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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_17/2024  
 
 
Arrêt du 26 août 2024  
I  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jametti, Présidente, Hohl et Rüedi. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Jean-Emmanuel Rossel, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Éta t de Vaud, Ordre judiciaire vaudois, 
agissant par le greffe du Tribunal cantonal du canton de Vaud, 
intimé. 
 
Objet 
mainlevée définitive, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 8 décembre 2023 par la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
(KC22.018812-221653, 261). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par jugement rendu le 28 janvier 2021 dans la cause opposant A.________ SA (ci-après: la société, la poursuivie ou la recourante) à deux de ses actionnaires, le Juge délégué de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Juge délégué) a notamment ordonné le contrôle spécial de la société, désigné B.________ en qualité de contrôleur spécial et dit que l'avance de frais demandée par celui-ci serait supportée par la société.  
Par arrêt 4A_170/2021 du 2 juin 2021, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé par la société à l'encontre dudit jugement. 
 
A.b. Sur demande du Juge délégué, le contrôleur spécial a estimé le montant de ses honoraires à 40'000 fr., dépenses effectives et TVA en sus.  
 
A.c. Le 11 août 2021, le Juge délégué a imparti à la société un délai au 15 septembre 2021 pour déposer au greffe la somme de 47'000 fr. correspondant à l'avance de frais pour le contrôleur spécial, dépenses effectives et TVA comprises.  
Le 19 octobre 2021, la société a payé 10'000 fr. Sur demande du Juge délégué, elle a confirmé le versement d'un " acompte " de 10'000 fr., suffisant selon elle, et expliqué que le montant de 47'000 fr. ne pouvait se justifier. 
 
A.d. Le 17 décembre 2021, les deux actionnaires ayant demandé l'institution du contrôle spécial ont requis l'exécution forcée selon les dispositions de la LP au sens de l'art. 335 al. 2 CPC.  
 
A.e. Par " [d]écision d'avance de frais (contrôle spécial; art. 697g CO) " du 25 janvier 2022, le Juge délégué a imparti à la société un ultime délai non prolongeable au 28 février 2022 pour s'acquitter du solde de l'avance de frais, soit 37'000 fr., faute de quoi il serait passé à l'exécution forcée.  
Ladite décision porte la mention de son caractère définitif et exécutoire dès le 1er mars 2022. 
 
A.f. À la réquisition de l'État de Vaud, Ordre judiciaire, représenté par le greffe du Tribunal cantonal (ci-après: le poursuivant ou l'intimé), l'Office des poursuites du district de Lausanne a, le 13 avril 2022, notifié à la société un commandement de payer 37'000 fr., sans intérêts, dans la poursuite en prestation de sûretés no....  
La société poursuivie a formé opposition totale. 
 
B.  
 
B.a. Le 28 avril 2022, le poursuivant a requis la mainlevée définitive de l'opposition.  
Par décision du 15 septembre 2022, la Juge de paix du district de Lausanne a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition. 
 
B.b. Par arrêt du 8 décembre 2023, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé par la poursuivie à l'encontre de ladite décision.  
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui avait été notifié le 11 décembre 2023, la poursuivie a formé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral le 10 janvier 2024. Elle conclut, avec requête d'effet suspensif, à ce que l'arrêt entrepris soit annulé et réformé en ce sens que la requête de mainlevée soit rejetée. 
Le poursuivant intimé a renoncé à se déterminer sur le recours, concluant uniquement à la confirmation de l'arrêt attaqué. 
La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. 
Par ordonnance présidentielle du 1er février 2024, l'effet suspensif a été octroyé au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 et art. 46 al. 1 let. c LTF) par la poursuivie, qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur recours par le tribunal supérieur du canton de Vaud (art. 75 LTF) dans une affaire en matière de poursuite pour dettes et de faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF) dont la valeur litigieuse dépasse 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF; arrêt 5A_941/2021 du 5 juillet 2023 consid. 2 et les références citées), le recours en matière civile est en principe recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1). 
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2).  
Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 446 consid. 4.1, 462 consid. 2.3). Il ne peut en revanche pas être interjeté pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est toutefois possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 138 I 1 consid. 2.1; 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 462 consid. 2.3). 
 
3.  
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir déclaré irrecevables quatre des cinq griefs qu'il avait soulevés dans son recours cantonal. 
 
3.1. Selon l'art. 321 al. 1 CPC, le recours doit être introduit par un acte écrit et motivé. La motivation d'un recours doit, à tout le moins, satisfaire aux exigences qui sont posées pour un acte d'appel (art. 311 al. 1 CPC; arrêts 4A_462/2022 du 6 mars 2023 consid. 5.1.1; 5A_206/2016 du 1er juin 2016 consid. 4.2.1). Il résulte de la jurisprudence relative à l'art. 311 al. 1 CPC que l'appelant doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1). Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. À défaut, son appel est irrecevable (arrêts 4A_462/2022 précité consid. 5.1.1; 4A_621/2021 du 30 août 2022 consid. 3.1; 4A_624/2021 du 8 avril 2022 consid. 5.1).  
 
3.2. La Juge de paix a considéré qu'à la lecture des art. 98 CPC et 3 al. 1 du Tarif des frais judiciaires civils du canton de Vaud du 28 septembre 2010 (TFJC/VD; RS/VD 270.11.5), il apparaissait clairement que les autorités judiciaires, respectivement le tribunal chargé de statuer dans la cause dont il est question, sont créancières des sûretés en garantie des frais de justice. Dès lors que la décision du 25 janvier 2022 avait été rendue par le Juge délégué, elle a considéré que le créancier du montant de l'avance de frais litigieuse ne pouvait être que le Tribunal cantonal, respectivement son greffe, et que cela prêtait d'autant moins à discussion que la partie poursuivie s'était déjà acquittée, en faveur de celui-ci, d'un acompte de 10'000 fr. Partant, elle a retenu que les conditions pour prononcer la mainlevée définitive de l'opposition étaient réalisées.  
 
3.3. La cour cantonale a retenu que, parmi les cinq arguments invoqués par la poursuivie, seul le dernier se référait à la motivation de la décision de première instance en ce qu'il critiquait la prise en compte par la Juge de paix de l'acompte de 10'000 fr. que la poursuivie contestait avoir versé. Elle a constaté que les quatre autres griefs n'étaient que des reprises, souvent littérales, des écritures que la poursuivie avait déposées en première instance et considéré que la poursuivie n'avait pas tenté de démontrer le caractère erroné du raisonnement tenu par la première juge, de sorte que le recours cantonal était, dans cette mesure, irrecevable.  
 
3.4. La recourante invoque que la cour cantonale a " dout[é] de la recevabilité matérielle du recours [...] au motif que les arguments invoqués dans le recours l'auraient déjà été pour quatre sur cinq d'entre eux dans la procédure de mainlevée devant le Juge de paix ". Elle estime que ce raisonnement est erroné, dans la mesure où il conduirait alors à l'irrecevabilité de presque tous les recours. Il allègue par ailleurs que les arguments étaient clairement invoqués contre le prononcé de mainlevée, et que la cour cantonale l'aurait parfaitement compris, dès lors qu'elle aurait répondu à l'ensemble des arguments et aurait donc considéré la motivation du recours cantonal comme suffisante pour pouvoir répondre en détail auxdits arguments.  
 
3.5. La recourante perd de vue que la cour cantonale ne lui a pas reproché d'avoir soulevé des griefs qu'elle avait déjà invoqués en première instance ou d'avoir fait valoir des griefs qui auraient été insuffisamment motivés ou qui n'auraient pas été dirigés contre la décision de première instance, mais de ne pas s'en être prise à la motivation de la décision de la Juge de paix.  
Force est donc de constater qu'à nouveau, la recourante ne s'en prend pas à la motivation de l'instance précédente, de sorte que sa critique est irrecevable (art. 42 al. 2 LTF). Au vu du principe de l'épuisement des griefs (cf. arrêt 4A_148/2022 du 21 décembre 2022 consid. 4.1 et les arrêts cités) et du fait que la recourante n'a pas établi que les quatre griefs litigieux auraient dû être considérés comme recevables par la cour cantonale, lesdits griefs ne sont pas non plus recevables devant le Tribunal fédéral. 
 
3.6. Seul demeure donc en principe recevable le cinquième et dernier grief soulevé par la recourante devant la cour cantonale, soit celui relatif à la prise en compte par la Juge de paix de l'acompte litigieux de 10'000 fr. Dans la mesure toutefois où la première juge n'a tenu compte dudit acompte que pour confirmer le résultat auquel elle était parvenue, ce qu'a du reste relevé la cour cantonale, et où la recourante n'invoque ni n'établit que cet élément pourrait être à lui seul décisif, la recourante ne s'en est pas valablement prise à la motivation des instances précédentes. Ledit grief est donc également irrecevable (art. 42 al. 2 LTF).  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable. 
Les frais judiciaires seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Dès lors que l'intimé a obtenu gain de cause dans l'exercice de ses attributions officielles, il ne lui sera pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 26 août 2024 
 
Au nom de la I re Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Douzals