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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_204/2024  
 
 
Arrêt du 13 janvier 2025  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Hurni, Président, Denys et May Canellas. 
Greffier : M. Esteve. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
tous trois représentés par Me Marie Franzetti, avocate, 
recourants, 
 
contre  
 
D.________ SA, 
représentée par Me Olivier Subilia, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
contrat de travail; location de services; convention collective de travail, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 23 février 2024 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (P321.048986-221219, 86). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 1er juillet 2019, E.________ (ci-après: l'employé) a été engagé par D.________ SA (ci-après: D.________, l'employeuse ou l'intimée) comme collaborateur auquel des missions seraient confiées.  
D.________ a notamment pour but le placement de personnel, activité en soi soumise à la Convention collective de travail de la branche de la location de service (à l'époque des faits, Convention collective de travail de la branche du travail temporaire; ci-après: CCT LSE), laquelle a fait l'objet d'arrêtés d'extension successifs du Conseil fédéral. 
L'employé a été mis à disposition de F.________ SA (ci-après: F.________) à compter du 8 juillet 2019 en qualité d'ouvrier de production, plus précisément d'hygiéniste machines. F.________ a pour but la fabrication, l'achat, la vente, la représentation de produits de boulangerie et d'alimentation, la représentation de vins et de spiritueux et de tous produits de consommation alimentaire. 
Le contrat de mission temporaire de l'employé fixait un salaire horaire brut de 24 fr. incluant les indemnités pour vacances et jours fériés ainsi qu'un treizième salaire. Ce salaire a été augmenté à 24 fr. 50 en janvier 2020, puis à 25 fr. 97 en février 2020. 
 
A.b. Le 21 décembre 2020, l'employeuse a notifié à l'employé la résiliation de sa mission de services avec effet au 24 janvier 2021. L'employé a formé opposition à cette résiliation, après en avoir demandé le motif. L'employeuse a maintenu sa décision.  
 
B.  
 
B.a. Le 19 juillet 2021, l'employé a saisi le Président du Tribunal de prud'hommes de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois d'une requête de conciliation. Devant l'échec de cette procédure, il a porté sa demande devant ce même tribunal en concluant à ce que l'employeuse soit condamnée à lui payer une indemnité pour licenciement abusif de 18'120 fr. net et, à titre de solde de salaire, 11'325 fr. 75 brut pour 2019, 16'123 fr. 95 pour 2020 et 433 fr. 40 pour 2021, avec les intérêts correspondants. Il réduira ensuite ses conclusions à un montant total de 27'883 fr. 10.  
Par jugement du 30 mai 2022, le Tribunal de prud'hommes de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a rejeté cette demande. 
 
B.b. Le 16 septembre 2022, l'employé a formé appel et, le 23 novembre 2022, l'employeuse a déposé un appel joint.  
L'employé est décédé le 24 octobre 2022. Son épouse et deux de ses enfants, soit C.________, B.________ et A.________ (ci-après conjointement: les héritiers de l'employé ou les recourants), se sont substitués à lui dans la procédure. 
Par arrêt du 23 février 2024, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté l'appel formé par l'employé et a admis l'appel joint sur le point des dépens de première instance, à verser solidairement entre eux par les héritiers de l'employé. 
 
C.  
Le 11 avril 2024, les héritiers de l'employé ont déposé un recours en matière civile, en concluant au versement par l'employeuse de 11'325 fr. 75 brut à titre de solde de salaire pour 2019, 16'123 fr. 95 brut à titre de solde de salaire pour 2020 et 433 fr. 40 brut à titre de solde de salaire pour 2021, avec intérêts. Ils ont également conclu à ce qu'ils ne soient pas reconnus débiteurs solidaires envers l'intimée des dépens de première et de seconde instance. 
Aucun échange d'écritures n'a été ordonné. 
La requête de suspension de la procédure a été rejetée par ordonnance présidentielle du 16 avril 2024. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par un tribunal supérieur statuant en dernière instance cantonale (art. 75 LTF), dans une affaire de droit du travail dont la valeur litigieuse - compte tenu de l'addition des chefs de conclusions des recourants (art. 52 LTF) - atteint le seuil de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2). Il n'est en revanche pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4).  
 
3.  
Il est constant qu'un contrat de travail liait l'employé à l'intimée du 8 juillet 2019 au 24 janvier 2021. À ce stade, le litige ne porte plus sur la question du licenciement abusif; il concerne un différentiel de salaire entre celui que l'employé a touché dans le cadre de sa mission pour F.________ et le salaire minimum que la CCT LSE imposerait à ses yeux. 
La cour cantonale n'a pas tranché la question de savoir si la CCT LSE, déclarée par le Conseil fédéral de force obligatoire en janvier 2012 pour la première fois (dernière version: FF 2024 3069), s'appliquait à la relation de travail en cause. Elle a considéré que, même si tel était le cas, le sens que les recourants prêtaient à l'art. 3 al. 3 CCT LSE était indéfendable, de sorte qu'ils ne pouvaient prétendre à un salaire plus élevé que celui qui avait été convenu. 
 
3.1. L'art. 3 al. 1 CCT LSE règle le conflit potentiel entre les dispositions de la CCT LSE et celles des autres conventions étendues applicables selon l'art. 20 de la loi fédérale du 6 octobre 1989 sur le service de l'emploi et la location de services (LSE; RS 823.11) et l'art. 48a de l'ordonnance du 16 janvier 1991 sur le service de l'emploi et la location de services (OSE; RS 823.111); il prévoit, comme principe, la priorité des dispositions spécifiques de ces autres conventions étendues (arrêt du Tribunal fédéral 4A_248/2021 du 9 novembre 2021 consid. 3.3.1 et les références citées). L'art. 3 al. 1 CCT LSE statue en effet que les dispositions concernant le salaire et le temps de travail visées à l'art. 20 LSE et à l'art. 48a OSE des CCT en vigueur dans l'entreprise locataire de services s'appliquent, à l'exclusion des propres dispositions de la CCT LSE, si les premières nommées sont déclarées de force obligatoire (ou si leurs dispositions non étendues figurent à l'annexe 1 de la CCT LSE).  
L'alinéa 3 - au coeur du présent litige - règle le cas où l'entreprise locataire de services n'est pas dotée d'une convention collective de travail étendue, ni d'une convention collective de travail qui figure à l'annexe 1 de la CCT LSE. Il est rédigé ainsi: "Dans les entreprises locataires de services dotées de conventions collectives de travail non étendues, qui ne figurent pas à l'annexe 1 de la présente CCT, les dispositions de la CCT Location de services s'appliquent dans leur intégralité. Les dispositions portant sur les salaires minimums selon l'art. 20 de la présente CCT sont exclues de ce champ d'application dans les entreprises de l'industrie chimique et pharmaceutique, de l'industrie des machines, de l'industrie graphique, de l'industrie horlogère, de l'industrie alimentaire et des produits de luxe ainsi [que] dans les entreprises de transports publics." 
Cet alinéa, dans sa formulation présentement litigieuse, comporte deux paragraphes supplémentaires qui n'ont pas été englobés dans la décision d'extension du Conseil fédéral, ce qui ne fait pas débat. Le premier de ces paragraphes explique que "[c]ette exclusion est convenue du fait que dans les branches précitées, les salaires minimums usuels en fonction de la localité et de la branche sont supérieurs à ceux fixés à l'art. 20 de la présente CCT." Le second paragraphe prévoit que, "[s]i la Com mission Professionnelle paritaire Suisse de la Location de Services (CPSLS) a des raisons sérieuses de penser qu'il y a dumping salarial dans l'une ou plusieurs de ces branches, elle ou toute partie signataire de la présente CCT peut demander à la commission tripartite compétente (art. 360b CO) d'ouvrir une enquête. " 
 
3.2. Les recourants concèdent que F.________ est une entreprise de l'industrie alimentaire et, partant, que les salaires minimums de l'art. 20 CCT LSE ne sont pas applicables, en vertu de l'exception prévue à l'art. 3 al. 3 CCT LSE. Cela étant, ils soutiennent que ce seraient les "salaires minimums usuels en fonction de la localité et de la branche" dont il est question au deuxième paragraphe de cet alinéa qui s'imposeraient dans ce cas de figure.  
 
3.3. La cour cantonale a réfuté cette thèse. Elle s'est laissée guider par un arrêt du Tribunal fédéral 4C_1/2014 du 11 mai 2015 où il était question d'un contrat-type de travail adopté dans le contexte d'un dumping salarial pratiqué dans les secteurs d'industrie énumérés à l'art. 3 al. 3 CCT LSE. Cet arrêt avait définitivement tranché par la négative le point de savoir si, dans les secteurs en question, la CCT LSE prévoyait des salaires minimaux ou des salaires usuels (les salaires moyens de la branche concernée) obligatoires. La cour cantonale s'était prononcée dans le même sens quelques mois avant l'arrêt attaqué, le 27 septembre 2023, dans une affaire opposant d'autres employés d'une entreprise de placement de personnel mis à disposition d'une société de l'industrie alimentaire entre 2016 et 2019. Les considérants de cet autre arrêt avaient été communiqués aux parties en cours d'instance.  
 
3.4. Cette interprétation catalyse les griefs des recourants, lesquels estiment, d'une part, que l'arrêt 4C_1/2014 du 11 mai 2015 ne répondrait pas à la question litigieuse et, d'autre part, que la cour cantonale aurait erré dans ce qui était loin d'être une interprétation en bonne et due forme, échouant à restituer l'objectif imprimé à l'art. 3 al. 3 CCT LSE. Leurs critiques à cet égard peuvent être résumées ainsi:  
 
- en renvoyant à un arrêt rendu dans une cause relative à d'autres employés, contesté devant le Tribunal fédéral par un recours en matière civile, la cour cantonale se serait dérobée à son devoir de motivation, violant de ce fait le droit d'être entendu des recourants; 
- la cour cantonale aurait mal interprété les considérants à la base de l'arrêt 4C_1/2014 dont la portée, circonscrite au droit public, aurait été mésestimée; 
- l'interprétation de l'art. 3 al. 3 CCT LSE, et particulièrement celle des paragraphes non couverts par les arrêtés d'extension du Conseil fédéral, dicterait une tout autre solution que celle qui se dégage de l'arrêt attaqué. Notamment, le but poursuivi par les parties contractantes à la convention, à savoir protéger les employés bénéficiant de salaires moins élevés que ceux fixés à l'art. 20 CCT LSE, conférerait à l'art. 3 al. 3 CCT LSE un tout autre sens; 
- la cour cantonale aurait méconnu le commentaire de la CCT LSE où l'obligation de respecter des salaires usuels serait soulignée à plusieurs reprises, notamment dans un tableau récapitulatif des salaires en question. De surcroît, les juges cantonaux auraient confondu recommandation sur les moyens de calculer les salaires usuels et recommandation de pratiquer des salaires usuels minimums, alors que cette dernière aurait valeur de prescription; 
- finalement, les recourants estiment devoir être protégés dans ce qu'ils pouvaient comprendre de l'art. 3 al. 3 CCT LSE selon le principe de la bonne foi. 
 
4.  
 
4.1. Sauf disposition contraire de la convention collective de travail, les clauses relatives à la conclusion, au contenu et à l'extinction des contrats individuels de travail ont, pour la durée de la convention, un effet direct et impératif envers les employeurs et travailleurs qu'elles lient (art. 357 al. 1 CO). Elles sont appelées clauses normatives. Elles doivent être interprétées de la même manière qu'une loi (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1; arrêt 4A_248/2021 précité consid. 4.1.1).  
D'après la jurisprudence, la loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). On peut cependant s'écarter de cette interprétation s'il y a des raisons sérieuses de penser que le texte de la loi ne reflète pas la volonté réelle du législateur; de tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi. Lorsque plusieurs interprétations sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions; le Tribunal fédéral ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique. Dans le domaine de l'interprétation des dispositions normatives d'une convention collective, il ne faut pas exagérer la distinction entre les règles sur l'interprétation des lois et les règles sur l'interprétation des contrats; la volonté des parties aux contrats individuels de travail et ce que l'on peut comprendre selon le principe de la bonne foi constituent également des moyens d'interprétation (ATF 136 III 283 consid. 2.3.1; arrêt 4A_248/2021 précité consid. 4.1.1). 
 
4.2. En l'espèce, c'est à tort que les recourants se plaignent d'une violation de leur droit à une décision motivée: l'arrêt attaqué est suffisamment explicite quant aux motifs qui ont dicté le dispositif. Certes, ce jugement fait référence à un autre arrêt, rendu en date du 27 septembre 2023 dans une cause opposant d'autres employés à une entreprise de location de personnel, après qu'ils avaient été mis à disposition d'une entreprise de l'industrie alimentaire. Cela étant, les considérants de cet arrêt antérieur ont été transmis aux parties et ont été résumés dans l'arrêt présentement contesté. Il ne ressort en outre ni de la décision entreprise ni du mémoire de recours que les recourants auraient valablement présenté aux juges cantonaux une argumentation circonstanciée au sujet de l'arrêt du 27 septembre 2023 qui aurait appelé une motivation plus approfondie. En tout état de cause, la prétendue carence dont se plaignent les recourants ne les a pas empêchés de déposer un recours motivé sur tous les aspects déterminants, ce qui démontre bien qu'ils ont parfaitement cerné le sens des considérants.  
Quant à l'interprétation de l'art. 3 CCT LSE, elle échappe aux griefs qu'ils lui adressent. Le Tribunal fédéral avait déjà, dans un arrêt 4A_539/2023 du 4 septembre 2024, débouté des employés qui élevaient des critiques équivalentes à celles en cause. Les considérations qui suivent n'ont dès lors rien de nouveau. 
Ainsi, les salaires minimums de l'art. 20 CCT LSE ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise locataire de services est active dans l'industrie alimentaire. L'art. 3 al. 3 CCT LSE ne pourrait être plus clair à cet égard. 
Les deux derniers paragraphes de cet alinéa (cf. supra consid. 3.1) en révèlent les motifs. Certes, ils n'ont pas été déclarés de force obligatoire par décision du Conseil fédéral mais, dès lors que le premier expose les raisons pour lesquelles cette exclusion a été prévue et le second l'un des mécanismes apte à corriger un éventuel dumping salarial dans la branche concernée, ils bénéficient d'une certaine valeur explicative. Contrairement à ce que les recourants estiment, la cour cantonale n'en a pas fait abstraction; en revanche, elle ne leur a pas accordé la même portée que les recourants, et ce à juste titre.  
D'après les recourants, dans les secteurs d'industrie exceptés selon l'art. 3 al. 3 CCT LSE, les salaires minimums usuels en fonction de la localité et de la branche seraient impératifs. Cette exégèse est indéfendable au regard du texte même de cette disposition. Le paragraphe en cause se limite en effet à expliquer que "cette exclusion est convenue du fait que dans les branches précitées, les salaires minimums usuels en fonction de la localité et de la branche sont supérieurs à ceux fixés à l'art. 20 de la présente CCT". Si la CCT LSE imposait le respect de ces salaires usuels, les parties contractantes l'auraient exprimé dans des termes autrement plus explicites et certainement pas en usant d'une formulation de nature manifestement explicative. Les recourants croient discerner dans le commentaire de l'art. 3 al. 3 CCT LSE la démonstration de leur thèse. Las, car - sans préjudice de la valeur que peut revêtir ce commentaire - les passages qu'ils évoquent ne révèlent rien de catégorique. De fait, les termes utilisés dans ce commentaire n'expriment aucune obligation. C'est en vain qu'ils prétendent tirer d'une brochure de swissstaffing la révélation de leur bon droit. À la question "Qu'est-ce qui fait foi ?" pour une entreprise active dans l'industrie alimentaire, cette brochure répond en effet: les "salaires usuels dans la localité et la branche". De là à interpréter cette expression comme une obligation découlant directement de la CCT LSE, il y a une marge appréciable. La même appréciation doit être faite de l'indication figurant au tableau annexé à la CCT LSE, en tant qu'elle correspond à la réponse sus-citée de la brochure de swissstaffing. En tout état de cause, il s'agit à chaque fois de documents à vocation purement informative. 
Pour autant, la CCT LSE ne perd pas de vue qu'il peut exister des situations problématiques, ce qui explique le rappel de l'existence d'un mécanisme correctif ancré dans le Code des obligations (art. 3 al. 3 dernier paragraphe, dernière phrase CCT LSE). C'est ce mécanisme qui concrétise l'objectif de protection des travailleurs concernés poursuivi dans cette convention collective. Il est clair que, si les salaires minimums usuels revêtaient un caractère impératif - comme les recourants l'affirment -, ce mécanisme n'aurait aucun sens. Ainsi, le paragraphe en question explique que, si la Commission Professionnelle paritaire Suisse de la Location de Services a des raisons sérieuses de penser qu'il y a dumping salarial dans l'une ou plusieurs de ces branches, elle ou toute autre partie signataire de ladite CCT peut demander à la commission tripartite compétente d'ouvrir une enquête, référence étant faite à l'art. 360b CO.  
Les art. 360a et 360b CO doivent être lus en parallèle. Ils remontent aux accords sectoriels signés avec la Communauté européenne en 1999. Le législateur avait alors prévu des mesures d'accompagnement destinées à parer aux risques de "dumping social" et de sous-enchère salariale induits par l'introduction de la libre circulation des travailleurs (cf. Message du 23 juin 1999 relatif à l'approbation des accords sectoriels entre la Suisse et la CE, FF 1999 5695 et 5698 s. ch. 276.12 et 276.132). D'où la création de commissions tripartites intégrant les partenaires sociaux dans chaque canton - ainsi qu'au niveau fédéral - dont la tâche est d'observer le marché du travail et, en présence d'un abus, de proposer à l'autorité compétente d'édicter un contrat-type de travail fixant des salaires minimaux dans les branches ou professions concernées. L'art. 360a al. 1 CO dépeint la situation redoutée, soit lorsque, au sein d'une branche économique ou d'une profession, les salaires usuels dans la localité, la branche ou la profession font l'objet d'une sous-enchère abusive et répétée, sans qu'il existe de convention collective de travail prévoyant des salaires minimaux pouvant être étendue. L'autorité compétente peut alors édicter, sur proposition de la commission tripartite, un contrat-type de travail de durée limitée prévoyant des salaires minimaux différenciés selon les régions et, le cas échéant, selon les localités. 
Les recourants ne parviennent pas à expliquer de manière convaincante ce qui justifierait le rappel de ce filet de sécurité si le respect des salaires minimaux usuels s'avérait impératif en vertu de la CCT LSE. 
Dans l'arrêt 4C_1/2014 du 11 mai 2015, la Ire Cour de droit civil du Tribunal fédéral a été appelée à juger de la légalité d'un contrat-type de travail décrété de force obligatoire pendant trois ans dans le canton du Tessin pour les secteurs du prêt de personnel dans les domaines de l'industrie chimique et pharmaceutique, de l'industrie des machines, de l'industrie graphique, de l'industrie horlogère, de l'industrie alimentaire et des produits de luxe ainsi que dans les entreprises de transports publics. Il apparaissait en effet que la situation dans le canton du Tessin était diamétralement opposée à celle prévalant au niveau suisse, laquelle voulait que, dans ces secteurs d'activité, les salaires usuels soient supérieurs auxdits salaires minimums. Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a observé que l'art. 360a al. 1 CO ne permet l'adoption d'un contrat-type de travail que s'il n'existe pas de salaires minimaux prévus par une convention collective de travail (consid. 6.2). Or, a-t-il ajouté, dans les secteurs d'activités précités, tous exceptés par la CCT LSE, celle-ci ne prévoit pas de salaires minimaux à respecter (consid. 6.2 et 6.3). De plus, l'instrument de l'extension ne permettait pas de suppléer à cette carence. Partant, dans l'affaire en question, l'adoption du contrat-type de travail querellé remplissait non seulement la condition de subsidiarité posée par l'art. 360a al. 1 CO, mais représentait même le correctif que les partenaires sociaux avaient expressément prévu à l'art. 3 al. 3 CCT LSE (consid. 6.4). Cet arrêt a donc tranché la question de savoir si, dans ces secteurs d'activité, la CCT LSE prévoit des salaires minimaux. 
C'est à tort que les recourants considèrent que la portée de cet arrêt est strictement limitée au droit public, car - même si la Cour de céans s'est prononcée sur un recours en matière de droit public interjeté contre le décret relatif à ce contrat-type - les considérations qui ont dicté son rejet intéressent aussi la présente affaire. Ils soutiennent également que ce ne serait pas la CCT qui imposerait des salaires minimaux, mais que celle-ci rendrait obligatoire les salaires usuels sans en fixer les montants. L'arrêt précité ne se prononcerait, à leurs yeux, que sur les salaires minimaux résultant de l'art. 20 CCT LSE, mais non sur les salaires usuels qui seraient "à déterminer", ce qui ferait toute la différence. Le Tribunal fédéral n'a toutefois pas procédé à une semblable dichotomie dans son arrêt. 
Quant à l'argument de la bonne foi brandi par les recourants, il est fondé exclusivement sur la référence à la brochure édictée à l'attention des membres de swissstaffing sur laquelle les recourants ne pouvaient se fonder, attendu que ce document ne dispose pas d'une valeur prescriptive. 
Leurs griefs sont dès lors tous voués au rejet. 
 
4.3. En définitive, les parties sont liées par les montants horaires dont elles sont convenues dans le contrat de mission et les prétentions salariales supplémentaires sont mal fondées.  
 
5.  
Les recourants ciblent également dans leurs conclusions les dépens de première et de seconde instance dont ils ont été reconnus débiteurs solidaires, mais sans l'étayer par une motivation pour le cas où leurs autres conclusions devaient être rejetées. Il n'y a dès lors pas lieu d'en traiter davantage. 
 
6.  
Partant, le recours doit être rejeté, aux frais de leurs auteurs, débiteurs solidaires. Il n'est pas dû de dépens en faveur de l'intimée, q ui n'a pas été invitée à se déterminer sur le recours. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.  
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 13 janvier 2025 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Hurni 
 
Le Greffier : Esteve