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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_530/2023  
 
 
Arrêt du 23 juillet 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, Hänni, 
Ryter et Kradolfer. 
Greffière : Mme Kleber. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Maîtres Nadine von Büren-Maier et/ou Clara Weill, Avocates, 
recourante, 
 
contre 
 
Service de la consommation et des affaires vétérinaires du canton de Genève (SCAV), 
quai Ernest-Ansermet 22, 1205 Genève. 
 
Objet 
Complément alimentaire, retrait du marché. 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 24 août 2023 (ATA/902/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société A.________ SA (ci-après: A.________ ou la société) est une société anonyme inscrite au registre du commerce qui a pour but, en Suisse et à l'étranger, la recherche, le développement, la production et le commerce de tous produits cosmétiques et pharmaceutiques, basés sur des technologies douces. Elle distribue en Suisse les produits B.________. 
Le 11 février 2022, le Service de la consommation et des affaires vétérinaires du canton de Genève (ci-après: le Service cantonal) a demandé à A.________ des informations concernant le produit "complément alimentaire à base d'extraits d'aubépine et de passiflore" (ci-après: le complément alimentaire), dont il avait prélevé un échantillon lors d'un contrôle officiel en pharmacie le 4 novembre 2021. 
La société a transmis au Service cantonal la fiche technique de l'ingrédient PPS Passiflore-Aubépine, une étude de 2010 portant sur la toxicité orale chez le rat par la méthode par classe de toxicité aiguë et la fiche " Quali Quanti formula " du produit.  
 
B.  
Dans un rapport "d'analyse-décision" du 2 mars 2022, le Service cantonal a constaté que le complément alimentaire contenait de l'extrait hydroalcoolique d'aubépine (espèces crataegus monogyna et oxyacantha) et de passiflore (espèce passiflora incarnata). La société n'ayant pas pu fournir la documentation requise sur ces ingrédients, ils devaient être considérés comme "nouvelles sortes de denrées alimentaires" au sens de la législation applicable, de sorte que leur commercialisation nécessitait une autorisation préalable de l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV; ci-après: l'Office fédéral). Le Service cantonal a ordonné les mesures suivantes:  
 
"1. Les denrées alimentaires contenant des ingrédients considérés comme nouvelles sortes de denrées alimentaires ne doivent ni être commercialisées ni utilisées dès lors qu'elles n'ont pas été autorisées au sens des art. 16 et 17 de l'ordonnance du 16 décembre 2016 sur les denrées alimentaires et les objets usuels. Le solde de la marchandise doit être retiré du commerce avec effet immédiat. 
 
2. Elucider les causes et prendre les mesures correctives appropriées au sens de l'art. 34 al. 3 de la loi fédérale du 20 juin 2014 sur les denrées alimentaires et les objets usuels. Mettre en place ou modifier l'autocontrôle afin de veiller, dans le cadre de l'activité, à ce que les marchandises soient conformes aux exigences légales au sens de l'art. 26 LDAI. Notamment, réévaluer les denrées alimentaires commercialisées par A.________ SA qui contiendraient des ingrédients considérés comme nouvelles sortes de denrées alimentaires et n'ayant pas obtenu d'autorisation de commercialisation. 
 
3. Informer le chimiste cantonal des quantités totales de marchandises encore en stock, vendues et retirées du commerce, et des mesures correctives mises en place au sens de l'art. 34 al. 3 LDAI". 
 
Par décision du 12 octobre 2022, le Service cantonal a rejeté l'opposition de A.________ contre cette décision. 
A.________ a formé un recours auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) à l'encontre de la décision du 12 octobre 2022. 
Par arrêt du 24 août 2023, la Cour de justice a rejeté le recours. Elle a considéré que c'était conformément au droit et sans abuser de son pouvoir d'appréciation que le Service cantonal avait prononcé la décision litigieuse, car la recourante devait obtenir une autorisation de l'Office fédéral avant de commercialiser de nouvelles sortes de denrées alimentaires. 
 
C.  
Contre l'arrêt du 24 août 2023, A.________ forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, principalement à l'annulation de l'arrêt du 24 août 2023, de la décision sur opposition du 12 octobre 2022 et du rapport-décision du 2 mars 2022 et, subsidiairement, au renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La société a requis l'effet suspensif. La Cour de justice a indiqué s'en rapporter à justice sur ce point. Le Service cantonal a conclu au rejet de la demande. Par ordonnance du 27 octobre 2023, la Présidente de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif. 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Service cantonal conclut au rejet du recours. L'Office fédéral a émis des observations. Il souligne qu'il est l'autorité compétente s'agissant de la mise sur le marché des nouvelles sortes de denrées alimentaires (ci-après également: nouvel aliment) et que, sur la base des informations au dossier, il n'est pas en mesure de se prononcer sur le statut des ingrédients utilisés dans le complément alimentaire de la recourante. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt attaqué a été rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) relevant de la loi fédérale sur les denrées alimentaires et les objets usuels du 20 juin 2014 (Loi sur les denrées alimentaires, LDAI; RS 817.0) et de la législation d'application, en particulier l'ordonnance sur les denrées alimentaires et les objets usuels du 16 décembre 2016 (ODAIOUs; RS 817.02) et l'ordonnance du Département fédéral de l'intérieur sur les nouvelles sortes de denrées alimentaires du 16 décembre 2016 (RS 817.022.2; ci-après: ordonnance sur les nouvelles sortes de denrées alimentaires). Ce domaine ne tombe sous le coup d'aucune des exceptions de l'art. 83 LTF, de sorte que la voie du recours en matière de droit public est ouverte. La décision de la Cour de justice est en outre une décision finale au sens de l'art. 90 LTF (arrêt 2C_1146/2012 du 21 juin 2013 consid. 1.2 à propos des décisions prises par les autorités cantonales compétentes chargées du contrôle des denrées alimentaires). Enfin, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par la destinataire de l'arrêt attaqué, qui a qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Il convient donc d'entrer en matière, sous réserve de la conclusion en annulation des décisions du 12 octobre 2022 et du 2 mars 2022, qui est irrecevable compte tenu de l'effet dévolutif complet du recours à la Cour de justice, l'arrêt de cette autorité se substituant aux prononcés antérieurs (ATF 136 II 539 consid. 1.2). 
 
2.  
Le litige porte sur la décision du Service cantonal ordonnant à la recourante de retirer avec effet immédiat du commerce son complément alimentaire contenant des ingrédients considérés comme de nouvelles sortes de denrées alimentaires soumises à autorisation et la sommant de prendre les mesures appropriées selon l'art. 34 al. 3 LDAI, ainsi que de respecter son obligation d'autocontrôle, notamment en lien avec le caractère nouveau des ingrédients qu'elle utilise. 
 
 
3.  
À titre liminaire, il convient d'examiner la nature de la décision rendue par le Service cantonal et confirmée par la Cour de justice, eu égard à la répartition des compétences entre l'Office fédéral et les cantons s'agissant de l'autorisation de mise sur le marché et du contrôle des nouvelles sortes de denrées alimentaires. 
 
3.1. Depuis l'entrée en vigueur le 1er mai 2017 de la LDAI, toutes les denrées alimentaires peuvent, sur le principe, être mises sur le marché sans autorisation à condition d'être sûres et de respecter les exigences légales (art. 7 ss LDAI). Cela inclut les compléments alimentaires (cf. art. 1 ordonnance du DFI sur les compléments alimentaires du 16 décembre 2016 [OCAI; RS 817.022.14]).  
En vertu de l'art. 7 al. 5 LDAI, le Conseil fédéral peut toutefois introduire une obligation d'autorisation ou de notification pour certaines denrées et notamment pour les "nouvelles sortes de denrées alimentaires" (art. 7 al. 5 let. a LDAI). L'objectif est la sécurité alimentaire (cf. art. 118 al. 2 Cst.). Les nouvelles sortes de denrées alimentaires sont définies à l'art. 15 ODAIOUs. En substance, il s'agit de denrées alimentaires dont la consommation humaine en Suisse ou dans les États membres de l'Union européenne (ci-après: UE) était négligeable avant le 15 mai 1997 et qui remplissent en sus certains critères (cf. infra consid. 6.1 et 6.2).  
Selon le régime mis en place aux art. 16 ss ODAIOUs, les nouvelles sortes de denrées alimentaires peuvent être mises sur le marché suisse sans (nouvelle) autorisation à condition de figurer sur la liste de l'annexe à l'ordonnance sur les nouvelles sortes de denrées alimentaires (art. 16 let. a ODAIOUs et art. 6 al. 1 ordonnance sur les nouvelles sortes de denrées alimentaires) ou sur la liste des nouveaux aliments autorisés dans l'UE, auquel l'annexe renvoie (règlement [UE] 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relatif aux nouveaux aliments, modifiant le règlement [UE] no 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant le règlement [CE] no 258/97 du Parlement européen et du Conseil et le règlement [CE] no 1852/2001 de la Commission, JO L 327 du 11.12.2015, p.1 et règlement d'exécution [UE] 2017/2470 de la Commission du 20 décembre 2017 établissant la liste de l'Union des nouveaux aliments conformément au règlement [UE] 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil relatif aux nouveaux aliments, JO L 351 du 31.12.2017, p. 72). Si la nouvelle sorte de denrée alimentaire ne figure pas sur ces listes, sa commercialisation nécessite une autorisation. La demande doit être adressée à l'Office fédéral (art. 16 let. b ODAIOUs; art. 2 et 3 ordonnance sur les nouvelles denrées alimentaires). L'Office fédéral octroie l'autorisation aux conditions de l'art. 17 ODAIOUs. Il vérifie en particulier que la denrée alimentaire concernée est sûre (cf. art. 17 al. 1 renvoyant à l'art. 3 al. 1 ODAIOUs). 
 
3.2. En vertu de l'art. 26 LDAI, le respect de la législation en matière de denrées alimentaires est avant tout fondé sur le principe de l'autocontrôle par les distributeurs (arrêt 2C_519/2023 du 1er mars 2024 consid. 6.2). Il revient donc en premier lieu à ceux-ci de déterminer si une denrée alimentaire est soumise à autorisation. Pour les nouvelles sortes de denrées alimentaires, l'Office fédéral met à disposition une "check-list des documents pour la clarification du statut de nouvel aliment" (cf. site de l'Office fédéral, https://www.blv.admin.ch/blv/fr/home/lebensmittel-und-ernaehrung/rechts-und-vollzugsgrundlagen/bewilligung-und-meldung/bewilligung.html [consulté la dernière fois le 3 juin 2024], ci-après: la check-list).  
En sus de l'auto-contrôle, la loi prévoit que les autorités d'exécution procèdent à des contrôles officiels ponctuels (art. 30 LDAI). Lorsque les autorités d'exécution constatent que les exigences fixées par la loi ne sont pas remplies, elles prononcent une contestation (art. 33 LDAI) et mettent en oeuvre les mesures prévues aux art. 34 à 37 LDAI. En vertu de l'art. 34 LDAI, les autorités d'exécution ordonnent les mesures nécessaires à la remise en conformité avec le droit (al. 1). Elles peuvent décider si le produit contesté: a. peut être utilisé, cette utilisation étant assortie ou non de charges; b. doit être éliminé par l'entreprise, aux frais de cette dernière; c. doit être confisqué, rendu inoffensif, utilisé de façon inoffensive ou éliminé aux frais de l'entreprise (al. 2). Elles peuvent aussi obliger la personne responsable dans l'entreprise à: a. établir les causes des défauts constatés; b. prendre des mesures appropriées; c. les informer des mesures prises (al. 3). 
À l'intérieur du pays, l'exécution de la législation sur les denrées alimentaires incombe en principe aux cantons. Ce sont donc les autorités cantonales qui prononcent les mesures énoncées aux art. 34 ss LDAI (art. 47 al. 1 et 2 LDAI; cf. CHRISTINE LEUCH-SCHERRER, Kontrolle von Lebensmitteln und Gebrauchsgegenständen, in Donauer/Reeves/Weber [édit.], Lebensmittel-und Gebrauchs-gegenständerecht, 2020, p. 149 ss, p. 166, 169). Les décisions prises peuvent faire l'objet d'une opposition (cf. art. 67 LDAI), puis d'un recours devant l'autorité de recours désignée par les cantons (cf. art. 69 LDAI; cf., sous l'ancien droit, arrêt 2C_1146/2012 du 21 juin 2013 consid. 1.2). 
 
3.3. Il résulte du système mis en place par la législation sur les denrées alimentaires qu'il y a, dans le domaine des nouvelles sortes de denrées alimentaires, un potentiel enchevêtrement des compétences entre les cantons et l'Office fédéral. En effet, d'une part, l'Office fédéral est seul compétent de par la loi s'agissant de l'autorisation de mise sur le marché des nouvelles sortes de denrées alimentaires. Les distributeurs doivent s'adresser à lui et il lui revient de se prononcer sur la qualification d'une denrée alimentaire en tant que nouvelle sorte de denrée alimentaire et sur l'autorisation de mise sur le marché. D'autre part cependant, les cantons sont chargés de procéder aux contrôles des denrées alimentaires et de prononcer les mesures qui s'imposent - par exemple un retrait de la marchandise - lorsqu'une denrée ne satisfait pas aux conditions de la loi et donc notamment aux conditions d'autorisation s'agissant des nouvelles sortes de denrées alimentaires. Dans ce contexte, l'autorité cantonale est partant nécessairement amenée à qualifier une denrée alimentaire en tant que nouvelle sorte de denrée alimentaire, afin de déterminer si celle-ci aurait dû faire l'objet d'une autorisation préalable ou si elle pouvait être mise sur le marché directement. L'autorité cantonale doit donc trancher une question préalable qui ne relève pas de sa compétence, pour pouvoir remplir ses obligations de surveillance des denrées alimentaires.  
C'est ce qui s'est produit en l'espèce. A la suite d'un contrôle, les autorités cantonales genevoises ont estimé que le complément alimentaire de la recourante était composé de nouvelles sortes de denrées alimentaires non autorisées et ont partant ordonné le retrait du marché. 
Cette qualification préalable des composants du complément alimentaire de la recourante, confirmée par la Cour de justice, n'est pas définitive, dans le sens où elle ne peut pas lier l'Office fédéral si celui-ci venait à être saisi par la recourante. Si la recourante s'adressait à lui, l'Office fédéral qualifierait tout d'abord les composants du complément alimentaire. Il pourrait conclure qu'ils ne constituent pas de nouvelles sortes de denrées alimentaires soumises à autorisation ou alors confirmer l'appréciation de l'autorité cantonale et se prononcer sur l'autorisation de mise sur le marché, conformément aux art. 16 et 17 ODAIOUs. Dans les deux cas, une fois cette décision rendue et entrée en force, le retrait prononcé par le Service cantonal dans la présente procédure deviendrait caduc. De ce point de vue, l'ordre de retrait de la marchandise prononcé par l'autorité cantonale est une mesure qui peut avoir un effet temporaire. Toutefois, cet ordre de retrait déploie ses effets aussi longtemps que l'Office fédéral ne se prononce pas, dans le cadre d'une demande formée par le distributeur, sur le statut de la denrée alimentaire. 
En l'occurrence, il n'apparaît pas que la recourante aurait déposé une demande auprès de l'Office fédéral. Dans ses déterminations devant la Cour de céans, celui-ci relève qu'il faudrait que la recourante lui remette différents documents pour qu'il puisse se prononcer sur le point de savoir si la méthode d'extraction utilisée par la recourante pour son complément alimentaire fait de celui-ci une nouvelle sorte de denrée alimentaire. Ces observations confirment la nature temporaire de la décision du Service cantonal en tant qu'elle qualifie le complément alimentaire de la recourante comme nouvelle sorte de denrée alimentaire. Cette décision, confirmée par la Cour de justice, déploiera cependant ses effets aussi longtemps que l'Office fédéral ne sera pas saisi par la recourante et ne se sera pas prononcé. C'est au regard de ces particularités qu'il convient d'examiner la conformité au droit de l'arrêt de la Cour de justice. 
 
4.  
 
4.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral contrôle en principe librement le respect du droit fédéral (art. 106 al. 1 LTF). Dans le cas d'un recours dirigé contre une décision portant sur une mesure provisionnelle, l'art. 98 LTF limite cependant les griefs à la violation des droits constitutionnels (ATF 147 II 44 consid. 1.2; 137 III 475 consid. 2; 134 I 83 consid. 3.2). La ratio legis de cette règle consiste notamment à éviter que la plus haute instance du pays ne doive se prononcer, au stade de mesures provisionnelles, sur la même question qu'elle pourrait avoir à examiner dans un recours subséquent dirigé contre la décision sur le fond (arrêt 2C_1146/2012 du 21 juin 2013 consid. 2.1). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral n'examine la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (cf. ATF 146 I 62 consid. 3; 142 III 364 consid. 2.4 et les arrêts cités).  
 
4.2. Entrent dans la catégorie des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF les décisions à caractère temporaire qui règlent une situation juridique en attente d'une réglementation définitive au travers d'une décision principale ultérieure (Message du 28 février 2001 sur la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 4133; ATF 146 III 303 consid. 2.1; arrêts 2C_992/2022 du 5 juin 2024 consid. 2.1; 2C_201/2016 du 3 novembre 2017 consid. 1.5.1 non publié in ATF 144 II 130). La qualification d'une décision comme mesure provisionnelle ne dépend pas de la procédure dont émane cette décision, mais de l'effet - provisoire ou définitif - que celle-ci revêt pour la prétention en cause (cf. ATF 146 III 303 consid. 2.1; 138 III 728 consid. 2.4; 137 III 193 consid. 1.2; arrêt 2C_992/2022 du 5 juin 2024 consid. 2.1). Il s'agit de rechercher si la décision tranche définitivement une question de droit, sur la base d'un examen complet des faits et du droit, avec autorité de chose jugée (ATF 146 III 303 consid. 2.1; 138 III 728 consid. 2.4; 137 III 193 consid. 1.2).  
 
4.3. En l'espèce, la Cour de justice a confirmé l'ordre de retrait du marché du complément alimentaire de la recourante prononcé par le Service cantonal, après avoir examiné si celui-ci contenait des nouvelles sortes de denrées alimentaires au sens de l'art. 15 ODAIOUs. Cette décision doit être qualifiée de mesure provisionnelle au sens de l'art. 98 LTF compte tenu de la répartition des compétences entre l'Office fédéral et les autorités cantonales s'agissant des nouvelles sortes de denrées alimentaires (cf. supra consid. 3.4). L'arrêt entrepris ne tranche pas définitivement la question du statut de nouvel aliment des composants du complément alimentaire de la recourante en ce sens que celle-ci, si elle ne se satisfait pas de l'interdiction de vente de son produit, doit adresser une demande d'autorisation de mise sur le marché à l'Office fédéral. Saisi d'une demande, celui-ci rendra une décision s'agissant de la mise sur le marché du complément alimentaire litigieux, dans le cadre de laquelle il se prononcera sur le statut de nouvel aliment des composants de ce complément, sans être lié à cet égard par l'appréciation de l'autorité cantonale d'exécution et la décision querellée dans la présente procédure. La décision de l'Office fédéral pourrait faire l'objet d'un recours au Tribunal administratif fédéral (art. 68 LDAI, cum art. 5 PA [RS 172.021] et 31 LTAF [RS 173.32]), puis au Tribunal fédéral (art. 82 ss LTF; art. 86 al. 1 let. a LTF). Le Tribunal fédéral pourrait donc être amené à nouveau à se prononcer sur le statut de nouvel aliment des composants du complément alimentaire de la recourante.  
Eu égard à la nature de la décision rendue, l'examen du Tribunal fédéral se limitera aux griefs constitutionnels invoqués, à savoir l'arbitraire et la violation du principe d'égalité de traitement. 
 
5.  
La recourante dénonce une constatation manifestement inexacte des faits. 
 
5.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, la partie recourante qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que si elle démontre la violation de droits constitutionnels, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF. Elle ne peut se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves. Elle doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 133 II 249 consid. 1.4.3), étant rappelé qu'en matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 148 I 127 consid. 4.3; 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1).  
 
5.2. La recourante reproche à la Cour de justice d'avoir effectué une présentation brève et insuffisante des pièces produites devant elle, à savoir l'analyse comparative avant/après extraction de la composition des plantes contenues dans l'échantillon contesté, l'avis de l'expert Prof. C.________ et l'analyse comparative de produits similaires vendus en Suisse.  
Les deux premiers éléments seraient déterminants pour démontrer que le procédé d'extraction utilisé dans le complément alimentaire ne modifie pas de manière significative sa composition et sa structure, contrairement à ce qui a été retenu dans l'arrêt attaqué. Quant à l'analyse comparative, elle prouverait que la décision du Service cantonal viole le principe d'égalité de traitement, puisque des produits similaires voire identiques au complément alimentaire litigieux seraient commercialisés sur le marché. 
 
5.3. La Cour de justice a fait état dans son arrêt des documents produits par la recourante. Le fait qu'elle n'en ait pas tiré les conclusions voulues par celle-ci ne démontre pas encore qu'elle aurait omis des éléments décisifs ou arbitrairement apprécié ces moyens de preuve. A cet égard, la recourante ne fait qu'opposer son appréciation à celle de la Cour de justice, en répétant ses arguments exposés en procédure cantonale. En revanche, elle n'établit pas le caractère insoutenable des constatations cantonales sur les faits décisifs. En particulier, la recourante ne démontre pas que la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en retenant que le procédé d'extraction utilisé en l'espèce a fait l'objet d'un brevet déposé en 2001 et permet de débarrasser la plante des composants sans intérêts pour la phytothérapie (cellulose, gommes, tanins).  
 
5.4. S'agissant du document relatif à la comparaison avec d'autres produits sur le marché, la Cour de justice a relevé que les produits listés n'étaient pas semblables à celui de la recourante, ce que celle-ci conteste. Elle ne démontre toutefois pas que les produits de ses concurrents qu'elle a listés contiendraient les mêmes extraits des mêmes plantes obtenus selon le même procédé d'extraction, de sorte qu'on ne voit pas en quoi la conclusion de la Cour de justice serait insoutenable. Quoi qu'il en soit, le sort d'autres marchandises n'est pas pertinent en l'espèce (cf. infra consid. 7), ce qui conduit également à écarter le grief (cf. art. 97 al. 1 LTF in fine).  
 
5.5. Le grief d'arbitraire dans les faits, mal fondé, est rejeté.  
 
6.  
La recourante se plaint d'arbitraire dans l'application de l'art. 15 al. 1 let. g ODAIOUs. 
 
6.1. Selon l'art. 15 al. 1 ODAIOUs, les nouvelles sortes de denrées alimentaires sont des denrées alimentaires dont la consommation humaine en Suisse ou dans les États membres de l'UE était négligeable avant le 15 mai 1997 et qui relèvent en outre de l'une des catégories mentionnées aux lettre a à j de cette disposition. Pour qu'un aliment soit considéré comme nouveau, il faut donc, cumulativement, qu'il n'ait pas été consommé de manière significative en Suisse ou dans un État membre de l'UE avant le 15 mai 1997 et qu'il puisse être attribué à une des dix catégories envisagées (cf. SANDRA BUCHLER, Novel Food, in BIAR 2/2020, p. 109 ss, p. 117; DONAUER/GALL, Die Regulierung von Novel Food nach schweizerischem Recht, Jusletter du 30 août 2021, n. 14). La législation suisse est calquée à cet égard sur la législation européenne relative aux nouveaux aliments (cf. art. 3 du règlement [UE] 2015/2283).  
 
6.2. Selon l'art. 15 al. 1 let. g ODAIOUs, appliqué en l'espèce par les autorités cantonales, sont de nouvelles sortes de denrées alimentaires les denrées alimentaires dont la consommation humaine était négligeable avant le 15 mai 1997 (i.), résultant d'un procédé de fabrication qui n'était pas utilisé avant le 15 mai 1997 (ii.), qui entraîne des modifications significatives dans leur composition ou leur structure, lesquelles affectent leur valeur nutritionnelle, le type de leur métabolisme ou leur teneur en substances indésirables (iii.).  
Ainsi qu'il a été exposé (cf. supra co nsid. 3.1), les nouvelles sortes de denrées alimentaires listées dans l'annexe à l'ordonnance y relative, ainsi que tous les nouveaux aliments figurant sur la liste de l'UE des nouveaux aliments autorisés dans l'UE peuvent être mis sur le marché suisse sans autorisation (art. 16 let. a ODAIOUs et art. 6 ordonnance sur les nouvelles sortes de denrées alimentaires).  
Si une denrée ne figure pas sur ces listes, les outils suivants permettent de déterminer si elle est nouvelle et doit partant faire l'objet d'une demande d'autorisation (cf. art. 16 al. 1 let. b ODAIOUs) : le catalogue de la Commission européenne sur le statut des nouveaux aliments (EU Novel Food status Catalogue; ci-après: le catalogue européen), qui renseigne sur la consommation humaine dans les États membres de l'UE avant le 15 mai 1997 de différents ingrédients et leur statut en tant que "novel food"; la liste de l'UE "Consultation process on novel food status"; la liste de l'Office fédéral "Statut novel food"; la check-list établie par l'Office fédéral (cf. supra consid. 3.2); le guide de l'UE "Human Consumption to a Significant Degree" et le règlement d'exécution (UE) 2018/456 de la Commission du 19 mars 2018 relatif aux étapes de la procédure de consultation en vue de la détermination du statut de nouvel aliment conformément au règlement [UE] 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil relatif aux nouveaux aliments, JO L 77 du 20.3.2018, p. 6. (cf. Office fédéral, autorisation pour les nouvelles sortes de denrées alimentaires et lettre d'information 2021/7 du 29 octobre 2021 [actualisée le 1er février 2024] intitulée "autocontrôle pour les autres substances non réglementées dans les compléments alimentaires ", disponibles sur le site de l'Office: https://www.blv.admin.ch/blv/fr/home.html, rubrique "Autorisations et annonces" et rubrique "Bases légales et documents d'application"; [consulté pour la dernière fois le 12 avril 2024]). 
 
6.3. En l'espèce, la Cour de justice a noté que le complément alimentaire de la recourante contenait de la passiflora incarnata, parties aériennes, et de la crataegus monogyna et oxycantha, sommités fleuries. Elle a relevé que ces deux ingrédients ne figuraient pas sur l'annexe à l'ordonnance sur les nouvelles sortes de denrées alimentaires et que seuls les fruits séchés de l'espèce crataegus oxycantha étaient répertoriés dans la liste de l'UE des nouveaux aliments autorisés. Sur le vu de ces éléments, on ne voit pas en quoi la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en considérant que les ingrédients utilisés n'étaient pas des nouvelles sortes de denrées alimentaires déjà autorisées.  
Par ailleurs, la Cour de justice a remarqué qu'il n'y avait pas d'entrée pour passiflora incarnata, parties aériennes, dans le catalogue européen sur le statut des nouveaux aliments, répertoriant la consommation humaine avant le 15 mai 1997, ni pour crataegus monogyna ou pour les sommités fleuries de crataegus oxycantha. Il y avait seulement une entrée pour passiflora edulis, avec l'indication que le fruit est comestible. Dès lors qu'une consommation des ingrédients avant le 15 mai 1997 n'est pas répertoriée dans le catalogue européen, c'est de manière soutenable que la Cour de justice a considéré qu'une consommation humaine de ces composants était négligeable avant le 15 mai 1997.  
S'agissant des autres conditions de l'art. 15 al. 1 let. g ODAIOUs, il résulte de l'arrêt attaqué que le procédé employé par la recourante a fait l'objet d'un brevet il y a une "vingtaine d'années" et permet d'éliminer la cellulose, les gommes et les tanins. La Cour de justice n'a donc pas non plus adopté une position insoutenable en confirmant la première analyse du Service cantonal selon laquelle le procédé employé par la recourante est postérieur au 15 mai 1997 et entraîne une modification significative dans la composition ou la structure, affectant la valeur nutritionnelle, le type de leur métabolisme ou la teneur en substances indésirables. Ainsi que le relève le Service cantonal dans ses déterminations, on ne comprendrait pas le but de ce procédé, si, comme le prétend la recourante, il ne provoquait strictement aucune modification. Dans ces circonstances, la Cour de justice n'a pas versé dans l'arbitraire en retenant que les conditions de l'art. 15 al. 1 let. g ODAIOUs semblaient réunies, de sorte que le complément alimentaire de la recourante est soumis à autorisation pour pouvoir être mis sur le marché. 
 
6.4. Les arguments de la recourante ne remettent pas en cause cette conclusion. La recourante prétend que l'absence de mention dans le catalogue européen ne prouve rien quant à la consommation d'un aliment avant le 15 mai 1997 et que les deux ingrédients qu'elle emploie sont de toute façon des équivalents d'aliments répertoriés dans ce catalogue européen.  
Il ne résulte pas de l'arrêt attaqué que la recourante aurait apporté des données devant la Cour de justice tendant à démontrer une consommation humaine significative en Suisse ou dans l'UE avant le 15 mai 1997 des composants qu'elle utilise dans son complément alimentaire. Dans ces conditions, il était soutenable de se fonder sur les éléments ressortant du catalogue européen. 
Quant à l'équivalence alléguée entre des ingrédients déjà autorisés dans l'UE et ceux utilisés par la recourante, on ne voit pas non plus en quoi la Cour de justice serait tombée dans l'arbitraire en retenant que les parties aériennes de passiflora incarnata et les sommités fleuries de crataegus monogyna ne correspondaient pas au fruit de passiflora edulis et aux fruits séchés de crataegus oxyacantha, dès lors qu'il ne s'agit, d'après les noms latins, pas des mêmes espèces et, de toute façon, pas des mêmes parties des plantes.  
 
6.5. Il résulte de ce qui précède que la Cour de justice n'a pas appliqué de manière arbitraire l'art. 15 al. 1 let. g ODAIOUs, en confirmant que les composants du complément alimentaire de la recourante constituaient des nouvelles sortes de denrées alimentaires. Celles-ci ne pouvant être mises sur le marché que moyennant autorisation de l'Office fédéral, c'est de manière parfaitement soutenable que la Cour de justice a confirmé l'ordre de retrait de la marchandise prononcé par le Service cantonal dans le cadre de ses attributions.  
 
7.  
La recourante dénonce une violation du principe d'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst.), car, selon elle, des compléments alimentaires composés d'extraits de plantes similaires voire identiques au sien seraient commercialisés en Suisse sans autorisation. 
 
7.1. Le principe de la légalité l'emporte en principe sur celui de l'égalité de traitement. En conséquence, le justiciable ne peut pas, en règle générale, se prétendre victime d'une inégalité devant la loi lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans d'autres cas (ATF 146 I 105 consid. 5.3.1; 139 II 49 consid. 7.1). Le justiciable ne peut prétendre à l'égalité dans l'illégalité que s'il y a lieu de prévoir que l'administration persévérera dans l'inobservation de la loi (ATF 146 I 105 consid. 5.3.1 et les arrêts cités). Il faut encore que l'autorité n'ait pas respecté la loi selon une pratique constante, et non pas dans un ou quelques cas isolés, et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant n'impose de donner la préférence au respect de la légalité (ATF 146 I 105 consid. 5.3.1 et les arrêts cités).  
 
7.2. En l'occurrence, il n'est pas établi dans l'arrêt attaqué que les compléments alimentaires auxquels se réfère la recourante sont identiques dans leur composition au sien (cf. supra consid. 5.4). Quoi qu'il en soit, il est relevé que la recourante ne peut rien déduire en sa faveur de la pratique potentiellement illégale de ses concurrents, dès lors que la loi est fondée sur le principe de l'autocontrôle (cf. art. 26 LDAI; arrêt 2C_519/2023 du 1er mars 2024 consid. 8.2) et qu'il n'est en outre pas établi que le Service cantonal admet une pratique illégale lorsqu'il procède à des contrôles officiels et entend persévérer en ce sens. Le grief tiré de la violation du principe d'égalité, mal fondé, est donc rejeté.  
 
8.  
Finalement, il est relevé que la recourante ne conteste pas l'arrêt attaqué en tant qu'est confirmé l'ordre qui lui est fait de respecter son devoir d'autocontrôle et de vérifier la conformité à la législation de ses autres produits, en particulier sous l'angle du caractère nouveau de leurs ingrédients. À juste titre. En application du principe de l'autocontrôle (art. 26 LDAI), il revient en effet en premier lieu aux distributeurs de déterminer si une substance relève de la catégorie des nouvelles sortes de denrées alimentaires. S'agissant plus spécifiquement des compléments alimentaires, cette obligation de vérification est soulignée dans la lettre d'information 2021/7 de l'Office fédéral du 29 octobre 2021 (citée supra consid. 6.2). 
 
9.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité. La recourante, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, fixés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante, au Service de la consommation et des affaires vétérinaires (SCAV) et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, ainsi qu'à l'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires. 
 
 
Lausanne, le 23 juillet 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
La Greffière : E. Kleber