Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_300/2024
Arrêt du 13 janvier 2025
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et MM. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente,
Donzallaz, Hänni, Ryter et Kradolfer,
Greffière : Mme Joseph.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Romain Jordan, avocat,
recourant,
contre
Direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir du canton de Genève,
rue de Bandol 1, 1213 Onex.
Objet
Loi genevoise sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur (LTVTC); renouvellement de l'autorisation d'usage accru du domaine public,
recours contre l'arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 30 avril 2024 (ATA/533/2024).
Faits :
A.
A.________, né en 1943, est titulaire d'une autorisation d'usage accru du domaine public liée aux plaques d'immatriculation GE xxx depuis 1991 et travaille depuis lors en qualité de chauffeur de taxi indépendant.
Le 21 septembre 2017, le Service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir de la République et canton de Genève (ci-après: le Service cantonal) a prolongé l'autorisation d'usage accru du domaine public jusqu'au 30 juin 2023.
Le 4 mars 2023, A.________ a requis le renouvellement de son autorisation d'usage accru du domaine public.
B.
Considérant que A.________ avait atteint l'âge de 75 ans, le Service cantonal a, par décision du 7 novembre 2023, constaté la caducité de l'autorisation d'usage accru du domaine public liée aux plaques d'immatriculation GE xxx et ordonné à A.________ de les déposer auprès de l'Office cantonal des véhicules.
Le 5 décembre 2023, A.________ a interpellé la Conseillère d'État en charge du Département de l'économie et de l'emploi (ci-après: le Département), afin de solliciter une décision fondée sur l'examen de sa situation individuelle. Ce courrier est demeuré sans réponse.
Le 11 décembre 2023, A.________ a recouru auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) contre la décision du 7 novembre 2023, concluant principalement au renouvellement de son autorisation d'usage accru du domaine public et à ce qu'il soit constaté qu'il en remplissait les conditions.
La Cour de justice a rejeté le recours, par arrêt du 30 avril 2024.
C.
A.________ dépose un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 30 avril 2024. Il conclut, sous suite de frais et dépens, au renouvellement de son autorisation d'usage accru du domaine public. Subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Par ailleurs, il requiert l'effet suspensif au recours.
Par ordonnance du 4 juillet 2024, la Présidente de la II e Cour de droit public a rejeté la requête d'effet suspensif.
Le Service cantonal dépose des observations et conclut au rejet du recours. La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt.
Considérant en droit :
1.
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par un tribunal cantonal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) qui confirme le constat de la caducité d'une autorisation donnant droit à un usage accru du domaine public en tant que chauffeur de taxi. Elle concerne donc une cause de droit public (cf. art. 82 let. a LTF) qui n'entre pas dans le catalogue des exceptions prévues par l'art. 83 LTF. Le recours est en outre déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et en la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, par le recourant qui est atteint par la décision entreprise et qui a la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Le recours en matière de droit public est donc recevable.
2.
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la violation de droits fondamentaux, ainsi que celle de droits constitutionnels cantonaux ou du droit intercantonal, que si de tels griefs ont été invoqués et motivés par la partie recourante, c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de façon claire et détaillée (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 141 I 36 consid. 1.3; 135 III 232 consid. 1.2). Quant à un éventuel grief de violation du droit cantonal - non constitutif d'un droit constitutionnel - il ne peut en principe pas être soulevé dans un recours devant le Tribunal fédéral. En revanche, il est toujours possible de faire valoir que l'application du droit cantonal est arbitraire ou qu'elle constitue une violation du droit fédéral (cf. ATF 142 II 369 consid. 2.1; 140 III 385 consid. 2.3).
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été constatés de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. À défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1).
3.
Dans un premier grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, le recourant se plaint d'une violation de l'interdiction du déni de justice formel et du droit d'être entendu ( art. 29 al. 1 et 2 Cst. ). Il reproche à la Cour de justice de ne pas avoir procédé à un contrôle préalable de la constitutionnalité et de la conformité au droit supérieur, à savoir aux art. 8 al. 2 Cst. et 27 Cst., de l'art. 13 al. 9 let. c de la loi genevoise sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 28 janvier 2022 (LTVTC/GE; RS/GE H 1 31), alors qu'il avait soulevé un grief en ce sens, mais de s'être limitée à renvoyer à la jurisprudence rendue par la Chambre constitutionnelle.
3.1. Il convient d'emblée de constater qu'il ne saurait être question de déni de justice formel en l'espèce, la Cour de justice étant entrée en matière sur le recours qui lui était soumis (cf. ATF 142 II 154 consid. 4.2 et les références; arrêts 2C_254/2024 du 19 août 2024 consid. 3.2; 2C_275/2023 du 12 juin 2024 consid. 3.1.2). L'absence de motivation suffisante, en réalité dénoncée par le recourant, doit ainsi être examinée sous l'angle d'une éventuelle violation du droit d'être entendu, qu'il soulève également (arrêts 2C_254/2024 du 19 août 2024 consid. 3.2; 2C_640/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.1).
3.2. Il découle du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. un devoir pour l'autorité de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 146 II 335 consid 5.1; 143 III 65 consid. 5.2; 139 IV 179 consid. 2.2), de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 139 IV 179 consid. 2.2). Il n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuves et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 145 IV 99 consid. 3.1; 143 III 65 consid. 5.2).
3.3. Il ressort de l'arrêt attaqué que la Cour de justice a traité le grief de la violation des art. 8 al. 2 et 27 Cst. soulevé par le recourant. Elle a spécifiquement mentionné la jurisprudence relative à ces deux dispositions constitutionnelles. Elle a en outre relevé que la Chambre constitutionnelle avait d'ores et déjà admis la constitutionnalité et la conformité au droit supérieur de plusieurs dispositions de la LTVTC/GE et a cité cinq arrêts. Dans son analyse, elle a notamment résumé l'un de ces arrêts selon lequel la fixation d'un âge limite à 75 ans, au-delà duquel l'autorisation d'usage accru du domaine public devenait caduque (cf. art. 13 al. 9 let. c LTVTC/GE), constituait une restriction admissible à la liberté économique. Elle a conclu qu'il ne lui appartenait pas de revenir sur ces jurisprudences.
Ainsi, contrairement à ce que soutient le recourant, le grief qu'il a formulé n'a pas été ignoré par la Cour de justice, la motivation de l'arrêt attaqué étant sur ce point suffisante pour comprendre les motifs sur lesquelles elle s'est fondée. En revanche, savoir si la Cour de justice a violé le droit en retenant, à la suite de la Cour constitutionnelle, que l'art. 13 al. 9 let. c LTVTC/GE était conforme au droit supérieur et ne constituait partant ni une restriction inadmissible à la liberté économique ni une violation de l'interdiction de la discrimination, relève du fond et sera examiné ci-après (cf.
infra consid. 6 et 7).
3.4. Dès lors, les griefs de déni de justice et de violation du droit d'être entendu doivent être rejetés.
4.
Le litige porte sur le bien-fondé de la décision de la Cour de justice confirmant le constat de la caducité de l'autorisation d'usage accru du domaine public pour chauffeur de taxi octroyée au recourant, en raison du fait qu'il a atteint l'âge limite fixé à 75 ans par le droit cantonal.
L'art. 13 al. 9 let. c de la loi genevoise sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur a la teneur suivante: le département révoque les autorisations [d'usage accru du domaine public] lorsque son titulaire a atteint l'âge de 75 ans révolus.
5.
Le recourant s'en prend à la constitutionnalité de cette disposition. La limite d'âge fixée consacrerait une discrimination à raison de l'âge (art. 8 al. 2 Cst.) ainsi qu'une violation de sa liberté économique (art. 27 Cst.), puisqu'elle empêche l'exercice de l'activité de chauffeur de taxi à titre indépendant à partir de 75 ans. Cette discrimination ne serait fondée sur aucun motif objectif suffisant respectivement sur aucun intérêt public, d'une part, et violerait le principe de la proportionnalité, d'autre part.
De tels griefs sont recevables, dans la mesure où la constitutionnalité d'une disposition de droit cantonal peut être examinée à titre préjudiciel, dans le cadre, comme en l'espèce, d'un contrôle concret de la norme c'est-à-dire en rapport avec un acte d'application. Si cette norme s'avérait inconstitutionnelle, le Tribunal fédéral ne saurait toutefois formellement annuler celle-ci, mais il pourrait uniquement modifier la décision qui l'applique (ATF 150 I 50 consid. 3.1.2; arrêts 2C_38/2024 du 19 août 2024 consid. 3.1; 2C_284/2019 du 16 septembre 2019 consid. 5.1).
6.
Il convient d'examiner en premier lieu le grief de discrimination liée à l'âge, en raison de la limite légale de 75 ans opposée au recourant.
6.1. Selon l'art. 8 al. 2 Cst., nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques, ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique. Une discrimination au sens de l'art. 8 al. 2 Cst. est réalisée lorsqu'une personne est juridiquement traitée de manière différente uniquement en raison de son appartenance à un groupe déterminé historiquement ou dans la réalité sociale contemporaine, mise à l'écart ou considérée comme de moindre valeur. La discrimination constitue une forme qualifiée d'inégalité de traitement de personnes dans des situations comparables, dans la mesure où elle produit sur un être humain un effet dommageable, qui doit être considéré comme un avilissement ou une exclusion, car elle se rapporte à un critère de distinction qui concerne une part essentielle de l'identité de la personne intéressée ou à laquelle il lui est difficilement possible de renoncer (ATF 147 I 89 consid. 2.1; 143 I 129 consid. 2.3.1).
6.2. Le Tribunal fédéral admet que les critères susceptibles de fonder une discrimination prohibée au sens de l'art. 8 al. 2 Cst. n'ont pas tous exactement la même portée. Si des distinctions fondées sur le genre, la race et la religion sont interdites dans leur principe et nécessitent toujours une justification qualifiée, il n'en va pas forcément de même des distinctions opérées en fonction de l'âge, qui présentent une nature quelque peu différente. Ce dernier critère ne se rattache pas à un groupe qui, historiquement, aurait été déprécié ou mis à l'écart de la vie sociale et politique (ATF 147 I 89 consid. 2.2; 138 I 265 consid. 4.3). Il s'agit plutôt d'une forme de discrimination atypique, qui se rapproche en pratique des situations d'inégalité de traitement prohibées par l'art. 8 al. 1 Cst., étant précisé que l'ordre juridique connaît de nombreuses différences de traitement du fait de l'âge (ATF 147 I 89 consid. 2.2; 147 I 1 consid. 5.2). La protection offerte par l'art. 8 al. 2 Cst. en cas de discrimination liée à l'âge n'en reste pas moins différente de celle que confère l'art. 8 al. 1 Cst. Elle implique un examen de proportionnalité plus strict que celui exigé par cette dernière disposition au moment de vérifier si la différence de traitement considérée repose sur des motifs objectifs suffisants, afin de tenir compte de la mention de l'âge dans le catalogue des critères discriminatoires (ATF 147 I 89 consid. 2.2; 147 I 1 consid. 5.2; 138 I 265 consid. 4.3; arrêt 8C_1074/2009 du 2 décembre 2010 consid. 3.4.3). En somme, le seuil de justification d'une différenciation fondée sur un critère visé par l'art. 8 al. 2 Cst. peut s'avérer plus ou moins haut selon le critère discriminatoire concrètement utilisé, mais il est en tous les cas plus élevé que lors d'une simple inégalité de traitement au sens de l'art. 8 al. 1 Cst. (ATF 147 I 89 consid. 2.2; 147 I 1 consid. 5.2; 138 I 217 consid. 3.3.5).
6.3. En l'occurrence, la discrimination liée à l'âge contestée par le recourant a pour origine l'art. 13 al. 9 let. c de la nouvelle loi genevoise sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 28 janvier 2022, entrée en vigueur le 1er novembre 2022 (cf.
supra consid. 4).
6.4. Il ressort des travaux préparatoires, en particulier du projet de loi n° 12'649 (PL 12'649) sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur déposé par le Conseil d'État devant le Grand Conseil le 26 février 2020 ainsi que des rapports ultérieurs de la commission parlementaire des transports (PL 12'649-A du 16 août 2021; PL 12'649-B du 11 janvier 2022) que la fixation d'une limite d'âge à 75 ans entraînant la caducité de l'autorisation d'usage accru du domaine public poursuit plusieurs objectifs.
6.4.1. Elle vise tout d'abord et principalement à réduire le temps d'attente pour obtenir une telle autorisation et à favoriser la rotation entre les chauffeurs de taxi (PL 12'649, p. 27. cf. aussi PL 12'649-A, p. 33, 64, 109).
Sur ce point, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de préciser - lors de l'examen de griefs en lien avec la liberté économique et l'égalité de traitement entre concurrents économiques - que lorsque une collectivité publique réglemente l'usage accru du domaine public par les taxis, les autorisations ne doivent pas être concentrées entre les mains d'un petit cercle toujours identique de bénéficiaires, mais être réparties équitablement entre les différents concurrents, selon un système permettant également l'accès à de nouveaux candidats (cf. arrêts 2C_394/2020 du 20 novembre 2020 consid. 7.2; 2C_829/2015 du 15 janvier 2016 consid. 4.3 et les arrêts cités). Il en découle un devoir pour la collectivité publique d'assurer une rotation. Sous cet angle, il convient d'admettre l'existence d'un motif légitime.
6.4.2. Il ressort aussi des travaux préparatoires que la limite d'âge vise également à assurer la sécurité des usagers (PL 12'649, p. 27; cf. aussi PL 12'649-A, p. 33).
Contrairement à ce que laisse entendre le recourant, le fait que la Confédération soit compétente pour légiférer en matière de circulation routière (art. 82 al. 1 Cst.; 106 al. 3 de la loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière [LCR; RS 741.01]), et accomplisse cette tâche également dans l'intérêt public de la sécurité, n'empêche pas les cantons de servir ce même intérêt lorsqu'ils réglementent d'autres domaines, comme celui de la profession de chauffeur de taxi (cf. ATF 150 I 120 consid 5.4.2; 99 Ia 389 consid. 2; arrêts 2C_38/2024 du 19 août 2024 consid. 3.3; 2C_580/2023 du 17 avril 2024 consid. 4.4; 2C_84/2019 du 20 septembre 2019 consid. 6.2.2). Dans ce contexte et contrairement à ce que soutient également le recourant, on ne voit pas que l'art. 15d al. 2 LCR, prévoyant que les titulaires d'un permis de conduire âgés de 75 ans et plus doivent être convoqués, en principe tous les deux ans, pour un examen par un médecin-conseil, puisse empêcher un canton de prévoir, dans un but de sécurité publique, des limites supplémentaires aux chauffeurs de taxis dans l'exercice de leur activité. Cette disposition de droit fédéral ne s'oppose ainsi pas à la fixation de la limite d'âge en l'espèce litigieuse, qui ne s'impose pas à tous les conducteurs, mais vise uniquement les chauffeurs de taxi au bénéfice d'une autorisation d'usage accru du domaine public.
À cela s'ajoute encore que la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de souligner que le service des taxis représente un quasi-service public complémentaire aux entreprises de transports publics collectifs (cf. ATF 99 Ia 389 consid. 3a; 143 II 598 consid. 4.2.2; arrêts 2C_275/2023 du 12 juin 2024 consid. 5.7; 2C_548/2022 du 30 mai 2023 consid. 4.6.5; 2C_940/2010 du 17 mai 2011 consid. 4.5 et 4.8). Il existe ainsi un intérêt public à garantir la fiabilité, la disponibilité et la qualité d'un tel service (cf. ATF 143 II 598 consid. 5.3; arrêts 2C_275/2023 du 12 juin 2024 consid. 5.7; 2C_116/2011 du 29 août 2011 consid. 7.3.3, 2P.56/2002 du 18 juin 2002 consid. 2.5), étant précisé que le but de sécurité publique est spécifiquement exprimé à l'art. 1 al. 2 LTVTC/GE. Sous cet angle également, la disposition litigieuse repose sur un intérêt légitime.
6.4.3. La limite d'âge prévue à l'art. 13 al. 9 let. c LTVTC/GE vise enfin à préserver la santé des chauffeurs de taxi eux-même (pénibilité de la profession de chauffeur, charges importantes à soulever) (PL 12'649, p. 27; cf. aussi PL 12'649-A, p. 33).
C'est encore en vain que le recourant tente de tirer argument du fait que la LTVTC/GE, qui règle également la profession des chauffeurs de voiture de transport avec chauffeur (ci-après: VTC), ne fixe pour ces derniers aucune limite d'âge, de sorte que celle-ci ne pourrait pas être destinée à préserver la santé des chauffeurs. ll perd en effet de vue que si le service des taxis représente un quasi-service public (cf.
supra consid. 6.4.2), tel n'est en revanche pas le cas du service des VTC, dont les chauffeurs ne bénéficient pas de l'usage accru du domaine public et ne peuvent effectuer des courses que sur commande ou réservation préalable (cf. art. 24 al. 2 LTVTC/GE; cf. ATF 150 I 120 consid. 8.4). La jurisprudence reconnaît que le statut de ces deux catégories de transporteurs professionnels de personnes, tel que prévu par la LTVTC/GE précédemment et actuellement en vigueur, et les droits et obligations en dérivant sont suffisamment différents pour justifier de leur appliquer certaines règles ou restrictions distinctes (cf. arrêts 2C_79/2023 du 23 février 2024 consid. 9.2 non publié in ATF 150 I 120; 2C_772/2017 du 13 mai 2019 consid. 3.1.5 et les références citées). En pareilles circonstances, il convient d'admettre, en lien avec les conducteurs de taxi, le caractère légitime de l'objectif de protection de la santé des chauffeurs titulaires d'une autorisation d'usage accru du domaine public.
6.4.4. Au vu de ce qui précède, l'art. 13 al. 9 let. c LTVTC/GE, répond à plusieurs motifs objectifs légitimes.
6.5. Reste à examiner si la limite d'âge fixée à 75 ans respecte le principe de la proportionnalité (cf.
supra consid. 6.2).
6.5.1. Selon l'art. 36 al. 3 Cst., une restriction à un droit fondamental doit être proportionnée. Cette exigence de proportionnalité implique qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité). Elle suppose en outre un rapport raisonnable entre ce dernier et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts; ATF 149 I 191 consid. 6 et 7.1; 142 I 76 consid. 3.5.1). Le Tribunal fédéral vérifie librement si cette exigence est respectée (cf. ATF 142 I 162 consid. 3.2.2; 134 I 153 consid. 4.2.1 et 4.2.2).
Dès lors que l'art. 5 al. 2 Cst., également invoqué par le recourant, ne s'applique pas lorsque l'art. 36 Cst. entre en ligne de compte (cf. ATF 136 I 241 consid. 3.1; 134 I 153 consid. 4.2.1 et 4.3), seule cette dernière disposition sera examinée, étant rappelé que l'examen d'une discrimination liée à l'âge en application de l'art. 8 al. 2 Cst. implique un examen de la proportionnalité plus strict (cf.
supra consid. 6.2).
6.5.2. Tout d'abord, la restriction exerce l'influence principalement voulue par le législateur genevois, à savoir permettre une meilleure rotation dans la profession des chauffeurs de taxi (cf.
supra consid. 6.4.1). Il ressort en effet de l'arrêt entrepris que, en raison du numerus clausus, les plus jeunes rencontrent des difficultés à entrer dans cette profession (PL 12'649-A, p. 64).
La mesure est également apte à atteindre les objectifs légitimes de sécurité ainsi que de préservation de la santé des chauffeurs de taxi (cf
. supra consid. 6.4.2 et 6.4.3). Il est reconnu que les aptitudes physiques et mentales de l'être humain diminuent avec l'âge, que sa capacité de concentration s'atténue et que la durée du repos nécessaire après des efforts augmente, et ce même si tout le monde n'est pas touché de la même manière. Le développement de l'expérience ne peut que partiellement compenser ces dégradations de sorte qu'une limite fondée sur l'âge peut s'imposer (cf. ATF 147 I 1 consid. 5.3; 124 I 297 consid. 4c), en l'espèce pour protéger les chauffeurs eux-même, leurs clients ainsi que les autres usagers de la route.
6.5.3. On voit mal quelle mesure moins incisive aurait pu être adoptée, quoi qu'en dise le recourant. Il ne suffirait en effet pas d'augmenter le nombre d'autorisations dans le canton. À ce titre, la loi genevoise prévoit que les autorisations d'usage accru du domaine public sont limitées en nombre (et en durée), en vue d'assurer un bon fonctionnement des services de taxis, par une utilisation optimale du domaine public, et en vue de garantir la sécurité publique (cf. 13 al. 1 LTVTC/GE). Une telle augmentation irait à l'encontre du système-même de la limitation de l'usage accru du domaine public (cf. pour les taxis arrêt 2C_829/2015 du 15 janvier 2016 consid. 4.3). En outre, une limite de la durée totale de l'octroi de l'autorisation - telle que suggérée par le recourant - ne peut être préférée à celle fondée sur un âge maximal. On ne voit en effet pas qu'une telle limite puisse atteindre les buts de protection de la santé et de sécurité poursuivis, ni en quoi elle serait préférable à un âge maximal; ce système est ainsi objectivement fondé et prévaut du reste dans de nombreux autres domaines (cf. arrêt 8C_495/2011 du 13 décembre 2011 consid. 4.3).
6.5.4. Enfin, la mesure respecte le principe de la proportionnalité au sens étroit. Si chaque individu subit de manière différente les conséquences de l'âge, il ne peut y échapper. Exiger un régime adapté au vieillissement individuel de chacun serait impraticable. Un certain schématisme est donc inévitable (cf. ATF 147 I 1 consid. 5.3; arrêt 8C_495/2011 du 13 décembre 2011 consid. 4.3).
6.5.5. À ces considérations générales, il convient d'ajouter que le département avait initialement prévu de fixer une limite plus basse puis, à la suite de discussions, avait choisi de l'arrêter dix ans après l'âge légal de la retraite, sachant qu'il n'y avait pas d'âge limite pour les indépendants (PL 12'649-A, p. 33). La question a également fait l'objet de discussions au Parlement cantonal, certains députés ayant souhaité l'abaisser à 70 ans, ce qui a été refusé (PL 12'649-A, p. 109, 146 s.). Ainsi, la limite choisie habilite les chauffeurs concernés à exercer leur activité dix ans après l'âge légal de la retraite, ce qui laisse le temps de se préparer. En outre, les intéressés, si leur santé le permet, peuvent ensuite continuer leur activité de chauffeur en qualité de VTC. Le législateur a donc apprécié l'effet de la limitation en raison de l'âge, en adoptant un système qui reste mesuré.
Certes, les chauffeurs de taxi ne sont pas salariés et ne bénéficient pas nécessairement d'une pension de retraite (suffisante), comme l'indique le recourant. En ce sens, il n'est pas exclu que la limite d'âge mette dans une situation difficile ceux d'entre eux qui n'ont pas réussi à constituer des ressources suffisantes pour assurer leurs vieux jours, alors que leurs aptitudes leur permettraient de continuer à pratiquer. Toutefois et d'une manière générale, tout salarié ne touche pas forcément une pension complète et peut devoir arrêter son activité bien avant la limite de 75 ans. Par ailleurs, l'âge choisi, soit 75 ans, est un seuil assez élevé pour permettre aux personnes concernées de constituer leur pension de retraite, d'autant que rien n'empêche les intéressés qui en ont les capacités de compléter leurs ressources passé cet âge, en poursuivant d'autres activités, en particulier celle de chauffeur VTC, comme cela a été exposé. Cette méthode s'inscrit finalement dans le cadre de la réalité sociale de la retraite, qui, si elle s'impose au premier chef pour les salariés, n'en influence pas moins l'activité professionnelle des personnes de condition indépendante (cf. ATF 124 I 297 consid. 4.c.bb). Ainsi, la critique du recourant doit être écartée.
6.6. Le grief de la violation de l'art. 8 al. 2 Cst. est partant infondé.
7.
Reste à examiner la violation de la liberté économique invoquée par le recourant.
7.1. Selon l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1); elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2).
La liberté économique au sens de l'art. 27 al. 1 Cst. protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu, et peut être invoquée tant par les personnes physiques que par les personnes morales (ATF 143 II 598 consid. 5.1 et les références). L'activité de chauffeur de taxi indépendant ou salarié est protégée par l'art. 27 Cst., même si l'exercice de cette activité implique un usage accru du domaine public (cf. ATF 150 I 120 consid. 4.1.1 et les arrêts cités, 143 II 598 consid. 5; arrêts 2C_38/2024 du 19 août 2024 consid. 4.1.1; 2C_275/2023 du 12 juin 2024 consid. 5.2.1; 2C_690/2023 du 4 juin 2024 consid. 7.1).
7.2. Les restrictions cantonales à l'exercice de la profession de chauffeur de taxi qui portent ainsi atteinte à la liberté économique doivent, en vertu de l'art. 36 Cst., reposer sur une base légale, être justifiées par un intérêt public prépondérant et respecter le principe de proportionnalité (sur cette notion cf.
supra consid. 6.5.1), étant rappelé que le Tribunal fédéral vérifie librement si ces différentes exigences sont respectées (cf. ATF 142 I 162 consid. 3.2.2; 134 I 153 consid. 4.2.1 et 4.2.2; arrêt 2C_38/2024 du 19 août 2024 consid. 4.1.2).
7.3. En l'occurrence, la caducité de l'autorisation d'usage accru du domaine public à partir de 75 ans empêche l'exercice de cette profession dès cet âge, ce qui constitue une atteinte à la liberté économique.
Force est en premier lieu de constater que le recourant ne conteste à juste titre pas l'existence d'une base légale suffisante (cf.
supra consid. 6.3).
Comme déjà indiqué en lien avec l'art. 8 al. 2 Cst., la mesure repose sur plusieurs intérêts légitimes (cf.
supra consid 6.4), à savoir la réduction du temps d'attente pour obtenir une autorisation d'usage accru du domaine public nécessaire à la pratique de la profession de chauffeur de taxi, la préservation de la santé des chauffeurs et la sécurité des usagers. Ceux-ci constituent des intérêts publics au sens de l'art. 36 al. 2 Cst.
Enfin, s'agissant de la proportionnalité, il convient également de renvoyer à ce qui a été dit précédemment (cf.
supra consid. 6.5).
7.4. En définitive, on ne décèle pas de violation de la liberté économique.
8.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à la Direction de la police du commerce et de lutte contre le travail au noir du canton de Genève et à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 13 janvier 2025
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
La Greffière : M. Joseph