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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1521/2022  
 
 
Arrêt du 27 avril 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et Koch. 
Greffière: Mme Paris. 
 
Participants à la procédure 
A._________, 
actuellement détenu, 
représenté par Me Delio Musitelli, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République 
et canton de Neuchâtel, 
passage de la Bonne-Fontaine 41, 
2300 La Chaux-de-Fonds, 
intimé. 
 
Objet 
Violation du principe de la célérité, 
 
recours contre le jugement de la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, du 3 novembre 2022 (CPEN.2021.103). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 8 novembre 2021, le Tribunal criminel des Montagnes et du Val-de-Ruz a notamment condamné A._________, outre aux frais de la cause, à une peine privative de liberté de 4.5 ans, sous déduction de 258 jours de détention avant jugement pour vols, dommages à la propriété, violation de domicile, rupture de ban et pour infractions aux art. 19 al. 1 et 2 et 19a LStup, à l'art. 33 al. 1 LArm et à l'art. 115 al. 1 let. c LEI. Il a maintenu sa détention pour des motifs de sûreté pour une durée de trois mois et a ordonné son expulsion pour une durée de 20 ans ainsi que son signalement dans le Système d'information Schengen. 
 
B.  
Statuant sur appel de A._________ par jugement du 3 novembre 2022, la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel l'a rejeté et a confirmé le jugement de première instance. 
 
C.  
A._________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 3 novembre 2022 en concluant, avec suite de frais et dépens, à ce qu'une violation du principe de la célérité dans le cadre de la procédure d'appel soit constatée et que, partant, la peine privative de liberté soit réduite à 4 ans, sous déduction des jours de détention avant jugement. Il requiert en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
En tant que, sous couvert d'un établissement manifestement inexact des faits, le recourant reproche à la cour cantonale de n'avoir pas tenu compte dans son examen relatif à la violation du principe de la célérité de la durée de la procédure d'appel en proportion avec la durée globale de la procédure, son grief d'arbitraire se recoupe avec sa critique en droit, de sorte qu'il sera examiné à l'aune de celle-ci (cf. consid. 2 infra).  
 
2.  
Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir admis une violation du principe de la célérité et de n'avoir pas réduit sa peine en conséquence. Il lui reproche en particulier de n'avoir constaté qu'une période d'inactivité de 7.5 mois durant la procédure d'appel en se basant, comme point de départ, sur la convocation des parties aux débats d'appel alors qu'elle aurait dû tenir compte de la durée globale de la procédure d'appel, soit 11 mois, laquelle apparaîtrait excessive. 
 
2.1. Les art. 5 CPP et 29 al. 1 Cst. garantissent notamment à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Ces dispositions consacrent le principe de la célérité et prohibent le retard injustifié à statuer.  
 
2.1.1. Le principe de la célérité s'applique à tous les stades de la procédure et impose aux autorités de mener la procédure pénale sans désemparer, dès le moment où le prévenu est informé des soupçons qui pèsent sur lui, afin de ne pas le maintenir inutilement dans l'angoisse (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1 p. 377; 133 IV 158 consid. 8 p. 170). Le caractère raisonnable de la durée d'une procédure s'apprécie suivant les circonstances de la cause, lesquelles commandent généralement une évaluation globale (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1 p. 377). Les critères pertinents à cet égard sont notamment la gravité des infractions qui sont reprochées, la complexité des faits, les mesures d'instruction requises, la difficulté et l'urgence de la cause, le comportement des autorités compétentes et celui du prévenu et à qui le retard de procédure doit être imputé (ATF 130 I 269 consid. 3.2 p. 273; 124 I 139 consid. 2c p. 142; plus récemment arrêt 6B_834/2020 du 3 février 2022 consid. 1.3). Comme on ne peut pas exiger de l'autorité pénale qu'elle s'occupe constamment d'une seule et unique affaire, il est inévitable qu'une procédure comporte quelques temps morts. Lorsque aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut; des périodes d'activités intenses peuvent donc compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires. Le principe de la célérité peut être violé, même si les autorités pénales n'ont commis aucune faute; elles ne sauraient exciper des insuffisances de l'organisation judiciaire (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3).  
S'agissant en particulier de la durée de la procédure d'appel, le Tribunal fédéral a considéré qu'une durée de 15 mois entre la déclaration d'appel et l'audience d'appel dans une affaire pénale de moindre importance violait le principe de la célérité (cf. arrêt 6B_1345/2021 du 5 octobre 2022 consid. 2.5). Une légère violation du principe de la célérité a également été admise pour une durée de deux ans concernant une procédure d'appel qui se limitait essentiellement à l'appréciation d'une seule déclaration de culpabilité et à un calcul de la peine (cf. arrêt 6B_942/2019 du 2 octobre 2020 consid. 1.2.2). En revanche, dans l'arrêt 6B_590/2014 du 12 mars 2015 consid. 5.3, la seule invocation d'un délai de sept mois et une semaine écoulés entre le dépôt de la déclaration d'appel et les débats d'appel ne démontrait pas l'existence d'une violation du principe de la célérité. Par ailleurs, la jurisprudence européenne a notamment admis qu'un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis à l'autorité de recours était choquant (ATF 130 IV 54 consid. 3.3.3 et les références citées; arrêt CourEDH Abdoella contre Pays-Bas du 26 mai 1993 § 23 et 24).  
 
2.1.2. La violation du principe de la célérité peut avoir pour conséquence la diminution de la peine, parfois l'exemption de toute peine ou encore une ordonnance de classement en tant qu' ultima ratio dans les cas les plus extrêmes (ATF 143 IV 373 consid. 1.4.1 p. 377).  
 
2.2. Après avoir retenu que la durée globale de la procédure, d'environ 24 mois, ne constituait pas une transgression du principe de la célérité, la cour cantonale a estimé que tel n'était pas non plus le cas de la durée de la procédure d'appel. Elle a tout d'abord considéré que la période entre le dépôt de la déclaration d'appel du recourant du 9 décembre 2021 et la convocation aux débats d'appel datée du 21 mars 2021 n'appelait pas de remarque particulière. Puis, elle a constaté qu'après dite convocation, aucune activité n'avait eu lieu jusqu'à l'audience du 3 novembre 2022, soit pendant 7.5 mois, sans que la surcharge de l'autorité judiciaire ne fournisse à cet égard aucune justification valable. Elle a néanmoins considéré que cette attente n'était pas choquante. Pour ce faire, elle a retenu que le recourant connaissait la date de l'audience et que l'attente avait eu lieu après le jugement du tribunal de première instance si bien que le recourant ne se trouvait pas dans la situation d'inquiétude liée à la période de l'instruction ou à celle précédant le prononcé du jugement du tribunal criminel. Au demeurant, vu la motivation du jugement de première instance et renseigné par un mandataire professionnel, il devait s'attendre à ce que son appel, même partiellement admis, n'aurait pas emporté une diminution de la peine d'une proportion telle que sa peine actuelle ne soit plus justifiée. Il savait en outre qu'il serait contraint de quitter le territoire suisse dans la mesure où il avait déjà été condamné à une mesure d'expulsion à laquelle il ne s'était pas soumis. La cour cantonale a encore souligné que moins d'une année s'était écoulée entre la déclaration d'appel et le jour de l'audience ce qui entrait dans la période de 12 mois retenue par les commissions des affaires juridiques du Conseil national et du Conseil des États lors des séances des 2 mars et 7 juin 2022 dans le cadre de la révision actuelle du code de procédure pénale.  
 
2.3. En l'espèce, la cour cantonale ne saurait être suivie lorsqu'elle considère qu'elle n'est restée inactive qu'à partir de la convocation des parties aux débats d'appel, soit pendant 7.5 mois. Le recourant a déposé une déclaration d'appel le 9 décembre 2021. Après que le ministère public a déclaré, le 12 janvier 2022, ne pas former d'appel joint, il s'est écoulé plus de deux mois avant que l'autorité cantonale ne convoque les parties à l'audience de jugement, sans qu'il ne ressorte de l'arrêt attaqué ou du dossier qu'il y ait eu des échanges d'écritures ou quelque acte d'instruction dans l'intervalle. Les divers actes ressortant du dossier ayant trait à la détention du recourant ne constituent pas des activités en lien avec le traitement du dossier. Ainsi, il s'est bien écoulé à tout le moins 10 mois, au stade de la procédure d'appel, durant lesquels l'autorité cantonale n'a procédé à aucune activité autre que la convocation des parties à l'audience d'appel. Or les mesures nécessaires à la convocation et à la préparation des débats n'étaient pas d'une importance telle qu'elles pourraient expliquer une si longue durée dans la mesure où ni les parties plaignantes, ni les nombreuses personnes entendues en première instance dans le cadre du trafic de stupéfiants n'ont été entendues lors de cette audience. Ce délai ne saurait non plus s'expliquer par la complexité de l'affaire. Il ressort en effet du jugement attaqué qu'au stade de l'appel, l'affaire ne présentait pas de difficulté particulière pour les préventions de vol et de dommages à la propriété (cf. jugement attaqué consid. 4 p. 22), ni pour le trafic de stupéfiants, la cour cantonale ayant à cet égard essentiellement renvoyé à la motivation claire et convaincante du jugement de première instance que l'appel du recourant, confinant à la témérité, ne venait pas remettre en cause (cf. jugement attaqué consid. 5 p. 22 et s.). De plus, la cour cantonale n'a pas eu à se pencher sur la peine. Le retard à statuer ne peut pas non plus être imputé au comportement du recourant. Au contraire, il ressort du dossier cantonal qu'après avoir été convoqué aux débats d'appel dans un délai de 8 mois, celui-ci a, par courrier du 6 avril 2022, reproché à la cour d'appel de ne pas respecter le principe de la célérité (cf. pièce n° 1067 du dossier cantonal) ce à quoi celle-ci a répondu être effectivement préoccupée par l'augmentation des délais de citation et faire tout son possible pour s'adapter aux exigences de la jurisprudence fédérale en matière d'oralité, d'immédiateté, de motivation ainsi que de célérité (cf. pièce n° 1071 du dossier cantonal). Compte tenu de ce qui précède, force est de constater que la période de 11 mois qu'a duré la procédure d'appel était excessive. D'autant plus, si l'on considère que seuls 9 mois se sont écoulés entre l'ouverture formelle de l'instruction pénale et le jugement de première instance alors que l'ampleur de la procédure était à ce stade plus importante, l'instruction visant plusieurs infractions (infractions graves à la LStup, consommation de stupéfiants, tentative de vol, infraction à la loi sur les armes, rupture de ban, conduite d'un véhicule sans être titulaire du permis de conduire, voies de fait, injure, exercice d'une activité lucrative sans autorisation, violation de la loi cantonale concernant l'harmonisation des registres officiels de personnes et le contrôle des habitants, ainsi que plusieurs vols, dommages à la propriété, violation de domicile et actes d'appropriation illégitime pour des complexes de faits différents) dont l'important trafic de stupéfiants a nécessité de nombreux actes d'enquêtes.  
Contrairement à ce que retient la cour cantonale, le fait que le recourant connaissait la motivation du jugement de première instance ne constitue pas un critère pertinent pour apprécier le respect du principe de la célérité par l'autorité judiciaire, pas plus que le fait de connaître la date de l'audience (cf. consid. 2.1.1 supra). Sur ce dernier point, le Tribunal fédéral a d'ailleurs déjà constaté qu'un délai de 8 mois entre une ordonnance de renvoi et l'audience de jugement violait le principe de la célérité (cf. arrêt 1B_419/2011 du 13 septembre 2011 consid. 2.2). Par ailleurs, le fait que la procédure d'appel a duré moins d'une année ne permet nullement de retenir qu'elle n'était pas excessive, d'autant moins pour un dossier ne relevant pas, comme en l'espèce, d'une complexité particulière, ce qui ressort d'ailleurs précisément de l'extrait du bulletin officiel du Conseil des États relatif aux modifications des art. 397 al. 5 et 408 al. 2 CPP auquel la cour cantonale se réfère (cf. intervention de Daniel Jositsch dans le Bulletin officiel du Conseil des États concernant la modification des art. 397 al. 5 et 408 al. 2 CPP, séance du 7 juin 2022, sous https://www.parlament.ch/de/ratsbetrieb/amtliches-bulletin/amtliches-bulletin-die-verhandlungen?SubjectId=57115).  
Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de constater que le principe de la célérité a été violé. Le grief du recourant doit donc être admis. Dans l'ensemble, la violation demeure toutefois légère de sorte qu'une réduction de la peine ne se justifie pas; le recours est rejeté en tant que le recourant conclut à une réduction de sa peine. Une violation du principe de la célérité doit néanmoins être constatée dans le dispositif du Tribunal fédéral. Par ce constat et par un règlement avantageux des frais et indemnités pour le recourant (cf. consid. 3 infra), celui-ci obtient, selon la jurisprudence, une réparation suffisante (cf. ATF 147 I 259 consid. 1.3.3; 138 II 513 consid. 6.5; 136 I 274 consid. 2.3; arrêts 6B_402/2022 du 24 avril 2023 consid. 4.4.3; 6B_1399/2021 du 7 décembre 2022 consid. 4.3; 6B_1147/2020 du 26 avril 2021 consid. 2.4 et les références citées).  
 
3.  
Il s'ensuit que le recours doit être partiellement admis. Il est constaté que le principe de la célérité a été violé dans le cadre de la procédure d'appel. Dans la mesure où le vice ayant conduit à l'admission du recours est de nature procédurale, il peut être renoncé à un échange d'écritures (cf. arrêts 6B_402/2022 précité consid. 6; 6B_1399/2021 du 7 décembre 2022 consid. 5; 6B_200/2022 du 23 mai 2022 consid. 6; 6B_124/2021 du 24 mars 2021 consid. 3 non publié in ATF 147 I 259). 
Compte tenu de l'issue du litige, la cause aurait dû être renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle constate une violation du principe de la célérité, ce qui aurait eu des répercussions sur sa décision relative aux frais et indemnités. Toutefois, dans la mesure où seul un point secondaire est concerné, les conséquences auraient été marginales, raison pour laquelle il est renoncé à un renvoi à l'instance précédente pour une nouvelle appréciation des conséquences en matière de frais et d'indemnisation. En lieu et place, aucun frais ne sera perçu et une compensation sera effectuée par une indemnité complète (cf. arrêts 6B_402/2022 précité consid. 6; 6B_1399 précité consid. 5; 6B_1147/2020 précité consid. 4.3; 6B_176/2017 du 24 avril 2017 consid. 3; 6B_927/2015 du 2 mai 2016 consid. 3). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est partiellement admis. Il est constaté que le principe de la célérité, dans la procédure d'appel, a été violé. Le recours est rejeté pour le surplus, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est admise. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais. 
 
4.  
Une indemnité de 3'000 fr. est versée à Me Delio Musitelli par la caisse du Tribunal fédéral. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour pénale du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 27 avril 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Paris