Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_1013/2024
Arrêt du 27 janvier 2025
IIe Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président,
van de Graaf et Hofmann.
Greffier: M. Magnin.
Participants à la procédure
A.B.________,
représentée par Me Romain Jordan, avocat,
recourante,
contre
1. C.________,
2. D.________,
intimées.
Objet
Récusation,
recours contre l'arrêt rendu le 5 août 2024 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ACPR/570/2024 - PS/45/2024).
Faits:
A.
A.a. Par acte d'accusation du 14 février 2023, complété et corrigé le 15 août 2023, le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après: le Ministère public) a renvoyé des membres de la famille B.________, dont A.B.________ (ci-après: la requérante), devant le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève (ci-après: le tribunal) pour, notamment, traite d'êtres humains par métier (art. 182 al. 2 CP), usure par métier ( art. 157 ch. 1 et 2 CP ) et infractions à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20).
A.b. Après plusieurs renvois d'audience, les débats devant le tribunal ont été ouverts le 15 janvier 2024, puis ajournés au 25 janvier 2024 et repris dès le 10 juin 2024.
A.c. Dans l'intervalle, à savoir le 21 décembre 2023, E.________, partie plaignante (ci-après: la plaignante 1), a déposé l'état de frais de son conseil juridique gratuit, qui comprend notamment des frais d'interprète de C.________ (ci-après: l'intimée 1) pour la période de 2018 à 2023 relatifs à des entretiens avec son avocat. Le 17 janvier 2024, elle a demandé que la prénommée soit désignée comme interprète à chaque fois que sa propre présence serait requise, au motif qu'elles se comprenaient bien. Les services de l'intimée 1 ont été sollicités par la police, puis par le Ministère public, en dernier lieu à l'audience de confrontation du 4 mars 2021 tenue en présence de tous les défenseurs des prévenus, et par le tribunal, à l'audience du 25 janvier 2024.
Le 14 février 2024, la plaignante 1 a demandé, pour le même motif, la désignation de l'interprète D.________ (ci-après: l'intimée 2), dont les services avaient été requis par la police dès le début de l'enquête. Le 16 février 2024, cette demande a été communiquée à toutes les parties par messagerie électronique.
A.d. Aux débats du 10 juin 2024, le tribunal a convoqué l'intimée 2 pour fonctionner comme interprète. Le procès-verbal mentionne que les parties, dont la requérante, n'avaient pas de motif de récusation à faire valoir. À l'audience du 11 juin 2024, le tribunal a entendu F.________, partie plaignante (ci-après: le plaignant 2), avec le concours de l'intimée 2. À cette occasion, le tribunal a demandé à ce plaignant pourquoi il estimait que "les injustices, c'était ici", et non en U.________. Celui-ci a répondu qu'"il y avait beaucoup plus de travail ici". Selon le procès-verbal, la requérante a informé son défenseur que le plaignant 2 avait en réalité indiqué qu'il y avait "plus" de travail en Suisse et non "beaucoup plus" de travail. La présidente du tribunal a demandé à l'intimée 2 de traduire strictement les propos tenus, y compris lorsque le plaignant 2 disait à celle-ci qu'il ne l'avait pas comprise. Les avocats de la défense ont alors demandé si l'intimée 2 connaissait les parties plaignantes, question à laquelle cette dernière a répondu par la négative en dehors de cette procédure. Ensuite, l'avocat de l'un des prévenus a requis le changement de l'interprète. La requérante en a fait de même, par l'intermédiaire de son défenseur. Selon le procès-verbal, la transcription de la traduction litigieuse, à savoir "il y avait beaucoup plus de travail ici", n'a pas été modifiée.
B.
B.a. Toujours lors de l'audience du 11 juin 2024, la requérante a également demandé, à titre subsidiaire, la récusation de l'intimée 2, au motif qu'elle aurait insisté à deux reprises auprès du plaignant 2 pour savoir s'il n'avait pas plutôt déclaré, en référence à ce qui précède, "beaucoup plus de travail" que "plus de travail". Elle a également fait valoir que l'intimée 2 avait fonctionné en qualité d'interprète durant l'instruction lors d'entretiens privés entre la plaignante et son conseil. Elle a en outre sollicité la récusation de l'intimée 1.
B.b. Le 12 juin 2024, le tribunal a refusé de faire remplacer l'intimée 2. Selon le procès-verbal de l'audience, il a en substance relevé qu'il n'était pas établi que l'incident soulevé par la défense concernant les termes "plus de travail" ou "beaucoup plus de travail" serait dû à une erreur de la part de l'interprète, plutôt qu'à une incompréhension de sa part des réponses données par le plaignant 2.
B.c. Le 26 juin 2024, la requérante a complété sa demande de récusation des intimées. Elle a encore fait valoir que l'interprète officiant ou ayant officié sur mandat de l'autorité pénale ne pouvait pas être le même que celui mis en oeuvre par une partie au procès lors d'entretiens privés avec son conseil. Elle a également exposé que l'intimée 2 avait menti le 11 juin 2024 lorsqu'elle avait nié connaître les parties plaignantes en dehors de la procédure, dès lors que la lettre du 14 février 2024 (cf. let. A.c supra) établissait des liens entre elles. Elle a encore demandé que les intimées soient formellement interpellées au sujet de la demande de récusation.
B.d. Par arrêt du 5 août 2024, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre pénale de recours) a déclaré irrecevable la requête de récusation dirigée contre l'intimée 1 et a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, la requête de récusation dirigée contre l'intimée 2.
C.
Par acte du 16 septembre 2024, A.B.________ (ci-après: la recourante) interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour instruction complémentaire, puis nouvelle décision dans le sens des considérants afin qu'elle prononce la récusation des intimées.
Par courriers des 4, 9 et 23 octobre 2024, la Chambre pénale de recours et les intimées ont déposé leurs déterminations. Ces prises de position ont été communiquées à la recourante.
Considérant en droit:
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2).
Une décision prise en instance cantonale unique (art. 80 al. 2 in fine LTF et art. 59 al. 1 let. b CPP) rejetant une demande de récusation peut être immédiatement portée devant le Tribunal fédéral, nonobstant son caractère incident (art. 92 al. 1 LTF; ATF 144 IV 90 consid. 1). Dès lors, la décision de l'autorité cantonale de recours (art. 59 al. 1 let. b CPP) rejetant une demande de récusation d'un traducteur ou d'un interprète peut, comme pour un expert (cf. arrêt 1B_488/2011 du 2 décembre 2011 consid. 1.1) vu le renvoi de l'art. 68 al. 5 CPP à l'art. 183 al. 3 CPP, faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale.
2.
La recourante invoque une violation de l'art. 58 al. 1 CPP. Elle reproche à l'autorité cantonale d'avoir considéré que le motif de récusation qu'elle avait soulevé lors de l'audience du 11 juin 2024 puis le 26 juin 2024, à savoir que les intimées avaient fourni leurs services d'interprète non seulement durant les audiences ou auditions au cours de la procédure, mais aussi lors d'entretiens privés entre la plaignante 1 et son conseil, était tardif. La juridiction cantonale a toutefois également statué sur ce motif de récusation dans le cadre de l'examen de l'art. 56 CPP (cf. arrêt querellé, pp. 8-9) et la recourante a soulevé des critiques sur ce point dans son recours au Tribunal fédéral (cf. recours, pp. 8-11). Ainsi, il y a lieu d'examiner ce motif de récusation sous l'angle de l'art. 56 CPP, sans qu'il soit nécessaire de déterminer si celui-ci a été invoqué conformément à l'art. 58 al. 1 CPP.
3.
3.1. La recourante invoque une violation de l'art. 56 let. b et f CPP. D'une part, elle fait en substance valoir que les intimées auraient fourni leurs services d'interprète non seulement durant les audiences ou auditions au cours de la procédure, mais aussi lors d'entretiens privés entre la plaignante 1 et son conseil. D'autre part, elle considère notamment que l'intimée 2 serait suspecte de prévention ou de partialité parce qu'elle n'aurait pas traduit fidèlement les propos tenus par le plaignant 2 lors de l'audience du 11 juin 2024.
3.2.
3.2.1. Selon l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours au Tribunal fédéral doivent indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés. En particulier, la partie recourante doit motiver son recours en exposant succinctement en quoi la décision attaquée viole le droit (cf. art. 42 al. 2 LTF). Pour satisfaire à cette exigence, il appartient à la partie recourante de discuter au moins brièvement les considérants de la décision litigieuse (ATF 143 II 283 consid. 1.2.2; 140 III 86 consid. 2); en particulier, la motivation doit être topique, c'est-à-dire se rapporter à la question juridique tranchée par l'autorité cantonale (ATF 123 V 335 consid. 1; arrêt 7B_715/2024 du 18 octobre 2024 consid. 1.1 et l'arrêt cité).
Selon la jurisprudence, un mémoire de recours ne satisfait pas aux exigences minimales fixées à l'art. 42 al. 2 LTF lorsque sa motivation reprend mot pour mot l'argumentation déjà développée devant la juridiction inférieure et que, partant, le recourant ne discute pas les motifs de la décision entreprise et n'indique pas - même succinctement - en quoi ceux-ci méconnaissent le droit selon lui. Le recourant ne saurait se contenter de renvoyer aux actes cantonaux ou de reproduire la motivation déjà présentée dans la procédure cantonale (ATF 134 II 244 consid. 2.1-2.3; arrêt 7B_993/2023 du 27 juin 2024 consid. 2.1).
3.2.2. Selon l'art. 56 CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsqu'elle a agi à un autre titre dans la même cause, en particulier comme membre d'une autorité, conseil juridique d'une partie, expert ou témoin (let. b), ou lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention (let. f). L'art. 56 let. f CPP - également applicable aux traducteurs et interprètes en vertu du renvoi des art. 68 al. 5 et 183 al. 3 CPP - a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes de l'art. 56 CPP. Cette clause correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH (ATF 148 IV 137 consid. 2.2 et les arrêts cités). Elle concrétise aussi les droits déduits de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'équité du procès et assure au justiciable cette protection lorsque sont concernés d'autres autorités ou organes que des tribunaux (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2), soit notamment des experts (arrêt 7B_645/2024 du 20 novembre 2024 consid. 3.2.1 et les arrêts cités) et, par conséquent, aussi les traducteurs et interprètes (cf. art. 68 al. 5 et 183 al. 3 CPP). Cette clause générale n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat, respectivement du traducteur ou de l'interprète, est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit ainsi que ces circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale de la personne en cause (ATF 149 I 14 consid. 5.3.2; arrêt 7B_645/2024 du 20 novembre 2024 consid. 3.2.1 et l'arrêt cité). Seules des circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération, les impressions purement subjectives des parties n'étant pas décisives (ATF 148 IV 137 consid. 2.2; 144 I 159 consid. 4.3 et les nombreux arrêts cités; arrêt 7B_645/2024 du 20 novembre 2024 consid. 3.2.1).
3.3.
3.3.1. L'autorité cantonale a livré un raisonnement relatif à l'art. 56 CPP concernant les services d'interprète fournis tant à titre officiel en audience qu'à titre privé. Elle a considéré que la recourante avait invoqué en vain l'arrêt 1B_404/2012 du 4 décembre 2012, où était en jeu l'admissibilité du recours à l'interprète d'audience pour traduire des conférences entre un prévenu et son défenseur et où le Tribunal fédéral avait considéré que le fait que l'interprète officiellement requis pour une audition de l'autorité pénale soit le même que celui qui traduirait les discussions en aparté, confidentielles, posait des problèmes de maxime de l'instruction, de droit de la défense, de conflit d'intérêts et de secret professionnel, de sorte qu'il valait mieux mandater un interprète distinct. Selon la cour cantonale, l'affaire jugée dans cet arrêt n'était en effet pas comparable à celui de la présente cause, dans la mesure où, le 11 juin 2024, l'intimée 2 devait traduire les déclarations en U.________ des parties plaignantes en audience, et non les propos de la recourante, qui bénéficiait pour sa part d'un interprète en anglais. La juridiction cantonale a indiqué que les questions de la maxime de l'instruction, de droit de la défense, de conflit d'intérêts et de secret professionnel ne se posaient donc pas au moment de l'incident qui était survenu durant l'audition du plaignant 2. De plus, elle a relevé que, dans l'arrêt précité, le Tribunal fédéral avait voulu préserver les droits du prévenu, sous l'angle de la confidentialité des échanges entre celui-ci et son défenseur, et que, contrairement à ce qu'avait affirmé la recourante à cet égard, la doctrine qu'elle avait citée (GRETER/ILSCHNER/SEPPEY, L'audition d'un comparant allophone en procédure pénale, in Forumpoenale, 2017, p. 421) n'étendait pas ces principes à la partie plaignante dans un sens plus rigoureux que pour le prévenu. Sur ce point, elle a précisé qu'elle ne voyait pas ce qui justifierait de traiter plus strictement la partie plaignante que le prévenu. Par ailleurs, l'autorité cantonale a retenu que la partie qui aurait éventuellement pu se plaindre, en l'espèce, d'un conflit d'intérêts ou de problèmes de confidentialité était en réalité la plaignante 1, parce que c'était elle qui avait utilisé les services de l'intimée 2 pour ses entretiens privés et que celle-ci avait été requise pour traduire les propos du plaignant 2, dont les intérêts pourraient ne pas converger avec les siens. Enfin, elle a relevé que la recourante ne démontrait pas que ses propres droits de prévenue bénéficieraient d'une protection plus large, fondée sur l'art. 6 CEDH, et qu'elle avait pu soulever l'incident du 11 juin 2024 dans des conditions conformes aux garanties conventionnelles (arrêt querellé, pp. 8-9).
3.3.2. Dans son recours au Tribunal fédéral, la recourante reprend tout d'abord mot pour mot l'exposé et l'argumentation qu'elle avait livrés dans sa requête de récusation du 26 juin 2024 et se contente ainsi de reproduire la motivation présentée devant les instances précédentes. Ensuite, face à la motivation cantonale, elle se limite à affirmer que les considérations des juges cantonaux - lorsqu'ils indiquent que seule la plaignante 1 "aurait pu être lésée par la situation voyant son interprète privée interpréter en qualité de traductrice au procès" et que "les garanties de conflit d'intérêts, de droit de la défense et de secret professionnel ne se posaient pas en l'espèce" - relèveraient de l'insolite, ne seraient pas fondés ni défendables ou ne sauraient être suivis, sauf à nier l'évidence. La recourante se borne également à reproduire un extrait de l'arrêt 1B_404/2012 du 4 décembre 2012 (consid. 3.4) et l'extrait de doctrine précité (cf. consid. 3.3.1 supra) et à affirmer que cet arrêt serait "évidemment topique et pertinent en l'espèce". Cela étant, elle ne discute pas la motivation de l'autorité cantonale ni les arguments que celle-ci a retenus pour considérer en définitive que, dans le cas d'espèce, le fait que les intimées aient fonctionné en qualité d'interprète lors d'audiences ou d'auditions durant la procédure, ainsi que lors d'entretiens privés entre la plaignante 1 et son conseil, ne permettait pas de fonder un motif de récusation au sens de l'art. 56 CPP. En réalité, il appartenait notamment à la recourante d'expliquer pourquoi elle estimait que l'interprétation des juges cantonaux au sujet de l'arrêt 1B_404/2012 du 4 décembre 2012 et de la doctrine concernée était selon elle erronée et, par ailleurs, pourquoi l'appréciation de ceux-ci, selon laquelle elle n'avait en l'occurrence pas été lésée par la situation dénoncée, ne pouvait pas être suivie. La recourante n'a toutefois pas procédé ainsi. On relève en outre que la recourante se contente d'évoquer l'art. 56 let. b CPP à un seul endroit dans son recours, mais ne soulève ni a fortiori ne développe aucun motif sur ce point. La recourante n'invoque pas non plus de déni de justice formel à cet égard. Il résulte de ce qui précède que la recourante ne formule, concernant les services d'interprète fournis en l'occurrence par les intimées tant à titre officiel qu'à titre privé, aucune critique conforme aux exigences découlant de l'art. 42 al. 2 LTF. Son grief se révèle donc irrecevable.
On peut préciser à toutes fins utiles que l'interprétation de la cour cantonale, selon laquelle l'affaire jugée dans l'arrêt 1B_404/2012 du 4 décembre 2012 (consid. 3.4) n'était pas comparable à celle de la présente cause, ne prête pas le flanc à la critique. Il ne ressort en effet pas des faits retenus par l'autorité cantonale que les intimées auraient également fonctionné comme interprète, que se soit à titre officiel ou privé, pour la recourante, celle-ci ayant pour sa part bénéficié, durant la procédure - sans que cela soit contesté par la recourante -, d'un interprète en anglais qui n'est pas la même personne que les intimées (cf. arrêt querellé, pp. 3 et 9).
3.4.
3.4.1. Concernant les autres reproches formulés contre l'intimée 2, l'autorité cantonale a relevé que la recourante n'alléguait et n'établissait pas que les prestations effectuées le 11 juin 2024 par cette dernière dénoteraient une faveur, une marque d'amitié ou une apparence de partialité au profit des parties plaignante. Elle a ajouté que, comme l'avait exposé le tribunal lorsqu'il avait refusé de relever l'intimée 2 de sa mission, la controverse sur la réponse à la question de savoir s'il y avait eu "plus" ou "beaucoup plus" de travail en Suisse qu'en U.________ relevait, selon le procès-verbal, davantage d'une incompréhension entre elle et le plaignant 1 que d'une erreur d'interprétation. Elle a précisé que quand bien même il s'agirait d'une erreur, on ne pouvait pas y discerner de caractère délibéré. Elle a encore indiqué qu'une éventuelle inobservation de l'art. 57 CPP pouvait encore être soulevée, que l'incident paraissait d'autant plus stérile que la même question, posée par le même avocat pendant la procédure préliminaire, avait reçu une réponse claire de la même partie plaignante et que cela ne pouvait que ressortir d'une prise de connaissance diachronique de ses dépositions. La cour cantonale a encore retenu que la question de savoir laquelle des nuances sur la charge de travail devait l'emporter concernait l'appréciation des preuves (arrêt querellé, p. 8).
3.4.2. La recourante ne fournit aucune explication permettant de remettre en cause ce raisonnement. Tout d'abord, il ne ressort pas du procès-verbal de l'audience du 11 juin 2024 que l'intimée 2 aurait adopté un comportement qui pourrait dénoter un parti pris ou une apparence de parti pris de sa part. Selon ce procès-verbal, lorsque la recourante a, par le biais de son avocat, relevé la nuance entre le fait de savoir s'il y avait "plus" ou "beaucoup plus" de travail en Suisse qu'en U.________ la direction de la procédure a simplement demandé à l'intimée 2 de traduire strictement les propos tenus, y compris lorsque le plaignant 2 lui disait qu'il n'avait pas compris. Or on ne saurait voir, dans cette situation, qui n'a au demeurant rien d'inhabituel, un manque d'impartialité de l'intimée 2 ou une erreur de traduction suffisamment caractérisée susceptible de fonder un motif de récusation. Si la recourante n'était pas d'accord avec la teneur du procès-verbal, il lui appartenait de le contester devant les autorités de recours normalement compétentes, et non de formuler une demande de récusation. De même, lorsque la présidente du tribunal a en définitive refusé de changer d'interprète, la recourante aurait dû contester cette décision devant la juridiction compétente, et non déposer une demande de récusation. Ensuite, il n'y a pas lieu de suivre la recourante lorsqu'elle prétend que l'intimée 2 aurait menti en répondant qu'elle ne connaissait pas les parties plaignantes en dehors des actes de procédure. En réalité, la recourante s'écarte des faits constatés, car, selon le procès-verbal précité, l'intimée 2 n'a pas dit qu'elle ne connaissait pas les plaignants "en dehors des actes de procédure", mais "en dehors de cette procédure". Or cette affirmation n'a rien d'erroné, puisque, selon les faits retenus, l'intimée 2 a vu la plaignante 1, certes lors d'entretiens privés, mais bien pour effectuer des traductions dans le cadre de la présente cause. On ne saurait donc reprocher à l'intimée 2 une violation de l'art. 57 CPP sur ce point. Enfin, la recourante ne relève aucun indice permettant de suspecter l'intimée 2 d'avoir un rapport d'amitié, qui plus est suffisamment étroit, avec l'une ou l'autre des parties plaignantes. Il s'ensuit que, dans le cadre de ses explications, la recourante, qui livre au mieux des impressions purement individuelles qui ne sont pas décisives dans le cadre d'un demande de récusation, ne parvient pas à établir l'existence d'un motif de récusation au sens de l'art. 56 let. f CPP à l'endroit de l'intimée 2.
4.
La recourante indique encore qu'elle a demandé l'interpellation des intimées pour qu'elles se déterminent sur plusieurs points, dont l'incident de traduction survenu à l'audience du 11 juin 2024. Elle invoque une violation de son droit d'être entendue et de l'art. 58 al. 2 CPP. Elle expose notamment qu'on ignorerait la position de l'intimée 2 et si les intimées auraient également fonctionné pour d'autres parties plaignantes durant la procédure. Cela étant, au vu de l'argumentation de la cour cantonale, il n'y avait en l'occurrence pas besoin d'établir plus avant les faits, ni, par conséquent, d'obtenir de plus amples explications des intimées. On peut ajouter que les intimées se sont exprimées durant la procédure devant le Tribunal fédéral, sans que cela ait amené d'éléments pertinents, ni de réaction de la part de la recourante. Quoi qu'il en soit, au regard des développements qui précèdent (cf. consid. 3 supra), la requête de récusation s'avérait d'emblée manifestement mal fondée et ne nécessitait pas de demander aux intimées de prendre position à ce sujet (cf., pour le détail, arrêt 7B_1/2024 du 28 février 2024 consid. 5.2 et les références citées).
5.
En définitive, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires ( art. 66 al. 1 et 5 LTF ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève et au Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève.
Lausanne, le 27 janvier 2025
Au nom de la II e Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Abrecht
Le Greffier: Magnin