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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_365/2024, 6B_375/2024  
 
 
Arrêt du 28 janvier 2025  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et Wohlhauser. 
Greffière : Mme Brun. 
 
Participants à la procédure 
6B_365/2024 
A.________, 
représenté par Me Gwenaël Ponsart, avocat, 
recourant 1, 
 
et 
 
6B_375/2024 
B.________, 
représenté par Me Julien Broquet, avocat, 
recourant 2, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton du Jura, Le Château, 2900 Porrentruy, 
intimé. 
 
Objet 
6B_365/2024 
Escroquerie; arbitraire; droit d'être entendu, 
 
6B_375/2024 
Indemnité, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal 
de la République et canton du Jura, Cour pénale, 
du 19 mars 2024 (CP 6 / 2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 5 mai 2022, la Juge pénale du Tribunal de première instance de la République et canton du Jura a reconnu A.________ coupable de faux dans les titres et d'escroquerie et l'a condamné à une peine pécuniaire de 300 jours-amende à 30 fr. le jour avec un sursis pendant deux ans, ainsi qu'à une amende additionnelle de 1'000 francs. 
 
B.  
Par jugement du 19 mars 2024, la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien a partiellement admis l'appel de A.________ formé à l'encontre du jugement du 5 mai 2022 en ce sens qu'elle l'a acquitté du chef d'accusation de faux dans les titres en raison de la prescription et l'a condamné à une peine pécuniaire de 200 jours-amende à 30 fr. le jour avec un sursis pendant deux ans et à une amende additionnelle de 600 francs. Elle a confirmé le jugement pour le surplus. 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants: 
 
B.a. Le 7 janvier 2019, B.________ a déposé une plainte pénale auprès du Ministère public du canton du Jura contre inconnu, pour faux dans les titres, et s'est constitué partie plaignante et demandeur au pénal. Il a indiqué, en substance, que C.________ et D.________ avaient intenté une action civile contre lui et A.________, en leur qualité d'administrateurs de la société E.________ SA (la société).  
Dans ce cadre, B.________ a pris connaissance de l'existence d'un contrat de bail, entre A.________ - également propriétaire des locaux commerciaux loués par la société - et la société précitée, daté du 16 février 2004 et conclu pour une durée de 10 ans (du 1 er avril 2004 au 31 mars 2014) moyennant le versement d'un loyer net de 5'000 fr. par mois (version I). B.________ n'a jamais eu connaissance de ce contrat. Lors des pourparlers qui ont précédé son arrivée au conseil d'administration de la société, A.________ lui avait transmis, en avril 2007, un contrat de bail, également daté du 16 février 2004, mais conclu pour une durée de trois ans (du 1 er avril 2004 au 31 mars 2007) moyennant le versement d'un loyer brut de 5'000 francs (version Il). Ledit contrat a mené la société à contracter avec le propriétaire des locaux commerciaux - A.________ -, l'avenant au contrat du 12 décembre 2007, lequel prévoyait un loyer brut de 6'250 fr. par mois dès le 1 er janvier 2008, 8'335 fr. par mois dès le 1 er janvier 2009, 10'417 fr. par mois dès le 1er janvier 2010, 12'500 fr. par mois dès le 1er janvier 2011 et 13'000 fr. par mois dès le 1 er janvier 2012.  
 
B.b. A.________ a été condamné par la cour cantonale, en sus de sa peine pécuniaire et de son amende, à deux tiers des frais judiciaires de première instance fixés à 3'211 fr. 50 (soit 2'141 fr., le solde étant laissé à la charge de l'État), ainsi qu'aux deux tiers des frais judiciaires de seconde instance fixés à 1'696 fr. 60 (soit 1'131 fr. 05).  
Considérant que B.________ avait succombé s'agissant du chef d'accusation de faux dans les titres, la cour cantonale l'a condamné à un tiers des frais judiciaires de seconde instance fixés à 1'696 fr. 60 (émolument de 1'500 fr. et débours de 196 fr. 60), soit un montant de 565 fr. 55. Elle l'a en outre condamné à supporter ses dépens pour la procédure de première et de deuxième instance. 
 
C.  
A.________ et B.________ forment un recours en matière pénale au Tribunal fédéral à l'encontre du jugement du 19 mars 2024. A.________ conclut principalement, avec suite de frais et dépens, à son acquittement du chef d'accusation d'escroquerie et à l'octroi d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP. Subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. B.________ conclut, avec suite de frais et dépens, à l'allocation d'une indemnité au sens de l'art. 433 CPP d'un montant total de 7'942 fr. 70 (5'834 fr. 65 pour la procédure de première instance + 2'108 fr. 05 pour la procédure de seconde instance). 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les deux recours, dirigés contre le même jugement, concernent le même complexe de faits et portent dans une large mesure sur les mêmes questions de droit. Il se justifie de les joindre et de statuer par une seule décision (art. 71 LTF et 24 PCF). 
 
2.  
Dénonçant une violation de son droit à une enquête officielle et approfondie (art. 3 et 13 CEDH), de la maxime d'instruction (art. 6 CPP), de son droit d'être entendu (art. 29 Cst. et 6 CEDH) et de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.), le recourant 1 reproche en réalité à l'autorité cantonale d'avoir violé son droit à la preuve en refusant les mesures d'instruction requises, à savoir l'expertise graphologique et trois auditions de témoins. 
 
2.1.  
 
2.1.1. Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment celui de produire ou de faire administrer des preuves, à condition qu'elles soient pertinentes et de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1; 143 V 71 consid. 4.1; 142 II 218 consid. 2.3; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références citées). Le droit d'être entendu n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant de manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude qu'elles ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion. Le refus d'instruire ne viole ainsi le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 144 II 427 consid. 3.1.3; 141 I 60 consid. 3.3; 136 I 229 consid. 5.3). Les mêmes principes prévalent en appel (arrêts 6B_165/2022 du 1er mars 2023 consid. 1.1.2; 6B_1403/2021 du 9 juin 2022 consid. 1.2, non publié in ATF 148 I 295, et les références citées).  
 
2.1.2. Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Le droit d'être entendu, consacré par l'art. 107 CPP, garantit aux parties le droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves (al. 1 let. e). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts 6B_1317/2023 du 31 octobre 2024 consid. 1.2; 6B_601/2024 du 2 octobre 2024 consid. 1.3). La juridiction d'appel peut ainsi refuser des preuves nouvelles lorsqu'une administration anticipée de ces preuves démontre qu'elles ne seront pas de nature à modifier le résultat de celles déjà administrées (ATF 136 I 229 consid. 5.3). Le refus d'instruire ne viole le droit d'être entendu des parties et l'art. 389 al. 3 CPP que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le tribunal a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 144 II 427 consid. 3.1.3; 141 I 60 consid. 3.3; 136 I 229 consid. 5.3; arrêts 6B_1317/2023 précité consid. 1.2; 6B_601/2024 précité consid. 1.3).  
 
2.2. Le recourant 1 estime que l'expertise graphologique pourrait permettre de déterminer qui a signé la version II du contrat de bail et, dans le meilleur des cas, de le disculper. Quant aux auditions, le recourant 1 considère que les membres du personnel de la régie immobilière seraient en mesure de désigner la personne qui a créé la version II du contrat de bail et d'expliquer dans quelles circonstances ce contrat a été rédigé, ainsi que les raisons pour lesquelles il ne figure pas dans les éléments qui ont été versés au dossier par la gérance.  
 
2.3. La cour cantonale a jugé que la mise en oeuvre d'une expertise graphologique était dénuée de toute pertinence car les éléments du dossier permettaient de se prononcer sur la question de l'authenticité des signatures. Au demeurant, le recourant 1 ayant fait usage de la version II du contrat de bail, il n'était en réalité pas nécessaire de déterminer s'il avait signé ce document ou non.  
S'agissant des auditions de trois employés de la régie immobilière, la cour cantonale a relevé que cette dernière avait déjà fait parvenir l'ensemble des documents en sa possession. Elle a en outre estimé qu'il était douteux que, quinze ans après les faits, le personnel de la gérance puisse fournir des indications détaillées sur les faits de la cause. Qui plus est, les circonstances, entourant la signature des baux, n'étaient pas déterminantes pour juger de l'affaire puisqu'il s'agissait plutôt de déterminer si la version II du contrat était authentique, question à laquelle le personnel de la gérance immobilière ne pouvait pas répondre. 
 
2.4. En l'espèce, l'argumentation du recourant 1 n'est pas propre à démontrer en quoi l'appréciation anticipée de la pertinence des moyens de preuve serait manifestement insoutenable. Le recourant 1 se contente d'affirmer que l'expertise et les auditions sollicitées seraient utiles, en ce sens qu'elles permettraient de faire la lumière sur cette affaire et de renforcer sa version des faits en excluant sa participation. Ce faisant, il ne fait qu'opposer sa propre appréciation à celle de la cour cantonale dans une démarche purement appellatoire, partant, irrecevable.  
 
3.  
Le recourant 1 conteste la manière dont la cour cantonale a calculé le point de départ du délai de prescription. Il estime que ce dernier aurait dû commencer à courir au plus tard fin avril 2007, soit au moment où un accord de fusion entre les deux sociétés de fitness a été trouvé, de sorte que les faits relatifs au chef d'accusation d'escroquerie étaient prescrits lorsque le jugement de première instance a été rendu en mai 2022. 
 
3.1. La survenance de la prescription de l'action pénale doit être prise en compte d'office à chaque stade de la procédure (ATF 139 IV 62 consid. 1; 129 IV 49 consid. 5.4; 116 IV 80 consid. 2a).  
Pour les infractions punissables d'une peine privative de liberté de plus de trois ans, telle que l'escroquerie (art. 146 CP), le délai de prescription est de quinze ans (art. 97 al. 1 let. b CP dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2014; cf. RO 2013 4417). Dans sa teneur en vigueur au moment des faits reprochés au recourant jusqu'au 31 décembre 2013, l'art. 97 al. 1 let. b aCP prévoyait le même délai, de sorte que c'est une prescription de quinze ans qui court, ce qui n'est au demeurant pas contesté. Seul reste donc litigieux le point de départ de la prescription. 
Le point de départ du délai de prescription est régi par l'art. 98 CP, lequel est resté inchangé (cf. ATF 142 IV 276 consid. 5.1; arrêt 6B_1097/2022 du 7 mars 2023 consid. 3.4). La prescription court dès le jour où l'auteur a exercé son activité coupable (let. a), dès le jour du dernier acte si cette activité s'est exercée à plusieurs reprises (let. b) ou dès le jour où les agissements coupables ont cessé s'ils ont eu une certaine durée (let. c). Dans le cadre du chef d'accusation d'escroquerie, le point de départ de la prescription est l'acte de l'auteur. Ce n'est donc pas la survenance du dommage qui fait courir la prescription (ATF 134 IV 297 consid. 4.2 et 4.3.2; arrêt 6B_164/2019 du 11 février 2020 consid. 1.2). Le dommage doit découler directement - c'est-à-dire sans autre comportement délictueux de l'auteur - de l'acte accompli sous l'effet de l'erreur (ATF 126 IV 113 consid. 3a). 
 
3.2. La cour cantonale a constaté que le recourant 1 avait fait usage de la version II du contrat de bail lorsqu'il l'a remise en avril 2007 au recourant 2. Elle a ainsi jugé que cette démarche avait pour but de tromper ce dernier sur les modalités dudit contrat, en particulier lui faire croire à une durée plus courte - de trois ans - que celle qui avait été fixée dans la version I. En lui remettant la version II, le recourant 1 avait pour dessein d'amener le recourant 2, en sa qualité d'administrateur de la société, à accepter une augmentation des loyers à laquelle celui-ci n'aurait pas consenti, s'il avait eu connaissance de la version I du contrat de bail, et ainsi obtenir des revenus plus élevés que ce qui avait été initialement prévu. La cour cantonale a considéré que le recourant 1 avait atteint ce but puisque, sur présentation du faux contrat de bail, le recourant 2 avait engagé sa société à verser des loyers plus importants que ce qui était initialement prévu en signant l'avenant au contrat du 12 décembre 2007, respectivement la convention de coopération et d'investissement du 22 mai 2007.  
 
3.3. En l'espèce, le délai de prescription a commencé à courir dès la signature de l'avenant au bail le 12 décembre 2007. Le jugement de première instance ayant été rendu le 5 mai 2022, il s'ensuit que la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant que la prescription n'était pas atteinte. Le grief du recourant 1 est rejeté.  
 
4.  
Le recourant 1 dénonce une violation de l'art. 146 al. 1 CP
 
4.1.  
 
4.1.1. En vertu de l'art. 146 CP, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 30 juin 2023, soit au moment des faits, se rend coupable d'escroquerie celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers.  
L'escroquerie suppose ainsi, au plan objectif, une tromperie astucieuse, une erreur, un acte de disposition préjudiciable, un dommage, ainsi qu'un rapport de causalité entre ces différents éléments. Sur le plan subjectif, l'art. 146 al. 1 CP décrit une infraction intentionnelle. L'auteur doit en outre être mû par un dessein d'enrichissement illégitime (ATF 150 IV 169 consid. 5). 
 
4.1.2. L'escroquerie consiste à tromper la dupe par des affirmations fallacieuses, par la dissimulation de faits vrais ou par un comportement qui la conforte dans son erreur. Par tromperie, il faut entendre tout comportement destiné à faire naître chez autrui une représentation erronée des faits (ATF 150 IV 169 consid. 5.1; 147 IV 73 consid. 3.1; arrêts 6B_984/2023 du 6 novembre 2024 consid. 4.1.2; 6B_1092/2023 du 24 mai 2024 consid. 2.2).  
Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit cependant pas; il faut encore qu'elle soit astucieuse. Il y a tromperie astucieuse, au sens de l'art. 146 al. 1 CP, lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manoeuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 150 IV 169 consid. 5.1; 147 IV 73 consid. 3.2). Il y a notamment manoeuvre frauduleuse lorsque l'auteur fait usage de titres falsifiés ou obtenus sans droit ou de documents mensongers (ATF 128 IV 18 consid. 3a; arrêts 6B_984/2023 précité consid. 4.1.2; 6B_1365/2022 du 25 janvier 2024 consid. 5.1.1). 
L'astuce n'est pas réalisée si la dupe pouvait se protéger avec un minimum d'attention ou éviter l'erreur avec le minimum de prudence que l'on pouvait attendre d'elle. Il n'est cependant pas nécessaire qu'elle ait fait preuve de la plus grande diligence ou qu'elle ait recouru à toutes les mesures possibles pour éviter d'être trompée. L'astuce n'est exclue que si elle n'a pas procédé aux vérifications élémentaires que l'on pouvait attendre d'elle au vu des circonstances. Une coresponsabilité de la dupe n'exclut toutefois l'astuce que dans des cas exceptionnels (ATF 150 IV 169 consid. 5.1.2; 147 IV 73 consid. 3.2; 143 IV 302 consid. 1.4.1). Ainsi, n'importe quelle négligence de sa part ne suffit pas à exclure l'astuce (ATF 126 IV 165 consid. 2a). Il n'est donc pas nécessaire que la dupe soit exempte de la moindre faute (arrêts 6B_984/2023 précité consid. 4.1.2; 6B_1324/2023 du 3 juin 2024 consid. 2.1 et les références citées). 
 
4.1.3. La tromperie astucieuse doit amener la dupe, dans l'erreur, à accomplir un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. L'erreur créée ou confortée par la tromperie doit motiver l'acte. En d'autres termes, il doit exister un rapport de causalité ou de motivation entre l'acte de disposition de la dupe et l'erreur, créée ou confortée par la tromperie (ATF 150 IV 169 consid. 5; 128 IV 255 consid. 2e/aa). L'acte de disposition peut consister en tout acte ou omission qui cause "directement" un préjudice au patrimoine de la dupe ou d'un tiers, sans qu'une intervention supplémentaire de l'auteur ne soit nécessaire. L'existence d'une telle immédiateté résulte de la définition même de l'escroquerie, qui implique notamment que le dommage soit causé par un acte de disposition de la dupe elle-même (" Selbstbeschädigung "; ATF 128 IV 255 consid. 2e/aa). L'acte de disposition ne doit toutefois pas nécessairement consister en un seul acte; il est tout à fait concevable, notamment dans les structures marquées par la répartition des tâches (entreprises, autorités, etc.), que plusieurs personnes entreprennent des actes isolés successifs, dont le dernier entraîne l'atteinte au patrimoine (ATF 126 IV 113 consid. 3a in JdT 2001 IV 48; arrêts 6B_984/2023 précité consid. 4.1.3; 6B_129/2022 du 5 avril 2023 consid. 1.3.4).  
Ainsi qu'il découle du texte de l'art. 146 al. 1 CP, la dupe qui dispose du patrimoine atteint ne doit pas nécessairement se confondre avec le lésé (ATF 133 IV 171 consid. 4.3; arrêt 6B_984/2023 précité consid. 4.1.3); l'acte de disposition peut également porter sur le patrimoine d'un tiers. Toutefois, si la dupe porte préjudice au patrimoine d'un tiers (par une escroquerie dite triangulaire), l'art. 146 CP n'est réalisé que si la dupe bénéficie d'un pouvoir de disposition sur ce bien, qu'il soit de droit ou de fait (ATF 133 IV 171 consid. 4.3; 128 IV 255 consid. 2e/aa; arrêts 6B_984/2023 précité consid. 4.1.3; 6B_271/2022 du 11 mars 2024 consid. 5.2.2). Ce n'est en effet qu'à cette condition que l'on peut imputer le comportement de la dupe au lésé et remplir ainsi la condition du dommage à soi-même. 
 
4.2. Le recourant 1 conteste la réalisation de plusieurs éléments constitutifs objectifs de l'infraction d'escroquerie.  
 
4.2.1. Le recourant 1 nie l'existence d'un pouvoir de disposition du recourant 2 sur le patrimoine lésé, en ce sens que celui-ci n'aurait pas pu engager la société en décembre 2007, puisqu'il n'en a été membre qu'en janvier 2008.  
Il ressort effectivement du jugement attaqué (p. 2) que la société a été inscrite au registre du commerce le 4 décembre 2003 et que le recourant 2 n'en est devenu membre qu'en janvier 2008. La jurisprudence est toutefois claire quant au fait qu'un simple pouvoir de disposition de fait est suffisant (cf. jurisprudence citée supra consid. 4.1.3, en particulier ATF 133 IV 171 consid. 3.3 et 128 IV 255 consid. 2e/aa). Dès lors, il importe uniquement que, de facto, il ait eu la possibilité d'engager la société, ce indépendamment des administrateurs ou des ayants droit économiques.  
 
4.2.2. Le recourant 1 invoque l'absence d'astuce. Il estime à cet égard que le recourant 2 aurait dû prendre d'autres mesures pour s'assurer que le contrat de bail, qui lui était remis, était authentique, ce d'autant plus que celui-ci a dû le lui demander à de multiples reprises et a été étonné de la durée de trois ans qui y figurait.  
La cour cantonale a considéré que le recourant 1 avait trompé le recourant 2 en lui affirmant, dans le cadre des négociations portant sur le regroupement de leur fitness respectif, que le contrat de bail qui liait la société portait sur une durée de trois ans, taisant l'existence de la version I du 16 février 2004. Elle a estimé que cette tromperie devait être considérée comme astucieuse dès lors que, pour valider ses propos, le recourant 1 lui avait remis un faux contrat dont le contenu confirmait ses dires, soit que le bail avait été conclu pour une durée de trois ans. La cour cantonale a d'ailleurs indiqué à cet égard que c'était justement les doutes relatifs à la durée du contrat de bail qui avaient poussé le recourant 2 à demander la production d'une copie de ce document. Dès lors, on ne saurait lui reprocher de ne pas avoir procédé aux vérifications. 
Le raisonnement de la cour cantonale ne prête pas flanc à la critique. Face à la supercherie orchestrée par le recourant 1, on ne saurait reprocher au recourant 2, même s'il était expérimenté dans le domaine du fitness, de ne pas avoir mis en doute l'authenticité du contrat de bail produit à sa demande pour vérifier les conditions qui y figuraient. 
Lorsque le recourant 1 affirme que le recourant 2 n'a pas pris les mesures de prudence élémentaires qu'on pouvait attendre de lui, il oppose son appréciation des faits à celle de la cour cantonale dans une démarche appellatoire, partant, irrecevable. 
 
4.2.3. Le recourant 1 nie l'existence d'un dommage et d'un lien de causalité. Selon lui, dès lors que le recourant 2 a engagé la société sans droit, c'est son propre comportement qui lui a causé un dommage.  
Le recourant 2 était en mesure d'engager la société avant janvier 2008 (cf. supra consid. 4.2.2). Cet élément suffit à sceller le sort du grief.  
En tant que le recourant 1 semble invoquer une interruption du lien de causalité, sa critique se limitant à l'invocation de l'absence de pouvoir de représentation, son grief est infondé au vu de ce qui précède. 
 
4.2.4. En définitive, c'est sans violer le droit fédéral que la cour cantonale a reconnu que les éléments constitutifs objectifs de l'infraction d'escroquerie étaient réalisés. Les griefs du recourant 1 sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables.  
 
5.  
Le recourant 1 invoque pèle-mêle plusieurs griefs dont la violation du principe d'accusation et de la reformatio in pejus.  
 
5.1. Le recourant 1 conteste la réalisation de l'infraction d'escroquerie au motif que la société n'existerait plus, qu'il aurait été condamné pour avoir commis une infraction au préjudice de quelqu'un d'autre que les lésés qui figuraient dans l'acte d'accusation et qu'il aurait été condamné pour avoir commis une infraction au préjudice d'une seule personne en première instance puis, en deuxième instance, au préjudice de plusieurs personnes dont une personne morale.  
L'infraction d'escroquerie étant une infraction poursuivie d'office (art. 146 al. 1 CP), le fait que la société ait cessé d'exister n'a aucune incidence sur la poursuite pénale des agissements en cause. 
S'agissant de la prétendue violation du principe d'accusation, on peine à comprendre son grief dans la mesure où, comme l'a relevé la cour cantonale (cf. jugement attaqué, p. 23), l'acte d'accusation du 14 janvier 2021 mentionne expressément que le recourant 1 est renvoyé pour escroquerie au préjudice de la société et de ses ayants droit. 
Il en va de même lorsqu'il voit une violation de l'interdiction de la reformatio in pejus. On rappelle à cet égard que ce principe est violé, à l'aune du dispositif, en présence d'une aggravation de la peine prononcée en première instance ou d'une qualification juridique plus grave des faits. Ce n'est pas le cas en l'espèce. Ces griefs sont infondés.  
 
5.2. Le recourant 1 estime devoir uniquement être condamné pour escroquerie pour la période se déroulant entre avril et le 12 décembre 2007 puisque l'infraction serait consommée par la signature de l'avenant.  
Le recourant 1 perd de vue que, par le truchement de son escroquerie, il s'est enrichi au-delà du 12 décembre 2007 en percevant des loyers indus. Lorsqu'il a signé l'avenant au bail du 12 décembre 2007, respectivement les conventions du 22 mai 2007, le recourant 2 a accepté, au préjudice de la société, une augmentation des loyers à compter du 1er janvier 2008, laquelle, à défaut, aurait uniquement été tenue au versement d'un loyer mensuel de 5'000 fr. jusqu'au 31 mars 2014. C'est donc à raison que la cour cantonale a retenu que l'infraction d'escroquerie s'était déroulée jusqu'au 31 mars 2014, date qui correspond à la fin du contrat de bail version I. 
 
6.  
Le recourant 2 considère qu'il n'aurait pas dû être privé d'une indemnité, au sens de l'art. 433 CPP, car il aurait au moins obtenu partiellement gain de cause sur le pan de l'escroquerie. 
 
6.1. Aux termes de l'art. 81 al. 1 LTF, quiconque a participé à la procédure de dernière instance cantonale ou a été privé de la possibilité de le faire, et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée est habilité à recourir au Tribunal fédéral. En l'occurrence, le recourant 2, en qualité de partie plaignante, se plaint qu'aucune indemnité (art. 433 CPP) ne lui a été versée. Il est touché par la décision entreprise et a un intérêt juridique au sens de l'art. 81 al. 1 let. b LTF (ATF 138 IV 248 consid. 2; arrêt 6B_438/2013 du 18 juillet 2013 consid. 1). Il a qualité pour former un recours en matière pénale.  
 
6.2. À teneur de l'art. 428 al. 1, 1re phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. L'art. 428 al. 2 CPP régit les cas dans lesquels les frais de la procédure peuvent être mis à la charge de la partie recourante qui obtient une décision qui lui est plus favorable. Pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts 6B_271/2024 du 17 septembre 2024 consid. 3.1.3; 6B_1130/2020 du 14 avril 2021 consid. 4.1.2; 6B_701/2019 du 17 décembre 2020 consid. 2.3).  
Aux termes de l'art. 433 al. 1 CPP, la partie plaignante peut demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure si elle obtient gain de cause (let. a). La partie plaignante obtient gain de cause au sens de l'art. 433 al. 1 CPP si les prétentions civiles sont admises ou lorsque le prévenu est condamné (ATF 139 IV 103 consid. 4.1). 
La question de l'indemnisation (art. 429 à 434 CPP) doit être traitée après celle des frais (art. 423 à 428 CPP, ATF 145 IV 268 consid. 1.2). Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation (ATF 145 IV 268 consid. 1.2). 
 
6.3. En tant que le recourant 2 renonce expressément à demander la modification du jugement attaqué sur la question des frais (art. 428 CPP), cette question ne sera pas examinée (cf. art. 42 al. 2 LTF). Au demeurant, compte tenu des conclusions en appel du recourant 2 tendant au rejet de l'appel du recourant 1, la cour cantonale pouvait, sans violer l'art. 428 al. 1 CPP, considérer que celui-ci avait succombé et mettre, par un tiers, les frais d'appel à sa charge.  
S'agissant de l'indemnité réclamée (art. 433 CPP), dans le cas où la partie plaignante n'est que demanderesse au pénal, elle obtient gain de cause lorsque le prévenu est condamné. Dans le cas d'espèce, le recourant 2 n'a pas déposé de conclusions civiles, il n'a pas la qualité de partie dans le cadre de l'infraction d'escroquerie - seule la société revêtant la qualité de lésée à cet égard - et l'infraction de faux dans les titres est prescrite. Partant, il n'a pas obtenu gain de cause, même partiellement (art. 433 al. 1 let. a CPP). Le grief est rejeté. 
 
7.  
Il résulte de ce qui précède que les recours 6B_365/2024 et 6B_375/2024 sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. Les recourants, qui succombent, supportent les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Les causes 6B_365/2024 et 6B_375/2024 sont jointes. 
 
2.  
Les recours sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables. 
 
3.  
Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants à raison de 3'000 fr. chacun. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour pénale. 
 
 
Lausanne, le 28 janvier 2025 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Brun