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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_359/2022  
 
 
Arrêt du 20 avril 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Pont Veuthey, Juge suppléante. 
Greffière : Mme Arn. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Mark Barokas, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Département du territoire de la République et canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8. 
 
Objet 
Refus d'autorisation de construire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève, du 17 mai 2022 (ATA/520/2022 - A/3189/2020-LCI). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ est propriétaire d'une maison d'habitation d'une surface au sol de 59 m2, sise sur la parcelle n° 141, de 179 m2, sur la commune de Carouge. Le bien-fonds se trouve dans le périmètre du plan de site du Vieux-Carouge, en zone 4A, adopté par le Conseil d'Etat le 21 juillet 1982. 
Cette parcelle se situe dans un îlot, formé par treize bâtiments, dont le centre est une cour intérieure presque entièrement libre de constructions, à l'exception d'un dépôt et de quatre bâtiments regroupés d'une surface allant pour chacun d'eux de 12 à 44 m2. L'espace intérieur de l'îlot est arborisé et constitué par la toiture végétalisée d'un parking souterrain et par les cours ou jardins sis à l'arrière des bâtiments. 
Le 28 mai 2019, A.________ a déposé une demande définitive d'autorisation de construire portant sur la création d'un jardin d'hiver, la réfection des façades du bâtiment et la démolition d'un escalier extérieur. 
Le 7 août 2019, la commune a préavisé favorablement le projet sous la condition que l'Office du patrimoine et des sites ainsi que la Commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après: la CMNS) donnent un préavis favorable. Le 16 juillet 2019, la CMNS a préavisé négativement le projet. Tout en étant favorable à la suppression de l'escalier et à la réfection des façades, elle estimait que la construction avait pour conséquence un noyautage de l'espace jardin et une altération de la lecture du bâtiment principal. L'architecte du projet s'est déterminé et a proposé de nouvelles versions. La CMNS a maintenu son préavis négatif le 18 février 2020. Le 4 juin 2020, le Service des monuments et sites (ci-après : le SMS) a rendu un préavis négatif. 
Par décision du 11 septembre 2020, le Département du territoire (ci-après: le DT) a rejeté la requête en autorisation de construire, faisant siens les préavis de la CMNS et du SMS. 
 
B.  
Par recours du 8 octobre 2020, A.________ a recouru au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI). Après plusieurs échanges d'écritures, le TAPI a rejeté le recours par jugement du 17 novembre 2021. Le 13 décembre 2021, A.________ a recouru contre ce jugement à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève qui a confirmé le jugement du TAPI, par arrêt du 17 mai 2022. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt cantonal et d'ordonner l'octroi de l'autorisation de construire. Subsidiairement, elle demande le renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. La Cour de justice persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le DT s'est déterminé et conclut au rejet du recours. La recourante réplique et confirme ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale prise en dernière instance cantonale dans une cause relevant du droit public de la construction, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. La recourante, destinataire de la décision, est particulièrement touchée par l'arrêt attaqué qui confirme le refus de l'autorisation de construire; elle a un intérêt digne de protection à sa modification ou à son annulation; elle bénéficie partant de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité étant, au surplus, réunies, il convient d'entrer en matière. 
 
2.  
La recourante soutient que l'autorité cantonale aurait arbitrairement écarté la tentative de conciliation prévue par l'art. 65A de la loi genevoise sur la procédure administrative (LPA/GE; RSG E 5 10) au motif que l'octroi d'une autorisation de construire ne laisse pas aux parties la possibilité de négocier l'un ou l'autre aspect de la requête, alors que tel n'est pas le cas. Elle se réfère à une jurisprudence faisant état de négociations entre la CMNS et le requérant. 
 
2.1. Sous le chapitre conciliation, l'art. 65A LPA/GE indique que les juridictions administratives peuvent en tout temps procéder à une tentative de conciliation. Elles peuvent déléguer un de leurs magistrats à cet effet.  
 
2.2. Le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal (art. 95 LTF). Il examine en revanche sous l'angle restreint de l'arbitraire l'interprétation et l'application des autres règles du droit cantonal ou communal (ATF 141 I 36 consid. 5.4; 138 V 67 consid. 2.2; 134 II 349 consid. 3). Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 144 IV 136 consid. 5.8; 144 I 170 consid. 7.3).  
Les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit alors mentionner les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés; de même, elle doit citer les dispositions du droit cantonal ou communal dont elle se prévaut et démontrer en quoi ces dispositions auraient été appliquées arbitrairement ou d'une autre manière contraire au droit (ATF 141 IV 369 consid. 6.3; 136 II 489 consid. 2.8). 
 
2.3. La cour cantonale a considéré que s'agissant d'une disposition potestative l'autorité saisie n'est pas tenue de donner suite à une requête de conciliation présentée par l'une des parties. Cette appréciation échappe à l'arbitraire. Elle a également indiqué que la tentative de conciliation serait dépourvue de chances de succès en raison du caractère impératif du droit de la construction. En l'occurrence, la CMNS a rendu un premier préavis négatif puis, par suite de compléments apportés par la requérante, un second préavis confirmant le premier; elle a été suivie par le SMS qui a préavisé négativement le projet pour les mêmes motifs. Ce processus a permis à la recourante de faire valoir ses arguments. Par la suite, malgré de nombreux échanges d'écritures, ni les autorités, ni la recourante n'ont modifié leur position. L'autorité de dernière instance pouvait donc inférer des circonstances que la conciliation serait vouée à l'échec et ne pas faire usage de la possibilité offerte par l'art. 65A LPA/GE. Si, comme le soutient la recourante, cette disposition n'a jamais été appliquée, cela tendrait à confirmer que de façon générale les échanges intervenus entre les autorités concernées et un administré avant la prise de décision, rendent inutile toute tentative de conciliation ultérieure.  
L'autorité précédente pouvait ainsi sans arbitraire écarter la requête de conciliation, n'étant pas tenue d'y donner suite tant en application de la loi que des circonstances du cas d'espèce. 
 
3.  
La recourante se plaint également d'une violation de son droit d'être entendue. Elle fait valoir une violation de l'art. 29 al. 2 Cst. Elle se prévaut également de dispositions du droit de procédure administrative cantonal (art. 19, 20, 41 et 76 LPA/GE); elle ne prétend cependant pas que ces dispositions lui conféreraient des droits plus étendus que l'art. 29 al. 2 Cst. ni qu'elles auraient été appliquées arbitrairement; il n'y a pas lieu de s'y attarder (cf. ATF 146 I 62 consid. 3; arrêt 1C_478/2021 du 24 novembre 2022 consid. 5). 
 
3.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour la personne intéressée de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Selon la jurisprudence, le droit d'être entendu n'empêche toutefois pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 140 I 285 consid. 6.3.1). La garantie de l'art. 29 al. 2 Cst. ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3; arrêts 1C_372/2021 du 26 janvier 2023 consid. 2.3; 1C_228/2018 du 18 juillet 2019 consid. 5.2). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il appartient à la partie recourante de démontrer, par une argumentation circonstanciée, que ce refus d'instruire procède d'arbitraire.  
 
3.2. La recourante voit une violation de son droit d'être entendue dans le défaut d'inspection locale et de comparution personnelle.  
 
3.2.1. La recourante reproche à l'instance précédente de ne pas l'avoir entendue « de vive voix » ce qui lui aurait permis « d'expliquer la vie de toute sa famille dans le logement actuel et en quoi la réalisation de la terrasse et du jardin d'hiver allait concrètement améliorer sa situation ». Or, dans le cas d'espèce, la recourante s'est déterminée par écrit à plusieurs reprises par l'intermédiaire de son avocat, ce qui suffit à respecter son droit d'être entendue tel qu'il ressort de l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. arrêt 1C_228/2018 du 18 juillet 2019 consid. 5.2). Elle n'explique en outre pas ce que ses commentaires oraux auraient apporté de plus dans la présente cause par rapport aux prises de position écrites. Elle ne parvient en particulier pas à démontrer en quoi des précisions supplémentaires de sa part seraient susceptibles de modifier l'appréciation des autorités inférieures.  
 
3.2.2. S'agissant du transport sur place, la Chambre administrative de la Cour de justice a indiqué que la recourante avait pu exposer ses arguments de façon détaillée, dans ses écritures. Le dossier de la procédure contient de nombreuses photographies du bâtiment concerné, de ses façades ainsi que de la cour intérieure et des bâtiments qui la bordent. On y trouve également de multiples photographies du projet et de son insertion dans la cour. La recourante a également déposé « une expertise d'un préavis défavorable de la Commission des sites, des monuments, de la nature et des sites de B1.________ » qui, à l'appui d'un dossier photographique complet, a détaillé le projet de construction et son emprise. Cette expertise très documentée analyse tous les aspects du projet, en particulier en comparaison avec d'autres projets sis à Carouge. Sur cette base, la Cour de justice s'est estimée suffisamment renseignée pour statuer sur la base du dossier.  
Cette appréciation échappe à la critique et la recourante faillit à en démontrer le caractère arbitraire. Son argumentation en reste à des considérations strictement appellatoires, dont on ne peut déduire que la mesure requise aurait conduit l'instance précédente à revoir son opinion, respectivement qu'elle aurait été écartée arbitrairement. La recourante n'expose en particulier pas quels faits pertinents n'auraient pu être établis que par un transport sur place. 
Au vu de ce qui précède, on ne voit pas que le refus de mettre en oeuvre une comparution personnelle ou un transport sur place procéderait d'une appréciation anticipée des preuves qui serait entachée d'arbitraire. Le grief relatif à la violation du droit d'être entendu doit être écarté. Il en va de même du grief de la violation des règles de la bonne foi et du principe de l'égalité de traitement qui, en lien avec le refus de procéder à l'inspection locale et l'audition de la recourante ou de celle de l'architecte B.________, n'ont pas de portée propre. 
 
4.  
La recourante se prévaut également d'une violation du principe de l'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst.), faisant état de situations comparables qui auraient obtenu une autorisation de construire. 
 
4.1. Une décision viole le principe de l'égalité ancré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (ATF 144 I 113 consid. 5.1.1; 142 I 195 consid. 6.1 et la jurisprudence citée). L'inégalité de traitement apparaît ainsi comme une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement (ATF 141 153 consid. 5.1; 140 I 77 consid. 5.1; arrêt 1C_107/2021 du 6 juillet 2021 consid. 3.1).  
 
4.2. L'autorité précédente a énoncé les différences entre le projet de la recourante et les autorisations délivrées dans le Vieux-Carouge. En particulier, elle a souligné qu'une des autorisation concernait la reconstruction d'un atelier en bois existant. Une autre avait trait à une construction se situant en fond de cour et non en façade et portait sur la transformation intérieure d'une halle industrielle en logement dépôts ainsi que sur la démolition de bureaux. Cette construction s'insérait dans un projet de transformation global dont un assainissement de la cour. La rénovation du musée de Carouge concernait un atelier déjà existant et permettait de réaliser une économie de terrain. Enfin, la transformation de l'EMS portait sur la création d'une véranda et d'un aménagement sur cour qui dans un premier temps n'avait pas reçu l'aval de la CMNS. La position de la véranda avait par la suite été modifiée et le projet accepté dans la mesure où sa construction s'inscrivait dans un espace résiduel sans intérêt patrimonial. Tel n'est manifestement pas le cas du projet de la recourante qui ne s'inscrit pas dans un espace résiduel mais, comme le démontrent les pièces du dossier, modifie l'alignement existant. Les situations comparées sont différentes de telle sorte que leur traitement différent n'est pas contraire au principe de l'égalité de traitement. La recourante reproche à l'autorité de s'attacher aux différences plutôt que d'avoir mis en évidence leur similitude. Or, la Chambre administrative a comparé les éléments pertinents, à savoir ceux qui sont d'importance pour juger de la conformité de la décision à la loi genevoise sur les constructions et installations diverses du 14 avril 1988 (LCI; RSG L 5 05), pour arriver à la conclusion que ces différences justifiaient un traitement différent.  
Au vu de ces différences pertinentes, la cour cantonale n'est pas tombée dans l'arbitraire et n'a pas violé le principe de l'égalité de traitement en confirmant le refus de l'autorisation de construire. Partant, les griefs d'arbitraire et de violation du principe de l'égalité de traitement doivent être rejetés. 
 
5.  
La recourante se plaint d'une violation de la garantie de la propriété. 
 
5.1. La garantie de la propriété ancrée à l'art. 26 al. 1 Cst. n'est pas absolue. Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l'art. 36 Cst. La restriction doit ainsi reposer sur une base légale, être justifiée par un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité.  
Dans le cadre de la juridiction constitutionnelle, le Tribunal fédéral examine en principe librement si les mesures d'aménagement du territoire répondent à un intérêt public et respectent le principe de la proportionnalité; il s'impose toutefois une certaine retenue lorsqu'il s'agit de trancher de pures questions d'appréciation ou de tenir compte de circonstances locales (ATF 142 I 162 consid. 3.2.2; 132 II 408 consid. 4.3), dont les autorités cantonales ont une meilleure connaissance que lui, notamment en matière de protection des monuments ou des sites (ATF 135 I 176 consid. 6.1; arrêts 1C_708/2020 du 27 janvier 2022 consid. 2.3; 1C_52/2016 du 7 septembre 2016 consid. 2). 
En l'espèce, le refus du permis de construire relève de la politique de protection des sites construits d'importance nationale à protéger. Selon l'inventaire fédéral des sites construits d'importance nationale à protéger en Suisse (ci-après: ISOS) "les cours intérieures, résultant de la disposition en îlots du bâti, sont très caractéristiques du Vieux-Carouge et méritent de ce fait d'être protégées intégralement, bien qu'elles soient parfois invisibles depuis la rue". 
 
5.2. Dans un premier argument, la recourante soutient que la décision de l'autorité précédente se fonde sur l'art. 103 LCI en lieu et place de l'art. 94 LCI et serait ainsi dépourvue de base légale entraînant une violation de la garantie de la propriété. Cet argument tombe à faux. En effet, la décision de la Chambre administrative détaille l'art 94 LCI qui indique les modalités de la préservation de l'aménagement et du caractère architectural historique du Vieux-Carouge. Elle se réfère également aux art. 97 ss LCI qui prévoient des dispositions spéciales applicables à la zone du Vieux-Carouge, dont notamment l'art. 103 LCI intitulé "Aménagements et assainissement des îlots". L'autorité précédente a ainsi défini le cadre juridique applicable, dont l'art. 94 LCI. Elle a à cet égard exposé que la protection dont bénéficie le Vieux-Carouge portait notamment sur les volumes des constructions et les cours intérieures et a considéré que l'agrandissement projeté diminuait (même de façon relativement peu importante) la surface de la cour intérieure et nuisait au site protégé; la cour cantonale a en outre estimé que la construction créait une altération de la lecture du bâtiment principal. Contrairement à ce que soutient la recourante, la cour cantonale s'est notamment fondée sur l'art. 94 LCI pour refuser le permis de construire. Au demeurant, les deux dispositions citées par la recourante visent le même objectif, à savoir préserver l'aménagement et l'architecture historique du Vieux-Carouge (art. 94 LCI), notamment par l'assainissement des îlots et l'amélioration des cours et jardins (art. 103 let. b et c LCI).  
 
5.3. La recourante soutient également que la décision ne repose sur aucun intérêt public suffisant. Comme l'a souligné l'autorité précédente, le refus de l'autorisation de construire se justifiait au vu de la protection dont bénéficie le Vieux-Carouge, qui porte notamment sur les volumes des constructions existantes et les cours intérieures. Les relevés de l'inventaire ISOS préconisent pour Carouge la sauvegarde rigoureuse des cours intérieures enfermées par des îlots d'habitations qui composent des espaces intermédiaires de grandes valeurs, même si elles ne sont pas visibles de la rue. Parmi les objectifs généraux de la sauvegarde figure celui de protéger rigoureusement ces cours. Il s'agit d'un intérêt public prépondérant, défini comme tel tant par le législateur fédéral (inventaire ISOS) que par le législateur cantonal qui définit la zone du Vieux-Carouge comme zone à protéger (cf. art. 28 et 29 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987) et énumère les dispositions applicables à sa préservation (cf. art. 94 ss LCI). Lorsque la recourante cite la Cour de justice qui accorderait sa protection « à une coulée en béton et des grilles aux fenêtres en PVC », elle omet de préciser que l'autorité cantonale cite ses propres paroles qui figurent dans sa réplique du 12 janvier 2021. Quoi qu'il en soit, cette argumentation n'est pas soutenable dans la mesure où il existe un intérêt public prépondérant à assurer la protection rigoureuse des cours du Vieux-Carouge.  
La décision querellée repose sur un intérêt public pertinent et l'argument de la recourante doit donc être écarté. 
 
5.4. Selon la recourante, le refus du permis serait contraire au principe de la proportionnalité. Le principe de la proportionnalité exige que les mesures mises en oeuvre soient propres à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité); il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts) (ATF 140 I 168 consid. 4.2.1; 135 I 233 consid. 3.1).  
 
5.4.1. La recourante soutient que l'interdiction n'est pas apte à atteindre le but de protection du patrimoine du Vieux-Carouge dans la mesure où ni le public ni la commune ne bénéficieront de la réfection des façades. Cet argument tombe à faux. La CMNS a indiqué dans son préavis qu'elle était favorable à la réfection des façades ainsi qu'à la suppression de l'escalier améliorant la situation existante. La règle de l'aptitude doit donc s'analyser eu égard au refus d'autoriser la création d'un jardin d'hiver dans la cour intérieure. A l'évidence, cette interdiction permet d'atteindre le but défini par l'inventaire ISOS, à savoir la protection des cours intérieures enfermées par des îlots d'habitations. Dès lors, la mesure considérée est propre à produire le résultat escompté et clairement défini pas l'ISOS.  
 
5.4.2. La recourante soutient également qu'une mesure moins contraignante que celle de l'interdiction totale de construire aurait permis la sauvegarde de l'intérêt public considéré. Il ne s'agit à l'évidence pas d'une interdiction totale de construire mais du refus de l'adjonction d'un jardin d'hiver dans un périmètre qui fait l'objet d'une protection de l'ISOS. Comme l'a souligné la cour cantonale, la recourante reste libre de déposer une demande portant sur la réfection des façades. Cela étant, la conservation rigoureuse des cours intérieures ne peut être atteinte que par l'interdiction d'empiéter sur ces espaces intermédiaires de grandes valeurs même s'ils ne sont pas visibles depuis la rue.  
 
5.4.3. Enfin, s'agissant du principe de la proportionnalité au sens étroit, une mesure de protection est incompatible avec la Constitution si elle produit des effets insupportables pour le propriétaire ou ne lui assure pas un rendement acceptable. Savoir ce qu'il en est dépend notamment de l'appréciation des conséquences financières de la mesure critiquée (ATF 126 I 219 consid. 2c; arrêts 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 7.1; 1C_52/2016 du 7 septembre 2016 consid. 2). La recourante estime qu'il n'existe pas de rapport raisonnable entre l'intérêt public poursuivi et les effets de la mesure sur sa situation personnelle. Elle se limite toutefois à des considérations générales et ne démontre en aucune façon que les effets de la mesure lui seraient insupportables ou ne lui assureraient pas un rendement acceptable de l'immeuble. Il lui est d'ailleurs loisible de déposer une nouvelle demande, sur les autres objets de la transformation qui ne sont pas la cause du refus de la demande. Enfin, ce refus ne consacre aucune privation totale ou définitive de construire, mais vise comme seul objet la création d'un jardin d'hiver.  
La recourante faillit à démontrer l'existence d'une atteinte disproportionnée à son droit de propriété. 
 
6.  
Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté, aux frais de la recourante qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais de justice, arrêtés à 4'000 fr. sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, au Département du territoire de la République et canton de Genève et à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 20 avril 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Arn