Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
9C_343/2024
Arrêt du 17 janvier 2025
IIIe Cour de droit public
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Moser-Szeless, Présidente, Stadelmann et Beusch.
Greffière : Mme Perrenoud.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Jean-Michel Duc, avocat,
recourante,
contre
Vaudoise Vie Compagnie d'Assurances SA,
avenue de Cour 41, 1006 Lausanne,
représentée par Me Anne Troillet et Me Kilian Baumgartner, avocats,
intimée.
Objet
Prévoyance professionnelle,
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 2 mai 2024 (PP 23/23 - 21/2024).
Faits :
A.
A.a. A.________, née en 1977, a travaillé en qualité de greffière à plein temps au Tribunal de B.________, à partir du 1er août 2014. À ce titre, elle a été affiliée auprès de la Caisse C.________. La prénommée est au bénéfice d'une police de prévoyance liée D.________ (pilier 3a) n° xxx auprès de Vaudoise Vie Compagnie d'Assurances SA (ci-après: Vaudoise Vie ou l'assureur), qui a pris effet le 1er septembre 2013 et arrivera à échéance le 30 décembre 2041. Cette police d'assurance prévoit notamment le versement d'une rente annuelle jusqu'au 30 décembre 2041 de 12'000 fr. en cas d'incapacité de gain après un délai d'attente de 24 mois, ainsi que la libération du paiement de la prime correspondant à l'objectif annuel de 3'600 fr. en cas d'incapacité de travail après un délai d'attente de trois mois.
A.b. Par décision du 5 octobre 2021, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) a reconnu le droit de A.________ à une rente entière d'invalidité, assortie de deux rentes pour enfant, avec effet au 1er mars 2018 (compte tenu de la date du dépôt de la demande de prestations, en septembre 2017). Entre-temps, par courrier du 5 août 2020 faisant suite à un entretien téléphonique qu'elle avait eu avec l'assurée, Vaudoise Vie lui a transmis copie des conditions générales d'assurance (CGA) applicables à la police n° xxx, en l'informant notamment que le ch. 1.12 de celles-ci prévoit qu'en cas d'annonce tardive de l'incapacité, le droit aux prestations ne s'ouvre que dès l'annonce. Le 30 septembre 2021, l'assureur a ensuite transmis à A.________ les formulaires de déclaration et de certificat médical en cas d'incapacité de travail ou de gain, en se référant à un entretien téléphonique du même jour relatif à une récente incapacité de gain de l'assurée. La prénommée a rempli le formulaire de déclaration d'incapacité de travail ou de gain et l'a adressé à Vaudoise Vie le 24 octobre 2021. Le 24 janvier 2022, l'assureur a informé l'assurée que les prestations étaient dues dès le 24 octobre 2019, soit au plus tôt deux ans avant la signature de la déclaration d'incapacité de travail ou de gain le 24 octobre 2021, et que son préjudice économique était évalué à 36'364 fr. 50 pour l'année 2019, respectivement à 42'514 fr. 50 pour l'année 2020. Il indemnisait la libération du paiement de la prime annuelle à hauteur de 3'600 fr. et allouait une rente d'invalidité annuelle de 12'000 fr. selon les conditions contractuelles de la police d'assurance. D'après des décomptes de prestations datés des 27 janvier, 4 avril et 24 juin 2022, l'assurée a perçu de Vaudoise Vie le montant de 14'233 fr. 30 à titre de rentes pour la période du 24 octobre 2019 au 31 décembre 2020 et elle a été libérée du paiement des primes pour la période du 24 octobre 2019 au 30 juin 2022.
Par la suite, le 24 février 2023, Vaudoise Vie a indiqué à A.________ qu'elle évaluait à zéro son préjudice économique pour les années 2019 et 2020 compte tenu notamment des prestations que la Caisse C.________ lui avait versées. Elle a prié son assurée de lui rembourser dans les trente jours le montant de 14'233 fr. 30 correspondant à l'intégralité de la rente servie entre le 24 octobre 2019 et le 31 décembre 2020, en précisant qu'elle continuait de servir la libération du paiement des primes à titre de geste commercial. Vaudoise Vie a réitéré sa demande de paiement de la somme de 14'233 fr. 30 les 21 avril et 2 juin 2023. Le 16 juin 2023, elle a sommé l'assurée de rembourser ce montant dans un délai fixé au 30 juin 2023.
B.
Le 28 juin 2023, A.________ a ouvert action contre Vaudoise Vie devant la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Elle a conclu à ce que l'assureur soit condamné à lui verser la somme de 44'766 fr. 70 portant intérêt à 5 % depuis la date de son exigibilité. L'assurée alléguait en substance qu'il n'y avait pas de surindemnisation et que Vaudoise Vie devait lui verser un montant total de 59'000 fr. à titre de rentes pour la période du 15 août 2018 au 30 juin 2023, sous déduction du montant de 14'233 fr. 30 qu'elle avait perçu pour la période du 24 octobre 2019 au 31 décembre 2020. Le 13 octobre 2023, Vaudoise Vie a déposé sa réponse, ainsi qu'une demande reconventionnelle, en concluant au rejet de la demande et à ce que A.________ soit condamnée à lui verser le montant de 14'233 fr. 30, avec intérêts à 5 % l'an dès le 1er juillet 2023.
Statuant le 2 mai 2024, la juridiction cantonale a rejeté l'action et admis la demande reconventionnelle, en ce sens que A.________ doit restitution à Vaudoise Vie de la somme de 14'233 fr. 30, plus intérêt à 5 % l'an à partir 1er juillet 2023.
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement. Elle en requiert principalement la réforme, en reprenant les mêmes conclusions que devant la juridiction cantonale. Subsidiairement, l'assurée conclut à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour qu'elle procède conformément aux considérants et rende une nouvelle décision.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le litige porte sur des prestations fondées sur un contrat de prévoyance professionnelle liée du pilier 3a selon l'art. 82 al. 2 LPP. De telles contestations ressortissent aux tribunaux de la prévoyance professionnelle (art. 73 al. 1 let. b LPP). En dernière instance, la III e Cour de droit public du Tribunal fédéral est compétente (art. 31 let. f du Règlement du Tribunal fédéral du 20 novembre 2006 [RS 173.110.131] en relation avec les art. 49 et 73 LPP ).
1.2. Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF . Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut pas être pris en considération.
2.
Est litigieuse la question de savoir si la recourante peut prétendre des prestations pour incapacité de gain pour la période du 15 août 2018 au 30 juin 2023 en vertu du contrat d'assurance de prévoyance liée qu'elle a conclu avec l'assureur intimé.
3.
3.1. À l'appui de son recours, l'assurée se prévaut d'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves, ainsi que d'une violation du droit fédéral ( art. 33 et 38 LCA [RS 221.229.1] et la jurisprudence idoine). Elle reproche à l'instance précédente d'avoir rejeté l'action qu'elle a ouverte le 28 juin 2023.
3.2. Le grief de la recourante tiré d'une constatation manifestement inexacte des faits est mal fondé. En ce qu'elle se limite à affirmer que la juridiction cantonale a fait preuve d'arbitraire en considérant que l'annonce de l'incapacité de travail n'avait pas été "dûment" communiquée par écrit le 5 août 2020 et en admettant qu'elle percevait un "salaire irrégulier ou d'indépendante", la recourante présente en effet une argumentation strictement appellatoire, que le Tribunal fédéral n'a pas à examiner (cf. ATF 140 III 264 consid. 2.3).
3.3. L'argumentation de la recourante à l'appui d'une violation de l'art. 38 LCA n'est pas davantage fondée. Elle reproche à cet égard aux juges précédents d'avoir nié que "l'annonce du 5 août 2020" eût été valablement effectuée par écrit. Or selon les constatations cantonales, non contestées par l'assurée, elle avait adressé une déclaration écrite datée du 24 octobre 2021 au sujet de son incapacité de travail ayant débuté en février 2016, que Vaudoise Vie avait reçue le 28 octobre 2021. Elle avait ensuite indiqué le 17 janvier 2023 avoir annoncé le sinistre par téléphone le 5 août 2020.
Par son argumentation, la recourante n'établit pas, pas plus qu'elle ne l'allègue, qu'elle aurait annoncé son incapacité de travail ou de gain à l'assureur intimé par écrit avant le 24 octobre 2021. L'assurée ne conteste en particulier pas que la correspondance du 5 août 2020 lui a été adressée par l'assureur intimé qui l'a alors notamment informée que le droit aux prestations ne s'ouvrait que dès l'annonce de l'incapacité en cas d'annonce tardive. Quoi qu'elle en dise, ce courrier ne saurait toutefois être considéré comme une "confirmation par écrit de l'annonce" le 5 août 2020 d'une incapacité de gain, puisqu'il n'y est nullement question d'une annonce concrète qu'aurait faite la recourante quant à la survenance d'une incapacité de travail ou de gain, mais comprend précisément une information sur la nécessité d'une annonce au sens du ch. 1.13 des CGA applicables à la police d'assurance n° xxx. Par ailleurs, la recourante ne conteste pas non plus que l'exigence d'une communication par écrit émanant de la personne assurée est clairement prévue par le ch. 1.13 des CGA, en relation avec l'art. 38 al. 1 LCA, selon lequel le contrat d'assurance peut prévoir que l'avis du sinistre et du droit qui en découle pour la personne assurée doit être donné par écrit, comme l'ont dûment rappelé les premiers juges. Il n'y a dès lors pas lieu de s'écarter des constatations cantonales selon lesquelles la recourante a annoncé par écrit son incapacité de travail à Vaudoise Vie le 24 octobre 2021, avec pour conséquence que le droit aux prestations d'assurance ne pouvait pas naître avant cette date. Selon le ch. 1.12 des CGA applicables à la police d'assurance n° xxx, auquel l'assurée se réfère du reste, en cas d'annonce tardive, si la notification est faite après l'échéance du délai d'attente contractuel, le droit aux prestations naît en effet à partir de la date d'annonce.
En ce qui concerne ensuite l'argumentation de la recourante relative à l'absence d'incidence de l'annonce tardive sur "l'étendue des prestations, dans la mesure où [Vaudoise Vie] n'aurait pu prendre aucune mesure susceptible de réduire le dommage", il suffit de relever qu'elle n'explique pas en quoi le fait que l'office AI aurait "attesté médicalement" une capacité de travail (recte: incapacité de travail) dès le 15 août 2016 aurait rendu inutile les démarches de l'intimée pour vérifier la survenance de l'événement assuré. La décision de l'office AI du 5 octobre 2021, par laquelle a été fixé le droit aux prestations de l'assurance-invalidité de la recourante, a été rendue bien après le mois d'août 2020, où l'intimée aurait été en droit de procéder à ses propres investigations, si elle avait été dûment informée par la recourante. Le grief tiré de la violation de l'art. 38 LCA est mal fondé.
3.4. C'est également en vain que la recourante se prévaut d'une violation de l'art. 33 LCA, selon lequel sauf disposition contraire de la présente loi, l'entreprise d'assurance répond de tous les événements qui présentent le caractère du risque contre les conséquences duquel l'assurance a été conclue, à moins que le contrat n'exclue certains événements d'une manière précise, non équivoque. Contrairement à ce qu'allègue l'assurée, il n'y a pas lieu de se fonder sur le salaire qu'elle percevait auprès du Tribunal de B.________ pour déterminer le gain présumé perdu. En l'occurrence, l'incapacité de gain doit en effet être déterminée en comparant le revenu fiscal du travail acquis durant les deux années civiles entières précédant l'incapacité de gain, provenant d'une ou de plusieurs activité (s) lucrative (s) exercée (s) avant l'atteinte à la santé, au revenu provenant d'une activité lucrative que la personne assurée exerce ou serait en mesure d'exercer dans un marché du travail équilibré après atteinte à la santé, comme l'ont dûment exposé les juges précédents en se référant au ch. 2.2 par. 2 des CGA applicables à la police d'assurance n° xxx. Ils ont précisé à cet égard que le revenu avant l'atteinte à la santé au sens de l'art. 2.2 par. 2 des CGA ne coïncide pas avec le revenu sans invalidité que l'office AI a retenu en application de l'art. 28a LAI qui renvoie à l'art. 16 LPGA (RS 830.1), dès lors qu'il représente le revenu perçu concrètement par la personne assurée avant son incapacité de gain selon les décisions fiscales des deux années précédentes, et non pas un revenu hypothétique qu'elle aurait pu obtenir de son ancien employeur si l'atteinte à la santé n'était pas survenue au sens de l'art. 16 LPGA. À l'inverse de ce qu'affirme de manière péremptoire l'assurée, la juridiction de première instance ne s'est ainsi pas fondée sur le ch. 2.2 par. 5 des CGA relatif à la détermination du gain présumé perdu lorsque la personne assurée percevait un revenu irrégulier ou provenant d'une activité lucrative indépendante.
Pour le surplus, la recourante ne s'en prend pas aux autres aspects déterminants du litige qui ont conduit l'instance précédente à retenir que la perte de gain de la recourante est intégralement couverte par les prestations de la Caisse C.________ et de l'assurance-invalidité durant la période considérée, avec pour conséquence que sa demande devait être rejetée. Il n'y a pas lieu d'y revenir, pas plus que sur l'admission de la demande reconventionnelle, contre laquelle la recourante n'émet aucun grief.
4.
Compte tenu de ce qui précède, le recours est mal fondé.
5.
La recourante, qui succombe, supportera les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF; arrêt 9C_540/2014 du 22 janvier 2015 consid. 5 et les références).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 17 janvier 2025
Au nom de la IIIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Moser-Szeless
La Greffière : Perrenoud