Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1C_265/2024
Arrêt du 20 septembre 2024
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président,
Chaix et Müller.
Greffière : Mme Rouiller.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Nathalie Bornoz, avocate,
recourant,
contre
Services Industriels de Genève,
case postale 2777, 1211 Genève 2,
intimés.
Objet
Droit de la fonction publique; enquête administrative,
recours contre l'arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 26 mars 2024 (ATA/428/2024 - A/3968/2023-FPUBL).
Faits :
A.
Employé par les Services Industriels de Genève (ci-après: SIG) depuis le 1
er octobre 1990, A.________ (ci-après: l'employé) est affecté à la fonction de "spécialiste construction, opérations et maintenance" et rattaché à l'unité "eau potable production". Le responsable de cette unité est B.________.
En décembre 2021, des dissensions sont survenues entre B.________ et A.________ au sujet de l'emploi du temps de ce dernier. B.________ a alors convoqué A.________ à un entretien, auquel ce dernier a refusé de se présenter. Un nouvel entretien a été convoqué, à la suite duquel B.________ a supprimé la possibilité de l'employé d'effectuer des remplacements au centre de conduite de l'eau.
À compter du 9 mars 2022, l'employé a été en arrêt maladie.
Dès le 1
er juin 2022, des échanges ont eu lieu entre les SIG et l'employé afin de trouver une solution pour mettre fin au différend opposant ce dernier à B.________. Il était notamment envisagé de déplacer l'employé dans un nouveau poste au sein des SIG. Dans ce cadre, A.________ a reçu des réponses négatives à ses postulations.
Les échanges se sont poursuivis, au cours desquels l'employé s'est plaint de harcèlement de la part de B.________.
B.
Au vu des allégations de A.________, les SIG l'ont informé, en date du 29 août 2023, qu'ils avaient décidé d'ouvrir une enquête administrative afin de déterminer si des actes de harcèlement ou d'autres atteintes à la personnalité avaient eu lieu dans le cadre des relations de travail et si, le cas échéant, les conditions de son licenciement ou de celui de B.________ étaient remplies. Ce courrier était signé par la "Directrice exécutive gestion des réseaux de distribution" et la "Directrice de l'activité TDR-RH".
Le mandat d'enquête, daté du 31 août 2023, reprend les termes précités et précise que la décision d'ouverture de l'enquête administrative a également été notifiée à B.________.
L'ouverture de l'enquête administrative a été confirmée à A.________ par courrier du 18 septembre 2023.
C.
A.________ a recouru contre les courriers du 29 août et du 18 septembre 2023 auprès de la commission de recours en matière d'application du statut du personnel des SIG (ci-après: commission de recours). Par décision du 13 octobre 2023, ladite commission a déclaré le recours irrecevable, au motif que l'ouverture d'une enquête administrative était une décision incidente et que les conditions permettant de contester une telle décision n'étaient pas remplies.
Par arrêt du 26 mars 2024, la Chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: Cour de justice) a rejeté le recours de A.________ contre la décision du 13 octobre 2023. La commission de recours était régulièrement composée et n'avait pas violé le droit d'être entendu de l'employé. La décision d'ouverture de l'enquête administrative n'était pas nulle et la commission de recours avait à juste titre retenu que l'existence d'un préjudice difficilement réparable n'était pas rendue vraisemblable.
D.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public et du recours constitutionnel subsidiaire, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour de justice. Il lui demande également de constater qu'il revêt le statut de victime et de lanceur d'alerte, et qu'il demeure affecté aux fonctions de "Spécialiste construction, opérations et maintenance" et de "Remplaçant chargé de quart du Centre de conduite du Service de l'Eau des SIG". Il souhaite au surplus que le Tribunal fédéral constate qu'il n'est passible d'aucune sanction disciplinaire qui pourrait mener à une résiliation des rapports de service; il demande encore au Tribunal fédéral de constater la nullité de, subsidiairement d'annuler, la décision de la commission du 13 octobre 2023 et les décisions du 29 août et du 18 septembre 2023. Subsidiairement, A.________ demande l'annulation de l'arrêt du 26 mars 2024 et le renvoi de la cause à la Cour de justice.
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Les SIG se réfèrent aux considérants de l'arrêt attaqué et aux pièces du dossier, et concluent au rejet du recours. Le recourant a répliqué.
Par ordonnance du 27 mai 2024, le Juge présidant de la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif formée par le recourant et a admis sa requête de mesures provisionnelles.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis.
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu en lien avec la décision d'ouvrir une enquête administrative à l'encontre du recourant; celle-ci vise à déterminer, d'une part, la cause de la détérioration des relations de travail entre le recourant et l'un de ses supérieurs et, d'autre part, si les conditions d'un licenciement de l'un ou de l'autre étaient remplies. La cause au fond relève des rapports de travail de droit public au sens des art. 83 let. g et 85 al. 1 let. b LTF. À ce stade, aucune sanction n'a été prononcée; toutefois, selon les résultats de l'enquête, le recourant s'expose à un licenciement, susceptible d'avoir une incidence directe sur son traitement allant au-delà de la valeur litigieuse de 15'000 fr. Il s'agit ainsi d'une contestation pécuniaire et l'exception prévue à l'art. 83 let. g LTF ne s'applique pas (cf. arrêt 1C_577/2023 du 4 avril 2024 consid. 1).
1.2. L'arrêt attaqué rejette un recours contre une décision qui déclare irrecevable un recours contre une décision d'ouverture d'une enquête administrative. Il ne met par conséquent pas fin à la procédure et revêt un caractère incident. Le recours au Tribunal fédéral n'est en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Cela étant, lorsque le recours est formé contre un arrêt confirmant l'irrecevabilité d'un recours - notamment faute d'un intérêt juridiquement protégé -, cette situation équivaut, sous l'angle de la recevabilité, à un déni de justice formel. Le recours sur cette question particulière est donc ouvert indépendamment d'un préjudice irréparable (cf. ATF 143 I 344 consid. 1.2). En l'espèce, seule la question de l'irrecevabilité du recours auprès de la commission, contestée devant la Cour de justice, peut être portée devant le Tribunal fédéral qui n'a, à ce stade, pas à examiner le fond de la contestation (ATF 137 II 313 consid. 1.3). Les conclusions, qui visent à constater que le recourant n'est passible d'aucune sanction disciplinaire pouvant mener à une résiliation des rapports de service et qu'il demeure affecté à ses précédentes fonctions, sont partant irrecevables.
1.3. La voie du recours en matière de droit public étant recevable, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (cf. art. 113 LTF).
2.
Le recourant se plaint d'un établissement manifestement inexact des faits.
2.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2). Lorsque la partie recourante entend s'en prendre aux faits ressortant de l'arrêt entrepris, elle doit établir de manière précise la réalisation de ces conditions, c'est-à-dire qu'elle doit exposer, de manière circonstanciée, que les faits retenus l'ont été d'une manière absolument inadmissible, et non seulement discutable ou critiquable (cf. art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).
2.2. Le recourant reproche à la Cour de justice de ne pas avoir retenu que la fonction de remplaçant chargé de quart au centre de conduite du service de l'eau (CdC-SO) était consacrée dans son cahier des charges et représentait près de 30% de son temps de travail global. Il considère également que l'autorité précédente aurait dû retenir que son dossier personnel était exempt de tout reproche, manquement, mise en garde ou sanction disciplinaire. Les dissensions avec son supérieur seraient intervenues après qu'il ait lancé une alerte au sujet de la surveillance illicite des employés; il disposerait par conséquent du statut de lanceur d'alerte, ce que la Cour de justice aurait omis de constater. Finalement, l'autorité précédente n'aurait pas retenu que les SIG s'étaient engagés à mettre en oeuvre des mesures pour permettre un plein retour au travail du recourant.
2.3. En l'espèce, le recourant se contente, de manière appellatoire, d'exposer sa version des faits. Il perd également de vue que la présente cause porte uniquement sur la question de la recevabilité du recours contre la décision d'ouverture de l'enquête administrative; il ne démontre en effet pas en quoi une correction de l'état de fait aurait une influence sur le sort de la présente procédure, dès lors que le fond du litige n'en fait pas l'objet.
S'agissant en particulier de la question de son statut de lanceur d'alerte, le recourant se limite à renvoyer à certains passages de son recours cantonal, ce qui ne saurait être suffisant pour satisfaire aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 145 V 141 consid. 5.1; 143 IV 122 consid. 3.3). Il se contente ainsi d'opposer sa version des faits à celle retenue par l'autorité précédente et ne démontre pas que les dissensions avec ses supérieurs ne seraient issues que de l'alerte qu'il aurait lancée.
Partant, le recourant ne parvient pas à démontrer que l'autorité précédente aurait fait preuve d'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves. Son grief est dès lors rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
3.
Le recourant se plaint ensuite d'une violation de son droit à ce que sa cause soit traitée par une autorité régulièrement composée ( art. 29 al. 1 et 30 Cst. ). Il considère, d'une part, que la décision d'ouverture de l'enquête administrative n'a pas été rendue par une personne habilitée pour le faire et, d'autre part, qu'il n'avait pas eu connaissance de la composition de la commission de recours des SIG avant son recours à la Cour de justice.
3.1. L'art. 29 al. 1 Cst. prévoit que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. La jurisprudence a tiré de cette disposition un droit à ce que l'autorité administrative qui statue le fasse dans une composition correcte et impartiale (ATF 142 I 172 consid. 3.1; 127 I 128 consid. 3c). La composition de l'autorité est définie selon les règles du droit de procédure ou d'organisation. L'autorité est ainsi valablement constituée lorsqu'elle siège dans une composition qui correspond à ce que le droit d'organisation ou de procédure prévoit. Si l'autorité statue alors qu'elle n'est pas valablement constituée, elle commet un déni de justice formel (ATF 142 I 172 consid. 3.2; 137 I 340 consid. 2.2.1).
3.2. Dans l'arrêt attaqué, la Cour de justice a retenu à raison que la décision d'ouvrir une enquête administrative avait été prise par la personne y étant formellement habilitée selon l'art. 68 du règlement d'application du statut du personnel des SIG (ci-après: RAstatut), qui prévoit que le Directeur exécutif Droit, Achats et Risques est compétent pour ouvrir une enquête au sens de l'art. 77 du statut du personnel des SIG du 25 juillet 2012 (ci-après: statut). En effet, même si le courrier du 29 août 2023, informant le recourant de l'ouverture de ladite enquête, était signé par la "Directrice exécutive - Gestion des réseaux de distribution" et par la "Directrice de l'Activité TDH-RH", le mandat d'enquête adressé à l'enquêteur le 31 août 2023, dont le recourant a reçu copie, était signé par le "Directeur général" et le "Directeur exécutif Droit, Achats et Risques". Par courrier du 18 septembre 2023, le "Directeur exécutif Droit, Achats et Risques" et la "Responsable Droit administratif" ont confirmé au recourant l'ouverture de l'enquête.
Il convient au surplus de relever que le recourant ne conteste pas que le courrier du 18 septembre 2023, confirmant l'ouverture de l'enquête administrative et sur lequel son recours portait également, était signé de la personne compétente. On ne saurait dès lors retenir une violation de l'art. 29 al. 1 Cst.
3.3. La Cour de justice a également retenu, suite aux informations qu'elle a reçues du Président de la commission de recours, que celle-ci avait siégé conformément à l'art. 81 al. 1 du statut. Cet article prévoit que ladite commission est composée de cinq membres, soit un Président choisi par le Conseil d'administration en son sein, deux membres désignés par le Conseil d'administration et deux membres désignés par la Commission du personnel; un juriste assure au surplus le rôle de secrétaire. Le recourant ne conteste pas que la commission de recours était régulièrement composée; il n'indique pas non plus que l'un ou plusieurs des membres ayant siégé auraient dû être récusés. Il se contente en effet de soutenir que la composition aurait dû lui être communiquée, avant ou au moment de la décision. Dès lors que l'autorité était composée conformément aux dispositions applicables, le seul fait que la composition exacte ait été seulement connue du recourant au cours de la procédure de recours devant la Cour de justice ne saurait être constitutif d'une violation de l'art. 29 al. 1 Cst.
Le grief de violation du droit à une autorité composée de manière régulière est partant rejeté.
4.
Le recourant reproche encore à l'autorité précédente de ne pas avoir donné suite à sa demande d'être entendu oralement (art. 29 al. 2 Cst. et 6 § 1 CEDH).
4.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 142 III 48 consid. 4.1.1). En revanche, l'art. 29 al. 2 Cst. ne confère pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1; 134 I 140 consid. 5.3).
4.2. Selon l'art. 6 par. 1 CEDH, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Sauf exceptions - non réalisées en l'espèce -, cette disposition conventionnelle s'applique dans les contestations relatives aux employés publics, notamment lorsqu'elles portent sur un salaire, une indemnité ou d'autres droits de ce type (arrêt de la CourEdH
Vilho Eskelinen et autres contre Finlande du 19 avril 2007, Recueil CourEDH 2007-II p. 1 § 62, confirmé récemment par l'arrêt
Grzeda contre Pologne du 15 mars 2022 § 261).
L'audience publique garantie par cette disposition est un principe fondamental. La publicité n'est pas uniquement importante pour les particuliers; elle l'est également en lien avec la confiance dans le fonctionnement de la justice. Les parties doivent ainsi avoir la possibilité de plaider leur cause en audience publique devant un tribunal indépendant au moins une fois au cours de la procédure, à moins qu'elles aient expressément ou tacitement renoncé à la tenue d'une telle audience (cf. ATF 147 I 219 consid. 2.3.1; 124 I 322 consid. 4a).
La CourEDH a rappelé que l'art. 6 CEDH - en dehors des limitations expressément prévues par cette disposition - n'exige pas nécessairement la tenue d'une audience dans toutes les procédures. Cela est notamment le cas pour les affaires ne soulevant pas de question de crédibilité ou ne suscitant pas de controverse sur les faits qui auraient requis une audience, et pour lesquelles les tribunaux peuvent se prononcer de manière équitable et raisonnable sur la base des conclusions présentées par les parties et d'autres pièces. Partant, on ne saurait conclure, même dans l'hypothèse d'une juridiction investie de la plénitude de juridiction, que la disposition conventionnelle implique toujours le droit à une audience publique, indépendamment de la nature des questions à trancher. D'autres considérations, dont le droit à un jugement dans un délai raisonnable et la nécessité en découlant d'un traitement rapide des affaires inscrites au rôle, entrent en ligne de compte pour déterminer si des débats publics sont nécessaires. La CourEDH a ainsi déjà considéré que des procédures consacrées exclusivement à des points de droit ou hautement techniques pouvaient remplir les conditions de l'art. 6 CEDH même en l'absence de débats publics (arrêt de la CourEDH
Mutu et Pechstein contre Suisse du 2 octobre 2018 § 177).
4.3. En l'espèce, la question à résoudre par la Cour de justice était limitée à la recevabilité du recours dirigé contre l'ouverture d'une enquête administrative. En d'autres termes, le litige dont était saisi l'autorité précédente portait sur le seul point de savoir si la décision d'ouverture de l'enquête administrative était susceptible en soi de recours. Une telle question relève du droit et pouvait, comme l'a retenu la Cour de justice, être résolue de manière équitable et raisonnable sur la base du dossier et des écritures des parties. En tout état, le recourant pourra faire valoir son droit à une audience publique dans le cadre de l'éventuelle procédure qui suivra.
Sur le vu de ce qui précède, le grief de violation du droit d'être entendu doit être écarté.
5.
Le recourant se plaint d'une application arbitraire de l'art. 70 al. 6 RAstatut.
5.1. Le Tribunal fédéral revoit librement l'interprétation et l'application du droit fédéral et du droit constitutionnel cantonal (art. 95 LTF). Il examine en revanche sous l'angle restreint de l'arbitraire l'interprétation et l'application des autres règles du droit cantonal ou communal (ATF 147 I 433 consid. 4.2; 146 II 367 consid. 3.1.5). Une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou lorsqu'elle contredit d'une manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. Le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer quelle est l'interprétation correcte que l'autorité cantonale aurait dû donner des dispositions applicables; il doit uniquement examiner si l'interprétation qui a été faite est défendable. Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci apparaît insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou encore si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que celle-ci soit arbitraire dans son résultat. Si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne se révèle pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 148 II 465 consid. 8.1; 148 I 145 consid. 6.1). Dans ce contexte, il incombe à la partie recourante d'exposer une argumentation spécifique qui réponde aux exigences accrues de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 149 III 81 consid. 1.3; 146 I 62 consid. 3).
5.2. L'art. 70 al. 6 RAstatut prévoit qu'avant de se prononcer, la commission de recours entend le recourant, le responsable hiérarchique du recourant, le supérieur dudit responsable, le représentant des ressources humaines désigné par le directeur exécutif RH, les collègues de l'environnement direct du recourant, ainsi que toute autre personne dont l'audition lui paraît utile. Au surplus, selon l'art. 70 al. 5 RAstatut, la commission de recours réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision conformément à la loi sur la procédure administrative (LPA/GE; RS GE E 5 10).
L'art. 72 LPA/GE prévoit que l'autorité de recours peut, sans instruction préalable, par une décision sommairement motivée, écarter un recours manifestement irrecevable ou rejeter un recours manifestement mal fondé.
5.3. La Cour de justice a considéré que la commission de recours s'était à juste titre fondée sur l'art. 72 LPA/GE pour déclarer le recours irrecevable sans entendre le recourant au préalable, dès lors qu'il s'était suffisamment exprimé dans ses écritures.
Le recourant tient l'interprétation des art. 70 al. 5 et 6 RAstatut de la Cour de justice pour arbitraire. Il considère que l'application de la LPA par le renvoi de l'art. 70 al. 5 RAstatut ne porte que sur l'établissement des faits.
Ce faisant, il se limite en réalité à opposer sa propre interprétation des dispositions litigieuses à celle de l'autorité précédente. Cela ne suffit pas à démontrer le caractère manifestement insoutenable de l'interprétation faite par la Cour de justice. En effet, dès lors qu'un renvoi à la LPA/GE est prévu par le RAstatut pour permettre à la commission de recours de réunir les renseignements et procéder aux enquêtes nécessaires afin de fonder sa décision, il n'apparaît pas choquant que ladite commission puisse également se fonder sur la LPA/GE s'agissant de l'instruction du recours en cas d'irrecevabilité manifeste.
Partant, et à défaut de démonstration d'arbitraire dans l'application des dispositions litigieuses, le grief du recourant doit être écarté.
6.
Le recourant reproche finalement à l'autorité précédente d'avoir commis un déni de justice formel et violé l'art. 29 Cst. en ne traitant pas certains des griefs qu'il a soulevés devant elle.
6.1. Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 Cst. implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 150 III 1 consid. 4.5; 146 II 335 consid. 5.1; 143 III 65 consid. 5.2). La motivation peut pour le reste être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1). En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst. si elle ne se prononce pas sur un des griefs qui lui est valablement soumis, alors qu'elle devrait le faire (cf. ATF 142 II 154 consid. 4.2 et les arrêts cités).
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et examine l'application du droit fédéral; cela étant, et compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , il n'examine en principe que les griefs soulevés, sauf en présence de violations du droit manifestes (ATF 149 II 337 consid. 2.2; 148 V 209 consid. 2.2). Il appartient à la partie recourante de discuter au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse et d'expliquer en quoi ceux-ci seraient contraires au droit (art. 42 al. 2 LTF; ATF 142 I 99 consid. 1.7.1). Les griefs de violation des droits fondamentaux sont en outre soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF), la partie recourante devant alors citer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (ATF 148 I 127 consid. 4.3). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2).
6.2. Le recourant estime que la Cour de justice aurait omis de traiter son grief concernant sa prétendue qualité de lanceur d'alerte. Il se réfère à l'art. 26 al. 3 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst./GE; RS 131.234), qui prévoit en substance qu'un lanceur d'alerte bénéficie d'une protection adéquate. Son statut de lanceur d'alerte aurait dû empêcher l'ouverture d'une enquête administrative, laquelle lui porterait un préjudice réputationnel, professionnel et économique.
On comprend également que le recourant estime que l'autorité précédente aurait omis de traiter ses griefs en lien avec la présomption d'innocence et le principe de l'accusation (art. 6 CEDH), ainsi qu'avec le principe de la bonne foi (5 et 9 Cst.). Il se contente toutefois d'affirmer que la Cour de justice aurait violé les droits précités, alors qu'elle aurait dû admettre le bien-fondé de son recours. Partant, faute de motivation suffisante, il est douteux que ce grief soit recevable (art. 106 al. 2 Cst.).
En tout état, il a déjà été vu (cf. consid. 2.3 ci-dessus) que le recourant n'a pas démontré que les dissensions avec ses supérieurs faisant l'objet de l'enquête administrative étaient survenues après qu'il avait dénoncé une surveillance des employés des SIG. Au surplus, et contrairement à ce qu'affirme le recourant, la Cour de justice n'a pas ignoré ses griefs relatifs à son statut de lanceur d'alerte, à la présomption d'innocence, au principe de l'accusation et au principe de la bonne foi. Elle a en effet considéré, à raison, que l'enquête administrative permettrait justement d'établir précisément les faits pertinents; le fait que le recourant soit partie à ladite enquête lui offrait ainsi plus de droits que s'il était entendu uniquement à titre de témoin, en particulier la possibilité de s'opposer aux conclusions de l'enquête (cf. consid. 7.9 de l'arrêt attaqué). Ce faisant, elle a répondu de manière suffisante au grief tel qu'il était soulevé.
On rappellera encore que les principes de la présomption d'innocence et de l'accusation ressortent du droit pénal (cf. arrêt 8D_5/2021 du 10 février 2022 consid. 4.1) et que le recourant ne prétend pas, à raison, que la présente procédure relèverait du volet pénal de l'art. 6 § 1 CEDH. Il ne saurait dès lors se prévaloir de ces principes.
Par conséquent, le grief de violation de l'art. 29 al. 1 Cst. doit être écarté, dans la mesure de sa recevabilité.
7.
Les considérants qui précèdent conduisent à l'irrecevabilité du recours constitutionnel subsidiaire et au rejet du recours en matière de droit public, dans la mesure de sa recevabilité.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
2.
Le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable.
3.
Les frais de justice, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Il n'est pas alloué de dépens.
5.
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, aux Services Industriels de Genève et à Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 20 septembre 2024
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Kneubühler
La Greffière : Rouiller