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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_673/2023  
 
 
Arrêt du 17 septembre 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________ Sàrl, 
2. B.________ Sàrl, 
toutes les deux représentées par Maîtres Mark Muller & Philippe Grumbach, 
recourantes, 
 
contre  
 
Département du territoire du canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8. 
 
Objet 
Autorisation de construire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre administrative, du 7 novembre 2023 (A/949/2022-LCI ATA/1205/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société B.________ Sàrl est propriétaire des parcelles n° s 1'832 et 1'834 et copropriétaire de la parcelle n° 1'830 de la commune de Genève, section de Plainpalais. Sur la parcelle n° 1'834 est érigé un immeuble d'habitation devant lequel se trouve un jardin privé. Les parcelles n° s 1'830 et 1'832 ne sont pas bâties et forment un parc. Ces trois bien-fonds, sis en 3 ème zone de construction (au sens de l'art. 19 al. 1 de la loi genevoise d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 [LaLAT; RSG L 1 30]), se situent dans le périmètre du plan de site 29'184A "Roseraie-Beau-Séjour", adopté par le Conseil d'État genevois le 5 mars 2003.  
 
B.  
Le 13 juillet 2020, la société A.________ Sàrl a requis du Département du territoire du canton de Genève (ci-après: le Département) la délivrance d'une autorisation de construire portant sur la réalisation sur la parcelle n° 1'834 d'un parking souterrain de 21 places, accessible par un ascenseur à voitures et de locaux communs (sauna, hammam, salle de sport, piscine, salle de réunion et caves). La Ville de Genève, la Commission cantonale des monuments, de la nature et des sites (CMNS) et le Service des monuments et des sites (SMS) ont émis des préavis défavorables, alors que l'Office cantonal de l'agriculture et de la nature (OCAN) a rendu un préavis favorable sous conditions pour l'abattage d'arbres. 
Le 9 avril 2021, une nouvelle version du projet a été déposée auprès du Département: la surface prévue pour les locaux communs a été diminuée; il a été renoncé à l'abattage de certains arbres et la structure pour l'ascenseur à voitures a été supprimée au profit d'une simple plateforme élévatrice. La CMNS et la Ville de Genève ont à nouveau émis un préavis défavorable. L'Office cantonal des transports a émis un préavis favorable sous conditions. 
Par décision du 22 février 2022, le Département a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée, faisant siens les préavis défavorables de la CMNS, du SMS et de la Ville de Genève. 
 
Le refus d'autorisation de construire a été confirmé successivement par le Tribunal administratif de première instance (TAPI) dans son jugement du 14 décembre 2022 et par la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) dans son arrêt du 7 novembre 2023. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ Sàrl et B.________ Sàrl demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 7 novembre 2023, le jugement du 14 décembre 2022 et la décision du 22 février 2022 ainsi que d'ordonner à l'Office cantonal des autorisations de construire de délivrer l'autorisation de construire sollicitée. 
La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Département conclut au rejet du recours. Les recourantes répliquent. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans une cause relevant du droit public de la construction (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. B.________ Sàrl, destinataire de la décision litigieuse, est particulièrement touchée par l'arrêt attaqué qui confirme le refus de l'autorisation de construire sollicitée; elle a un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation; elle bénéficie partant de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. La question de la qualité pour recourir de A.________ peut demeurer indécise. 
Les autres conditions de recevabilité étant, au surplus, réunies, il convient d'entrer en matière. 
 
2.  
Dans un grief d'ordre formel qu'il convient d'examiner en premier lieu, les recourantes se plaignent d'une violation de leur droit d'être entendues (art. 29 al. 2 Cst.). Elles reprochent à l'instance précédente d'avoir renoncé à effectuer une inspection locale et d'avoir considéré que le TAPI avait écarté cette mesure d'instruction à juste titre. 
 
2.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1; 145 I 167 consid. 4.1). De jurisprudence constante, l'autorité peut renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 144 II 427 consid. 3.1.3). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle tire des conclusions insoutenables (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 143 IV 500 consid. 1.1).  
Dans ce contexte, le recourant est soumis aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 146 I 62 consid. 3). 
 
2.2. En l'espèce, la Cour de justice a relevé qu'une rencontre avec des représentants de l'Office du patrimoine et des sites (OPS) et du SMS avait eu lieu sur place en mars 2021, en présence de l'architecte et de l'avocat des recourantes. Elle a ajouté que des représentants de la CMNS s'étaient rendus sur place en 2018 dans le cadre d'un autre projet de construction sur la même parcelle et avaient notamment visualisé le jardin. Elle a considéré qu'un transport sur place ne s'avérait pas nécessaire vu les pièces du dossier, les plans, les photos et les données disponibles conformément à la loi relative au système d'information du territoire à Genève du 17 mars 2000 (LSITG; RSG B 4 36).  
Les recourantes soutiennent au contraire qu'une inspection locale était nécessaire pour constater que le projet améliorerait le site et qu'il y avait eu des atteintes au plan de site 29'184A et à l'arborisation à proximité de la parcelle litigieuse. Elles relèvent que la CMNS s'était rendue sur place en 2018 pour un ancien projet et que la visite de mars 2021 avait été effectuée seulement par des représentants de l'OPS et non par la CMNS. Elles insistent sur le fait que la CMNS a reconnu la qualité du projet de remise en valeur du jardin la qualifiant d'exemplaire. Cet élément n'est toutefois pas susceptible d'avoir une influence sur l'issue du litige dans la mesure où il n'a jamais été contesté que le projet refusé apportait une amélioration au niveau de l'aménagement du jardin (voir notamment infra consid. 3.2).  
Pour les recourantes, l'inspection locale aurait pu démontrer l'emprise concrète du projet, l'absence d'impact du projet sur le bâtiment sis à l'avenue V.________, la mauvaise qualité de la végétation existante et son amélioration par le projet, le caractère inesthétique et l'emprise au sol des parkings des immeubles voisins ainsi que les atteintes au site occasionnées par les constructions autorisées pour le complexe hospitalier U.________ et par l'agrandissement de la Haute école de santé. Ces éléments ressortent cependant des plans, des photos ou des cartes interactives mises à disposition par le système d'information du territoire. Ainsi, les intéressées ne démontrent pas que la Cour de justice aurait procédé à une appréciation anticipée des preuves entachée d'arbitraire en renonçant à procéder à une inspection locale. Dans ces conditions, le grief de la violation du droit d'être entendu peut être rejeté. 
 
3.  
Les recourantes se plaignent d'une application arbitraire de différentes dispositions de droit cantonal. 
 
3.1. Appelé à revoir l'application d'une norme cantonale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit aussi arbitraire dans son résultat. Si l'application de la norme défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (cf. ATF 148 II 121 consid. 5.2 et les arrêts cités).  
Le Tribunal fédéral s'impose une certaine retenue lorsqu'il s'agit de tenir compte de circonstances locales dont les autorités cantonales ont une meilleure connaissance que lui, ou de trancher de pures questions d'appréciation (cf. ATF 140 I 168 consid. 4.2.1; 138 II 77 consid. 6.7). 
 
3.2. Les recourantes reprochent d'abord à la cour cantonale d'avoir appliqué arbitrairement l'art. 15 de la loi genevoise du 14 avril 1988 sur les constructions et les installations diverses (LCI; RS/GE L 5 05) en confirmant le refus d'autorisation de construire. Pour elles, l'application de la clause esthétique reprise dans cette disposition légale pour s'opposer à la demande d'autorisation, serait arbitraire.  
 
3.2.1. L'art. 15 al. 1 LCI prévoit que le département peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public.  
Selon l'art. 15 al. 2 LCI, la décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d'architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la commission des monuments, de la nature et des sites. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département. 
 
3.2.2. En l'espèce, la Cour de justice a considéré qu'en se fondant sur les préavis défavorables de la CMNS et de la Ville pour refuser l'autorisation de construire sur la base de l'art. 15 LCI, le Département n'avait pas commis un excès ou un abus de son pouvoir d'appréciation. Elle a estimé que la CMNS avait procédé à un examen circonstancié du projet - fondé sur le règlement du plan de site 29'184A - prenant en considération le contexte du quartier et de la préservation de ses intérêts, en particulier de l'implantation et de l'intégration de la construction projetée dans son environnement; sans contester la qualité du projet de remise en valeur du jardin, la qualifiant d'exemplaire, la CMNS avait considéré que la réalisation des installations en sous-sol porterait une atteinte irrémédiable et importante au caractère végétal du site, notamment par l'imperméabilisation du sol, l'abattage d'arbres et la péjoration des conditions de vie de certains d'entre eux, et avait retenu que le projet aurait un impact visuel, mentionnant également que le jardin, bordé par deux parkings souterrains réalisés antérieurement à l'adoption du plan de site 29'184A, dont la préservation en l'état était précieuse dans un contexte fortement urbanisé et minéralisé. L'instance précédente en a déduit que les éléments relatifs à l'esthétique du projet au sens de l'art. 15 LCI avaient ainsi été dûment pris en considération; le préavis, certes favorable, émis par l'OCAN. concernant l'abattage d'arbres, ne permettait pas au Département de relativiser la portée du préavis défavorable de la CMNS, dans la mesure où le but poursuivi par le plan de site concernait essentiellement une question de protection du patrimoine.  
 
3.2.3. Les recourantes contestent d'abord l'atteinte au caractère végétal du site. Partant, elles perdent de vue que si le projet est de nature à améliorer l'aménagement du jardin, il n'en demeure pas moins que la réalisation projetée porterait atteinte au caractère végétal du site, en particulier s'agissant de l'imperméabilisation du sol et de l'abattage d'arbres. S'ajoute à cela que les diverses installations et émergences prévues (jours zénithaux, ascenseur à voitures, escaliers,...) auront un impact visuel sur le jardin. Il n'est ainsi pas insoutenable de confirmer l'interdiction d'un projet qui, par ses dimensions et sa situation, nuit au caractère ou à l'intérêt d'un quartier et d'un site naturel au sens de l'art. 15 al. 1 LCI.  
Les recourantes reprochent encore à la Cour de justice de s'être limitée à faire sien le préavis de la CMNS, sans analyse concrète. Il n'est cependant pas déraisonnable pour la cour cantonale de se fonder sur le préavis de la CMNS et de faire siens les arguments de celle-ci, ce d'autant moins que l'art. 15 al. 2 LCI prévoit que la décision du Département se fonde sur le préavis de la CMNS. 
Les critiques des recourantes ne sont par conséquent pas de nature à démontrer le caractère manifestement insoutenable de l'argumentation de l'instance précédente, ce d'autant moins que le Tribunal de céans s'impose une retenue dans l'appréciation des circonstances locales. 
 
3.3. Les recourantes font ensuite grief à la Cour de justice d'avoir considéré arbitrairement que le projet n'était pas conforme au plan de site 29'184A et à son règlement.  
 
3.3.1. Le plan de site 29°184A a pour but de protéger les quartiers de la Roseraie et de Beau-Séjour et de permettre leur transformation en respectant l'échelle et le caractère des constructions d'origine ainsi que le site environnant (art. 1 du règlement).  
En règle générale, le caractère du site doit être préservé, et en particulier le mode d'implantation des constructions et la végétation, qui caractérisent le secteur (art. 3 al. 1 du règlement). Les jardins et terrasses côté rue de même que les jardins et espaces verts côté cour doivent rester libres de constructions et d'installations diverses, notamment de celles qui pourraient entraver les objectifs de la perméabilité piétonne (art. 8 al. 3 du règlement). 
À titre exceptionnel, le stationnement des véhicules peut être autorisé sur les parcelles privées. Toutefois, en vue de préserver les jardins, le nombre de places est limité à deux au maximum. Un nombre supérieur ne peut être autorisé que si le projet démontre qu'il n'en résulte pas de dégradation du jardin (art. 11 al. 1 du règlement). 
 
3.3.2. En l'occurrence, les recourantes ne contestent pas que la parcelle concernée par leur projet se situe dans le périmètre 4 du plan de site 29'184A. Conformément aux art. 3 al. 1 et 8 al. 3 du règlement, la surface de verdure constituée par le jardin doit dès lors être maintenue (afin de préserver le caractère végétalisé du site) et les espaces verts côté cour doivent rester libres de constructions et d'installations diverses.  
Les recourantes reprochent d'abord à la Cour de justice de n'avoir opéré aucune distinction entre les constructions hors-sol et les constructions souterraines. Elles font valoir que le texte du règlement ne préciserait pas que l'interdiction des constructions s'appliquerait aussi aux constructions souterraines. Cette appréciation subjective n'est toutefois pas de nature à démontrer le caractère manifestement insoutenable de l'argumentation de la Cour de justice. En effet, il n'est pas arbitraire de considérer que s'il y avait lieu d'opérer une distinction entre constructions hors-sol et constructions souterraines, elle aurait figuré dans le texte du règlement. 
Les recourantes soulignent ensuite que le règlement n'interdit pas l'abattage d'arbres et qu'il a aussi "pour but de permettre la transformation des quartiers en respectant l'échelle et le caractère des constructions d'origine ainsi que le site environnant" (art. 1). Elles semblent en déduire que comme l'aspect esthétique de l'immeuble n'est pas touché, le projet litigieux n'irait pas à l'encontre du but recherché par l'adoption du plan de site 29'184A; or ce but n'est pas d'interdire toute nouvelle construction ni de toucher à la végétation. La cour cantonale a relevé à cet égard que le projet litigieux comportait différents aménagements au niveau du jardin: notamment onze ouvertures zénithales en dalle de verre (permettant un apport de lumière dans les locaux communs au premier niveau du sous- sol) situées sur l'ensemble de la surface verte actuelle du jardin, une grille d'aspiration pour la pompe à chaleur, deux sauts-de-loup nécessaires à la ventilation du parking, la construction de la plateforme élévatrice pour voitures, ainsi qu'un escalier d'accès. Elle en a déduit sans arbitraire que la construction projetée impliquait la réalisation d'aménagements ayant un impact sur le caractère et l'aspect végétalisé du jardin. Les améliorations du jardin proposées dans le cadre du projet litigieux ne sont certes pas contestées, que ce soit par les instances de préavis, le Département, le TAPI et la Cour de justice. Ce constat ne rend toutefois pas insoutenable l'appréciation de la cour cantonale selon laquelle l'ensemble des travaux projetés, en particulier en tant qu'ils sont visibles en surface, reste incompatible avec le plan de site 29'184A et les art. 8 al. 3 et 3 al. 1 du règlement. Dès lors, la plus-value que pourrait apporter le projet au jardin ne permet pas, à elle seule, d'en autoriser la construction. 
Les recourantes critiquent encore le fait que l'instance précédente avait souligné que la CMNS avait relevé que la réalisation du projet péjorerait les conditions de survie de certains arbres, notamment à cause de l'imperméabilisation du sol. Elles font valoir que l'OCAN a préavisé favorablement le projet et que l'imperméabilisation du sol ne saurait avoir un impact sur l'esthétique du site. Cette argumentation ne suffit cependant pas à démontrer le caractère manifestement insoutenable de celle de la Cour de justice et ne permet pas de retenir que le projet n'entraînerait aucune dégradation du jardin existant au sens de l'art. 11 du règlement, ce d'autant moins que le Tribunal de céans s'impose une retenue dans l'appréciation de circonstances locales. Il y a en effet lieu de prendre en compte le fait que la construction projetée est sise dans les jardins d'un bâtiment appartenant à un ensemble protégé construit en 1912 et inscrit dans le périmètre protégé par le plan de site 29'184A; on ne peut nier non plus l'impact qu'auraient sur le jardin les diverses installations et émergences techniques; s'y ajoute le fait que cet espace est déjà bordé par deux parkings souterrains (antérieurs au plan de site), ce qui rend cette parcelle en pleine terre encore plus précieuse. 
 
3.3.3. Les recourantes ne parviennent ainsi pas à démontrer l'arbitraire dont aurait fait preuve la Cour de justice en considérant que les différents aménagements projetés au niveau du jardin auraient un impact sur l'aspect végétalisé du jardin, supprimeraient de la pleine terre et seraient par conséquent contraires au plan de site 29'184A. Le grief de violation du plan de site doit aussi être écarté.  
 
4.  
Les recourantes soutiennent que l'interdiction de construire le projet litigieux, malgré le préavis favorable de l'OCAN, violerait la garantie de la propriété (art. 26 Cst.). 
 
4.1. La protection du patrimoine naturel ou bâti constitue une restriction du droit de propriété garanti par l'art. 26 al. 1 Cst.; pour être compatible avec cette disposition, l'assujettissement doit reposer sur une base légale - une loi au sens formel si la restriction est grave -, être justifié par un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 1 à 3 Cst.; ATF 126 I 219 consid. 2a et les arrêts cités).  
Le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.) exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité); en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts; ATF 149 I 49 consid. 5.1 et les arrêts cités). 
Les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit alors mentionner les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ceux-ci auraient été violés (ATF 148 I 127 consid. 4.3; 143 IV 500 consid. 1.1). Sous cette réserve, le Tribunal fédéral examine en principe librement si une restriction de la propriété répond à un intérêt public et respecte le principe de la proportionnalité; il s'impose toutefois une certaine retenue lorsqu'il s'agit de tenir compte de circonstances locales dont les autorités cantonales ont une meilleure connaissance que lui, ou de trancher de pures questions d'appréciation (ATF 147 I 393 consid. 5.3.2; 135 I 176 consid. 6.1). Le Tribunal fédéral doit alors examiner, dans le cadre des griefs soulevés (art. 106 al. 2 LTF), si la décision attaquée se prononce de façon complète sur les motifs d'intérêt public invoqués pour justifier l'atteinte au droit de propriété et si, dans la pesée des intérêts, les intérêts privés ont été pris en considération de manière adéquate (cf. ATF 126 I 219 consid. 2c; arrêt 1C_142/2021 du 22 décembre 2021 consid. 2.1). 
 
4.2. En l'occurrence, l'atteinte à la garantie de la propriété repose sur une base légale, l'art. 15 LCI ainsi que sur le plan de site 29'184A et les art. 8 al. 3 et art. 3 du règlement. Les restrictions de la propriété ordonnées pour protéger les monuments et sites naturels ou bâtis sont en principe d'intérêt public (ATF 135 I 176 consid. 6.1; arrêts 1C_221/2022 du 24 juillet 2023 consid. 3.1; 1C_545/2014 du 22 mai 2015 consid. 5.5).  
Reste à examiner le principe de la proportionnalité. Quoi qu'en disent les recourantes, le refus de délivrer l'autorisation de construire est apte à garantir la protection du patrimoine végétal du site (voir supra consid. 3) et celle-ci peut difficilement être atteinte par une mesure moins incisive. Les recourantes n'en proposent d'ailleurs aucune.  
En ce qui concerne la proportionnalité au sens étroit, les recourantes contestent la pesée des intérêts effectuée par l'autorité précédente, laquelle a fait primer l'intérêt à la préservation du jardin sur leurs intérêts privés. Pour elles, la protection du patrimoine serait mieux assurée par leur projet que par la situation actuelle. Le projet litigieux n'est cependant pas de nature à améliorer la situation existante au sens du plan de site 29'184A et de son règlement, même si la revégétalisation du jardin a été saluée. Les aménagements proposés vont en effet avoir un impact sur l'aspect végétalisé du jardin et impliquent une perte de surface de pleine terre. Le seul préavis positif de l'OCAN ne suffit pas pour inverser la pesée des intérêts, dans la mesure où il ne porte que sur la question de l'abattage des arbres. Compte tenu de ces éléments, la Cour de justice pouvait apprécier, sans arbitraire, la situation en ce sens que l'intérêt au maintien du jardin devait prévaloir. En effet, même si l'appréciation des instances judiciaires cantonales restreint les possibilités de construire et diminue les expectatives de rendement des recourantes, la mesure de protection répond à un intérêt public important et ne porte pas atteinte au principe de la proportionnalité. L'instance précédente a d'ailleurs pris soin d'opposer la mesure litigieuse aux intérêts économiques des recourantes. 
En définitive, avec la retenue que s'impose le Tribunal fédéral s'agissant de l'examen de circonstances locales, l'instance précédente n'a pas violé la garantie de la propriété en confirmant le refus d'autorisation de construire en question. 
 
5.  
Les recourantes se plaignent enfin d'une violation de l'égalité de traitement (art. 8 Cst.). Elles soutiennent que la situation des immeubles voisins, lesquels disposent pour la plupart de parkings n'aurait pas été prise en compte. Elles relèvent aussi que des autorisations de construire auraient été délivrées dans le périmètre du plan de site 29'184A. 
 
5.1. Selon l'art. 8 Cst., tous les êtres humains sont égaux devant la loi (al. 1). Une décision viole le principe de l'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 144 I 113 consid. 5.1.1; 142 V 316 consid. 6.1.1). Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (ATF 130 I 65 consid. 3.6).  
 
5.2. En l'espèce, la cour cantonale a retenu les éléments suivants: le projet cité par les recourantes qui portait sur la démolition et la construction d'un centre hospitalier de consultation et de chirurgie n'avait rien de similaire avec le projet querellé; il répondait en outre à un intérêt public sanitaire dont ne pouvaient se prévaloir les recourantes pour leur propre projet; les parcelles concernées par le projet de démolition et reconstruction étaient par ailleurs incluses dans le sous-périmètre 5 du plan de site 29'184A, qui autorise l'édification de constructions nouvelles (art. 9 al. 3 du règlement). Quant aux projets portant sur une construction liée à la Haute école de Santé et sur la construction d'un parking, la Cour de justice a souligné qu'ils se situaient dans le périmètre du plan de site 30'054-199, ce qui a eu pour effet de soustraire les parcelles concernées du plan de site 29'184A; par ailleurs, l'installation de deux pompes à chaleur (PAC) sur une parcelle voisine ne pouvait, de par la nature totalement différente du projet des recourantes, permettre à celles-ci de se prévaloir d'une inégalité de traitement; enfin, le projet des recourantes ne s'apparentait à aucune des autres constructions précitées, de sorte que la situation des bâtiments et autorisations de construire mentionnés par les recourantes différait nettement de celle du projet litigieux.  
Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et les griefs des recourantes ne parviennent pas à le remettre en question. En effet, le seul fait qu'une PAC soit une construction extérieure visible ne suffit évidemment pas à rendre la construction sur une parcelle voisine de deux PAC (d'une emprise au sol limitée) équivalente à celle d'un garage, certes souterrain, mais d'une ampleur considérable avec deux niveaux en sous-sol comprenant 21 places et des locaux communs (sauna, hammam, salle de sport, piscine et caves) avec de nombreuses émergences en surface (11 ouvertures en dalle de verre, une grille d'aspiration, deux sauts-de-loup, une plateforme élévatrice pour voitures, ainsi qu'un escalier d'accès). De même, le fait que les immeubles voisins disposent de parkings (et que ceux-ci soient particulièrement inesthétiques) n'est pas de nature à justifier un traitement semblable. 
 
5.3. Par conséquent, les circonstances sont différentes (sous-périmètre différent ou construction de nature différente), ce qui justifie de traiter ces projets de manière différente. Cette différenciation repose sur des circonstances de fait décisives, de sorte que le grief de violation de l'égalité de traitement doit être rejeté.  
 
6.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
Les recourantes, qui succombent, doivent supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 francs, sont mis à la charge des recourantes. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des recourantes, au Département du territoire du canton de Genève et à la Cour de justice du canton de Genève (Chambre administrative). 
 
 
Lausanne, le 17 septembre 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller