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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_622/2024  
 
 
Arrêt du 14 avril 2025  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juge fédéraux Bovey, Président, 
De Rossa et Josi. 
Greffière : Mme Feinberg. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Marc Reymond, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Mes Ekaterine Blinova et Raphaël Huggel, 
intimée. 
 
Objet 
succession (sûretés en garantie de dépens), 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud, du 19 juin 2024 (PT23.003791-240710 157). 
 
 
Faits :  
 
A.  
B.________, domiciliée en Russie, est la mère de C.________, lequel est décédé le 15 avril 2021 et était lié à A.________ par un partenariat enregistré. 
 
B.  
 
B.a. Par demande du 20 janvier 2023, A.________ a ouvert action contre B.________ auprès de la Chambre patrimoniale du canton de Vaud (ci-après: la Chambre patrimoniale). Il a conclu notamment à ce que la nullité du testament du 2 février 2021 de feu A.________ [recte: C.________] soit prononcée, à ce qu'il soit constaté qu'il est héritier légal du défunt et qu'il a droit aux trois quarts de sa succession, à ce que B.________ soit condamnée à rapporter à ladite succession toute libéralité rapportable et à ce que la réduction de toute libéralité réductible faite à celle-ci soit prononcée.  
Dans sa réponse du 18 octobre 2023, B.________ a notamment conclu, à titre reconventionnel, à ce qu'il soit dit que le testament litigieux est valable de plein droit, à ce qu'il soit constaté qu'elle est l'unique héritière instituée du défunt et à ce qu'il soit en conséquence dit qu'elle n'est tenue à aucun rapport et qu'aucune réduction de libération (sic) ne saurait lui être imposée. 
 
B.b. Par acte du 21 novembre 2023, A.________ a conclu à ce que B.________ soit condamnée à fournir, dans un délai non prolongeable de dix jours, des sûretés en garantie des dépens de la procédure relative à la succession litigieuse à concurrence d'un montant de 126'000 fr. et à ce qu'à défaut, la demande reconventionnelle du 18 octobre 2023 soit déclarée irrecevable.  
Par prononcé du 9 février 2024, le Juge délégué de la Chambre patrimoniale a rejeté la requête de sûretés en garantie des dépens. 
Par arrêt du 19 juin 2024, la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté par A.________ contre le prononcé précité. 
 
C.  
Par acte du 17 septembre 2024, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Il conclut principalement à la réforme de l'arrêt du 19 juin 2024 dans le sens de ses conclusions prises en première instance et réitérées en appel. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt querellé et au renvoi de la cause à la juridiction précédente pour nouvelle décision. 
Des déterminations n'ont pas été requises. 
 
D.  
Par ordonnance présidentielle du 19 septembre 2024, la requête d'effet suspensif assortissant le recours a été rejetée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'autorité précédente, autorité cantonale supérieure ayant statué sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF), a rejeté une demande de sûretés en garantie des dépens ( cautio judicatum solvi), rendant ainsi une décision incidente (arrêt 4A_497/2020 du 19 octobre 2021 consid. 1.1.1, non publié in ATF 147 III 529) dont les conditions de recours sont déterminées par la nature du litige principal (arrêt 5A_1013/2020 du 28 avril 2021 consid. 1.1) : le différend est ici de nature civile (art. 72 al. 1 LTF); d'ordre pécuniaire, il excède le seuil de 30'000 fr. prescrit par la loi (art. 51 al. 1 let. c LTF en lien avec l'art. 74 al. 1 let. b LTF). Le recourant - qui a succombé devant l'autorité précédente - a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF) et a agi en temps utile (art. 46 al. 1 let. b et 100 al. 1 LTF).  
 
1.2. Pour pouvoir faire l'objet d'un recours, la décision incidente attaquée doit être de nature à causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, les hypothèses prévues aux art. 92 et 93 al. 1 let. b LTF n'entrant ici pas en ligne de compte.  
Une décision peut causer un préjudice irréparable lorsque la partie recourante s'expose à un dommage de nature juridique qu'une décision ultérieure qui lui serait favorable ne fera pas disparaître complètement; un inconvénient seulement matériel, résultant par exemple d'un accroissement de la durée et des frais de la procédure, est insuffisant. La partie recourante doit démontrer en quoi elle se trouve menacée d'un préjudice juridique irréparable (sauf s'il est manifeste); à ce défaut, son recours est irrecevable (ATF 150 III 248 consid. 1.2; 149 II 476 consid. 1.2.1; 144 III 475 consid. 1.2). 
Selon la jurisprudence, le refus (total ou partiel) d'ordonner des sûretés en garantie des dépens au sens des art. 99 à 101 CPC, lequel prive la partie attraite en justice d'une protection légalement prévue, est susceptible de constituer un préjudice d'ordre juridique irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 150 III 248 consid. 1.4; arrêt 4A_497/2020 du 19 octobre 2021 consid. 1.1.1, non publié in ATF 147 III 529, et les références). Il s'ensuit que, devant le Tribunal fédéral, la décision attaquée peut faire l'objet d'un recours séparé conformément à la disposition légale précitée. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée par le recourant ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 150 II 346 consid. 1.5.3; 149 III 81 consid. 1.3; 146 IV 114 consid. 2.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF); le recourant ne peut critiquer les constatations de fait que si elles ont été établies de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui entend se plaindre d'un établissement manifestement inexact - c'est-à-dire arbitraire (art. 9 Cst.; ATF 150 II 537 consid. 3.1; 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 I 73 consid. 2.2) - des faits doit se conformer au principe d'allégation (cf. supra consid. 2.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 150 I 50 consid. 3.3.1; 150 IV 360 consid. 3.2.1; 147 IV 73 consid. 4.1.2 et les références).  
 
3.  
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir arbitrairement établi les faits ainsi que d'avoir violé les art. 99 al. 1 let. d et 151 CPC en refusant de tenir compte de faits notoires qui démontreraient l'existence d'un risque considérable que l'intimée ne lui verse pas les dépens auxquels elle pourrait être condamnée dans la procédure au fond. 
 
3.1. La cour cantonale a retenu que le recourant invoquait pour la première fois au stade du recours l'application de l'art. 99 al. 1 let. d CPC. En première instance, il avait en effet fondé sa requête en fourniture de sûretés uniquement sur l'art. 99 al. 1 let. a et c CPC, à savoir sur le fait que l'intimée n'avait pas de domicile en Suisse, respectivement qu'elle était débitrice envers lui de frais d'une procédure antérieure. Or, les allégations selon lesquelles il serait dans l'impossibilité de recouvrer d'éventuels dépens qui lui seraient alloués en raison de la guerre en Ukraine étaient nouvelles, partant irrecevables en vertu de l'art. 326 al. 1 CPC. Pour le surplus, le simple fait pour le recourant d'alléguer que l'intimée avait payé les dépens qui lui étaient dus en vertu d'une précédente procédure après le dépôt de sa présente requête ne pouvait, à lui seul, constituer une " menace importante " qui justifierait l'application de l'art. 99 al. 1 let. d CPC.  
 
3.2. Les faits notoires (art. 151 CPC), qu'il n'est pas nécessaire d'alléguer ni de prouver, sont ceux dont l'existence est certaine au point d'emporter la conviction du juge. Pour être notoire, un renseignement ne doit pas être constamment présent à l'esprit; il suffit qu'il puisse être contrôlé par des publications accessibles à chacun (ATF 143 IV 380 consid. 1.1.1; 135 III 88 consid. 4.1; arrêt 4A_344/2022 du 15 mai 2023 consid. 5.1). Un fait notoire doit être admis seulement de manière restrictive (ATF 150 III 209 consid. 2.3; arrêt 4A_90/2024 du 30 octobre 2024 consid. 4.1). En ce qui concerne Internet, seules les informations bénéficiant d'une empreinte officielle (p. ex. Office fédéral de la statistique, inscriptions au registre du commerce, etc.) peuvent en principe être considérées comme notoires, car facilement accessibles et provenant de sour ces non controversées (ATF 149 I 91 consid. 3.4; 143 IV 380 consid. 1.2; arrêt 4A_90/2024 précité loc. cit.).  
 
3.3. En l'occurrence, il est vrai que la guerre entre la Russie et l'Ukraine peut être qualifiée de fait notoire (cf. sur les évènements historiques en tant que faits notoires: BRÖNNIMANN, in Berner Kommentar ZPO, vol. II, 2012, n° 3 ad art. 151 CPC; CHABLOZ/COPT, in Petit commentaire, Code de procédure civile, 2020, n° 3 ad art. 151 CPC; GUYAN, in Basler Kommentar ZPO, 4e éd. 2024, n° 2 ad art. 151 CPC; HASENBÖHLER/YAÑEZ, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, Art. 1-218, 4 e éd. 2025, n° 3 ad art. 151 CPC). Il en va de même des restrictions, notamment commerciales et financières, que la Suisse a prises dans ce contexte à l'encontre de la Russie (cf. Ordonnance du 4 mars 2022 instituant des mesures en lien avec la situation en Ukraine; RS 946.231.176.72) ainsi que du taux officiel de conversion du rouble (ATF 150 III 209 consid. 2.2; 143 IV 380 consid. 1.1.2). Tel ne saurait en revanche être le cas des informations générales que le recourant tire du site du gouvernement russe, notamment concernant le paiement des créances en rouble, dès lors qu'il s'agit de renseignements donnés par un état étranger (cf. pour les informations tirées de sites officiels étrangers: ATF 150 III 209 consid. 2.5; arrêt 5A_1048/2019 du 30 juin 2021 consid. 3.6.3 et la référence). Les déductions toutes générales (cf. CHABLOZ/COPT, op. cit., n° 7 ad art. 151 CPC) que le recourant entend tirer de la situation actuelle - à savoir que celle-ci a " un impact non négligeable " sur l'applicabilité et l'efficacité de la Convention de La Haye du 1er mars 1954 relative à la procédure civile (RS 0.274.12) et que la voie diplomatique est inefficace - ne revêtent pas non plus un caractère notoire. Enfin, le communiqué dont il se prévaut, publié le 7 décembre 2023 sur le site internet des Nations Unies et portant sur la décision de la Cour suprême russe du 30 novembre 2023 qui déclare " extrémiste " le " mouvement international LGBT et ses filiales ", ne contient aucune information sur les conséquences concrètes (cf. arrêt 5A_160/2023 du 5 juillet 2023 consid. 3.3) que dite décision pourrait avoir sur l'éventuelle créance en remboursement de dépens du recourant. Infondés, les griefs de celui-ci doivent donc être rejetés.  
Pour le surplus, le recourant ne critique pas (art. 42 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1) l'argumentation de la juridiction précédente selon laquelle le simple fait que l'intimée aurait payé les dépens dus dans une procédure antérieure après le dépôt de la requête en fourniture de sûretés ne pouvait constituer, à lui seul, une menace importante au sens de l'art. 99 al. 1 let. d CPC. Il n'y a donc pas lieu d'examiner ce point. 
 
4.  
En conclusion, le recours est rejeté. Les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens, l'intimée n'ayant été invitée à se déterminer ni sur la requête d'effet suspensif ni sur le fond (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 14 avril 2025 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Bovey 
 
La Greffière : Feinberg