Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_382/2024
Arrêt du 14 janvier 2025
IIe Cour de droit public
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Kradolfer.
Greffière : Mme Jolidon.
Participants à la procédure
1. A.________,
2. B.________,
recourants,
contre
Direction de la sécurité du canton de Berne DSE,
Kramgasse 20, 3011 Berne.
Objet
Révocation des autorisations d'établissement et remplacement de celles-ci par des autorisations de séjour (rétrogradation),
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, du 11 juin 2024 (100.2023.298).
Faits :
A.
A.________, ressortissant marocain né en 1966, est entré en Suisse en janvier 1991. Son épouse, B.________, ressortissante marocaine née en 1976, y est arrivée en février 2003, dans le cadre du regroupement familial. Ils sont au bénéfice d'autorisations d'établissement. Le couple a eu quatre enfants, nés en 1997, 2004, 2006 et 2015. Les trois plus âgés sont titulaires de la nationalité suisse, alors que la cadette détient une autorisation d'établissement.
Par courriers des 18 décembre 2017 et 30 avril 2019, le Service social de la commune de domicile des époux a informé le Service des migrations du canton de Berne (ci-après: le Service des migrations) que A.________ et B.________ touchaient des prestations de l'aide sociale depuis 2005. Le Service des migrations a, dans une lettre du 8 mai 2018, mis en garde le couple face à leur dépendance à l'aide sociale, leur a conseillé de trouver un emploi et de ne plus générer de nouvelles dettes. Puis, il a formellement averti les intéressés, en date du 2 août 2019, que des mesures de droit des étrangers pourraient être prises à leur encontre faute d'amélioration de leur situation financière. En date du 5 février 2021, il a reçu un rapport du service social, faisant état d'une dette sociale d'un montant d'environ 789'000 fr. qui ne cessait d'augmenter.
B.
B.a. Par décision du 12/13 septembre 2022, le Service des migrations a révoqué les autorisations d'établissement de A.________ et B.________ et les a remplacées par des autorisations de séjour (rétrogradation). Il a conditionné la prolongation de ces autorisations de séjour à la production de contrats de travail, respectivement de preuves de recherches de travail, ainsi que d'une attestation du service social. La Direction de la sécurité du canton de Berne (ci-après: la Direction de la sécurité) a rejeté le recours des intéressés à l'encontre de la décision susmentionnée, en date du 11 octobre 2023.
B.b. Par jugement du 11 juin 2024, le Tribunal administratif du canton de Berne (ci-après: le Tribunal administratif) a rejeté le recours de A.________ et B.________. Il a en substance considéré que l'époux n'avait que peu travaillé durant la période durant laquelle le couple avait perçu l'aide sociale, à savoir du 1er janvier 2005 à avril 2023; les revenus réalisés sporadiquement par celui-ci pendant plus de 17 ans, jusqu'à la conclusion de son contrat de travail en tant que chauffeur de bus scolaire en mai 2022, n'avaient de loin pas permis d'éviter l'accumulation d'une dette de prestations d'aide sociale qui n'avait cessé de s'accroître, pour atteindre la somme de 866'674 fr. en novembre 2022. Ce n'était qu'avec l'accroissement progressif du revenu de A.________ que les intéressés avaient été en mesure de s'affranchir de l'aide sociale à partir de mai 2023. En outre, B.________ n'avait jamais travaillé, alors qu'on pouvait exiger d'elle qu'elle contribue à l'entretien du ménage depuis plusieurs années, au moins à temps partiel, compte tenu de l'âge des enfants du couple. De plus, A.________ accumulait quatorze actes de défaut de biens pour un montant total qui atteignait 57'802 fr. en novembre 2022. Ces éléments faisaient conclure à un défaut d'intégration permettant la rétrogradation de l'autorisation d'établissement des intéressés; celle-ci s'avérait en outre être proportionnée.
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et B.________ demandent au Tribunal fédéral, outre d'être mis au bénéfice de l'assistance judiciaire, de maintenir et d'accorder la prolongation de leur autorisation d'établissement, subsidiairement, de réformer le jugement attaqué en ce sens que les obligations faites à la recourante 2 de trouver un emploi sur le marché du travail à un taux de 60 % et de produire un contrat de travail, respectivement des preuves de recherches de travail soient supprimées, plus subsidiairement, de renvoyer la cause au Tribunal administratif pour une nouvelle décision dans le sens des considérants.
La Direction de la sécurité conclut au rejet du recours. Le Tribunal administratif se réfère à son jugement du 11 juin 2024. Le Secrétariat d'État aux migrations n'a pas déposé d'observations.
Par ordonnance du 15 août 2024, la Juge présidant de la IIe Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 89 consid. 1).
1.1. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit.
Il est ainsi recevable contre les décisions révoquant, comme en l'espèce, une autorisation d'établissement et la remplaçant par une autorisation de séjour ("décision de rétrogradation"), puisqu'il existe, en principe, un droit au maintien de l'autorisation d'établissement et qu'une rétrogradation porte atteinte à ce droit (cf. arrêts 2C_14/2024 du 4 septembre 2024 consid. 1). Le point de savoir si les conditions de la rétrogradation sont remplies relève du fond et non de la recevabilité. La voie du recours en matière de droit public est partant ouverte.
1.2. Au surplus, l'arrêt attaqué constitue une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF), par les destinataires de l'arrêt entrepris qui possèdent un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 89 al. 1 LTF), le recours est recevable.
2.
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (cf. art. 95 let. a et b, ainsi que 106 al. 1 LTF). Il n'examine cependant la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante (cf. art. 106 al. 2 LTF). Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), à moins que ces faits n'aient été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 2 LTF), ce que la partie recourante doit exposer, de manière circonstanciée (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2).
2.2. Dans leur recours, les intéressés étayent leur argumentation par des faits qui ne sont pas constatés dans l'arrêt attaqué. Il en va notamment ainsi de l'indépendance financière de leur fils aîné. Le recours ne contient toutefois pas de grief en lien avec l'établissement des faits: il n'est ainsi ni démontré ni même prétendu que les faits tels qu'établis par la cour cantonale l'auraient été de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF) ou arbitraire (art. 9 Cst.). Partant, le Tribunal fédéral statuera sur la base des faits constatés dans l'arrêt attaqué.
3.
Le litige porte sur la révocation des autorisations d'établissement des recourants et leur remplacement par des autorisations de séjour (rétrogradation), dont la prolongation a été subordonnée au respect d'exigences en matière d'intégration.
4.
Les dispositions et la jurisprudence topiques sont les suivantes.
4.1. Conformément à l'art. 63 al. 2 LEI (RS 142.20 [avant le 1er janvier 2019, LEtr; RO 2007 5437]), entré en vigueur le 1er janvier 2019, l'autorisation d'établissement peut être révoquée et remplacée par une autorisation de séjour, lorsque l'étranger ne remplit pas (ou plus) les critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI. Parmi ceux-ci figurent la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (58a al. 1 let. d LEI). A teneur de l'art. 77e de l'ordonnance fédérale du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA; RS 142.201), une personne participe à la vie économique lorsque son revenu, sa fortune ou des prestations de tiers auxquelles elle a droit lui permettent de couvrir le coût de la vie et de s'acquitter de son obligation d'entretien (al. 1); elle acquiert une formation lorsqu'elle suit une formation ou une formation continue (al. 2).
Selon la jurisprudence, une intégration réussie n'implique pas nécessairement la réalisation d'une trajectoire professionnelle particulièrement brillante au travers d'une activité exercée sans discontinuité. L'essentiel en la matière est que l'étranger subvienne à ses besoins, n'émarge pas à l'aide sociale et ne s'endette pas de manière disproportionnée (arrêts 2C_184/2024 du 29 août 2024 consid. 5.2; 2C_353/2023 du 22 novembre 2023 consid. 4.3.1; 2C_797/2022 du 22 mars 2023 consid. 3.3.3; 2C_145/2022 du 6 avril 2022 consid. 6.3). L'impact de l'endettement dans l'appréciation de l'intégration d'une personne dépend du montant des dettes, de leurs causes et du point de savoir si la personne les a remboursées ou s'y emploie de manière constante et efficace. L'évolution de la situation financière doit donc être prise en considération à cet égard (cf. arrêts 2C_723/2022 du 30 novembre 2022 consid. 4.1; 2C_847/2021 du 5 avril 2022 consid. 3.2.2 et les arrêts cités).
4.2. Selon la lettre de l'art. 63 al. 2 LEI, la rétrogradation peut déjà être prononcée lorsqu'il existe un déficit d'intégration. Il n'est pas nécessaire qu'un motif de révocation de l'autorisation d'établissement soit réalisé. La rétrogradation peut également concerner les autorisations d'établissement délivrées avant le 1er janvier 2019, à savoir sous l'empire de la LEtr (cf. ATF 148 II 1 consid. 2.3.1). Compte tenu de l'interdiction de la rétroactivité, la rétrogradation de ces autorisations doit toutefois se fonder essentiellement sur des faits ayant débuté après le 1er janvier 2019 ou qui se poursuivent après cette date; dans le cas contraire, il y aurait une rétroactivité (proprement dite) inadmissible (cf. ATF 148 II 1 consid. 5.3; cf. aussi arrêt 2C_723/2022 susmentionné consid. 4.3 et les arrêts cités). Il en découle que la rétrogradation selon l'art. 63 al. 2 LEI doit être liée à un défaut d'intégration qui est actuel (c'est-à-dire postérieur au 1er janvier 2019) et d'une certaine importance ("ein aktuelles Integrationsdefizit von einem gewissen Gewicht"); ce n'est qu'à cette condition qu'il existe un intérêt public suffisamment important à la rétrogradation des autorisations d'établissement délivrées sous l'ancien droit (ATF 148 II 1 consid. 5.3). Les éléments de fait survenus avant le 1er janvier 2019 peuvent néanmoins être pris en compte, afin d'apprécier la nouvelle situation à la lumière de l'ancienne et, en ce sens, de clarifier globalement l'origine et la persistance du déficit d'intégration (ATF 148 II 1 consid. 5.3; arrêt 2C_14/2024 du 4 septembre 2024 consid. 4.2 et les arrêts cités).
4.3. Comme tout acte étatique, la rétrogradation doit en outre respecter le principe de la proportionnalité (cf. ATF 148 II 1 consid. 2.6; arrêt 2C_1053/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.2). Par conséquent, selon les circonstances, un simple avertissement, menaçant de rétrogradation, peut d'abord être envisagé comme moyen moins incisif (cf. ATF 148 II 1 consid. 2.6; arrêt 2C_1053/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.2).
4.4. L'évaluation de l'intégration d'un étranger doit s'examiner à l'aune d'une appréciation globale des circonstances. Dans l'examen de ces circonstances, les autorités compétentes disposent d'un large pouvoir d'appréciation, que le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec retenue (arrêts 2D_25/2023 du 12 janvier 2024 consid. 5.5; 2C_797/2022 du 22 mars 2023 consid. 3.3.5; 2C_162/2022 du 11 mai 2022 consid. 5.1.1).
4.5. Selon les recourants, la rétrogradation de leur autorisation d'établissement en autorisation de séjour violerait les art. 63 al. 2 et 58a al. 1 let. d LEI, le principe de proportionnalité (art. 96 LEI) et celui de la non-rétroactivité (art. 5 Cst.).
4.5.1. D'après les faits constatés dans l'arrêt attaqué, qui lient le Tribunal fédéral (cf. supra consid. 2), l'aide sociale perçue par les recourants et leurs quatre enfants depuis 2005 atteignait la somme de 866'674 fr. en novembre 2022. En outre, à cette même date, le recourant 1 faisait l'objet de quatorze actes de défaut de biens pour un montant total de 57'802 fr. En ce qui concerne la situation professionnelle des intéressés, le recourant 1 a travaillé en tant que concierge et fait le commerce de voitures d'occasion jusqu'en février 2016; de plus, il a réalisé, auprès de différents employeurs, des salaires nets de 17'169 fr. (2008), 4'500 fr. (2012), 5'469 fr. (2014) 2'372 fr. (2015) et 9'585 fr. (2017); il a participé à un programme d'occupation en juin et juillet 2017, avant de refuser de s'engager dans d'autres programmes; un rapport du service social de 2017 fait état d'absence de recherches de travail de la part du recourant 1 et de doutes quant à des activités lucratives non déclarées. Le Service des migrations a mis en garde les intéressés face à leur dépendance à l'aide sociale, par courrier du 8 mai 2018. Par décision du 2 août 2019, il les a formellement averti que des mesures de droit des étrangers, pouvant aller jusqu'à la révocation de leurs autorisations d'établissement et au renvoi de Suisse, pourraient être prises faute d'amélioration de leur situation financière. Le recourant 1 a effectué 21 postulations entre août et novembre 2020 et treize en septembre et octobre 2022; la recourante 2, pour sa part, a fait valoir 93 recherches de travail entre août 2019 et décembre 2020, qui sont certes recensées sur les formules officielles de l'assurance-chômage, mais dont aucune n'est contresignée par les employeurs potentiels indiqués. Le 28 mai 2022, le recourant 1 a conclu un contrat de travail sur appel rémunéré à l'heure, de durée indéterminée, en tant que chauffeur de bus scolaire; il a ainsi gagné environ 32'280 fr. de juillet 2022 à novembre 2023. La recourante n'a jamais occupé d'emploi.
4.5.2. Il sied de d'abord souligner que, contrairement à ce qu'allèguent les recourants, il suffit qu'un seul des critères d'intégration mentionnés à l'art. 58a al. 1 LEI, parmi lesquels figure la participation à la vie économique, soit réalisé pour prononcer la rétrogradation d'une autorisation d'établissement en autorisation de séjour, comme vient de le juger le Tribunal fédéral (cf. arrêt 2C_14/2024 susmentionné consid. 7).
4.5.3. En ce qui concerne la participation à la vie économique des recourants, il apparaît que l'aide sociale perçue par ceux-ci et leurs quatre enfants, initiée en 2005, a continué de croître après le 1er janvier 2019 pour atteindre 866'674 fr. en novembre 2022. De cette somme, environ 174'600 fr. ont été touchés entre 2019 et novembre 2022. En outre, le recourant 1 faisait l'objet de quatorze actes de défaut de bien pour un montant total de 57'802 fr. en novembre 2022, somme qui n'avait pas baissé depuis 2018. Contrairement à ce que soutiennent les intéressés, la prise en compte de ces dettes dans le cadre de la présente cause ne viole pas le "principe de non-rétroactivité". En effet, quand bien même une grande partie d'entre elles sont nées avant le 1er janvier 2019, il est possible de les prendre en considération dans l'examen du défaut d'intégration, dès lors que ces dettes existaient toujours au moment où le Tribunal administratif a rendu son arrêt et qu'il s'agit ainsi d'une situation qui perdurera (arrêt 2C_723/2022 susmentionné c. 4.4 et l'arrêt cité). En lien avec les revenus du couple, on constate que le recourant 1 a gagné environ 32'280 fr. de juillet 2022 à novembre 2023, grâce à son activité de chauffeur de bus scolaire, conclu le 28 mai 2022. Ces salaires ont permis aux recourants de ne plus faire appel à l'aide sociale depuis le 1er mai 2023. Le revenu net mensuel le plus élevé ne s'est toutefois monté qu'à environ 4'000 fr. perçus en octobre et novembre 2023. Il est douteux qu'un telle somme suffise à faire vivre une famille de six personnes. Tout doute quant à la couverture des besoins de celle-ci n'est donc en aucun cas levé. De plus, la recourante 2 n'a jamais occupé d'emploi. Le recourant 1 souligne qu'il a trouvé un emploi moins de trois ans après l'avertissement reçu en août 2019, malgré la pandémie du Covid. Il oublie, néanmoins, qu'il n'a commencé à sérieusement chercher un travail et exercé une activité lucrative qu'après avoir reçu un avertissement en août 2019. En outre, ses premières postulations datent seulement du mois d'août 2020. On relève encore qu'avant ledit avertissement, les recourants avaient perçu l'aide sociale sans interruption pendant 18 ans. Enfin, il ne ressort pas des constatations de l'arrêt attaqué que le recourant s'emploie à rembourser ses dettes. Ainsi, au regard de la durée de la dépendance à l'aide sociale, du montant des prestations de cette aide, des actes de défaut de biens et des efforts infructueux déployés jusqu'à présent pour subvenir autant que possible aux besoins de la famille, il existe un sérieux défaut d'intégration, défaut qui existe depuis longtemps et qui a perduré sous le nouveau droit.
4.5.4. La rétrogradation de l'autorisation d'établissement des recourants est, en outre, conforme au principe de proportionnalité. Le recourant 1, âgé de 58 ans, séjourne en Suisse depuis plus de trente ans. Cette durée doit cependant être contrebalancée avec sa dépendance à l'aide sociale, qui a duré de 2005 à 2023, étant mentionné qu'il parle le français et qu'il ne ressort pas de l'arrêt attaqué qu'il aurait des problèmes de santé l'empêchant de travailler. Il a donc vécu plus de la moitié de cette période à la charge de l'aide sociale sans avoir véritablement effectué des recherches d'emploi avant l'avertissement reçu. Quant à la recourante 2, comme susmentionné, elle n'a jamais occupé d'emploi rémunéré et ne semble pas décidée à le faire. Si cette situation pouvait s'expliquer, lorsque les quatre enfants du couple étaient en bas âge, cela fait plusieurs années qu'elle aurait pu contribuer à l'entretien du ménage, les enfants étant nés en 1997, 2004, 2006 et 2015. Au sujet des activités lucratives, on ne voit pas en quoi une rétrogradation en autorisation de séjour mettrait en danger l'emploi occupé par le recourant 1 ni ne péjorerait les chances d'en trouver un de la recourante 2, comme ceux-ci le prétendent. Un avertissement a d'ailleurs déjà été donné aux intéressés (cf. supra consid. 4.3) et il ne les a fait réagir que très tardivement. L'intérêt privé des recourants à conserver leur autorisation d'établissement ne saurait l'emporter sur l'intérêt public à ce qu'ils remédient à leur déficit d'intégration, ce d'autant plus que, malgré la rétrogradation, ceux-ci peuvent rester en Suisse et continuer à y vivre leur vie familiale. Partant, le Tribunal administratif n'a pas violé le droit en considérant que la rétrogradation de l'autorisation d'établissement des intéressés était proportionnée.
5.
5.1. Les recourants se plaignent encore d'une violation des art. 13, 27 et 36 Cst. , ainsi que 8 CEDH, dans la mesure où les conditions fixées par le Service des migrations dans sa décision du 12/13 septembre 2022 consistent, pour la recourante 2, à tout mettre en oeuvre pour trouver un emploi sur le premier marché du travail à un taux d'au moins 60 %. Avec cette obligation, les recourants se verraient imposer un modèle familial où les deux époux devraient travailler, ne leur permettant pas d'opter pour un modèle plus traditionnel où seul un des époux exerce une activité lucrative, pendant que l'autre se charge de la famille et du ménage.
5.2. Il va sans dire que ni la liberté économique ni la vie familiale ne sont touchées par une obligation de trouver un emploi, afin de pouvoir vivre sans dépendre de l'aide sociale et de rembourser les dettes accumulées. Il est pour le moins imaginatif et audacieux d'invoquer la liberté économique pour ne pas devoir travailler, ce d'autant plus lorsque l'on est débiteur de sommes aussi importantes que les recourants vis-à-vis de la collectivité publique. De même, il est à la limite de la témérité d'alléguer la protection de la vie familiale en lien avec l'obligation de travailler. Le grief est rejeté.
6.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.
Le recours était d'emblée dénué de chances de succès, de sorte que la demande d'assistance judiciaire est rejetée (cf. art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants, qui succombent, solidairement entre eux ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ) et en tenant compte de leur situation financière (art. 65 al. 2 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge des recourants solidairement entre eux.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux recourants, à la Direction de la sécurité et au Tribunal administratif du canton de Berne, Cour des affaires de langue française, ainsi qu'au Secrétariat d'État aux migrations.
Lausanne, le 14 janvier 2025
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
La Greffière : E. Jolidon