant de la créance compensante (arrêts 5A_66/2020 du 22 avril 2020 consid. 3.3.1; 5A_139/2018 du 25 juin 2019 consid. 2.6.1). La question de savoir si la partie poursuivie a rendu vraisemblable son moyen libératoire déduit de la compensation ressortit à l'appréciation des preuves (arrêts 5A_1036/2018 du 15 mai 2019 consid. 4.1.2; 5A_446/2018 du 25 mars 2019 consid. 4.2), appréciation que le Tribunal fédéral ne revoit que sous l'angle de l'arbitraire.  
 
4.2. La cour cantonale a indiqué que les titres produits par la recourante et ses explications ne permettaient pas de rendre vraisemblable l'existence de la créance compensante ainsi que le montant exact à concurrence duquel la dette serait éteinte. En effet, le fait que la recourante réclame à l'intimé, dans le cadre d'une procédure pendante devant le tribunal des baux, une somme importante, supérieure à 500'000 fr., ne suffit pas en lui-même à rendre vraisemblable que l'intéressée dispose d'une prétention à l'encontre de l'intimé qu'elle pourrait opposer en compensation. Il n'était pas rendu vraisemblable que les locaux n'étaient pas équipés et que, de ce fait, la recourante pourrait demander le remboursement de l'intégralité des sommes versées comme fermage, ce qui paraissait au demeurant improbable compte tenu du fait qu'elle ne pouvait vraisemblablement pas prétendre à la gratuité des locaux qu'elle occupe depuis treize ans. La recourante relevait d'ailleurs elle-même que le montant d'un loyer devra être fixé. La cour cantonale a ainsi conclu que le montant de la créance que la recourante pourrait invoquer en compensation n'était pas rendu vraisemblable.  
 
4.3. Là encore, la recourante reproduit l'argumentaire de son recours cantonal, ce qui n'est pas admissible (supra consid. 3.3). Elle se livre à une libre discussion et met en avant que le tribunal des baux est déjà saisi de la cause sur le fond et que cette autorité serait seule habilitée à se prononcer. Ce faisant, elle ne cherche nullement à établir que la cour cantonale aurait versé dans l'arbitraire en niant la vraisemblance de la créance compensante. La recourante perd aussi de vue que le but de la procédure de mainlevée n'est pas de constater la réalité de la créance en poursuite, mais l'existence d'un titre exécutoire. Elle ne peut donc rien déduire à ce stade de la procédure parallèle sur le fond, non encore tranchée.  
 
5.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. La recourante supporte les frais de procédure (art. 66 al. 1 LTF) et doit verser des dépens à l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante est condamnée à verser à l'intimé une indemnité de 6'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile. 
 
 
Lausanne, le 11 avril 2025 
 
Au nom de la I re Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Hurni 
 
Le Greffier : Botteron