Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_133/2025
Arrêt du 22 mai 2025
I
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Kiss, Juge présidant, Denys et May Canellas.
Greffier : M. Douzals.
Participantes à la procédure
A.________,
représentée par Me B.________, avocate,
recourante,
contre
C.________ SA,
intimée.
Objet
mainlevée provisoire; restitution de délai (art. 148 CPC),
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 5 février 2025 par la IIe Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg (102 2025 16).
Faits :
A.
A.a. Par décision du 1er octobre 2024 (complètement d'office selon l'art. 105 al. 2 LTF), la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de la Gruyère a notamment prononcé, à concurrence de 489'000 fr. et de 200'000 fr., intérêts et frais en sus, la mainlevée provisoire de l'opposition qu'avait formée A.________ (ci-après: la poursuivie ou la recourante) au commandement de payer no xxx de l'Office des poursuites de la Gruyère que lui avait fait notifier C.________ SA (ci-après: la poursuivante ou l'intimée).
A.b. Le 6 décembre 2024, la poursuivie a déposé un recours contre ladite décision auprès de la IIe Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.
Par ordonnance du 16 décembre 2024, la poursuivie a été invitée à verser une avance de frais de 1'200 fr. dans un délai de dix jours.
L'avance de frais requise n'ayant pas été versée dans le délai fixé, un délai supplémentaire échéant le 14 janvier 2025 a été imparti à la poursuivie par ordonnance du 7 janvier 2025. Dite ordonnance a été notifiée à l'avocate de la poursuivie le 9 janvier 2025.
Le 9 janvier 2025, l'avocate de la poursuivie a informé celle-ci par courriel que l'avance de frais devait être payée au plus tard le 14 janvier 2025. À la même date, elle a déposé dans une autre procédure, pour le compte de sa cliente, une requête de restitution du délai en raison de prétendus problèmes informatiques rencontrés par sa mandante.
La poursuivie a payé l'avance de frais le 17 janvier 2025.
Par arrêt du 22 janvier 2025, le Vice-président de la IIe Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg a déclaré le recours du 6 décembre 2024 manifestement irrecevable.
B.
Le 27 janvier 2025, la poursuivie a déposé une requête de restitution de délai pour payer l'avance de frais auprès de la IIe Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.
Par arrêt du 5 février 2025, la IIe Cour d'appel civil a rejeté ladite requête.
C.
Contre cet arrêt, qui lui avait été notifié le 12 février 2025, la poursuivie a formé un recours auprès du Tribunal fédéral le 14 mars 2025. Elle conclut en substance à ce que l'arrêt attaqué soit annulé et réformé, en ce sens que sa requête de restitution de délai soit admise.
L'intimée et la cour cantonale n'ont pas été invitées à se déterminer sur ledit recours.
Considérant en droit :
1.
Interjeté dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 LTF) par la poursuivie, qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF; cf. arrêts 5A_280/2020 du 8 juillet 2020 consid. 1; 5A_180/2019 du 12 juin 2019 consid. 1 et les arrêts cités; 4A_163/2015 du 12 octobre 2015 consid. 1.1) rendue par le tribunal supérieur du canton de Fribourg (art. 75 LTF) dans une affaire en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF) dont la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF; cf. arrêt 5A_941/2021 du 5 juillet 2023 consid. 2 et les références citées), le recours en matière civile est en principe recevable.
2.
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3).
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2).
Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 446 consid. 4.1, 462 consid. 2.3). Il ne peut en revanche pas être interjeté pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est toutefois possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 138 I 1 consid. 2.1; 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 462 consid. 2.3).
2.3. Dans une partie intitulée "Procédure", la recourante invoque de nombreux faits qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale et dont elle ne sollicite pas valablement le complètement (cf.
supra consid. 2.1). La Cour de céans ne saurait donc tenir compte de ces éléments.
3.
La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 148 CPC et d'avoir commis un déni de justice formel en rejetant sa requête de restitution du délai pour verser l'avance de frais.
3.1.
3.1.1. Aux termes de l'art. 148 CPC, le tribunal peut accorder un délai supplémentaire ou citer les parties à une nouvelle audience lorsque la partie défaillante en fait la requête et rend vraisemblable que le défaut ne lui est pas imputable ou n'est imputable qu'à une faute légère (al. 1). La requête est présentée dans les dix jours qui suivent celui où la cause du défaut a disparu (al. 2). Si une décision a été communiquée, la restitution ne peut être requise que dans les six mois qui suivent l'entrée en force de la décision (al. 3).
Le défaut doit découler d'une absence de faute ou d'une faute légère. L'art. 148 al. 1 CPC est ainsi moins sévère que les art. 50 al. 1 LTF, 13 al. 1 PCF, 33 al. 4 LP et 94 al. 1 CPP, qui subordonnent la restitution à l'absence de toute faute. La faute légère vise tout comportement ou manquement qui, sans être acceptable ou excusable, n'est pas particulièrement répréhensible, tandis que la faute grave suppose la violation de règles de prudence vraiment élémentaires qui s'imposent impérieusement à toute personne raisonnable (arrêts 4A_617/2020 du 21 janvier 2021 consid. 3.1; 5A_280/2020 du 8 juillet 2020 consid. 3.1.1; 4A_52/2019 du 20 mars 2019 consid. 3.1). Une maladie subite d'une certaine gravité qui empêche la partie de se présenter ou de prendre à temps les dispositions nécessaires peut justifier une restitution de délai (arrêts 4A_617/2020 précité consid. 3.1; 5A_280/2020 précité consid. 3.1.1 et les références citées; 4A_163/2015 du 12 octobre 2015 consid. 4.1 et l'arrêt cité). Seule la maladie survenant à la fin du délai de recours et empêchant la partie de défendre elle-même ses intérêts, ainsi que de recourir à temps aux services d'un tiers, constitue un empêchement non fautif (arrêts 4A_617/2020 précité consid. 3.1; 5A_280/2020 précité consid. 3.1.1 et les arrêts cités).
Le point de savoir quelles circonstances excusables une partie a rendu vraisemblables concerne l'appréciation des preuves et constitue une question de fait. En revanche, dire si la faute de la partie requérante peut encore être qualifiée de légère au regard des constatations de fait souveraines de l'autorité précédente est une question de droit (arrêts 4A_617/2020 précité consid. 3.1; 5A_280/2020 précité consid. 3.1.1 et les arrêts cités; 4A_52/2019 précité consid. 3.1; 4A_163/2015 précité consid. 4.1). Il suffit que les conditions (matérielles) d'application de l'art. 148 CPC soient rendues vraisemblables par le requérant, qui supporte le fardeau de la preuve. La requête de restitution doit ainsi être motivée, c'est-à-dire indiquer l'empêchement, et accompagnée des moyens de preuve disponibles (arrêts 4A_617/2020 précité consid. 3.1; 5A_280/2020 précité consid. 3.1.1; 4A_52/2019 précité consid. 3.1).
Le juge appelé à se prononcer sur la requête de restitution dispose d'une marge d'appréciation. Le Tribunal fédéral n'intervient dès lors que si la décision attaquée s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, si elle s'appuie sur des faits qui, dans le cas particulier, ne devaient jouer aucun rôle ou, à l'inverse, si elle n'a pas tenu compte d'éléments qui auraient absolument dû être pris en considération; il sanctionne en outre les décisions rendues en vertu d'un pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (arrêts 4A_617/2020 précité consid. 3.1; 5A_280/2020 précité consid. 3.1.1; 4A_52/2019 précité consid. 3.1; 4A_334/2016 du 7 juillet 2016 consid. 4.2 et les arrêts cités).
Pour trancher la question de la restitution du délai, une partie doit se laisser imputer la faute de son représentant (arrêts 5A_280/2020 précité consid. 3.1.2; 4A_617/2020 précité consid. 3.1; 4A_52/2019 précité consid. 3.1; 5A_927/2015 du 22 décembre 2015 consid. 5.1; 5A_393/2013 du 17 octobre 2013 consid. 2.4).
3.1.2. Il y a formalisme excessif, constitutif d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 145 I 201 consid. 4.2.1; 142 IV 299 consid. 1.3.2; 142 I 10 consid. 2.4.2; 135 I 6 consid. 2.1).
3.2. En substance, la cour cantonale a considéré (1) que, dès lors que l'ordonnance du 7 janvier 2025 avait été correctement notifiée à l'avocate de la poursuivie le 9 janvier 2025, il appartenait à la mandataire de la poursuivie de s'assurer que le versement fût effectué à temps, (2) que ladite avocate aurait notamment pu appeler sa cliente ou l'autorité compétente, (3) que l'avocate, qui n'était pas elle-même empêchée, ne pouvait pas se prévaloir de la défaillance informatique de sa cliente pour justifier une restitution du délai pour verser l'avance de frais, (4) qu'elle pouvait d'autant moins le faire qu'elle savait, le 9 janvier 2025, que le système informatique de sa cliente était défaillant et qu'il y avait donc un risque qu'elle ne reçût pas son courriel, de sorte qu'elle aurait dû redoubler de vigilance en s'assurant que sa cliente avait bien pris connaissance de l'information communiquée dans son courriel et (5) qu'un tel contrôle se justifiait d'autant plus que le délai en question constituait déjà le bref délai supplémentaire octroyé conformément à l'art. 101 al. 3 CPC. Elle a jugé que le comportement de l'avocate constituait une faute grave imputable à sa cliente, de sorte que la requête de restitution devait être rejetée.
3.3. La recourante invoque, en substance, (1) qu'elle a dûment justifié auprès de la cour cantonale qu'en raison d'une défaillance affectant depuis octobre 2024 la totalité de son système informatique, elle n'a pas reçu de nombreux courriels, et notamment celui que son avocate lui avait envoyé le 9 janvier 2025, (2) qu'il "résulte [...] formellement de l'historique des appels téléphoniques émis sur le portable de [son avocate] que celle-ci [lui] a bien précisément téléphoné [...] le 9 janvier à 19h06 pour s'assurer de la transmission de l'information", (3) que son avocate a pris toutes les mesures raisonnables et que sa responsabilité n'est donc pas engagée, (4) qu'il ne saurait incomber à un avocat de verser une avance de frais "au lieu et place de son mandant" et (5) qu'elle n'a pu verser l'avance de frais qu'après l'échéance du délai supplémentaire car elle a été appelée en urgence au chevet de sa mère.
Elle soutient par ailleurs que le rejet de sa requête en restitution du délai équivaudrait à un déni de justice formel, dans la mesure où le recours cantonal qu'elle avait déposé à l'encontre de la décision de mainlevée aurait ainsi été déclaré à tort irrecevable par la cour cantonale.
3.4. La recourante se fonde de nouveau sur de nombreux faits qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale et dont elle ne sollicite pas valablement le complètement, faute pour elle de démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle les aurait valablement allégués et prouvés devant la cour cantonale (cf.
supra consid. 2.1). Partant, la Cour de céans ne peut tenir compte de ces éléments. Il en va notamment ainsi du prétendu appel téléphonique de son avocate et du fait qu'elle se serait rendue au chevet de sa mère. En outre, les nombreuses pièces nouvelles produites par la recourante sont également irrecevables, dès lors que celle-ci n'établit pas qu'elles résulteraient de l'arrêt attaqué (art. 99 al. 1 LTF).
Dès lors notamment que l'avocate de la recourante savait, le jour où elle a reçu l'ordonnance du 7 janvier 2025, que le système informatique de sa mandante était défaillant et que l'ordonnance du 7 janvier 2025 prévoyait un bref et ultime délai pour verser l'avance de frais, la cour cantonale n'a pas excédé sa marge d'appréciation en retenant que l'absence de contrôle par l'avocate de la poursuivie que sa mandante avait bien eu connaissance dudit délai constituait une faute grave imputable à sa cliente et que la requête en restitution du délai pour verser l'avance de frais devait donc être rejetée.
Étant donné que le paiement de l'avance de frais dans le délai (supplémentaire) imparti est une condition de recevabilité du recours (art. 101 al. 3 CPC), que la recourante n'a pas versé l'avance de frais dans ledit délai et qu'elle ne saurait se prévaloir d'une absence de faute ou d'une faute légère dans le cadre de sa requête en restitution dudit délai, la recourante ne saurait être suivie lorsqu'elle affirme que son recours cantonal aurait été à tort déclaré irrecevable. Partant, son grief relatif à un prétendu déni de justice formel tombe à faux.
Les griefs doivent donc être rejetés, dans la mesure de leur recevabilité.
4.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, selon la procédure simplifiée prévue par l'art. 109 al. 2 let. a LTF.
Les frais judiciaires seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Dès lors que l'intimée n'a pas été invitée à se déterminer, il ne lui sera pas alloué de dépens.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la II
e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg.
Lausanne, le 22 mai 2025
Au nom de la I re Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
La Juge présidant : Kiss
Le Greffier : Douzals