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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_23/2024  
 
 
Arrêt du 24 septembre 2024  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Hartmann et De Rossa. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Cyrielle Kern, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Micaela Vaerini, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
mesures protectrices de l'union conjugale (contributions d'entretien), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile, Juge unique, du 24 novembre 2023 (JS22.007840-220994 477). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ (1986) et B.________ (1986) sont les parents mariés de C.________ (2011) et D.________ (2014). 
Le couple est séparé depuis la fin décembre 2021. 
 
B.  
L'épouse a déposé une requête de mesures protectrices de l'union conjugale et d'extrême urgence le 25 février 2022. 
 
B.a. Les parties ont signé dans ce contexte une convention partielle lors d'une audience tenue le 10 mars 2022, convention ratifiée séance tenante par la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: la présidente) pour valoir ordonnance de mesures protectrices de l'union conjugale. Dite convention prévoyait notamment que la jouissance du domicile conjugal était attribuée à l'épouse (ch. II) et que le lieu de résidence des enfants était fixé au domicile de leur mère qui exerçait la garde de fait (ch. III); un droit de visite était réservé au père selon des modalités précisément décrites (ch. IV).  
Par ordonnance de mesures protectrices du 13 juillet 2022, la présidente a rappelé la convention précitée (ch. I) et astreint A.________ à contribuer l'entretien de ses filles par le versement d'un montant mensuel de 1'806 fr., allocations familiales en sus, en faveur de C.________ (ch. II) et de 1'594 fr., allocations familiales en sus, en faveur de D.________ (ch. III), toutes autres ou plus amples conclusions étant rejetées (IV), singulièrement celles de l'épouse en paiement d'une contribution d'entretien pour elle-même et d'une provision ad litem.  
 
B.b. Statuant le 24 novembre 2023 sur l'appel formé par l'épouse, le Juge unique de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le juge unique) l'a partiellement admis et réformé les ch. II et III du dispositif de l'ordonnance en arrêtant ainsi les contributions d'entretien destinées aux enfants: pour C.________, allocations familiales en sus, 2'360 fr. entre le 5 décembre et le 31 décembre 2021 et 2'815 fr. dès le 1er janvier 2022, sous déduction du montant de 6'600 fr. déjà réglé au 20 septembre 2023 (ch. II); pour D.________, allocations familiales en sus, 2'135 fr. du 5 au 31 décembre 2021 et 2'545 fr. dès le 1er janvier 2022, sous déduction du montant de 6'068 fr. déjà réglé au 20 septembre 2023 (ch. III). Le juge unique a par ailleurs fixé une contribution d'entretien en faveur de l'épouse, ce à hauteur de 755 fr. entre le 5 et le 31 décembre 2021, puis de 900 fr. par mois dès le 1er janvier 2022, sous déduction du montant de 2'072 fr. déjà réglé au 20 septembre 2023 (ch. IIIbis). L'ordonnance a été confirmée pour le surplus.  
 
C.  
Agissant le 8 janvier 2024 par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, A.________ (ci-après: le recourant) conclut principalement à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants; subsidiairement, il demande la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que la contribution destinée à chacune de ses filles est arrêtée à 1'150 fr. par mois dès le 1er décembre 2021, sous déduction du montant de 7'400 fr. déjà réglé au 20 septembre 2023, et qu'aucune contribution n'est octroyée à son épouse. 
Invitées à se déterminer, la cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt tandis que l'intimée conclut principalement à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet. Les parties n'ont pas procédé à un échange d'écritures complémentaire. 
 
D.  
L'effet suspensif a été attribué au recours s'agissant des contributions d'entretien arriérées; il a en revanche été refusé pour les pensions courantes. 
 
E.  
Le recourant sollicite l'octroi de l'assistance judiciaire. 
L'intimée affirme plaider au bénéficie de l'assistance judiciaire, sans pourtant avoir déposé aucune requête idoine devant la Cour de céans. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont ici réalisées (art. 72 al. 1, art. 74 al. 1 let. b avec les art. 51 al. 1 let. a et al. 4, art. 75 al. 1 et 2, art. 76 al. 1 let. a et b, art. 90, art. 100 al. 1 et 46 al. 2 let. a LTF). 
 
2.  
 
2.1. La décision attaquée porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 149 III 81 consid. 1.3), en sorte que la partie recourante ne peut dénoncer que la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant ("principe d'allégation"; art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 149 III 81 consid. 1.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 I 73 consid. 2.2; 144 III 93 consid. 5.2.2), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1).  
 
3.  
Le recourant reproche au magistrat cantonal de ne pas avoir examiné les critiques qu'il avait développées en lien avec certaines charges afférentes au budget respectif des parties et des enfants. Il y voit un déni de justice (art. 29 al. 1 Cst.) ainsi qu'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 1 Cst.), ce qui aurait entraîné un établissement arbitraire des faits et une application arbitraire du droit, le montant des charges contestées ayant nécessairement une incidence sur celui des contributions d'entretien qu'il était astreint à verser. 
L'intimée relève pour l'essentiel que sa partie adverse n'avait pas déposé d'appel contre la décision rendue le 13 juillet 2022 par l'autorité de première instance et n'avait ainsi soulevé aucune contestation quant aux charges retenues à l'appui de cette décision. Elle en déduit l'irrecevabilité des griefs soulevés sur ces points dans la présente procédure, ou à tout le moins leur rejet. 
 
3.1. Selon la jurisprudence, l'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinent pour l'issue du litige, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 141 V 557 consid. 3.2.1 et les références). Relève en revanche de la violation du droit d'être entendu la motivation qui ne satisfait pas aux exigences minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst. Pour satisfaire à ces exigences, il suffit que le juge mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que le justiciable puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Le juge n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties; il peut se limiter aux questions décisives pour l'issue du litige (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 141 V 557 consid. 3.2.1). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 et la référence).  
 
3.2. L'autorité cantonale a exclusivement développé une motivation au sujet de la charge de leasing de l'intimée, que celle-ci reprochait à la présidente d'avoir écartée. Les autres charges des parties et des enfants ont toutes été reprises de la décision de première instance et reportées dans un tableau, sans faire l'objet d'aucune analyse de la part du juge cantonal.  
 
3.3. Le recourant développe ses griefs en lien avec les postes de charges suivants: le loyer de l'intimée et le sien, les frais médicaux de l'intimée, les subsides de l'assurance-maladie de l'intimée et des enfants, les frais de garde des enfants ainsi que ses frais de télécommunication et d'assurances privées.  
 
3.3.1. Sur ce dernier point, le recourant reproche au magistrat cantonal de ne pas avoir pris en compte les forfaits liés à ses dépenses de téléphonie et d'assurances privées, ce sans explications. Le recourant ne démontre toutefois pas avoir développé cette critique devant l'autorité cantonale. Le principe de l'épuisement des griefs (ATF 146 III 203 consid. 3.3.4; 143 III 290 consid. 1.1) s'oppose ainsi à sa prise en considération devant la Cour de céans.  
 
3.3.2.  
 
3.3.2.1. En référence aux écritures du recourant devant l'autorité cantonale (réponse à l'appel du 28 octobre 2022; déterminations du 15 juin 2023), l'on constate en revanche au sujet des autres postes de charges critiqués devant la Cour de céans que ceux-ci ont été discutés (loyers respectifs des parties) devant le juge unique, voire même instruits (frais de garde, frais médicaux de l'intimée, subsides de l'assurance-maladie des enfants et de l'intimée) par l'autorité cantonale sans que celle-ci procède à aucune appréciation consécutive à leur égard, se limitant à reprendre les chiffres ressortant de la première décision et violant ainsi le droit d'être entendu du recourant. En tant que ces éléments sont manifestement susceptibles d'avoir une incidence sur le montant des contributions d'entretien, la cause doit ainsi être renvoyée au juge unique afin qu'il procède à une nouvelle appréciation sur ces points, puis à un nouveau calcul des pensions dues par le recourant.  
 
3.3.2.2. L'on précisera que, contrairement à ce que soutient l'intimée, le fait que le recourant n'ait pas fait appel de la décision de première instance n'est pas décisif. Celui-ci était fondé à critiquer, dans ses déterminations devant l'instance d'appel, les considérations et les constatations du premier jugement susceptibles de lui porter préjudice en cas de décision divergente de l'instance d'appel (arrêts 5A_804/2018 du 18 janvier 2019 consid. 3.2; 4A_258/2015 du 21 octobre 2015 consid. 2.4.2; cf. pour la procédure fédérale: 137 I 257 consid. 5.4; 134 III 332 consid. 2.3), ce qu'il a effectué. Le principe de l'épuisement des griefs (ATF 146 III 203 consid. 3.3.4; 143 III 290 consid. 1.1; sur son application à la partie intimée: ATF 140 III 86 consid. 2) ne lui est ainsi pas opposable. Il s'ensuit que l'argumentation de l'intimée consistant à systématiquement invoquer l'irrecevabilité des critiques de son époux sur ce dernier fondement est vaine.  
 
4.  
A l'issue de son recours, le recourant procède à un calcul des contributions d'entretien en intégrant les critiques développées plus haut; les montants obtenus font l'objet de ses conclusions subsidiaires. Dans ce contexte, il apparaît remettre en cause le principe de l'attribution d'une contribution d'entretien à son épouse, concluant à sa suppression. Affirmant que celle-ci n'aurait en effet pas démontré que son train de vie antérieur serait supérieur au montant de ses charges calculées selon le minimum vital du droit de la famille, le recourant soutient qu'une répartition de l'excédent par moitié entre les parties ne serait pas justifiée et s'apparenterait à une liquidation anticipée du régime matrimonial. 
Cette critique ne se fonde toutefois sur la violation d'aucun droit constitutionnel (consid. 2.1 supra). Il n'y a donc pas lieu d'entrer en matière sur le principe même de la suppression d'une contribution d'entretien en faveur de l'intimée, qui devra cas échéant être fixée en fonction du résultat du renvoi précédemment ordonné ( supra consid. 3.3.2).  
 
5.  
Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable, l'arrêt cantonal est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour instruction et nouvelle décision. Vu sa situation financière restreinte, l'assistance judiciaire est octroyée au recourant (art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires sont mis à la charge des parties à raison d'un quart pour le recourant et de trois quarts pour l'intimée (art. 66 al. 1 LTF), la part due par le recourant étant supportée par la Caisse du Tribunal fédéral - étant rappelé que l'intimée n'a pour sa part déposé aucune requête d'assistance judiciaire (let. E. supra). L'intimée versera directement à l'avocat d'office la part de dépens qu'elle doit au recourant (arrêts 5D_90/2022 du 26 avril 2023 consid. 8 et les références; 5A_389/2014 du 9 septembre 2014 consid. 4). La distraction des dépens n'est certes pas prévue par la LTF, dont l'art. 68 prescrit de verser l'indemnité de dépens à la partie elle-même. Toutefois, dans cette situation particulière où la partie bénéficiant de l'assistance judiciaire n'encourt pas de frais de défense, il se justifie de parer au risque que les dépens versés par la partie adverse ne parviennent pas à l'avocat commis d'office, pour une raison ou pour une autre ("détournement" par la partie assistée, saisie ou séquestre de sa créance de dépens, compensation avec une dette de la partie adverse; cf. arrêt 4A_248/2015 du 15 janvier 2016 consid. 6). Pour le cas où le conseil ne pourrait pas recouvrer les dépens dus par la recourante, la caisse du Tribunal fédéral y suppléera (cf. arrêt 4A_248/2015 précité loc. cit. et les réf. citées). Une indemnité réduite (cf. art. 10, 2ème phrase, du Règlement du 31 mars 2006 sur les dépens alloués à la partie adverse et sur l'indemnité pour la représentation d'office dans les causes portées devant le Tribunal fédéral [RS 173.110.210.3]), supportée par la Caisse du Tribunal fédéral, sera versée au conseil du recourant à titre d'honoraires d'avocat d'office (art. 64 al. 2 LTF). Le recourant est rendu attentif au fait qu'il est tenu de rembourser ultérieurement la Caisse du Tribunal fédéral s'il est en mesure de le faire (art. 64 al. 4 LTF). Il appartiendra à l'autorité cantonale de statuer à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale (art. 67 et 68 al. 5 LTF).  
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis dans la mesure où il est recevable, l'arrêt attaqué est annulé s'agissant du montant des contributions d'entretien et la cause est renvoyée au juge unique pour instruction et nouvelle décision au sens des considérants. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire du recourant est admise. Me Cyrielle Kern, avocate à Lausanne, lui est désignée comme avocate d'office. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant à hauteur de 500 fr. et à celle de l'intimée à hauteur de 1'500 fr, la part du recourant étant provisoirement supportée par la Caisse du Tribunal fédéral. 
 
4.  
L'intimée versera à l'avocate du recourant la somme de 1'250 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral; au cas où ces dépens ne pourraient être recouvrés, la Caisse du Tribunal fédéral versera à Me Cyrielle Kern, une indemnité de 1'250 fr. à titre d'honoraires d'avocat d'office. 
 
5.  
La Caisse du Tribunal fédéral versera à l'avocate du recourant une indemnité de 750 fr. à titre d'honoraires d'avocat d'office. 
 
6.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile, juge unique. 
 
 
Lausanne, le 24 septembre 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso