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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_794/2022  
 
 
Arrêt du 21 avril 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Hurni. 
Greffier: M. Fragnière. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Nicolas Charrière, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'État de Fribourg, 
case postale 1638, 1701 Fribourg, 
intimé. 
 
Objet 
Conduite d'un véhicule malgré le retrait du permis 
de conduire; présomption d'innocence, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal 
de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal, 
du 4 mai 2022 (501 2021 146). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 11 mai 2021, la Juge de police de l'arrondissement de la Gruyère a libéré A.________ du chef d'accusation de conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR). 
 
B.  
Statuant par arrêt du 4 mai 2022, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal fribourgeois a admis l'appel formé par le ministère public contre le jugement du 11 mai 2021. Elle l'a réformé en ce sens que A.________ était condamné pour conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR) à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, à 80 francs. 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants. 
 
B.a. Par décision du 11 avril 2019, la Commission des mesures administratives en matière de circulation routière (ci-après: la CMA) a retiré le permis de conduire de A.________ pour une durée de 8 mois débutant au plus tard le 11 octobre 2019.  
Cette décision a été envoyée à A.________ par courrier A Plus, qui a été déposé le 17 avril 2019 dans sa boîte aux lettre, à l'entrée de l'immeuble où il est domicilié. 
 
B.b. Le 31 octobre 2019, vers 7 heures, dans la rue de U._________ à V._________ (FR), A.________ a circulé au volant d'un véhicule automobile alors qu'il était sous le coup d'une mesure de retrait de son permis de conduire depuis le 11 octobre 2019.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 4 mai 2022. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à son acquittement et à l'allocation d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits en première et deuxième instances. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision. Il sollicite en outre l'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dans une première partie de son mémoire de recours intitulée "En fait", le recourant présente sa propre version des événements, en introduisant divers éléments qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué, sans démontrer en quoi la cour cantonale aurait arbitrairement omis de retenir ceux-ci (cf. art. 97 al. 1 LTF). 
Ce faisant, il ne présente aucun grief recevable. 
 
2.  
Le recourant conteste sa condamnation pour conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis. Invoquant une violation du principe in dubio pro reo, il se plaint exclusivement d'une notification irrégulière de la décision de retrait du permis de conduire de la CMA du 11 avril 2019.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
2.2. À teneur de l'art. 95 al. 1 let. b LCR, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque conduit un véhicule automobile alors que le permis d'élève conducteur ou le permis de conduire lui a été refusé, retiré ou qu'il lui a été interdit d'en faire usage.  
 
2.2.1. Les éléments constitutifs objectifs de l'art. 95 al. 1 let. b LCR sont réunis lorsqu'une décision de retrait du permis de conduire a été valablement rendue, qu'elle est exécutoire et qu'elle n'a pas été respectée (arrêt 6B_81/2014 du 18 mars 2014 consid. 1.1 et les réf. citées).  
La validité de la notification d'une décision de retrait du permis de conduire est soumise au droit cantonal (arrêt 1C_236/2016 du 15 novembre 2016 consid. 2.3) dont la violation ne constitue pas en tant que tel un motif de recours au Tribunal fédéral (cf. art. 95 LTF). Le droit fédéral prescrit uniquement que la décision de retrait d'un permis de conduire doit être notifiée par écrit, avec indication des motifs (art. 23 al. 1 LCR). 
 
2.2.2. Selon une jurisprudence bien établie, les communications des autorités sont soumises au principe de la réception. Il suffit qu'elles soient placées dans la sphère de puissance de leur destinataire et que celui-ci soit à même d'en prendre connaissance pour admettre qu'elles ont été valablement notifiées (arrêt 6B_192/2021 du 27 septembre 2021 consid. 2.3.1 et les réf. citées). Il n'est donc pas nécessaire que le destinataire ait personnellement en main la décision en cause, encore moins qu'il en prenne effectivement connaissance (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1; 109 Ia 15 consid. 4).  
L'envoi d'une décision par courrier A Plus est un mode de notification des décisions admis par le Tribunal fédéral. À l'instar de ce qui prévaut pour l'avis de retrait d'un pli recommandé, il existe une présomption réfragable selon laquelle le courrier A Plus a été dûment déposé dans la boîte aux lettres ou dans la case postale du destinataire et que la date de distribution a été correctement enregistrée (ATF 142 III 599 consid. 2.2; arrêt 6B_192/2021 précité consid. 2.3.1 et les réf. citées). 
Cette présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire. Si ce dernier ne parvient pas à établir l'absence de dépôt dans sa boîte ou sa case postale au jour attesté par le facteur, la remise est censée avoir eu lieu en ces lieu et date. Dès lors que la non-distribution d'une invitation à retirer un pli est un fait négatif, on ne peut naturellement guère en apporter la preuve formelle. La seule possibilité, toujours envisageable, d'une erreur de la Poste ne suffit pas à renverser la présomption. Il faut au contraire qu'il existe des indices concrets d'erreur (ATF 142 IV 201 consid. 2.3; arrêts 6B_428/2022 du 14 décembre 2022 consid. 1.2; 6B_517/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1.2). La conclusion, tirée de la présomption de distribution, que la preuve du contraire n'a pas été apportée relève de l'appréciation des preuves, que le Tribunal fédéral ne peut revoir que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 142 IV 201 consid. 2.3; arrêts 6B_1350/2022 du 9 février 2023 consid. 3; 6B_517/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1.2 et les réf. citées). 
 
2.3. En l'espèce, la cour cantonale a retenu que la décision de la CMA du 11 avril 2019, expédiée par courrier A Plus, avait été distribuée le 17 avril 2019 dans la boîte aux lettres du recourant, tel que cela ressortait de l'attestation de suivi des envois de la Poste (ci-après: le relevé "Track & Trace"). Il découlait en effet de cette pièce une présomption, selon laquelle l'envoi avait été correctement déposé dans la boîte aux lettres du recourant, qu'aucune circonstance du cas d'espèce n'était propre à renverser.  
Aussi, la cour cantonale a considéré, au regard du droit cantonal (cf. art. 34 al. 1 et 68 al. 1 du Code de procédure et de juridiction administrative [CPJA/FR; RS/FR 150.1]), ainsi que de la jurisprudence fédérale, que la décision de retrait du permis de conduire était entrée dans la sphère de puissance du recourant le 17 avril 2019, de sorte qu'elle avait été valablement notifiée à cette date (cf. arrêt attaqué, consid. 2.1 à 2.3 p. 4 à 6). 
 
2.4.  
 
2.4.1. Le recourant reproche à la cour cantonale de n'avoir pas correctement apprécié les faits en tenant pour établi qu'il avait reçu la décision de la CMA du 11 avril 2019 dans sa boîte aux lettres.  
Par son argumentation, il ne soutient toutefois pas que l'appréciation cantonale serait entachée d'arbitraire et se borne pour l'essentiel à présenter sa propre appréciation des preuves, dans une démarche appellatoire et partant irrecevable dans le recours en matière pénale. 
Il en va ainsi notamment lorsqu'il relève qu'il existait des indices concrets faisant apparaître qu'une erreur de distribution avait pu être commise par la Poste et qu'ainsi, la cour cantonale ne pouvait pas écarter certains éléments qui devaient être appréciés globalement (et non séparément), tels que les erreurs d'acheminement des courriers postaux évoquées par les autorités judiciaires fribourgeoises en novembre 2019, la configuration des boîtes aux lettres devant l'immeuble du recourant et le fait qu'il n'aurait pas pris le volant le 11 avril 2019 face à une voiture de police parquée quelques mètres devant lui, s'il avait effectivement eu connaissance de la décision de retrait du permis de conduire. 
 
2.4.2. Pour le surplus, on ne voit pas que la cour cantonale était empêchée d'écarter tout indice concret d'une erreur de la Poste et de se fier, en définitive, au relevé "Track & Trace" dont il pouvait être présumé que la décision de retrait du permis de conduire avait été déposée dans la boîte aux lettres du recourant le 17 avril 2019.  
Le recourant n'avait en particulier jamais prétendu avoir personnellement rencontré des soucis de distribution de courriers, respectivement avoir été victime d'une erreur de la Poste par le passé, voire que des lettres lui avaient été faussement adressées ou encore que des problèmes étaient récurrents dans son immeuble ou dans son quartier. En outre, le recourant était si négligent dans le suivi de son courrier que les autorités administratives avaient dû solliciter la gendarmerie à 19 reprises entre janvier 2016 et juin 2020 pour la remise de courriers, de mandats et d'autres documents. Il n'avait par ailleurs pas retiré la citation à comparaître à l'audience d'appel, qui lui avait été envoyée par acte judiciaire le 8 février 2022 (cf. arrêt attaqué, consid. 2.3 p. 5). 
Dans ce contexte, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, retenir que les quelques éléments avancés par le recourant ne constituaient pas des indices concrets qui, considérés séparément ou ensemble, étaient propres à renverser en l'espèce la présomption de distribution découlant du relevé "Track & Trace". 
Mal fondé, son grief doit être rejeté dans la faible mesure de sa recevabilité. 
 
2.5. En tant que son argumentation vise à établir que la décision de retrait du permis de conduire n'a pas été valablement notifiée, le recourant ne formule finalement aucun grief tendant à expliquer et à démontrer que les dispositions de droit cantonal correspondantes ont été arbitrairement violées.  
 
2.6. Le recourant ne conteste au surplus pas que les autres conditions de l'infraction au sens de l'art. art. 95 al. 1 let. b LCR sont réalisées. Sa condamnation pour conduite d'un véhicule malgré le refus, le retrait ou l'interdiction de l'usage du permis (art. 95 al. 1 let. b LCR) ne viole pas le droit fédéral, de sorte qu'elle doit être confirmée.  
 
3.  
Le recourant ne consacre par ailleurs aucune critique quant à la peine qui lui a été infligée. 
 
4.  
Les conclusions du recourant tendant à l'octroi d'indemnités pour les dépens cantonaux sont sans objet en tant qu'elles supposent l'acquittement de l'infraction reprochée, qu'il n'obtient pas. 
 
5.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
La cause étant jugée, la demande d'effet suspensif devient sans objet. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal. 
 
 
Lausanne, le 21 avril 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Fragnière