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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_288/2023  
 
 
Arrêt du 11 juin 2024  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jametti, présidente, Hohl, Kiss, Rüedi et May Canellas. 
Greffier: M. O. Carruzzo. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Mes Sébastien Besson, Antonio Rigozzi, Silja Schaffstein et Eolos Rigopoulos, avocats, 
requérante, 
 
contre  
 
1. B.________ Limited, 
2. C.________ Limited, 
toutes deux représentées par Mes Philippe Bärtsch, Anya George, Christopher Boog et Anne-Carole Cremades, avocats, 
intimées. 
Objet 
arbitrage international, 
 
demande de révision de la sentence rendue le 5 mai 2020 par un Tribunal arbitral avec siège à Genève (CPA no 2019-03). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 25 avril 2001, B.________ Limited (ci-après: B.________), société incorporée aux Bermudes dont l'adresse principale se situe aux Émirats Arabes Unis, et la société de droit iranien A.________ (ci-après: A.________) ont conclu un contrat, intitulé "Gas Sales and Purchase Contract" (ci-après: le GSPC), en vertu duquel cette dernière s'est engagée à fournir certaines quantités de gaz à sa partenaire contractuelle et à les transporter jusqu'au lieu de livraison prévu par les parties.  
En 2003, B.________ a cédé le GSPC à C.________ Limited (ci-après: C.________), société incorporée aux Îles Vierges britanniques dont l'adresse principale se trouve aux Émirats Arabes Unis. 
A.________ n'a jamais livré de gaz à B.________ et C.________. 
 
A.b. Par sentence du 31 juillet 2014, un tribunal arbitral, siégeant à Londres, a reconnu que A.________ avait violé ses obligations de livraison de gaz découlant du GSPC et continuait à ne pas respecter ses engagements.  
 
B.  
 
B.a. Le 28 juin 2018, B.________ et C.________, se fondant sur la clause arbitrale insérée dans le GSPC, ont introduit une nouvelle procédure d'arbitrage contre A.________ en vue d'obtenir le paiement de dommages-intérêts en raison de la non-livraison du gaz à compter du 1er août 2014 et du préjudice en résultant. Les demanderesses ont estimé provisoirement le montant de leur dommage à 18,6 milliards de dollars américains (USD), soit 5,7 milliards USD pour la période comprise entre le 31 juillet 2014 et le 28 juin 2018, ainsi que 12,9 milliards USD pour celle courant à partir du dépôt de la requête d'arbitrage jusqu'à l'échéance du GSPC prévue en décembre 2030.  
Un tribunal arbitral comprenant trois arbitres, administré par la Cour permanente d'arbitrage (CPA), a été constitué. Son siège a été fixé à Genève et l'anglais désigné comme langue de l'arbitrage. Il était composé des arbitres Charles Poncet et Klaus Sachs, désignés respectivement par les demanderesses et la défenderesse, et du président Laurent Aynès, associé d'un cabinet d'avocats français, nommé le 20 février 2019 par les arbitres précités. 
Le 18 avril 2019, les demanderesses ont informé le Tribunal arbitral qu'elles avaient résilié le GSPC le 11 septembre 2018. 
Statuant le 30 juillet 2019, le Tribunal arbitral s'est déclaré compétent pour connaître du différend opposant les parties. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral. 
En date des 5 et 6 février 2020, le Tribunal arbitral a tenu une audience consacrée à la question de la validité de la résiliation du GSPC. 
Par sentence du 5 mai 2020, intitulée "Award on Termination", le Tribunal arbitral a jugé que le GSPC avait été valablement résilié le 11 septembre 2018. Il a précisé que le sort des frais serait réglé dans la sentence finale. 
 
B.b. Le 4 juin 2020, A.________ a formé un recours en matière civile au Tribunal fédéral aux fins d'obtenir l'annulation de cette sentence.  
Statuant par arrêt du 24 juillet 2020 (cause 4A_300/2020), le Tribunal fédéral a prononcé l'irrecevabilité du recours. En bref, il a estimé que la décision attaquée devait être qualifiée de sentence incidente. Or, A.________ n'avait pas soulevé de grief recevable selon l'art. 190 al. 3 de la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP; RS 291). 
 
B.c. Le Tribunal arbitral a poursuivi l'instruction de la cause. En cours de procédure, soit le 27 février 2023, la défenderesse, se fondant sur l'annexe 2 au GSPC, laquelle attribuait à la Cour d'arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (ci-après: la CCI) la compétence de statuer sur une éventuelle demande de récusation, a sollicité la récusation du président Laurent Aynès, celui-ci ayant préalablement refusé de renoncer à son mandat.  
Par décision du 23 mars 2023, dont la motivation a été communiquée aux parties le 21 avril 2023, la CCI a prononcé la récusation du président du Tribunal arbitral. Les motifs qui étayent cette décision seront résumés plus loin. 
 
C.  
Le 30 mai 2023, A.________ (ci-après: la requérante), se fondant sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP, a présenté une demande de révision de la sentence incidente rendue le 5 mai 2020 aux fins d'obtenir son annulation, en soutenant que divers éléments permettaient de remettre en cause l'indépendance et l'impartialité du président du Tribunal arbitral (cause 4A_288/2023). 
Par courrier du 1er septembre 2023, Laurent Aynès a fourni plusieurs précisions de nature factuelle au sujet de la demande de révision formée par la requérante. 
Dans leur réponse du 4 septembre 2023, les sociétés demanderesses (ci-après: les intimées) ont conclu, principalement, à l'irrecevabilité de la demande de révision et, subsidiairement, à son rejet. 
Par pli du 4 septembre 2023, l'arbitre Charles Poncet a fait valoir qu'il ne pouvait pas prendre position sur le recours. Il a rappelé que la CCI avait prononcé la récusation du président du Tribunal arbitral et a souligné que l'arbitre Klaus Sachs avait démissionné le 4 mai 2023. 
La requérante a répliqué suscitant le dépôt d'une duplique de la part des intimées. 
Le 27 novembre 2023, la requérante a introduit devant le Tribunal fédéral une nouvelle demande de révision de la sentence incidente prononcée le 5 mai 2020 (cause 4A_572/2023), fondée sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP. Elle a indiqué avoir découvert des éléments susceptibles de mettre sérieusement en doute l'impartialité de l'arbitre Charles Poncet. L'intéressée a sollicité la jonction des causes 4A_288/2023 et 4A_572/2023 et maintenu cette requête dans le pli qu'elle a adressé au Tribunal fédéral le 26 janvier 2024. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
D'après l'art. 54 al. 1 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Lorsque cette décision a été rendue dans une autre langue (ici l'anglais), il utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant le Tribunal arbitral, celles-ci se sont servies de l'anglais, tandis que, dans les mémoires qu'elles ont adressés au Tribunal fédéral, elles ont employé le français. Conformément à sa pratique, le Tribunal fédéral rendra, par conséquent, son arrêt en français. 
 
 
2.  
Le siège du Tribunal arbitral se trouve à Genève. Aucune des parties n'avait son siège en Suisse au moment déterminant. Les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont donc applicables (art. 176 al. 1 LDIP). 
 
3.  
La requérante sollicite la jonction de la présente procédure avec la cause 4A_572/2023. En l'occurrence, les deux demandes de révision sont certes étroitement liées, puisqu'elles sont dirigées contre la même sentence et reposent sur une base légale identique (art. 190a al. 1 let. c LDIP). Cela étant, les circonstances invoquées à l'appui de chacune des demandes de révision diffèrent sensiblement et visent des arbitres distincts. La réponse à apporter aux divers problèmes soulevés dans les deux affaires en question - qui ne se recoupent pas forcément - est également susceptible de varier. Dans ces conditions, la Cour de céans estime qu'il n'est pas opportun, du point de vue de l'économie de la procédure, de faire droit à la requête tendant à la jonction des causes. 
 
4.  
Toute loi de procédure prévoit un moment à partir duquel les décisions de justice sont définitives, qu'elles émanent d'autorités étatiques ou de tribunaux privés. Effectivement, il arrive toujours un moment où la vérité matérielle, si tant est qu'elle puisse être établie, doit s'effacer devant la vérité judiciaire, quelque imparfaite qu'elle soit, sous peine de mettre en péril la sécurité du droit. Il est cependant des situations extrêmes où le sentiment de la justice et de l'équité requiert impérativement qu'une décision en force ne puisse pas prévaloir, parce qu'elle est fondée sur des prémisses viciées. C'est précisément le rôle de la révision que de permettre d'y remédier (ATF 142 III 521 consid. 2.1 et les références citées). 
 
4.1. Depuis le 1er janvier 2021, la LDIP contient des dispositions relatives à la révision des sentences arbitrales internationales. Celles-ci s'appliquent aux demandes de révision introduites devant le Tribunal fédéral après le 1er janvier 2021, même lorsque la sentence attaquée a été rendue avant cette date (art. 132 LTF; ATF 148 III 436 consid. 3.1 et les références citées).  
 
4.2. Le Tribunal fédéral est l'autorité judiciaire compétente pour connaître d'une demande de révision visant une sentence arbitrale internationale (art. 191 LDIP), qu'elle soit finale, partielle ou incidente (ATF 149 III 277 consid. 3.2; arrêt 4A_36/2020 du 27 août 2020 consid. 2.2). Il est nécessaire que la décision attaquée lie le tribunal arbitral, car seules les décisions entrées en force peuvent en principe faire l'objet d'une demande de révision. Une sentence incidente réglant une ou plusieurs questions préalables de fond ou de procédure, telle la sentence attaquée, lie le tribunal arbitral, raison pour laquelle elle peut faire l'objet d'une demande de révision. En revanche, une simple ordonnance de procédure pouvant être modifiée ou rapportée en cours d'instance ne peut pas faire l'objet d'une demande de révision (ATF 149 III 277 consid. 3.2 et les références citées).  
 
4.3. Selon l'art. 119a al. 2 LTF, la procédure de révision est régie par les art. 77 al. 2bis et 126 LTF. Si le Tribunal fédéral admet la demande de révision, il annule la sentence et renvoie la cause au tribunal arbitral pour qu'il statue à nouveau, ou fait les constatations nécessaires (art. 119a al. 3 LTF).  
 
5.  
Invoquant l'art. 190a al. 1 let. c LDIP, la requérante fait valoir qu'elle a découvert, plusieurs années après le prononcé de la sentence incidente attaquée, des éléments susceptibles d'éveiller des doutes légitimes quant à l'impartialité de l'arbitre Laurent Aynès, ce qui justifierait de faire droit à sa demande de révision et, partant, d'annuler la décision entreprise. 
 
5.1.  
 
5.1.1. La révision d'une sentence arbitrale internationale peut être demandée pour l'un des motifs énoncés à l'art. 190a LDIP. La demande de révision, dont la recevabilité est subordonnée à l'existence d'un intérêt digne de protection, doit être déposée devant le Tribunal fédéral, sous peine de déchéance, dans les 90 jours qui suivent la découverte du motif de révision, compte tenu de la suspension de ce délai légal dans les hypothèses prévues à l'art. 46 LTF (art. 190a al. 2 LDIP; arrêts 4A_69/2022 du 23 septembre 2022 consid. 4.2.1 non publié in ATF 148 III 436; 4A_247/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2.3). Le droit de demander la révision se périme par dix ans à compter de l'entrée en force de la sentence, à l'exception des cas prévus à l'art. 190a al. 1 let. b LDIP (art. 190a al. 2 LDIP). Lorsque plusieurs motifs de révision sont invoqués, le délai commence à courir séparément pour chacun d'eux (ATF 149 III 277 consid. 4.1.2 et les références citées). Le respect des délais visés par l'art. 190a al. 2 LDIP est une question qui relève de la recevabilité, et non du fond, au contraire de celle de savoir si la partie requérante a tardé à découvrir le motif de révision invoqué (arrêts 4A_247/2014, précité, consid. 2.3; 4A_688/2012 du 9 octobre 2013 consid. 4.3; 4A_570/2011 du 23 juillet 2012 consid. 4.1; 4A_222/2011 du 22 août 2011 consid. 2.1). Il appartient à la partie requérante d'établir les circonstances déterminantes pour la vérification du respect du délai (ATF 149 III 277 consid. 4.1.2 et les références citées).  
 
5.1.2. La jurisprudence impose aux parties un devoir de curiosité quant à l'existence d'éventuels motifs de récusation susceptibles d'affecter la composition du tribunal arbitral (ATF 147 III 65 consid. 6.5; 136 III 605 consid. 3.4.2). Une partie ne peut dès lors se contenter de la déclaration générale d'indépendance faite par chaque arbitre, mais doit au contraire procéder à certaines investigations pour s'assurer que l'arbitre offre des garanties suffisantes d'indépendance et d'impartialité (ATF 147 III 65 consid. 6.5).  
Il est difficile de cerner les contours du devoir de curiosité qui dépendent des circonstances de chaque cas concret. Le Tribunal fédéral a considéré que l'on peut certainement exiger des parties qu'elles utilisent les principaux moteurs de recherche informatiques et consultent les sources susceptibles de fournir, a priori, des éléments permettant de révéler un éventuel risque de partialité d'un arbitre, par exemple les sites internet des principales institutions d'arbitrage, des parties, de leurs conseils et des études dans lesquels ceux-ci exercent ainsi que ceux des cabinets d'avocats dans lesquels officient certains arbitres (ATF 147 III 65 consid. 6.5).  
 
5.2. La requérante soutient qu'elle a acquis, en date du 22 février 2023, une connaissance suffisamment sûre de plusieurs éléments susceptibles de remettre en cause l'indépendance et l'impartialité du président du Tribunal arbitral ayant rendu la sentence querellée. A cet égard, elle expose que l'arbitre incriminé a fait savoir aux parties, par courriel du 23 septembre 2022, qu'il avait récemment appris que deux associés de son étude avaient été retenus comme co-conseils dans une procédure d'arbitrage CCI - sans rapport avec la présente cause ("unrelated to the present proceedings") - aux côtés de l'avocat britannique D.________, lequel est également l'un des conseils principaux des intimées dans la présente affaire. L'intéressée rappelle avoir demandé les clarifications suivantes au président du Tribunal arbitral le 26 septembre 2022:  
 
"a. Is the case in which your two partners and Mr. D.________ are acting as counsel in any way related, directly or indirectly, to the B.________ and C.________ Group, the Government of Iran, A.________ or any of their respective related entities? 
b. What is the subject matter of that case? 
c. When were your two partners first approached by the party who has engaged them as co-counsel; when did they become aware of the involvement of Mr. D.________; when was their engagement signed; and when did they become counsel of record on the case?". 
Le 27 septembre 2022, le président du Tribunal arbitral a répondu que, selon sa compréhension des informations que lui avaient communiquées ses associés, le différend opposait une société émiratie à une entité française, aucune d'elles n'étant liée aux intimées, au gouvernement iranien ou à la requérante. Il a indiqué que le litige portait sur la rupture d'un contrat relatif à la vente de marchandises conclu entre l'entreprise française (venderesse) et l'entité émiratie (acheteuse), l'utilisateur final des biens étant une société de télécommunication iranienne non partie à l'arbitrage en question. Ses associés avaient reçu des instructions concernant ladite procédure arbitrale le 13 juillet 2022, pris connaissance du fait que l'avocat D.________ était également impliqué dans cet arbitrage le 5 septembre 2022 et officiellement agi en tant que conseils à partir du 13 septembre 2022. 
Sur la base desdites informations divulguées par le président du Tribunal arbitral, la requérante estime qu'une récusation n'entrait pas en ligne en compte en septembre 2022. Elle n'avait, selon elle, aucune raison de douter de la sincérité des révélations faites par l'arbitre concerné, raison pour laquelle des investigations supplémentaires ne s'imposaient pas à ce moment-là. L'intéressée soutient que ce n'est que le 11 février 2023 que le directeur de son secteur juridique a fortuitement entendu des fonctionnaires d'un département gouvernemental iranien parler d'un arbitrage CCI impliquant des sociétés française et émiratie ainsi que diverses entités liées à l'État iranien. Pour étayer sa thèse, elle se fonde sur les déclarations du responsable de son pôle juridique retranscrites dans un document intitulé "Affidavit", daté du 13 mars 2023. Sur la base des informations fortuitement découvertes le 11 février 2023, la requérante prétend avoir entrepris de plus amples recherches, lesquelles lui auraient permis d'identifier le numéro de référence de l'arbitrage CCI concerné (cause n....), procédure qui pouvait potentiellement correspondre à celle à laquelle le président du Tribunal arbitral avait fait référence dans son courriel du 23 septembre 2022. Pour s'en assurer, elle indique avoir soumis les questions suivantes à l'arbitre concerné le 18 février 2023: 
 
"4.1 Do the Disclosures relate to ICC Case No.... ? 
(...) 
4.2 Are the Government of Iran, any organs thereof, or any entities related thereto, identified as "Related Parties" by the ICC in its Case Information Sheet or by the parties in the ICC Case referred to in the Disclosures? 
(...) 
4.3 Does the ICC case in question involve any adverse allegations against the State/Government of Iran, organs thereof, or entities related thereto? 
(...) 
4.4 With regard to the Disclosure of 27 September 2022 regarding relevant dates, is it correct that your firm was not in any way involved in the relevant ICC case or the underlying dispute before 13 july 2022, be it on or off the record, nor involved in any of the pre-arbitration correspondence exchanged, or any related proceedings that may have been initiated, before the same date of 13 July 2022? 
(...) ". 
Par courriel du 22 février 2023, le président du Tribunal arbitral a confirmé que les informations révélées en septembre 2022 concernaient effectivement l'affaire CCI n..... Il a indiqué ne pas pouvoir répondre aux questions 4.2 et 4.3, étant donné que la procédure d'arbitrage CCI obéissait à des règles de confidentialité. Enfin, il a répondu que la partie demanderesse dans l'affaire CCI avait approché deux de ses associés en novembre 2016. Ceux-ci s'étaient toutefois retirés du dossier en mars 2017 en raison d'un conflit d'intérêts et n'avaient pas été impliqués dans l'arbitrage CCI ni dans le litige sous-jacent d'une quelconque manière jusqu'au 13 septembre 2022. La requérante fait valoir que ce n'est qu'à réception dudit courriel qu'elle a acquis une connaissance suffisamment sûre des éléments permettant de douter de l'indépendance et de l'impartialité du président du Tribunal arbitral, raison pour laquelle elle a sollicité sa démission le 22 février 2023, avant de déposer une demande de récusation auprès de la CCI le 27 février 2023, laquelle a été admise. Elle estime en outre avoir respecté son devoir de curiosité en posant des questions supplémentaires à l'arbitre mis en cause afin d'obtenir des clarifications de sa part concernant ses révélations lacunaires. 
 
5.3. Les intimées rétorquent que la demande de révision formée par leur adversaire s'inscrit dans le cadre de sa stratégie consistant à faire obstacle à la procédure arbitrale et à vouloir la faire "dérailler", par tous les moyens, aux fins d'échapper à sa responsabilité contractuelle.  
Selon les intimées, la demande de révision est irrecevable, à un double titre. 
Premièrement, les intéressées soutiennent que la requérante n'a pas prouvé la date à laquelle elle a effectivement eu connaissance du motif de récusation invoqué, le prétendu "affidavit" de son propre directeur juridique n'étant qu'une simple allégation de partie n'ayant aucune valeur probante. L'absence de preuve documentaire est, à leur avis, pour le moins révélatrice et suggère qu'il est plus que probable que la requérante a eu connaissance des faits sur lesquels elle fonde sa demande de révision bien avant la date alléguée par elle. Si les investigations qui lui ont permis d'avoir connaissance de ces éléments avaient véritablement eu lieu après le 11 février 2023, comme la requérante le prétend, il eût été aisé pour elle de l'établir par des preuves contemporaines. Les intimées relèvent, par ailleurs, que leur adversaire a indiqué, dans son courriel du 18 février 2023, avoir procédé à des investigations supplémentaires en raison de la nature et du contenu des révélations faites par l'arbitre mis en cause en septembre 2022 ("The Respondent has now undertaken further investigations, prompted by the content and unparticularised nature of the Disclosures..."). Selon elles, ce n'est qu'après coup, dans le cadre de la procédure de récusation introduite auprès de la CCI, que la requérante a fait référence, pour la première fois, à l'épisode du 11 février 2023 qui l'aurait incitée à entreprendre des investigations supplémentaires. Les intimées exposent en outre que divers documents provenant de l'arbitrage CCI n...., qui ont permis d'étayer la demande de récusation formée auprès de la CCI, ont été publiés le 14 mars 2023 sur le site internet d'une revue juridique consacrée à l'arbitrage international ("Global Arbitration Review"; ci-après: la revue GAR), à la suite de fuites anonymes. De l'avis des intimées, de telles fuites ne peuvent avoir été orchestrées qu'à l'instigation de la requérante, ce qui confirmerait que celle-ci avait en réalité déjà eu accès aux documents concernés auparavant. 
Secondement, les intimées soutiennent que la requérante aurait pu et dû découvrir bien plus tôt le motif de récusation allégué, si elle avait respecté son devoir de curiosité. Dans son courriel du 27 septembre 2022, l'arbitre mis en cause avait en effet indiqué que l'utilisateur final des biens visés par le contrat de vente objet de l'arbitrage CCI était une société de télécommunication iranienne. Elles estiment que la requérante aurait dû procéder à des investigations supplémentaires à réception dudit courriel, au lieu d'attendre près de cinq mois avant de réagir. 
 
5.4. En l'occurrence, force est de relever le caractère pour le moins nébuleux, sinon troublant, des circonstances dans lesquelles le motif de récusation invoqué aurait prétendument été découvert par la requérante. Celle-ci aurait en effet pris connaissance des divers éléments fondant sa demande de révision à la suite d'une conjonction d'événements pour le moins insolites, sinon heureux, matérialisés notamment par des informations découvertes inopinément par le directeur de son service juridique au détour d'une conversation entre des fonctionnaires de son pays, d'une part, et la publication sur le site internet d'une revue juridique, à la suite de fuites anonymes, de documents provenant de l'arbitrage CCI n.... ayant servi à étayer la demande de récusation visant le président du Tribunal arbitral, d'autre part. Il est possible que cet enchaînement de circonstances favorables aux intérêts de la requérante ne soit peut-être pas le seul fruit du hasard. Quoi qu'il en soit, il sied de rappeler qu'il appartient à la partie requérante d'établir les circonstances déterminantes pour le respect du délai du dépôt de sa demande de révision et que, si elle échoue dans cette entreprise, elle doit se laisser opposer le fait que l'introduction d'une telle demande dans les 90 jours à compter de la découverte du motif de révision n'a pas été prouvée. Or, en l'espèce, l'unique élément de preuve invoqué à cet égard par la requérante, à savoir un "affidavit" du directeur de son propre service juridique, revêt une force probante toute relative. Cet élément à lui seul ne saurait a priori suffire à établir que c'est à partir de ce moment-là que l'intéressée a eu connaissance du motif de récusation invoqué par elle. Indépendamment de la question afférente au respect du délai de l'art. 190a al. 2 LDIP, on peut aussi s'interroger sur le point de savoir si, comme le soutiennent les intimées, le courriel de l'arbitre du 27 septembre 2022 - il y était indiqué que l'utilisateur final des choses vendues, faisant l'objet de l'arbitrage CCI et impliquant deux de ses associés et l'avocat D.________, était une société de télécommunication iranienne - aurait dû éveiller la curiosité de la requérante, laquelle aurait potentiellement pu découvrir le prétendu motif de récusation allégué bien plus tôt en procédant à des investigations complémentaires quant aux tenants et aboutissants de cette autre affaire intéressant indirectement une entité iranienne.  
Au vu de ce qui précède, il est fortement douteux que la requérante ait démontré avoir respecté le délai du dépôt de sa demande de révision. Point n'est toutefois besoin d'examiner plus avant cette question, dès lors que ladite demande doit de toute manière être rejetée pour les motifs exposés ci-après. 
 
6.  
Dans leurs mémoires respectifs, les parties ont largement débattu de la portée des décisions prises par un organisme privé, tel que la CCI, au sujet d'une demande de récusation d'un arbitre. 
En bref, la requérante soutient que la décision par laquelle la CCI admet une demande de récusation lierait le Tribunal fédéral et ne pourrait donc pas être indirectement revue par celui-ci dans le cadre d'une demande de révision fondée sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP. La solution inverse prévaudrait, selon elle, en cas de rejet d'une telle demande. A son avis, le Tribunal fédéral demeurerait ainsi libre de revoir les circonstances invoquées à l'appui d'une demande de récusation qui n'auraient pas été retenues par la CCI. De leur côté, les intimées défendent la thèse selon laquelle l'admission d'une demande de récusation par la CCI n'interdit pas au Tribunal fédéral de revoir indirectement, dans le cadre d'un recours ou d'une demande de révision, le bien-fondé de la décision prise par cet organisme de droit privé. Les parties admettent, en revanche, que la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral en la matière, dans le cadre de recours fondés sur l'art. 190 al. 2 let. a LDIP, vaut aussi mutatis mutandis pour les demandes de révision fondées sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP.  
 
6.1. En l'espèce, la CCI, par décision du 23 mars 2023, motivée le 21 avril 2023, a admis dans sa conclusion, sinon dans tous ses motifs, la demande de récusation du président du Tribunal arbitral. En bref, elle a considéré que le cabinet d'avocats dont l'arbitre mis en cause est l'un des associés agissait de façon adverse au gouvernement iranien et à des entités étatiques iraniennes dans l'affaire CCI n...., étant précisé que l'arbitre incriminé devait être assimilé à son cabinet en vue d'apprécier l'existence d'un conflit d'intérêts. Elle a certes relevé que la requête d'arbitrage introduite par une société émiratie était dirigée contre une société de droit français dans la cause précitée. La CCI a toutefois souligné que les arguments développés dans cette procédure arbitrale par le cabinet du président du Tribunal arbitral et l'avocat D.________, au nom de la société demanderesse, consistaient notamment à porter des accusations de corruption contre le gouvernement iranien et plusieurs entités étatiques iraniennes, dont certaines apparaissaient comme "Other Relevant Entities" sur la fiche d'information officielle relative à l'affaire CCI n..... Après avoir indiqué que les différentes sociétés publiques d'un même État - telles que la requérante et les entités figurant sur la liste en question - devaient être assimilées à des filiales apparentées aux fins d'apprécier l'éventuelle existence d'un conflit d'intérêts, la CCI a jugé que les accusations formulées dans l'affaire CCI n.... par les mandataires de la société demanderesse représentaient une circonstance de nature à susciter objectivement des doutes quant à l'impartialité et à l'indépendance du président du Tribunal arbitral (n. 55-61). Elle a en outre considéré que l'arbitre mis en cause avait fait des révélations incomplètes, lorsqu'il avait fourni des réponses lacunaires aux questions que lui avait soumises la requérante le 26 septembre 2022 au sujet de la procédure d'arbitrage dans laquelle deux de ses associés étaient impliqués, puis quand il avait refusé de répondre, pour des motifs liés à la confidentialité de la procédure d'arbitrage parallèle, à des questions supplémentaires que lui avait posées la requérante en février 2023 (n. 64-65).  
 
6.2. Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, la décision prise par un organisme privé, comme la CCI ou le Conseil International de l'Arbitrage en matière de Sport (CIAS), au sujet d'une demande de récusation d'un arbitre, n'est pas susceptible d'un recours direct au Tribunal fédéral. Une telle décision pourra néanmoins être revue dans le cadre d'un recours dirigé contre la sentence, motif pris de la composition irrégulière du tribunal arbitral (ATF 138 III 270 consid. 2.2.1; 118 II 359 consid. 3b; arrêts 4A_404/2021 du 24 janvier 2022 consid. 5.1.2; 4A_146/2019 du 6 juin 2019 consid. 2.2; arrêt 4A_644/2009 du 13 avril 2010 consid. 1).  
L'expression "décision prise par un organisme privé... au sujet d'une demande de récusation d'un arbitre" inclut logiquement tant l'admission que le rejet d'une telle demande. Un arrêt rendu le 22 juin 2023 par le Tribunal fédéral n'autorise du reste aucune autre conclusion (cause 4A_100/2023). Dans cette affaire, la Cour de céans a eu à connaître d'un litige sportif dans lequel le recourant attaquait une sentence finale du Tribunal Arbitral du Sport, sur le fondement de l'art. 190 al. 2 let. a LDIP, en faisant valoir que le CIAS avait prononcé à tort la récusation de l'arbitre proposé par lui. A cette occasion, elle a reconnu à la partie recourante le droit de contester la décision admettant cette demande de récusation (consid. 6.7.1). 
 
6.3. Les arguments avancés par la requérante afin de démontrer que, nonobstant le texte clair de ce dernier arrêt, l'admission de la demande de récusation par un organisme de droit privé ne devrait pas justifier l'application de cette jurisprudence tombent à faux.  
Contrairement à ce que l'intéressée tente d'inférer de l'ATF 138 III 270, cette décision n'a pas servi de base au Tribunal fédéral pour établir une distinction entre admission et rejet de la demande de récusation, aux fins d'exclure tout recours direct et indirect ou toute demande de révision dans la première hypothèse. Cet arrêt visait en effet à justifier la différence de traitement existant entre l'arbitrage ad hoc et l'arbitrage institutionnel sous l'angle de la possibilité d'un recours indirect (le recours direct au Tribunal fédéral étant exclu dans les deux hypothèses) contre la décision relative à une demande de récusation rendue dans le premier type d'arbitrage par le juge d'appui (exclusion du recours indirect) et, dans le second, par l'organisme privé compétent, telle la CCI (recevabilité du recours indirect). 
La requérante ne peut pas davantage être suivie lorsqu'elle soutient, en substance, que le Tribunal fédéral pourrait s'abstenir de contrôler la régularité de la composition du tribunal arbitral lorsqu'un organisme de droit privé admet la demande de récusation et qu'un nouvel arbitre est désigné. L'ordre juridique suisse ne saurait en effet se reposer exclusivement sur la décision prise par un tel organisme et renoncer à veiller au respect de la composition régulière du tribunal arbitral et de la garantie primordiale que constituent l'indépendance et l'impartialité des arbitres. Or, un tribunal arbitral n'est pas moins irrégulièrement constitué lorsque n'y siège pas un arbitre indépendant et impartial qui a été valablement nommé, mais récusé à tort par la suite (hypothèse de l'admission injustifiée de la demande de récusation), que lorsqu'y siège un arbitre désigné correctement, mais qui aurait dû être écarté si la demande de récusation le concernant avait été admise à bon droit (hypothèse du rejet injustifié de la demande de récusation). 
C'est aussi en vain que la requérante tente d'extrapoler à partir d'un passage extrait de l'arrêt 4A_100/2023 précité ("... on ne saurait ainsi dénier à une partie - qui se retrouve privée de l'arbitre qu'elle avait choisi initialement et qui avait été valablement nommé par l'institution d'arbitrage concernée - le droit de contester la décision admettant une demande de récusation visant cet arbitre."). Soulignant que, dans l'affaire en question, le recours au Tribunal fédéral avait été déposé par la partie ayant choisi l'arbitre récusé, prétendument à tort, elle expose que la situation est bien différente dans la présente espèce en ce sens que la demande de récusation admise par la CCI ne visait pas un arbitre désigné par les intimées, mais le président du Tribunal arbitral nommé par les deux co-arbitres. Contrairement à ce que soutient l'intéressée, le Tribunal fédéral n'a jamais entendu limiter la possibilité de revoir la décision d'un organisme privé admettant une demande de récusation au seul cas où celle-ci est dirigée contre l'arbitre choisi par la partie s'opposant à sa récusation. Que la présente affaire se rapporte à une demande de récusation formée à l'encontre du président du Tribunal arbitral est dès lors dénué de pertinence. 
Il appert ainsi que la partie estimant qu'une demande de récusation a été admise ou rejetée à tort par un organisme privé pourra en principe contester une telle décision en formant un recours au Tribunal fédéral à l'encontre d'une sentence attaquable, motif pris d'une composition irrégulière du tribunal arbitral (art. 190 al. 2 let. a LDIP), les cas de comportements incompatibles avec les règles de la bonne foi demeurant naturellement réservés. 
 
6.4. En l'occurrence, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de se prononcer sur le point de savoir si l'arbitre mis en cause a été récusé à juste titre ou non par la CCI pour la suite de la procédure. Le rôle de la Cour de céans consiste uniquement à déterminer si les éléments invoqués par la requérante au soutien de sa demande de révision permettent d'établir l'existence d'un motif de récusation visé par l'art. 190a al. 1 let. c LDIP justifiant de faire droit à sa demande de révision de la sentence incidente rendue le 5 mai 2020. Pour remplir pareille tâche, le Tribunal fédéral ne sera pas tenu de faire nécessairement siennes toutes les considérations juridiques émises par la CCI. Il n'est en effet pas contradictoire d'admettre que, quand bien même un arbitre aurait par hypothèse été récusé à juste titre au cours de la procédure arbitrale, sa participation au prononcé d'une sentence incidente rendue avant la survenance du motif de récusation retenu à son encontre ne suffit pas à justifier l'annulation de ladite sentence.  
 
6.5. S'agissant des faits déterminants pour apprécier une demande de récusation formée à l'encontre d'un arbitre, le Tribunal fédéral, lorsqu'il est amené à revoir indirectement, dans le cadre d'un recours en matière civile dirigé contre une sentence et fondé sur l'art. 190 al. 2 let. a LDIP, la décision prise par l'organisme privé compétent au sujet d'une telle demande, effectue semblable démarche sur le vu des seuls faits constatés dans la décision prise par cet organisme (arrêts 4A_200/2023, précité, consid. 6.2; 4A_520/2021 du 4 mars 2022 consid. 5.3; 4A_234/2010 du 29 octobre 2010 consid. 2.2 non publié aux ATF 136 II 605). En l'espèce, l'intéressée fonde sa demande de révision sur les mêmes circonstances factuelles que celles qu'elle a déjà invoquées devant la CCI. Par conséquent, le Tribunal fédéral se basera en principe sur les faits retenus dans la décision de la CCI pour statuer sur le sort de la demande de révision et vérifier ainsi s'il existe en l'occurrence un motif de révision visé par l'art. 190a al. 1 let. c LDIP. Il tiendra toutefois compte, si nécessaire, des précisions supplémentaires d'ordre factuel apportées par l'arbitre mis en cause dans ses observations sur la demande de révision ainsi que des explications fournies par les parties dans leurs mémoires respectifs.  
 
7.  
Invoquant l'art. 190a al. 1 let. c LDIP ainsi que l'art. 6 par. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH; RS 0.101), la requérante soutient que la sentence attaquée doit être annulée car certaines circonstances permettraient légitimement de douter de l'indépendance et de l'impartialité du président du tribunal arbitral. 
A l'appui de sa demande de révision, l'intéressée invoque cinq éléments. 
Premièrement, la requérante fait valoir que deux associés du cabinet d'avocats de l'arbitre incriminé représentent la partie demanderesse dans l'affaire CCI n..... Or, quand bien même ladite procédure oppose formellement la société émiratie E.________ LLC (ci-après: E.________) à la société de droit français F.________ SA (ci-après: F.________), elle souligne que l'affaire en question concerne également plusieurs entités étatiques iraniennes et que de graves accusations ont été portées à leur encontre par la société demanderesse. Elle se réfère à cet égard à divers documents - en particulier la requête d'arbitrage du 20 août 2020, la fiche d'information établie le 28 juillet 2021 par la CCI dans le cadre de ladite affaire ainsi qu'une requête de conciliation introduite le 9 janvier 2017 devant le Tribunal de première instance du canton de Genève par E.________ à l'encontre de l'entité iranienne G.________ (ci-après: G.________) - publiés le 14 mars 2023 sur le site internet de la revue GAR. Estimant que l'arbitre incriminé doit être assimilé à son étude d'avocats aux fins d'apprécier son indépendance et son impartialité, la requérante soutient que le cabinet de l'arbitre concerné agit de manière adverse au gouvernement iranien et aux entités affiliées, comme elle, à l'État iranien, eu égard aux graves accusations formulées par la société demanderesse dans l'affaire CCI n..... 
Deuxièmement, la requérante estime que la circonstance précitée est aggravée par le fait que le cabinet de l'arbitre mis en cause agit conjointement avec l'avocat D.________ dans l'affaire CCI n..... 
Troisièmement, l'intéressée fait valoir que l'arbitre incriminé et l'avocat D.________ ont agi pour le même client, à savoir H.________, dans des procédures conduites parallèlement en France et en Angleterre. A cet égard, elle relève qu'une procédure a été initiée en France le 13 décembre 2017 en vue d'obtenir l'annulation de la sentence rendue par un tribunal arbitral siégeant à Paris, tandis qu'une autre a débuté le 21 décembre 2017 en Angleterre en vue de s'opposer à la reconnaissance de ladite sentence. L'intéressée affirme que le traitement de ces procédures parallèles a nécessairement donné lieu à des contacts entre les avocats français et anglais impliqués dans cette affaire. 
Quatrièmement, la requérante reproche au président du Tribunal arbitral d'avoir violé de manière répétée son devoir de révélation, en divulguant des informations incomplètes et inexactes en septembre 2022 et en refusant de répondre de manière transparente aux questions qui lui avaient été soumises en février 2023. 
Cinquièmement enfin, l'intéressée soutient que le Tribunal arbitral aurait rendu des décisions procédurales particulièrement injustes qui manifesteraient l'apparence d'une prévention de l'arbitre incriminé à son égard. Elle en veut notamment pour preuve la fixation d'une audience arbitrale sans consultation préalable des parties et le maintien de celle-ci à une date ne lui convenant pas, pendant les principales festivités du calendrier iranien, qui a entraîné la démission de tous ses conseils précédents. 
 
7.1.  
 
7.1.1. Un arbitre doit, à l'instar d'un juge étatique, présenter des garanties suffisantes d'indépendance et d'impartialité. Pour dire si un arbitre présente de telles garanties, il faut se référer aux principes constitutionnels développés au sujet des tribunaux étatiques, en ayant égard, toutefois, aux spécificités de l'arbitrage - surtout dans le domaine de l'arbitrage international - lors de l'examen des circonstances du cas concret (ATF 142 III 521 consid. 3.1.1; 136 III 605 consid. 3.2.1 et les références citées; arrêts 4A_166/2021 du 22 septembre 2021 consid. 3.1 non publié in ATF 147 III 586; 4A_318/2020 du 22 décembre 2020 consid. 7.1 non publié in ATF 147 III65).  
La garantie d'un tribunal indépendant et impartial découlant des art. 6 par. 1 CEDH et 30 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.; RS 101) permet d'exiger la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle vise à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du juge est établie, car une disposition relevant du for intérieur ne peut guère être prouvée; il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Cependant, seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération; les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 142 III 521 consid. 3.1.1; 140 III 221 consid. 4.1 et les références citées; arrêt 4A_318/2020, précité, consid. 7.1 non publié in ATF 147 III 65). 
La partie qui entend récuser un arbitre doit invoquer le motif de récusation aussitôt qu'elle en a connaissance. Cette règle jurisprudentielle vise aussi bien les motifs de récusation que la partie intéressée connaissait effectivement que ceux qu'elle aurait pu connaître en faisant preuve de l'attention voulue (ATF 129 III 445 consid. 4.2.2.1 et les références citées; cf. aussi l'art. 182 al. 4 LDIP). 
 
7.1.2. Dans l'affaire Mutu et Pechstein contre Suisse (arrêt du 2 octobre 2018), la Cour européenne des droits de l'homme a été amenée à se prononcer sur le prétendu manque d'indépendance et d'impartialité de deux arbitres du TAS. A cette occasion, elle a souligné que l'impartialité se définit d'ordinaire par l'absence de préjugé ou de parti pris (§ 141). Elle a aussi rappelé que, selon sa jurisprudence constante, l'impartialité doit s'apprécier non seulement d'un point de vue subjectif, en tenant compte de la conviction personnelle et du comportement de la personne appelée à statuer en telle occasion, mais aussi en suivant une approche objective, consistant à se demander si le tribunal offrait, indépendamment de la conduite personnelle d'un juge, des garanties suffisantes pour exclure tout doute légitime quant à son impartialité (§ 141).  
 
7.1.3. Pour vérifier l'indépendance des membres d'un tribunal arbitral, les parties peuvent également se référer aux lignes directrices sur les conflits d'intérêts dans l'arbitrage international, édictées par l'International Bar Association (IBA Guidelines on Conflicts of Interest in International Arbitration, approuvées en 2004 et révisées une première fois en octobre 2014, puis une seconde fois en février 2024 [ci-après: les lignes directrices IBA]). Ces lignes directrices, que l'on pourrait comparer aux règles déontologiques servant à interpréter et à préciser les règles professionnelles (ATF 140 III 6 consid. 3.1; 136 III 296 consid. 2.1), n'ont bien sûr pas valeur de loi et ce sont toujours les circonstances du cas concret qui sont décisives; elles n'en constituent pas moins un instrument de travail utile, susceptible de contribuer à l'harmonisation et à l'unification des standards appliqués dans le domaine de l'arbitrage international pour le règlement des conflits d'intérêts, lequel instrument ne devrait pas manquer d'avoir une influence sur la pratique des institutions d'arbitrage et des tribunaux (ATF 142 III 521 consid. 3.1.2).  
Les lignes directrices IBA énoncent des principes généraux. Elles contiennent aussi une énumération, sous forme de listes non exhaustives, de circonstances particulières: une liste rouge, divisée en deux parties (situations dans lesquelles il existe un doute légitime quant à l'indépendance et l'impartialité, les parties ne pouvant pas renoncer aux plus graves d'entre elles); une liste orange (situations intermédiaires qui doivent être révélées, mais ne justifient pas nécessairement une récusation); une liste verte (situations spécifiques n'engendrant objectivement pas de conflit d'intérêts et que les arbitres ne sont pas tenus de révéler). Il va sans dire que, nonobstant l'existence de semblables listes, les circonstances du cas concret resteront toujours décisives pour trancher la question du conflit d'intérêts (ATF 142 III 521 consid. 3.2.1 et les références citées; arrêt 4A_100/2023, précité, consid. 6.1.4). 
Selon l'un des principes des lignes directrices IBA, un arbitre doit refuser de siéger ou se démettre lorsqu'il existe ou survient après sa nomination, des faits ou des circonstances qui, du point de vue d'un tiers raisonnable ayant connaissance des faits et des circonstances pertinents, donneraient lieu à des doutes légitimes quant à l'impartialité ou à l'indépendance de l'arbitre (chiffre 2 (b) des lignes directrices IBA). Les doutes sont légitimes si un tiers raisonnable, ayant connaissance des faits et des circonstances pertinents, estimerait probable que l'arbitre soit influencé dans sa prise de décision par des facteurs autres que le bien-fondé de l'affaire tel que présenté dans les demandes des parties (chiffre 2 (c) des lignes directrices IBA). 
 
7.2. Aux termes de l'art. 190a al. 1 let. c LDIP, une partie peut demander la révision d'une sentence si, bien que les parties aient fait preuve de la diligence requise, un motif de récusation au sens de l'art. 180 al. 1 let. c LDIP n'est découvert qu'après la clôture de la procédure arbitrale et qu'aucune autre voie de droit n'est ouverte.  
Les avis des parties divergent sur le point de savoir si le motif de récusation, au sens de l'art. 180 al. 1 let. c LDIP, doit avoir existé au moment du prononcé de la sentence attaquée pour pouvoir justifier une demande de révision de celle-ci fondée sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP. 
La requérante soutient, en substance, qu'une telle condition ne figure pas dans la loi et qu'il ne lui appartient ainsi pas de démontrer que le motif de récusation existait au moment où la sentence attaquée a été rendue. Pour les intimées, la révision basée sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP exige que l'existence d'un motif de récusation soit établie au jour du prononcé de la décision attaquée. 
 
7.3. Pour résoudre cette question de principe, il y a lieu d'interpréter l'art. 190a al. 1 let. c LDIP.  
La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Si le texte se prête à plusieurs interprétations, s'il y a de sérieuses raisons de penser qu'il ne correspond pas à la volonté du législateur, il convient de rechercher sa véritable portée au regard notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique; ATF 149 III 98 consid. 5.2 et les références citées; 141 III 444 consid. 2.1). Lorsqu'il est appelé à interpréter une loi, le Tribunal fédéral adopte une position pragmatique en suivant ces différentes interprétations, sans les soumettre à un ordre de priorité (ATF 149 III 98 consid. 5.2 et les références citées; 141 III 444 consid. 2.1). 
 
7.3.1. A titre liminaire, il sied de relever que les termes " après la clôture de la procédure arbitrale ", figurant à l'art. 190a al. 1 let. c LDIP, tendent à démontrer que le législateur fédéral avait apparemment à l'esprit uniquement l'hypothèse la plus courante d'une demande de révision formée contre une sentence finale, et qu'il n'a pas songé au cas où une sentence incidente - liant le tribunal arbitral - fait l'objet d'une demande de révision fondée sur un motif de récusation découvert après le prononcé de celle-ci alors que la procédure arbitrale est toujours en cours. Rien n'indique, cependant, qu'une partie ne pourrait pas présenter une demande de révision dans ce dernier cas de figure en se prévalant de l'art. 190a al. 1 let. c LDIP.  
La lettre de l'art. 190a al. 1 let. c LDIP ne mentionne pas expressément que le motif de récusation doit avoir existé au jour du prononcé de la sentence attaquée. Cela ne permet toutefois pas d'écarter l'interprétation proposée par les intimées. Bien au contraire. Il sied en effet de souligner que l'expression " bien que les parties aient fait preuve de la diligence requise ", utilisée dans cette disposition, semble plutôt plaider en faveur de la thèse prônée par ces dernières. En effet, si le motif de récusation ne devait pas nécessairement exister au moment du prononcé de la sentence faisant l'objet de la demande révision, l'exigence de diligence serait superflue, puisqu'aussi bien une partie ne peut pas découvrir un motif de récusation inexistant même en faisant preuve de la plus grande diligence. 
 
7.3.2. Les travaux préparatoires ne sont d'aucun secours pour résoudre la question litigieuse. Dans son Message du 24 octobre 2018 concernant la modification de la loi fédérale sur le droit international privé (chapitre 12: Arbitrage international), le Conseil fédéral se borne, en effet, à indiquer que " les dispositions sur la révision seront applicables si un motif de récusation n'est découvert qu'après la clôture d'une procédure ", sans fournir d'autres précisions à cet égard (FF 2018 p. 7184).  
 
7.3.3. D'un point de vue systématique, il convient de souligner que l'art. 190a al. 1 LDIP énumère trois motifs de révision. Or, les deux premières hypothèses se rapportent à des cas où les circonstances factuelles à la base de la demande de révision se sont produites avant le prononcé de la sentence attaquée. L'art. 190a al. 1 let. a LDIP exclut en effet expressément de son champ d'application les faits ou moyens de preuve postérieurs à la sentence. Quant à l'hypothèse visée par l'art. 190a al. 1 let. b LDIP, celle-ci suppose que la sentence ait été influencée au détriment de la partie requérant la révision par un crime ou un délit établi pénalement. Il en découle logiquement que les faits pénalement répréhensibles doivent avoir eu lieu avant le prononcé de la sentence attaquée, faute de quoi ils ne sont pas susceptibles d'influencer celle-ci. Il appert ainsi que deux motifs de révision prévus par la loi visent manifestement des circonstances factuelles survenues avant le prononcé de la décision entreprise.  
 
7.3.4. Si l'on examine la ratio legis de l'art. 190a al. 1 let. c LDIP, il apparaît que l'objectif visé est de ne pas laisser subsister une sentence dont on réalise tardivement - et de manière excusable - qu'elle a été rendue par un tribunal arbitral ne satisfaisant pas aux exigences d'indépendance et d'impartialité. Il est ainsi conforme au but de cette disposition légale que le motif de récusation existe déjà au moment du prononcé de la sentence attaquée. On ne discerne en revanche pas quelle raison commanderait d'annuler une sentence rendue par un tribunal arbitral répondant aux garanties d'indépendance et d'impartialité lorsqu'il a statué, sous prétexte que l'un des arbitres a violé ultérieurement son devoir d'indépendance et d'impartialité.  
Il est en effet tout à fait envisageable, dans les nombreux cas où, comme en l'espèce, la procédure arbitrale donne lieu au prononcé de sentences incidentes avant la reddition de la sentence finale, qu'un motif de récusation puisse ne prendre naissance qu'après la reddition de l'une de ces sentences intermédiaires. A supposer, par exemple, qu'un arbitre ayant participé au prononcé d'une sentence incidente entretienne, quelques années après, une relation amoureuse avec une avocate associée de l'étude de l'une des parties en litige, avocate dont il vient de faire la connaissance et qui est impliquée dans la gestion du dossier de l'arbitrage en question, ledit arbitre devra vraisemblablement se récuser spontanément ou risquera de l'être sur demande de l'une des parties. Cette récusation, spontanée ou forcée, lui interdira certes de siéger au sein du Tribunal arbitral pour la suite de la procédure arbitrale. On n'imagine pas, en revanche, qu'une telle circonstance puisse donner matière à une demande de révision vouée au succès de la sentence incidente rendue plusieurs années auparavant par le tribunal arbitral au sein duquel siégeait le même arbitre. 
L'interprétation selon laquelle le motif de récusation doit exister au moment où la sentence querellée a été rendue pour justifier son annulation est du reste confirmée par la Règle Générale (1) des lignes directrices IBA, qui limite dans le temps le devoir d'impartialité et d'indépendance de l'arbitre au moment où la sentence finale a été prononcée. A ce sujet, l'Explication de cette règle précise que l'arbitre doit rester impartial et indépendant des parties tout au long de la procédure arbitrale, avant d'ajouter ce qui suit (lignes directrices IBA, version 2014) : 
 
" La question de savoir si cette obligation devrait s'étendre à la période pendant laquelle la sentence arbitrale est susceptible de recours devant les juridictions nationales compétentes s'est posée. Finalement, il a été conclu qu'une telle obligation ne devrait pas s'étendre de cette manière, à moins que la sentence arbitrale finale ne soit renvoyée au même Tribunal Arbitral en vertu de la loi applicable ou des règles institutionnelles applicables. Ainsi, l'obligation de l'arbitre à cet égard s'éteint lorsque le Tribunal Arbitral a rendu la sentence arbitrale finale... ". 
Autrement dit, selon les règles de cet organisme privé, le devoir d'impartialité et d'indépendance de l'arbitre ne survit en principe pas au prononcé de la sentence. Il faut logiquement en déduire, s'agissant de la règle posée à l'art. 190a al. 1 let. c LDIP, que, pour justifier la révision d'une sentence finale sur cette base, le motif de récusation doit avoir existé au moment où la sentence a été rendue. Il doit en aller de même, par analogie, pour la révision d'une sentence partielle ou incidente, sauf à dire que, dans une telle hypothèse, le devoir d'impartialité et d'indépendance de l'arbitre subsiste jusqu'à la reddition de la sentence finale et que sa violation ultérieure peut justifier la récusation de l'arbitre incriminé pour la suite de la procédure arbitrale, sans que les sentences rendues antérieurement ne puissent être l'objet d'une demande de révision. 
Semblable interprétation est du reste conforme, sur un plan plus général, au but poursuivi par la législation suisse en matière d'arbitrage international, qui est de limiter autant que faire se peut les possibilités de contestation dans ce domaine (ATF 138 III 270 consid. 2.2.1). Il convient en outre de garder à l'esprit que la révision est un moyen de droit extraordinaire obéissant à des règles encore plus strictes que le recours (ATF 148 III 436 consid. 4.3.3), raison pour laquelle il convient d'interpréter restrictivement les dispositions légales y relatives. Pareille interprétation restrictive est d'autant plus de mise lorsque l'on a affaire, comme en l'espèce, à une demande de révision déposée plusieurs années après la reddition de la sentence qui en est l'objet, la révision d'une sentence devant rester l'exception à l'intangibilité d'une décision arbitrale afin de garantir la sécurité du droit. Force est de relever que l'interprétation de l'art. 190a al. 1 let. c LDIP proposée par la requérante - selon laquelle le motif de récusation allégué dans le cadre d'une demande de révision pourrait prendre naissance après le prononcé de la sentence attaquée - risquerait de mettre en péril la sécurité du droit et d'ouvrir la porte à certaines manoeuvres dilatoires en favorisant le dépôt de plus en plus fréquent de demandes de révision, même manifestement infondées, étant précisé que le droit de demander la révision pour cause de découverte d'un motif de récusation ne se périme que par dix ans à compter de l'entrée en force de la sentence (art. 190a al. 2 LDIP). 
 
7.3.5. Au vu de ce qui précède, le Tribunal fédéral considère, au terme de son examen, qu'une demande de révision fondée sur l'art. 190a al. 1 let. c LDIP ne peut être admise que si le motif de récusation invoqué existait déjà au moment du prononcé de la sentence finale, partielle ou incidente faisant l'objet de la demande de révision.  
 
7.4. En l'occurrence, la quasi-totalité des circonstances alléguées par la requérante au soutien de sa demande de révision sont postérieures à la reddition de la sentence entreprise, ainsi que les intimées le démontrent clairement dans leurs mémoires. En effet, l'arbitre mis en cause a accepté sa nomination en février 2019. La sentence faisant l'objet de la demande de révision a été rendue le 5 mai 2020. Les associés de l'arbitre incriminé n'ont été impliqués dans l'arbitrage CCI n.... qu'à partir de juillet 2022. Les décisions procédurales prétendument injustes, critiquées par la requérante, datent de septembre, octobre et novembre 2022. De tels éléments ne sauraient dès lors entrer en ligne de compte pour justifier la révision de la sentence attaquée.  
 
7.5. Seules deux circonstances invoquées par la requérante sont antérieures au prononcé de la sentence entreprise.  
La première est la requête de conciliation déposée le 9 janvier 2017 devant le Tribunal de première instance genevois par E.________, au nom de qui agissaient deux avocats suisses, à l'encontre de la société iranienne G.________, à savoir l'une des entités mentionnées dans la fiche d'information établie par la CCI dans le cadre de l'affaire n..... La requérante fait valoir que cet acte procédural contenait de multiples allégations hostiles à l'égard de l'Iran et d'entités affiliées au pouvoir iranien formulées en lien avec le même litige que celui visé par l'affaire CCI n..... Dans ses observations du 1er septembre 2023 sur la demande de révision, l'arbitre incriminé explique toutefois que son cabinet n'a été, en aucune manière, associé à cette requête de conciliation. Il précise, en outre, que lorsqu'il a accepté sa mission d'arbitre en février 2019 et quand le Tribunal arbitral a rendu la sentence attaquée le 5 mai 2020, il ignorait que deux de ses associés avaient, en novembre 2016 et jusqu'au 13 mars 2017, été consultés par E.________ sur certains aspects pénaux d'un dossier opposant cette société à F.________, relevant potentiellement de la compétence du Tribunal correctionnel de Paris. L'arbitre mis en cause ajoute qu'il n'a eu connaissance de la brève existence de ce dossier qu'en février 2023, précisant que, depuis le 13 mars 2017 jusqu'en juillet 2022, il n'y a eu aucune relation d'aucune sorte entre E.________ et son cabinet. La Cour de céans ne discerne pas quel intérêt l'arbitre concerné pourrait avoir eu à ne pas dire la vérité puisqu'il avait de toute façon été récusé pour la suite de la procédure par la CCI et qu'il s'adressait à la juridiction suprême d'un État tiers. Quoi qu'il en soit, la requérante ne tente pas véritablement de démontrer que les assertions figurant dans l'écriture du 1er septembre 2023 seraient fausses, mais se borne à affirmer, sans en faire la moindre ébauche de démonstration, que la lettre du 1er septembre 2023 "ne répond pas à l'ensemble des questions qui se posent en l'espèce" et à ajouter qu'il "ne serait pas satisfaisant que le sort de l'affaire repose sur les seules déclarations de l'arbitre". Ce faisant, elle perd de vue que les assertions de l'arbitre correspondent à la constatation ressortant de la décision de la CCI selon laquelle il n'existait pas de preuve que le cabinet de l'arbitre incriminé ait été impliqué dans la rédaction de la requête de conciliation, voire qu'il ait pris part à la procédure CCI n.... avant juillet 2022 (n. 59). Or, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne s'agit pas là d'une "appréciation" de la CCI susceptible d'être revue par le Tribunal fédéral, mais bien d'une constatation de fait qui lie ce dernier. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de donner suite aux diverses mesures d'instruction requises par la requérante. Au regard de ce qui précède, la première circonstance invoquée par la requérante ne saurait justifier l'annulation de la sentence attaquée. 
La seconde circonstance antérieure au prononcé de la sentence querellée tient au fait que l'arbitre incriminé est intervenu dans l'affaire H.________ devant les juridictions françaises, en vue d'obtenir l'annulation d'une sentence arbitrale, alors que l'avocat D.________ a agi dans la même affaire devant les tribunaux anglais aux fins d'empêcher l'exécution de la même sentence, procédures initiées en 2017 et ayant débouché sur des décisions judiciaires rendues en 2020 et 2021. On peut d'emblée s'interroger sur le point de savoir si la requérante n'est pas forclose à invoquer une telle circonstance, dès lors que, comme le démontrent de façon convaincante les intimées, les décisions judiciaires prononcées dans l'affaire H.________ ont fait l'objet d'une forte couverture médiatique au sein de la communauté arbitrale, de nombreuses publications ayant au demeurant mentionné les noms des divers conseils en charge de la défense des intérêts des parties concernées. Quoi qu'il en soit, la CCI a souligné, dans sa décision motivée du 21 avril 2023, qu'il n'était pas établi que le cabinet de l'arbitre et l'avocat D.________ auraient collaboré dans le cadre de l'affaire H.________ (n. 66). Cette constatation de fait lie la Cour de céans. Elle est du reste corroborée par les déclarations faites par l'arbitre mis en cause dans ses observations du 1er septembre 2023 sur la requête de révision, ce dernier ayant indiqué ce qui suit: " Quant à notre intervention dans le recours en annulation d'une sentence rendue dans l'affaire H.________, nous avons succédé à un cabinet français et n'avons eu de contact qu'avec le cabinet de sollicitors anglais PRC qui nous a mandaté pour la société H.________ et assurait la coordination des procédures. Nous n'avons jamais eu aucun contact avec Me D.________ ". Par conséquent, cette autre circonstance invoquée par la requérante ne saurait donner lieu à une révision de la sentence entreprise. 
En définitive, la requérante échoue à établir qu'il existait un motif de récusation de l'arbitre incriminé au moment où la sentence attaquée a été rendue. 
 
8.  
Au vu de ce qui précède, la demande de révision doit être rejetée dans la mesure de sa recevabilité. La requérante, qui succombe, supportera dès lors les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens aux intimées, créancières solidaires (art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
La demande de révision est rejetée dans la mesure où elle est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 200'000 fr., sont mis à la charge de la requérante. 
 
3.  
La requérante versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de 250'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et au président du Tribunal arbitral ayant rendu la sentence attaquée. 
 
 
Lausanne, le 11 juin 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : O. Carruzzo