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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_63/2024  
 
 
Arrêt du 23 janvier 2025  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Bovey, Président, Herrmann et De Rossa. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Alexandre Massard, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Alexandre Zen-Ruffinen, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
servitude d'interdiction ou de restriction du droit de bâtir; radiation d'une servitude devenue inutile (art. 736 CC), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, Cour d'appel civile, du 11 décembre 2023 (CACIV.2023.81/ctr). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ est propriétaire de l'immeuble n° 696 du cadastre de la commune de U.________. La maison d'habitation qui s'y trouve actuellement a été construite en 1955, à l'adresse rue V.________ 100.  
B.________ est propriétaire de la parcelle n° 9196 située sur la même commune, à la rue V.________ 65. Dite parcelle comprend actuellement trois immeubles en PPE, correspondant aux n os 9477/C, 9475/A et 9476/B.  
La parcelle n° 9196 se trouve au nord de la rue V.________, en face de la parcelle n° 696, située au sud de cette rue, en vis-à-vis. 
Le bien-fonds n° 696 est bordé à l'est par la parcelle n° 269 et à l'ouest par la parcelle n° 508 (aussi n° 12511). 
 
A.b. L'immeuble n° 696 est grevé d'une servitude au profit des fonds dominants n os 9196, 269 et 12511 (correspondant aussi au n° 508). Celle-ci est inscrite comme suit au registre foncier: "Ch. Interdiction de construire avec clause de déchéance à l'exception d'un pavillon d'habitation, interdiction d'y installer un débit de boissons ou une industrie bruyante ou d'y planter des arbres de haute futaie."  
L'acte constitutif de cette servitude est la "Convention modificative de servitudes foncières" (ci-après: la convention), conclue le 21 mars 1955 par les anciens propriétaires des différents biens-fonds concernés (parmi lesquels figure C.________, association à U.________). La clause déterminante de cet acte prévoit: 
 
" Constitution de servitudes 
Messieurs D.________ et E.________, Monsieur F.________ et Monsieur G.________ aux noms qu'ils agissent et Mademoiselle H.________ déclarent d'un commun accord grever l'article six cent nonante six (696) du cadastre de U.________ en faveur des articles deux cent soixante neuf (269), cinq cent huit (508) et six mille cent treize (6113) [i.e. la parcelle qui, avec la parcelle n° 6114, donnera la parcelle 9196] d'une servitude interdisant la construction sur l'article 696 de tout bâtiment, à l'exception d'un pavillon d'habitation le long de la rue V.________, d'une surface totale de 59,5 mètres carrés au sol et dont le toit aura une surface maximum de 76,6 mètres carrés. La hauteur totale du pavillon ne pourra pas dépasser 2,81 mètres calculés du niveau actuel de la rue V.________ (non compris une cheminée et une bouche d'aération de la salle de bains). 
D'autre part, le propriétaire de l'article 696 s'interdit d'installer sur son immeuble un débit de boissons ou une industrie bruyante; il s'interdit enfin de planter des arbres de haute futaie dans la partie de son immeuble non occupé [ sic] par le pavillon, mais s'oblige à maintenir, au besoin à remplacer à sa convenance, la verdure existante.  
Enfin, la servitude limitant la faculté de construire sur l'article 696 serait annulée purement et simplement sans indemnité dans la mesure où elle profite aux articles 269 et 508, le jour où les propriétaires de ces immeubles viendraient l'un et l'autre à construire des maisons d'un étage rez-de-chaussée à une distance inférieure à trois mètres des limites communes. 
Ces servitudes seront inscrites au registre foncier à la requête du notaire. " 
L'opération formalisée dans la convention prévoyait en outre la radiation d'autres servitudes qui grevaient précédemment les parcelles concernées et visait à les adapter à la construction projetée par H.________, propriétaire de la parcelle n° 696. À cet égard, il était constaté que la surface totale des deux pavillons existant alors sur cette dernière parcelle était de 43 m2 environ, représentant environ 145 m3, alors que la construction projetée par H.________ occuperait environ 59,5 m2 et représenterait environ 147 m3. La hauteur du faîte du toit existant alors était de 3,40 mètres et la hauteur maximale de la construction projetée serait de 2,81 mètres. La convention précisait: "Dans ces circonstances, la présente convention ne constitue pas un allègement des servitudes grevant l'article 696 mais une modification de l'assiette des servitudes existantes. Par conséquent, la présente convention ne comporte pas d'indemnités." 
 
B.  
Le 30 septembre 2021, après avoir obtenu une autorisation de procéder portant sur les mêmes conclusions, A.________ a déposé devant le Tribunal civil du Littoral et du Val de Travers (ci-après: le tribunal civil ou le premier juge) une demande de radiation de servitude au sens de l'art. 736 al. 1 CC contre B.________, concluant à ce que soit ordonné la radiation totale de la servitude grevant son bien-fonds au profit de la parcelle n° 9196 (1) et à ce que le conservateur du registre foncier soit invité à procéder aux inscriptions nécessaires (2), sous suite de frais et dépens (3). 
B.________ a conclu au rejet de la demande. 
Une audience a été tenue le 19 janvier 2023, lors de laquelle il a été procédé à une vision locale. 
 
B.a. Par jugement du 15 août 2023, le tribunal civil a rejeté la demande.  
 
B.b. Statuant le 11 décembre 2023, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté l'appel déposé par A.________.  
 
C.  
Agissant le 31 janvier 2024 par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, A.________ (ci-après: le recourant) conclut à la réforme de l'arrêt cantonal dans le sens des conclusions 1 et 2 de sa demande (cf. supra let. B), sous suite de frais et dépens tant pour l'instance fédérale que pour l'instance cantonale.  
Des déterminations n'ont pas été demandées. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont ici réalisées (art. 72 al. 1, art. 74 al. 1 let. b, art. 75 al. 1 et 2, art. 76 al. 1 let. a et b, art. 90 et art. 100 al. 1 avec l'art. 46 al. 1 let. c LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit au sens des art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 précité consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 144 II 313 consid. 5.1; 142 III 364 précité loc. cit.).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que si l'autorité cantonale n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte de preuves pertinentes ou a opéré, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence).  
 
3.  
 
3.1. Aux termes de l'art. 736 al. 1 CC, le propriétaire grevé peut exiger la radiation d'une servitude qui a perdu toute utilité pour le fonds dominant. Cette faculté découle du principe général selon lequel une servitude doit présenter un intérêt raisonnable pour l'ayant droit (ATF 121 III 52 consid. 2a; 108 II 39 consid. 3a; 107 II 331 consid. 3; arrêt 5A_162/2021 du 9 septembre 2021 consid. 5.1). D'après la jurisprudence, l'utilité pour le fonds dominant se définit par l'intérêt du propriétaire de ce fonds à exercer la servitude conformément à son objet et à son contenu. A cet égard, il faut tenir compte du principe de l'identité de la servitude qui veut qu'un tel droit ne peut être maintenu dans un autre but que celui pour lequel il a été constitué. Il convient ainsi d'examiner en premier lieu si le propriétaire du fonds dominant a encore un intérêt à exercer la servitude selon son but initial et quel est le rapport entre cet intérêt et celui qui existait au moment de la constitution de la servitude (arrêt 5A_395/2024 du 8 novembre 2024 consid. 2 destiné à la publication; ATF 130 III 554 consid. 2; 121 III 52 consid. 2a et 3a; arrêt 5A_525/2020 du 14 novembre 2022 consid. 2.1). L'intérêt du propriétaire du fonds dominant s'apprécie selon des critères objectifs (ATF 130 III 554 consid. 2; 121 III 52 consid. 3a et les références; arrêt 5A_162/2021 précité loc. cit.).  
La question de savoir si une servitude conserve une utilité conforme à son but initial doit s'apprécier en fonction de toutes les circonstances du cas d'espèce et relève du pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC). Le Tribunal fédéral s'impose dès lors une certaine retenue en la matière. Il n'intervient que si l'autorité cantonale a pris en considération des éléments qui ne jouent aucun rôle au sens de la loi ou a omis de tenir compte de facteurs essentiels (ATF 144 III 442 consid. 2.6; 142 III 336 consid. 5.3.2; arrêt 5A_162/2021 précité loc. cit.).  
 
3.2. Les considérations qui précèdent permettent de retenir que la détermination de l'objectif prêté initialement à la servitude revêt un caractère décisif dans la perspective de son éventuelle radiation. La cour cantonale a retenu à cet égard que le but poursuivi par la servitude, tel que défini par le premier juge, n'était pas contesté sur la question de la protection de la vue et de la préservation de la tranquillité, mais qu'il l'était en revanche en lien avec la limitation du volume, ce dernier point n'étant cependant pas déterminant (cf. infra consid. 6) en tant que les deux premiers objectifs visés par la servitude (cf. infra consid. 4 et 5) revêtaient toujours une utilité pour le fonds dominant. Le recourant le conteste sous l'angle de l'appréciation arbitraire des faits et, après avoir encore soulevé une violation de l'art. 736 al. 1 CC (cf. infra consid. 7), invoque enfin un déni de justice formel en lien avec la servitude liée à l'interdiction d'installer un débit de boissons ou une industrie bruyante (cf. infra consid. 8).  
 
4.  
Il convient d'abord d'examiner si la préservation de la vue conserve une utilité pour le fonds dominant, comme l'a considéré principalement la cour cantonale. Le recourant le nie sous l'angle de l'appréciation arbitraire des faits. 
 
4.1.  
 
4.1.1. Au sujet de l'objectif même de la servitude, les juges cantonaux ont estimé qu'au moment de la signature de la convention, le maintien d'un dégagement constituait un élément essentiel et absolu pour le fonds dominant, qui n'était alors pas construit. En modification de la servitude déjà existante, la propriétaire du fonds servant avait admis une restriction plus importante de la hauteur de sa construction (de 3,4 mètres à 2,81 mètres), limitation qui était inconditionnelle au profit de la parcelle de l'intimée, située au nord - au contraire de celle au bénéfice des parcelles jouxtant de part et d'autre le fonds servant, qui dépendait de la hauteur des constructions qui y seraient érigées et pour lesquelles la limitation ne valait désormais plus.  
Cet objectif n'est en tant que tel pas discuté par le recourant. 
 
4.1.2. Pour la cour cantonale, il s'agissait dès lors uniquement de déterminer si la préservation d'une vue avait encore une utilité pour la parcelle n° 9196 et non pas de savoir si celle-ci avait été construite depuis 1955. Or les photographies figurant au dossier démontraient que le bâtiment érigé sur le fonds dominant comportait trois étages, avec des fenêtres nombreuses du rez-de-chaussée au troisième étage inclus; elles permettaient de se convaincre qu'à la hauteur de la parcelle du fonds servant, l'alignement des bâtiments qui se succédaient au sud de la rue V.________ était clairement interrompu sur quelques mètres par une "trouée", impression accentuée par le fait que les bâtiments à l'est et à l'ouest étaient agrémentés d'un jardin jouxtant le fonds servant. Par cet effet, une vue depuis probablement le premier et encore plus les deuxième et troisième étages du bâtiment érigé sur le fonds dominant était garantie. La levée de la servitude ne permettrait plus de garantir cette aération. La préservation de la vue avait par ailleurs gagné en importance en raison de la construction non seulement du fonds dominant, mais également des parcelles jouxtant le fonds servant. Le fait qu'une route se situât entre les deux parcelles litigieuses ne modifiait pas cette impression générale aérée, la chaussée n'étant pas large; un sentiment de proximité avec le vis-à-vis se dégageait ainsi à l'évidence et construire un immeuble plus élevé sur la parcelle du fonds servant limiterait manifestement la vue depuis le fonds dominant.  
 
4.2. Le recourant reproche à la cour cantonale son appréciation arbitraire de la situation factuelle et la conséquence qu'elle en tire, à savoir l'intérêt toujours actuel du fonds dominant à la préservation de la vue. Pour l'essentiel, son argumentation consiste à nier l'impression de dégagement que retient la cour cantonale à l'avantage du bien-fonds dominant. Il affirme ainsi que la petite dimension de son bien-fonds ne permettrait d'abriter qu'une construction modeste, inapte par principe à obstruer la vue du fonds dominant, tout en relevant la vaste surface de ce dernier bien-fonds en comparaison du sien, l'important retrait du bâtiment qui y était érigé et la route séparant les parcelles litigieuses, ces dernières circonstances permettant à son sens de relativiser le dégagement que permettait d'apporter la servitude dont il demande la radiation.  
 
4.3. Ce faisant, le recourant se limite toutefois à une simple opposition de point de vue, inefficace à démontrer l'arbitraire de l'appréciation des preuves effectuée sur ce point par les juges cantonaux (cf. supra consid. 2.2), laquelle se fonde au demeurant sur les différentes photos figurant au dossier ainsi que sur la vision locale effectuée par le premier juge. Aucun élément apporté par le recourant ne permet d'écarter le dégagement constaté à l'avantage du bien-fonds dominant que garantit la servitude litigieuse, le caractère - certes étroit - de la vue qu'elle permet ne suffisant pas à autoriser le recourant à en exiger la radiation.  
 
5.  
Il s'agit ensuite d'examiner si le fonds servant bénéficiait toujours d'un intérêt à la préservation de la tranquillité qu'assurait de surcroît la servitude litigieuse - objectif que le recourant ne conteste pas. La cour cantonale l'affirme dans une motivation subsidiaire, que le recourant discute sous l'angle de l'appréciation arbitraire des faits. 
 
5.1.  
 
5.1.1. La préservation de la tranquillité a été examinée par la cour cantonale exclusivement en lien avec la restriction de bâtir. Ainsi qu'il le sera constaté ultérieurement, il faut admettre que la préservation de la tranquillité se rattache non seulement à cette dernière restriction, mais également à l'interdiction d'installer un débit de boissons ou une industrie bruyante (cf. infra consid. 8.2).  
 
5.1.2. L'autorité cantonale a essentiellement comparé la présente situation à celle décrite dans l'arrêt 5A_162/2021 du 9 septembre 2021, auquel le recourant se référait largement. Elle en a déduit que la situation prévalant dans cette dernière affaire - où la radiation d'une servitude de restriction de bâtir avait été admise - était différente de la présente, même si toutes deux concernaient le même secteur de la ville de U.________. Il n'y avait donc aucun arbitraire à considérer que le développement autour du quartier ici litigieux (rue V.________) n'était pas comparable à celui prévalant dans la procédure 5A_162/2021 (ruelle W.________). Plus précisément, les juges cantonaux ont relevé que, dans le cas précité, les parcelles concernées n'étaient pas contiguës et le quartier en question (constitué initialement de vignes et de vergers) avait subi de tels changements entre le moment de la constitution de la servitude et la demande de sa radiation (développement du quartier, physionomie des lieux) que la restriction de bâtir sur le fonds servant et le maintien de la servitude ne se justifiaient plus sous l'angle de la préservation de la tranquillité; dans la présente affaire, hormis a priori la parcelle dominante, le quartier était dans les grandes lignes resté le même (constructions de hauteur limitée sur le versant sud de la rue, avec un style architectural qui ne visait pas la densification) et la servitude attaquée prenait la place d'une servitude précédente, avec une limitation plus importante de la hauteur de la construction possible, pour des surface et volume comparables. L'autorité cantonale en a déduit que le présent litige se rapprochait bien plutôt de l'affaire 5A_340/2013 tranchée le 27 août 2013 par la Cour de céans, où la radiation de la restriction de bâtir avait été refusée en raison du fait que le cadre de vie que la servitude visait à préserver (quartier calme, constructions de petites dimensions) était encore largement semblable à celui qui existait au moment de la constitution de la servitude. Les juges cantonaux ont par ailleurs estimé qu'une comparaison avec des bâtiments aussi éloignés que le Lycée X.________ n'était quant à elle pas pertinente, pas plus que ne l'était le fait que l'intimée aurait elle-même contribué à l'augmentation de la fréquentation du quartier dès lors que sa parcelle n'était pas frappée des mêmes restrictions et qu'au demeurant, le seul argument de la préservation de la vue (cf. supra consid. 4.1.2) était suffisant pour considérer que le maintien de la servitude s'imposait.  
 
5.2. Le recourant soutient d'abord que, pour évaluer la tranquillité, il serait arbitraire de se fonder uniquement sur les fonds grevé et bénéficiaire, mais qu'il conviendrait d'appréhender le lieu dans sa globalité, dans son unité et sa physionomie propres. En ce sens, il était manifestement erroné de retenir que les quartiers de la ruelle W.________ (arrêt 5A_162/2021) et de la rue V.________ ne seraient pas les mêmes dans les deux causes en tant que ceux-ci étaient en réalité situés à moins de 70 mètres l'un de l'autre, que l'accès à la ruelle W.________ se faisait par la rue V.________ et qu'une augmentation du trafic dans celle-là en impliquait "mécaniquement" une dans celle-ci. Le recourant poursuit en qualifiant d'insoutenable le refus de prendre en considération la construction érigée postérieurement à 1955 sur le fonds dominant. Ce bâtiment, fréquenté continuellement par le public en tant d'abord que service des automobiles, puis par les patients des nombreux cabinets médicaux s'y étant installés par la suite, avait pourtant lui-même contribué à l'augmentation du passage de véhicules et de piétons, tout comme d'ailleurs le Lycée X.________, situé à moins de 100 mètres. Le recourant reproche enfin à la cour cantonale d'avoir négligé les dimensions modestes du fonds servant, soulignant que sa parcelle ne pourrait ainsi avoir le moindre impact sur la tranquillité de l'endroit.  
 
5.3. En se limitant à affirmer la proximité des quartiers de la ruelle W.________ et du Lycée X.________ avec celui de la rue V.________, le recourant n'attaque aucunement les critères retenus par la cour cantonale pour justifier les différences que présentaient pourtant les deux situations et expliquant son refus de les assimiler. L'on peut certes se demander si la construction du bâtiment plus important érigé sur la parcelle dominante pourrait constituer un critère permettant de relativiser la tranquillité du quartier, ainsi que l'affirme le recourant. Celui-ci se limite toutefois sur ce point à l'indication générale selon laquelle "la destination et l'utilisation constante" de la construction aurait "contribué à l'augmentation de véhicules et de piétons". Il apparaît toutefois que le bâtiment abrite des cabinets médicaux, lesquels devraient logiquement être limités à une fréquentation diurne, et que la circulation sur ce tronçon y est modérée, selon les constatations du premier juge, reprises - certes dans un autre contexte - par la cour cantonale. Pour autant que recevable, l'argumentation du recourant échoue ainsi à démontrer l'arbitraire de l'appréciation cantonale du point de vue de la tranquillité visée par la servitude et de l'intérêt à son maintien au bénéfice du fonds servant. L'on précisera enfin que la radiation sollicitée par le recourant lui permettrait de bâtir sans restriction, sans qu'il établisse concrètement, malgré son affirmation, que la surface de son bien-fonds le limiterait à une construction de taille très modeste.  
 
6.  
La cour cantonale a également relevé que le recourant contestait le contenu de la servitude en lien avec la limitation du volume. Elle a néanmoins considéré que celle-ci constituait bien un but poursuivi par la servitude et que, contrairement à ce qu'affirmait le recourant en invoquant la violation de l'art. 55 al. 1 CPC, cet objectif avait été allégué par les parties en se référant au texte de la servitude et à la convention, cette dernière y faisant expressément référence. Dans une remarque subsidiaire, l'autorité cantonale a précisé que cette question était de toute manière sans incidence sur le sort de la cause dans la mesure où l'utilité persistante de la servitude de vue suffisait à écarter la radiation sollicitée par l'intéressé. 
 
6.1. Le recourant se réfère à nouveau à l'art. 55 al. 1 CPC et à un défaut d'allégation sur ce point. Sous l'angle de l'arbitraire dans l'appréciation des preuves, il souligne que le volume ne ressortait pas du texte de la servitude et qu'il était usuel, dans une convention, de décrire un état de fait dans la perspective d'une modification future déjà connue des parties.  
 
6.2. La question de la persistance de l'intérêt lié à la limitation du volume peut en réalité être laissée indécise. Ainsi que le relève la cour cantonale, le volume de la construction autorisée sur la parcelle grevée est clairement spécifié dans le texte de la convention, circonstance qui permet de déduire que la restriction de bâtir était bien circonscrite à un certain volume. Mais quoi qu'il en soit, une telle restriction ne constitue pas un objectif en soi: elle doit être plutôt reliée à une perspective de garantie de la vue ou de la tranquillité, lesquelles viennent d'être examinées dans un sens défavorable au recourant.  
 
7.  
Sous le grief de violation de l'art. 736 CC, le recourant reproche encore à la cour cantonale d'avoir considéré que la construction du bâtiment sur le fonds dominant avait accentué l'intérêt au maintien de la servitude sous l'angle du critère de la préservation de la vue. Il y voit une actualisation de l'intérêt, qui s'écarterait ainsi de manière inadmissible de l'intérêt initial à la constitution de la servitude, en violation de la disposition susmentionnée. 
Cette critique peut être d'emblée écartée. La cour cantonale a simplement indiqué que la présence du bâtiment accentuait l'intérêt au maintien du but initial de la servitude que constituait la préservation de la vue. Cette constatation n'implique assurément aucune modification ou actualisation de cet objectif. 
 
8.  
Dans un dernier grief, le recourant invoque un déni de justice formel en relation avec l'aspect de la servitude lié à l'interdiction d'installer un débit de boisson ou une industrie bruyante. 
 
8.1. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir développé sa motivation exclusivement en lien avec la restriction de bâtir prévue par la servitude, sans aucunement examiner l'interdiction d'installer un débit de boisson ou une industrie bruyante, dont il avait pourtant également demandé la radiation en appel. Ces deux éléments de la servitude étaient indépendants l'un de l'autre et pouvaient ainsi faire l'objet d'une radiation individuelle. Le recourant précise dans ce contexte qu'une telle installation serait absolument impossible, tant en raison des strictes règles de droit public en la matière que de la configuration même du fonds servant, circonstance justifiant sa radiation.  
 
8.2. Avec le recourant, il faut admettre que l'autorité cantonale n'a pas examiné la possibilité de radier la servitude en tant qu'elle concernait l'installation d'un débit de boisson ou d'une industrie bruyante. Le fait d'indiquer que le maintien de l'intérêt lié à la préservation de la vue - à l'évidence rattaché à la restriction de bâtir exclusivement - suffisait à écarter la radiation sollicitée par le recourant (cf. supra consid. 5.1.2) le confirme du reste implicitement. Cette omission n'est cependant pas déterminante. La cour cantonale a en effet conclu à titre subsidiaire, sans contestation efficace du recourant, que l'objectif relatif à la préservation de la tranquillité du quartier - certes examiné dans le contexte de la restriction de bâtir - servait toujours le fonds dominant (cf. supra consid. 5). Or il apparaît évident que l'interdiction d'installer un débit de boisson ou une industrie bruyante se rattache à ce dernier aspect. C'est d'ailleurs sous cet angle que l'avait examiné le premier juge, sans que cela soit contesté par le recourant.  
 
8.3. L'on précisera encore que l'obsolescence de cet aspect de la servitude en raison de la prétendue impossibilité de son exercice n'est pas démontrée par le recourant, le renvoi général aux "strictes règles du droit public en la matière" et à la "configuration même du fonds servant" étant à cet égard insuffisant.  
 
9.  
En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les frais judiciaires sont à la charge du recourant (art. 66 al. 1 LTF); aucune indemnité de dépens n'est octroyée à l'intimée qui n'a pas été invitée à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel, Cour d'appel civile. 
 
 
Lausanne, le 23 janvier 2025 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Bovey 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso