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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_502/2022  
 
 
Arrêt du 22 mars 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Ryter. 
Greffière : Mme Kleber. 
 
Participants à la procédure 
A.________ GmbH, 
recourante, 
 
contre  
 
Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières, Domaine de direction Bases, Section Droit, Taubenstrasse 16, 3003 Berne. 
 
Objet 
Taxation de tabac pour pipe à eau, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 16 mai 2022 (A-5106/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. La société A.________ GmbH (ci-après: A.________ GmbH), inscrite au registre du commerce du canton de Lucerne depuis 2007, a notamment pour but la vente et l'achat (import-export) de marchandises en tout genre, dont les produits du tabac.  
Dans le cadre de son activité d'importation de tabac, A.________ GmbH maintenait un stock important de marchandises en dépôt franc sous douane à U.________. A la fin du mois d'avril 2015, ce stock comprenait 132'594 kg de tabac pour pipe à eau. 
 
A.b. Par modification du 29 avril 2015 de l'art. 2 de l'ordonnance du 14 octobre 2009 sur l'imposition du tabac (OITab; RS 641.311), le Conseil fédéral a décidé d'assimiler le tabac pour pipe à eau au tabac à coupe fine, ce qui a eu pour conséquence une importante augmentation de l'impôt, celui-ci étant passé d'environ 5 fr. par kg (12 % sur un prix de vente au détail de l'ordre de 43 fr.) à environ 80 fr. par kg (cf. annexe III de la loi fédérale du 21 mars 1969 sur l'imposition du tabac [LTab; RS 641.31]). Le nouvel art. 2 al. 6 OITab est entré en vigueur le 1er mai 2015 (RO 2015 1249).  
 
A.c. Le 6 août 2015, A.________ GmbH a déclaré 960 kg de marchandises à l'importation, le solde de son stock étant demeuré en port franc. Une décision de taxation "douane" et une décision de taxation "TVA" ont été rendues le 12 août 2015, imposant les 960 kg de tabac importés selon le nouvel art. 2 al. 6 OITab.  
A.________ GmbH a contesté ces décisions de taxation par les voies de droit internes à l'Administration fédérale des douanes (dénommée depuis le 1er janvier 2022: Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières [OFDF]; ci-après: l'Office fédéral), puis devant le Tribunal administratif fédéral, réclamant, en substance, l'application du droit en vigueur jusqu'au 30 avril 2015 aux 960 kg déclarés, ainsi qu'à l'entier de son stock de tabac pour pipe à eau. 
Par arrêt du 6 avril 2017 (A-882/2016), le Tribunal administratif fédéral a admis le recours de A.________ GmbH, pour autant que recevable, a annulé les décisions attaquées et renvoyé la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il a constaté que le nouvel art. 2 al. 6 OlTab était inapplicable, car le Conseil fédéral avait outrepassé la délégation législative de l'art. 1 al. 2 LTab. Il a, par conséquent, retenu que les 960 kg de tabac importés devaient être imposés à hauteur de 12 % du prix de vente au détail. Il a précisé que le litige était circonscrit au tabac effectivement importé, de sorte qu'il n'est pas entré en matière sur les conclusions de A.________ GmbH allant au-delà (consid. 1.2.2). 
L'Office fédéral a interjeté recours contre cet arrêt auprès du Tribunal fédéral, en sollicitant l'effet suspensif, lequel a été accordé par ordonnance présidentielle du 8 juin 2017 (cause 2C_454/2017). 
 
A.d. Le 25 avril 2017, A.________ GmbH a requis l'autorisation d'importer l'entier de son tabac pour pipe à eau entreposé en dépôt franc sous douane sur la base des dispositions en vigueur jusqu'au 30 avril 2015, en se prévalant de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral du 6 avril 2017. L'Office fédéral a refusé de faire droit à cette demande en invoquant l'absence d'entrée en force de l'arrêt du Tribunal administratif fédéral.  
A.________ GmbH a réitéré sa demande tendant à l'imposition de l'intégralité de ses stocks selon le régime applicable avant l'art. 2 al. 6 OITab les 9 mai, 24 mai et 7 juillet 2017. Par décision du 18 août 2017, confirmée sur opposition le 11 décembre 2017, l'Office fédéral a refusé d'entrer en matière sur ces demandes, faute d'importation concrète, d'une part, et d'un droit à la fixation préalable de l'impôt, d'autre part. Par arrêt du 6 novembre 2018 (A-601/2018), le Tribunal administratif fédéral a confirmé cette décision, retenant que A.________ GmbH n'avait pas d'intérêt digne de protection, respectivement de droit, à ce que le taux d'imposition soit fixé pour des marchandises non importées. Cet arrêt est entré en force. 
 
A.e. Le 1er septembre 2017 est entrée en vigueur la modification du 17 mars 2017 de la LTab (RO 2017 4041). D'après l'art. 10 al. 1 let. b LTab modifié, l'impôt est fixé de la même manière pour le tabac à coupe fine et le tabac pour pipe à eau.  
 
A.f. Par arrêt du 11 octobre 2018 rendu dans la cause relative à une autre société ayant importé 18 kg de tabac pour pipe à eau le 20 août 2015 (2C_343/2018), le Tribunal fédéral a confirmé que le Conseil fédéral avait outrepassé la délégation législative contenue dans la loi sur le tabac en adoptant l'art. 2 al. 6 OITab (consid. 4.6).  
 
 
A.g. Du fait de cet arrêt, l'Office fédéral a retiré son recours contre l'arrêt du 6 avril 2017 du Tribunal administratif fédéral relatif à la société A.________ GmbH, ce dont le Tribunal fédéral a pris acte par ordonnance du 13 novembre 2018 (ordonnance 2C_454/2017 du 13 novembre 2018).  
 
B.  
 
B.a. Par courriers des 10 avril et 6 juin 2019 à la Direction des douanes compétente, A.________ GmbH a sollicité une décision constatant son droit au dédouanement de tout son tabac entreposé en port franc à l'aune des dispositions en vigueur jusqu'au 30 avril 2015.  
 
B.b. En parallèle, A.________ GmbH a initié d'autres procédures. Elle a notamment déposé des actions en responsabilité contre les membres de l'Office fédéral, ainsi que contre les membres du Conseil fédéral.  
 
B.c. Par décision en constatation du 10 juillet 2019, confirmée le 11 septembre 2020 par l'Office fédéral, la Direction d'arrondissement douanière a retenu que la taxation du tabac pour pipe à eau encore entreposé en dépôt franc sous douane serait effectuée, en cas d'importation, conformément à la législation en vigueur le jour de la déclaration en douane, respectivement au moment de la sortie du dépôt.  
A.________ GmbH a recouru contre ce prononcé auprès du Tribunal administratif fédéral. 
 
B.d. Par arrêt du 11 novembre 2021 (2E_3/2020 et 2E_4/2020), le Tribunal fédéral a rejeté l'action en responsabilité formée par A.________ GmbH et une autre société contre les membres du Conseil fédéral, retenant que ceux-ci n'avaient pas commis d'acte illicite en adoptant l'art. 2 al. 6 OITab et en promulguant son entrée en vigueur immédiate.  
 
B.e. Par arrêt du 16 mai 2022, le Tribunal administratif fédéral a rejeté la requête de mesures provisionnelles formée par A.________ GmbH durant la procédure, rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours contre la décision de l'Office fédéral du 11 septembre 2020 confirmant la décision en constatation du 10 juillet 2019 et mis les frais de la procédure à la charge de A.________ GmbH.  
 
C.  
A.________ GmbH forme un "recours" au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 16 mai 2022. Elle demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt attaqué et, principalement, de constater que le régime légal applicable à l'importation des 59'468.40 kg de tabac pour pipe à eau encore entreposés en port franc est celui en vigueur au 30 avril 2015, qui correspond à un taux de 12 % par kg pour le calcul de l'impôt sur l'importation, ainsi que, subsidiairement, de renvoyer la cause à l'instance inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants. A.________ GmbH demande en outre au Tribunal fédéral d'ordonner la production des actes de la procédure, de lui accorder une audience, de réserver son droit de compléter le recours et son droit de répliquer, ainsi que de l'acheminer à prouver ses allégués par toutes voies de droit. 
Le Tribunal administratif fédéral se réfère intégralement à son arrêt et ne formule pas d'observations. L'Office fédéral conclut au rejet du recours, sous suite de frais. A.________ GmbH n'a pas répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La recourante n'a pas indiqué par quelle voie de recours elle procède auprès du Tribunal fédéral. Toutefois, cette omission ne saurait lui nuire si son recours remplit les exigences légales de la voie de droit qui lui est ouverte (cf. ATF 138 I 367 consid. 1.1). 
 
1.1. L'arrêt attaqué, qui concerne l'impôt sur le tabac, les droits de douane et la TVA relatifs à l'importation des stocks de tabac pour pipe à eau de la recourante, est une décision finale (art. 90 LTF), rendue par le Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF).  
En vertu de l'art. 83 let. l LTF, le recours en matière de droit public est exclu à l'encontre des décisions en matière de perception de droits de douane fondée sur le classement tarifaire ou le poids des marchandises. En l'occurrence, le litige porte sur la question du droit applicable en cas d'importation des marchandises de la recourante. La cause ne tombe ainsi pas sous le coup de l'exception de l'art. 83 let. l LTF et la voie du recours en matière de droit public est donc ouverte (cf. arrêt 2C_343/2018 du 11 octobre 2018 consid. 1). 
 
1.2. Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 LTF) et, sous réserve de certains griefs ne satisfaisant pas aux exigences de motivation (cf. infra consid. 4.3 et 7), dans les formes prescrites (art. 42 al. 1 et 2 LTF). La recourante est la destinataire de l'arrêt attaqué et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification, de sorte qu'il faut lui reconnaître la qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF).  
 
1.3. La conclusion tendant à ce que soit réservé le droit de la recourante de compléter son recours est irrecevable. En effet, la recourante a déposé son recours le dernier jour du délai et la possibilité de déposer un mémoire complémentaire n'est prévue qu'en matière d'entraide pénale internationale (art. 43 LTF; arrêt 2C_402/2021 du 10 novembre 2021 consid. 1.2). La conclusion tendant à ce que la recourante soit acheminée à prouver ses allégués par toutes voies de droit est également irrecevable. Des mesures probatoires ne sont en effet qu'exceptionnellement ordonnées dans une procédure de recours (cf. ATF 136 II 101 consid. 2) et il n'y a pas de motif de faire exception ici.  
 
1.4. La demande de la recourante tendant à la production du dossier du Tribunal administratif fédéral est sans objet, cette autorité ayant déposé le dossier de la cause en application de l'art. 102 al. 2 LTF.  
 
1.5. Il convient d'entrer en matière sur le recours sous les réserves qui précèdent.  
 
2.  
La recourante sollicite une audience devant le Tribunal fédéral. 
Le Tribunal fédéral statue par voie de circulation (art. 58 al. 2 LTF). Selon l'art. 57 LTF, le président peut ordonner des débats. Il n'y est cependant tenu que dans la mesure où des règles de rang supérieur l'y obligent. Or, l'art. 29 al. 2 Cst. ne garantit pas, de façon générale, le droit d'être entendu oralement (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1) et, sous réserve du droit pénal fiscal, qui n'est pas en cause en l'espèce, les litiges en matière fiscale n'entrent pas dans le champ d'application de l'art. 6 § 1 CEDH (ATF 140 I 68 consid. 9.2; 132 I 140 consid. 2.1). Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu d'entendre oralement la recourante. La demande est rejetée. 
 
3.  
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit au sens des art. 95 s. LTF. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés, sauf en présence de violations du droit évidentes (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4; arrêt 2C_1131/2013 du 31 mars 2015 consid. 2.1, non publié in ATF 141 II 113). La partie recourante doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4). Il doit exister un lien entre la motivation du recours et la décision attaquée; la partie recourante ne peut se contenter de reprendre presque mot pour mot l'argumentation formée devant l'autorité précédente (ATF 145 V 161 consid. 5.2; 134 II 244 consid. 2.1 et 2.3). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation des droits fondamentaux que si ce moyen est invoqué et motivé par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 148 I 127 consid. 4.3; 143 IV 500 consid. 1.1). 
 
4.  
La recourante dénonce une violation de son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.). Elle reproche au Tribunal administratif fédéral de ne pas avoir tenu compte de faits déterminants, à savoir les décisions du 11 juillet 2015 et du 3 mai 2015. Cette critique, qui relève de l'arbitraire dans l'établissement des faits, est examinée ci-après (cf. infra consid. 5.2). La recourante fait aussi grief aux précédents juges de ne pas avoir analysé certains moyens de droit invoqués dans son recours, soit "les principes de proportionnalité et de liberté économique du fait de l'application de l'OITab en vigueur, pas de la norme elle-même; l'application de l'OITab, pas son établissement, l'interdiction de l'arbitraire ou l'abus de droit" (p. 31 du recours).  
 
4.1. La jurisprudence a déduit du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) le devoir pour le juge de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient. Pour répondre à ces exigences, le juge doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; 134 I 83 consid. 4.1). En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé lorsqu'elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre. L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 141 V 557 consid. 3.2.1; 137 II 266 consid. 3.2; 136 I 229 consid. 5.2).  
 
4.2. En l'occurrence, le Tribunal administratif fédéral a exposé tous les griefs de la recourante et y a répondu. Il a expliqué en détail pour quelles raisons il n'y avait pas de violation des principes dont elle se prévalait (consid. 10). Sous l'angle de la proportionnalité en lien avec les libertés fondamentales invoquées par la recourante, qui se plaint essentiellement d'une charge fiscale trop lourde ayant pour conséquence de l'entraver dans son activité, les précédents juges ont noté que la procédure n'avait pas pour objet de discuter du régime mis en place par le législateur. Ils ont du reste douté de l'impossibilité alléguée par la recourante de pouvoir importer ses stocks selon les taux actuellement applicables, notant qu'elle avait écoulé la moitié de son stock depuis 2015. En tout état, ils ont considéré que la question relevait d'une éventuelle remise d'impôt et non du litige qui leur était soumis (consid. 10.5).  
Le Tribunal administratif fédéral ayant examiné les griefs de la recourante ou expliqué pour quels motifs il n'y avait pas lieu de les traiter dans le cadre du litige, le grief tiré de la violation du droit d'être entendu ne peut qu'être rejeté. 
 
4.3. Cette conclusion a pour conséquence que la Cour de céans n'examinera pas les griefs de la recourante tirés de la violation des principes de la proportionnalité, de la liberté économique et de la garantie de la propriété, ainsi que du principe de l'égalité devant la loi. En effet, p our ces griefs, la recourante ne fait que reproduire son recours devant le Tribunal administratif fédéral, en remplaçant le terme "décision attaquée" par "arrêt attaqué". Concernant l'égalité de traitement, la recourante a certes ajouté quelques phrases, mais elle ne s'en prend pas, même sommairement, à l'argumentation du Tribunal administratif fédéral. Une telle manière de faire n'est pas admissible au regard de l'art. 42 al. 2 LTF et les griefs doivent être déclarés irrecevables (ATF 145 V 161 consid. 5.2; 134 II 244 consid. 2.3; cf. supra consid. 3).  
 
5.  
La recourante reproche au Tribunal administratif fédéral d'avoir omis des faits décisifs. 
 
5.1. Le Tribunal fédéral se fonde sur les faits constatés par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF). Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2; 142 II 355 consid. 6; 139 II 373 consid. 1.6). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
5.2. La recourante reproche au Tribunal administratif fédéral de ne pas avoir tenu compte de la "décision du 11 juillet 2015", ni du "contenu fondamental de la décision du 3 mai 2015".  
L'arrêt entrepris ne mentionne en effet aucune décision du 3 mai 2015 ou du 11 juillet 2015. La recourante invoque toutefois leur existence de manière appellatoire. Dans la mesure où on ne comprend pas à quelles décisions la recourante se réfère, ni quelle pourrait être leur incidence sur le litige, il n'y a pas lieu de prendre en compte ces faits. 
 
5.3. La recourante allègue qu'elle a demandé à l'Office fédéral la taxation de la totalité de son stock entreposé au port franc de U.________ le 25 avril 2017 et que la résolution de cette demande a été mise en suspens en date du 3 mai 2017 par l'autorité jusqu'à droit connu, cette situation étant restée telle jusqu'à la décision en constatation du 10 juillet 2019.  
L'allégation de la recourante quant à une suspension d'une procédure de taxation de ses stocks entreposés en port franc s'oppose aux constats de l'arrêt attaqué. D'après celui-ci en effet, l'Office fédéral n'a pas suspendu la cause, mais refusé la demande du 25 avril 2017 de la recourante. Les précédents juges ont aussi relevé que la recourante avait réitéré sa demande en dates des 9 mai, 24 mai et 7 juillet 2017 et que par décision du 18 août 2017, confirmée le 11 décembre 2017 sur opposition, puis par arrêt du 6 novembre 2018 du Tribunal administratif fédéral, il a été considéré qu'elle n'avait pas d'intérêt digne de protection, respectivement de droit à ce que le taux d'imposition soit fixé pour des marchandises non importées. 
La recourante, qui se garde de faire état des éléments susmentionnés, ne démontre pas l'arbitraire des constats qui précèdent. Il n'y a donc pas lieu de s'écarter de l'arrêt entrepris. Le grief tiré de la violation de l'interdiction de l'arbitraire en lien avec les faits est rejeté. 
 
5.4. Il est précisé qu'il ne sera tenu compte dans ce qui suit ni des nombreux faits allégués dans le recours qui ne résultent pas de l'arrêt attaqué, ni du recours devant le Tribunal administratif fédéral auquel renvoie la recourante. D'une part, la recourante se contente de présenter sa propre version des événements, sans alléguer ni démontrer que les faits auraient été constatés de manière arbitraire par le Tribunal administratif fédéral. D'autre part, comme déjà indiqué, un renvoi aux écritures antérieures n'est pas admissible au regard de l'art. 42 LTF (cf. arrêt 2C_687/2021 du 4 octobre 2021 consid. 4.3). Conformément à l'art. 105 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral se fondera exclusivement sur les faits établis dans l'arrêt entrepris.  
 
6.  
Le litige porte sur le point de savoir si c'est à bon droit que le Tribunal administratif fédéral a confirmé la décision en constatation de l'Office fédéral retenant que le taux d'imposition applicable aux stocks de tabac pour pipe à eau de la recourante entreposés en port franc sera celui en vigueur au moment de la déclaration en douane, respectivement au moment de la sortie du dépôt. 
 
6.1. Aux termes de l'art. 1 al. 1 LTab, la Confédération perçoit un impôt sur les tabacs manufacturés, ainsi que sur les matières qui sont utilisées de la même manière que le tabac (produits de substitution). Le tabac pour pipe à eau constitue, de manière générale, un tabac manufacturé (art. 2 al. 1 OITab; arrêt 2C_343/2018 du 11 octobre 2018 consid. 4.2). Sont notamment soumis à l'impôt les tabacs manufacturés importés (art. 4 al. 1 let. a LTab). Pour ces tabacs, l'impôt est dû conformément aux dispositions applicables à la naissance de la dette douanière (art. 9 al. 1 let. b LTab). De même, en matière d'impôt sur les importations tel que prescrit par la loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée du 12 juin 2009 (loi sur la TVA; LTVA; RS 641.20), la dette fiscale prend naissance en même temps que la dette douanière (art. 56 al. 1 LTVA). Le montant de l'impôt est ainsi calculé sur la base des taux et base de calcul applicables au moment de la naissance de la dette douanière (cf. art. 19 al. 1 let. b de la loi du 18 mars 2005 sur les douanes [LD; RS 631.0]).  
 
6.2. Selon l'art. 69 LD, la dette douanière naît: au moment où le bureau de douane accepte la déclaration en douane (a); si le bureau de douane a accepté la déclaration en douane avant l'introduction des marchandises dans le territoire douanier ou avant leur sortie de celui-ci, au moment où les marchandises franchissent la frontière douanière (b); si la déclaration en douane a été omise, au moment où les marchandises franchissent la frontière douanière ou sont utilisées ou remises pour d'autres emplois (art. 14, al. 4), ou sont écoulées hors de la période libre (art. 15) ou, si aucune de ces dates ne peut être établie, au moment où l'omission est découverte (c); si la déclaration en douane a été omise lors de la sortie du dépôt franc sous douane, au moment où les marchandises en sortent ou, si cette date ne peut être établie, au moment où l'omission est découverte (d).  
Il ressort de cette disposition que l'élément déterminant pour la naissance de la dette douanière est le franchissement effectif de la frontière douanière par les marchandises (cf. aussi art. 7 LD: "les marchandises introduites dans le territoire douanier sont soumises aux droits de douane"; cf. MICHAEL BEUSCH, in KOCHER/CLAVADESTSCHER [ édit.], Stämpflis Handkommentar Zollgesetz, 2009, n. 3 ad art. 69 LD). Pour des marchandises entreposées en dépôt franc sous douane, la dette douanière naît lorsque ces marchandises sont transférées du régime de l'entrepôt douanier à celui de la mise en libre pratique et arrivent sur le marché intérieur (cf. art. 69 let. d LD; message du Conseil fédéral du 15 décembre 2003 relatif à la loi sur les douanes, FF 2004 517, p. 589 s.).  
 
6.3. En l'occurrence, sur le vu du système sus-exposé et comme l'a confirmé le Tribunal administratif fédéral, les marchandises de la recourante entreposées au port franc de U.________ seront taxées selon la législation en vigueur au moment de la naissance de la dette douanière, soit au moment de l'acceptation de la déclaration en douane ou au moment de la sortie du dépôt franc sous douane.  
Cette solution ne revient pas à appliquer le nouveau droit à des faits entièrement révolus sous l'ancien comme le prétend la recourante, qui se contente du reste sur ce point de répéter mot pour mot la même argumentation que devant l'autorité précédente, ce qui n'est pas admissible (cf. art. 42 al. 2 LTF; cf. supra consid. 3). Les faits qu'elle cite, à savoir la commande des marchandises et leur entreposage en port franc, intervenus avant le 1er mai 2015, ne sont en effet pas pertinents pour la détermination de la naissance de la dette douanière et partant des taux applicables d'imposition.  
 
6.4. La recourante fait valoir qu'elle a introduit une demande de taxation de la totalité de sa marchandise le 25 avril 2017, soit avant la modification de l'art. 10 LTab entrée en vigueur le 1 er septembre 2017. Elle devrait donc bénéficier selon elle des anciens taux, afin que soit respectée la teneur de l'arrêt du Tribunal fédéral du 11 octobre 2018 ayant constaté l'illégalité de l'art. 2 al. 6 OITab entré en vigueur le 1 er mai 2015.  
Il ressort de l'arrêt attaqué que la recourante a déposé une demande d'autorisation d'importer sa marchandise le 25 avril 2017, qu'elle a réitérée les 9 mai, 24 mai et 17 juillet 2017. Il n'est en revanche pas établi qu'elle a procédé à l'importation effective des marchandises. La dette d'impôt n'est donc née à aucune de ces dates. Le Tribunal administratif fédéral n'a partant pas méconnu le principe de la légalité et la teneur de l'arrêt du Tribunal fédéral du 11 octobre 2018 (2C_343/2018) ayant constaté l'illégalité de l'art. 2 al. 6 OITab introduit par le Conseil fédéral en considérant que la recourante ne pouvait pas bénéficier du régime d'imposition en vigueur avant le 1er mai 2015. On relève par ailleurs que le Tribunal administratif fédéral a retenu dans son arrêt du 6 novembre 2018 (cf. supra point A.d de l'état de fait) que la recourante n'avait pas le droit à une décision en constatation de l'impôt, ce qui n'a pas été contesté par l'intéressée. C'est donc en vain que celle-ci répète dans le cadre de la présente procédure qu'elle était dans l'impossibilité concrète de s'acquitter des nouvelles taxes résultant de l'art. 2 al. 6 OITab.  
 
6.5. La recourante fait aussi valoir qu'elle a formulé une demande d'importation le 30 avril 2015 et que l'Office fédéral aurait refusé d'appliquer l'ancien régime fiscal par décision du 7 juillet 2015. Il conviendrait de constater la nullité de cette décision.  
Ces faits ne résultent pas de l'arrêt attaqué. Ils sont allégués de manière appellatoire et le Tribunal fédéral n'a donc pas à les prendre en compte (cf. supra consid. 5.2). Au demeurant, si la recourante a effectivement été taxée le 7 juillet 2015 sur la base de l'art. 2 al. 6 OITab tel qu'entré en vigueur le 1 er mai 2015, on ne voit pas ce qui l'empêchait de contester cette décision devant le Tribunal administratif fédéral, comme elle a contesté la décision du 12 août 2015 relative aux 960 kg de tabac pour pipe à eau effectivement importés.  
 
6.6. La recourante estime que les règles de la bonne foi et la protection des droits acquis imposent de la laisser importer le reste de ses stocks aux taux d'imposition en vigueur avant le 1er mai 2015, car l'entrée en vigueur de l'art. 2 al. 6 OITab était imprévisible et soudaine.  
Comme l'a relevé le Tribunal administratif fédéral, il n'y a pas lieu de revenir sur l'adoption et la mise en vigueur de l'art. 2 al. 6 OITab dans le cadre de la présente procédure en constatation du droit applicable. Le régime qui sera applicable en cas d'importation par la recourante est en effet celui découlant de l'art. 10 al. 1 let. b LTab et non plus de l'art. 2 al. 6 OITab comme elle persiste à le croire. 
 
6.7. La recourante cite l'art. 190 al. 2 let. e de la loi fédérale sur le droit international privé du 18 décembre 1987 (LDIP; RS 291). Elle estime que l'arrêt entrepris doit être annulé car, portant atteinte à sa liberté professionnelle et à ses droits de la personnalité consacrés à l'art. 27 CC, il serait contraire à l'ordre public.  
L'art. 190 LDIP concerne les motifs de recours à l'encontre d'une sentence en matière d'arbitrage international, ce que l'arrêt attaqué n'est pas. Cette disposition n'a aucune pertinence en l'espèce. 
 
6.8. En conclusion, c'est à bon droit que le Tribunal administratif fédéral a confirmé que le tabac pour pipe à eau de la recourante entreposé en port franc devra être taxé selon les taux applicables au moment de la déclaration en douane ou de la sortie du dépôt franc.  
 
7.  
La recourante, qui expose qu'une de ses associées est algérienne, dénonce une violation des art. 4 et 6 de l'Accord entre le Conseil fédéral suisse et le Gouvernement de la République Algérienne Démocratique et Populaire concernant la promotion et la protection réciproque des investissements du 30 novembre 2004 (RS 0.975.212.7), ainsi que la violation des art. 6 § 1, 8, 14 et 17 CEDH. 
La recourante ne fait que citer toutes ces dispositions, sans développer aucunement sa critique. Eu égard à l'art. 42 al. 2 LTF, ainsi que, s'agissant de la CEDH, à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur ces griefs (cf. supra consid. 3).  
 
8.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, à l'Office fédéral de la douane et de la sécurité des frontières et au Tribunal administratif fédéral, Cour I. 
 
 
Lausanne, le 22 mars 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : E. Kleber