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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1206/2021  
 
 
Arrêt du 30 mars 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys, van de Graaf, Koch et Hurni. 
Greffier: M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par M e Loïc Parein, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens, 
intimé. 
 
Objet 
Contrôle de la correspondance par l'établissement pénitentiaire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal 
du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, 
du 26 août 2021 (n° 782 SPEN/146822/SBA). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, né en 1976, a été condamné à une peine privative de liberté de 18 ans, pour lésions corporelles simples qualifiées, voies de fait qualifiées, mise en danger de la vie d'autrui, menaces qualifiées, actes d'ordre sexuel avec des enfants, contrainte sexuelle aggravée, viol aggravé, tentative de viol aggravé, pornographie, inceste, complicité d'inceste et violation du devoir d'assistance ou d'éducation (jugement du Tribunal d'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois du 29 mars 2018). Il purge actuellement sa peine au sein de B.________. 
Le 9 août 2019, la direction de B.________ a informé l'intéressé qu'elle avait saisi trois courriers qui lui avaient été adressés par sa mère et son frère, au motif qu'ils contenaient une multitude de photographies représentant des enfants, vraisemblablement les siens, soit des victimes pénales. Après un échange d'écriture, la direction de B.________ a maintenu sa position, précisant que les photographies seraient transmises en cas d'accord écrit manifestement exprimé par chaque victime pénale figurant sur les photographies, respectivement chaque curateur muni d'un mandat de protection en faveur des victimes pénales concernées (communication du 18 novembre 2019). De plus, l'Office d'exécution des peines (OEP) a interdit le 11 mars 2020 à A.________ de prendre contact avec sa femme et ses enfants. 
Le 11 novembre 2020, la Cheffe du Service pénitentiaire vaudois (SPEN) a rendu une première décision d'irrecevabilité, au motif que les photographies avaient été récupérées par le frère de l'intéressé le 3 octobre 2019. Après que la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a annulé cette décision (arrêt du 5 janvier 2021), elle a, par décision du 22 juillet 2021, rejeté le recours formé par A.________ et confirmé la décision du 18 novembre 2019. Elle a également rejeté la demande d'assistance judiciaire de l'intéressé. 
 
B.  
Statuant le 26 août 2021, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le recours formé par A.________ et confirmé la décision du 22 juillet 2021. Elle a par ailleurs mis l'intéressé au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure cantonale de recours. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale contre cet arrêt dont il demande la réforme en ce sens que la "censure opérée par les autorités cantonales est annulée" et que le bénéfice de l'assistance judiciaire lui soit accordé pour la procédure devant le SPEN. A titre subsidiaire, il demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Le recours est assorti d'une demande d'assistance judiciaire. 
Il n'a pas été ordonné un échange d'écriture. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Selon l'art. 78 al. 2 let. b LTF, le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale, y compris celles sur l'exécution des peines et des mesures. 
 
2.  
 
2.1. La garantie de la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst.) et le droit au respect de la vie privée et familiale (art. 8 CEDH et 13 Cst.) permettent aux personnes détenues d'entretenir des contacts avec les membres de leur famille, dans les limites découlant de la mesure de contrainte qui leur est imposée et du rapport de sujétion spécial qui les lie à l'État (ATF 145 I 318 consid. 2.1).  
Conformément aux exigences de l'art. 36 Cst., les restrictions à ces droits doivent reposer sur une base légale - matérielle en matière de correspondance (ordonnance ou règlement; arrêt 1B_567/2021 du 14 janvier 2022 consid. 3.2 et les références) - et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire au but de l'incarcération et au fonctionnement de l'établissement de détention. Le principe de la proportionnalité, consacré de manière générale par la disposition susmentionnée, exige que chaque atteinte à ces droits fasse l'objet d'une pesée d'intérêts dans le cadre de laquelle l'autorité doit tenir compte de l'ensemble des circonstances, soit en particulier des buts de la détention, des impératifs de sécurité de l'établissement pénitentiaire, de la durée de l'incarcération et de la situation personnelle du prévenu (ATF 145 I 318 consid. 2.1 et les références). 
 
Les garanties de la CEDH relatives aux conditions de détention n'offrent pas une protection plus étendue que celles garanties par la Constitution fédérale. En effet, si la CourEDH relève que l'art. 8 CEDH protège la confidentialité des échanges y compris lorsque l'expéditeur ou le destinataire est un détenu, elle reconnaît également que la "nécessité" d'une ingérence dans l'exercice du droit d'un condamné détenu au respect de sa correspondance, est admissible; elle doit cependant s'apprécier en fonction des exigences normales et raisonnables de la détention. La défense de l'ordre public et la prévention des infractions pénales, par exemple, peuvent justifier des ingérences plus amples à l'égard d'un détenu que d'une personne en liberté (arrêt de la CourEDH Golder contre Royaume-Uni du 21 février 1975 [requête n° 4451/70], série A n° 61 § 45). Ces principes ont été rappelés encore récemment (arrêt Laurent c. France du 24 mai 2018 [requête n° 28798/13], § 42 ss; voir ATF 145 I 318 consid. 2.1).  
 
2.2. La Recommandation Rec (2006) 2-rév sur les Règles pénitentiaires européennes, adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe le 11 janvier 2006, révisée et modifiée par le Comité des Ministres le 1 er juillet 2020, s'applique aux personnes placées en détention provisoire par une autorité judiciaire ou privées de liberté à la suite d'une condamnation (règle 10.1). La règle 24.1 autorise les détenus à communiquer aussi fréquemment que possible - par lettre, par téléphone ou par d'autres moyens de communication - avec leur famille, des tiers et des représentants d'organismes extérieurs, ainsi qu'à recevoir des visites desdites personnes. La règle 24.2 prévoit que toute restriction ou surveillance des communications et des visites nécessaire à la poursuite et aux enquêtes pénales, au maintien du bon ordre, de la sécurité et de la sûreté, ainsi qu'à la prévention d'infractions pénales et à la protection des victimes - y compris à la suite d'une ordonnance spécifique délivrée par une autorité judiciaire - doit néanmoins autoriser un niveau minimal acceptable de contact.  
Selon la jurisprudence, ces règles n'ont valeur que de simples directives à l'intention des États membres du Conseil de l'Europe. Le Tribunal fédéral en tient cependant compte dans la concrétisation de la liberté personnelle et des autres droits fondamentaux garantis par la Cst. et la CEDH. Ainsi, s'agissant des contacts des détenus avec le monde extérieur, la règle 24 mentionnée ci-dessus peut être considérée comme définissant les responsabilités des administrations pénitentiaires pour assurer le respect des droits découlant notamment de l'art. 8 CEDH dans les conditions fondamentalement restrictives de la prison (ATF 145 I 318 consid. 2.2 et les références). 
 
2.3. Le principe d'un contrôle de la correspondance en détention - avant jugement (art. 235 al. 3 CPP) ou en exécution de peine (art. 84 al. 2 CP) - n'est pas remis en cause par la doctrine. La doctrine reconnaît que le but de la détention en cause, le fonctionnement de l'établissement pénitentiaire (sécurité) et/ou l'organisation de la vie en communauté dans celui-ci peuvent justifier certaines restrictions - parfois allant au-delà d'un seul contrôle - dans les contacts avec l'extérieur; ces limitations doivent respecter le principe de proportionnalité (ATF 145 I 318 consid. 2.5 et les références).  
 
3.  
 
3.1. Le CPP règle la poursuite et le jugement, par les autorités pénales de la Confédération et des cantons, des infractions prévues par le droit fédéral (art. 1 CPP). Il ne régit en revanche pas la procédure d'exécution des jugements rendus, qui demeure de la compétence des cantons, sauf disposition contraire de la loi (cf. art. 123 al. 2 Cst. et 439 al. 1 CPP).  
 
3.2. En matière d'exécution des peines privatives de liberté et des mesures entraînant une privation de liberté, l'art. 74 CP prévoit que le détenu et la personne exécutant une mesure ont droit au respect de leur dignité; l'exercice de leurs droits ne peut être restreint que dans la mesure requise par la privation de liberté et par les exigences de la vie collective dans l'établissement.  
 
3.2.1. Selon l'art. 75 al. 1 et 3 CP, l'exécution de la peine privative de liberté doit améliorer le comportement social du détenu, en particulier son aptitude à vivre sans commettre d'infractions; elle doit correspondre autant que possible à des conditions de vie ordinaires, assurer au détenu l'assistance nécessaire, combattre les effets nocifs de la privation de liberté et tenir compte de manière adéquate du besoin de protection de la collectivité, du personnel et des codétenus (al. 1). Le règlement de l'établissement prévoit qu'un plan d'exécution est établi avec le détenu; le plan porte notamment sur l'assistance offerte, sur la possibilité de travailler et d'acquérir une formation ou une formation continue, sur la réparation du dommage, sur les relations avec le monde extérieur et sur la préparation de la libération (al. 3).  
 
3.2.2. Selon l'art. 18 du Concordat du 10 avril 2006 sur l'exécution des peines privatives de liberté et des mesures concernant les adultes et les jeunes adultes dans les cantons latins (C-EPMCL; RSV 340.93), dans le but de développer le comportement social de la personne détenue, tout en protégeant la collectivité publique, un plan d'exécution de la peine et un plan de traitement pour l'exécution de la mesure sont établis, sous réserve des dispositions sur l'internement à vie (al. 1). La Conférence fixe les conditions et les modalités d'application (al. 2). Sont réservées la compétence, la procédure et la responsabilité des cantons en matière de plan d'exécution de la peine et de la mesure (al. 3).  
Dans le canton de Vaud, la loi du 4 juillet 2006 sur l'exécution des condamnations pénales (LEP/VD; RSV 340.01) régit l'exécution des peines et des mesures, conformément aux principes et aux règles contenus dans le droit fédéral (art. 1 al. 1 LEP/VD). Selon l'art. 8 al. 3 LEP/VD, l'Office d'exécution des peines prend toutes les décisions relatives à la planification, à l'organisation et au contrôle de l'exécution des condamnations pénales, et requiert à cette fin tous les avis utiles. S'agissant de l'exécution de peines privatives de liberté en milieu fermé, il est compétent notamment pour approuver, mettre en oeuvre et corriger le plan d'exécution de sanction (art. 19 al. 1 let. e LEP/VD). 
Selon les art. 29 ss du règlement du 16 août 2017 sur le statut des personnes condamnées exécutant une peine privative de liberté ou une mesure (RSPC/VD; RSV 340.01.1), le plan d'exécution de la sanction (ci-après: le plan d'exécution) est l'instrument qui permet de mettre en oeuvre le principe d'individualisation de l'exécution de la peine privative de liberté ou de la mesure (art. 29 RSPC/VD). Il contribue à favoriser la réinsertion des personnes condamnées dans la société libre et à prévenir le risque de récidive (art. 30 RSPC/VD). En cas de condamnation à une peine privative de liberté, le plan décrit le déroulement de l'exécution de la peine en tenant compte de la durée de la peine, des caractéristiques de la délinquance de la personne condamnée, des besoins de cette dernière ainsi que de ceux de la collectivité publique (art. 33 al. 2 RSPC/VD). L'établissement soumet le plan d'exécution qu'il a élaboré à l'autorité dont la personne condamnée dépend pour ratification dans un délai de 3 mois dès l'admission de la personne condamnée dans l'établissement (art. 34 al. 1 RSPC/VD). En fonction de la durée et du motif de la détention, le plan d'exécution contient notamment les relations avec l'extérieur (art. 35 let. j RSPC/VD). La personne condamnée est tenue de participer activement à l'élaboration et à la mise en oeuvre du plan d'exécution (art. 36 al. 1 RSPC/VD). 
 
3.2.3. Selon l'art. 84 CP, le détenu a le droit de recevoir des visites et d'entretenir des relations avec le monde extérieur; les relations avec les amis et les proches doivent être favorisées (al. 1). Les relations peuvent être surveillées; elles peuvent être limitées ou interdites pour des raisons d'ordre et de sécurité de l'établissement; le contrôle des visites n'est pas autorisé si les intéressés n'en sont pas informés; les mesures de procédure destinées à garantir la poursuite pénale sont réservées (al. 2). Les relations avec les défenseurs doivent être autorisées; les visites des défenseurs peuvent être surveillées, mais l'écoute des conversations est interdite; l'examen du contenu de la correspondance et des écrits de l'avocat n'est pas permis; en cas d'abus, l'autorité compétente peut interdire les relations avec un avocat (al. 4). Les relations du détenu avec les autorités de surveillance ne peuvent être soumises à un contrôle (al. 5).  
Selon l'art. 89 RSPC/VD, les personnes condamnées peuvent recevoir et envoyer de la correspondance (al. 1). Les établissements remettent et expédient la correspondance chaque jour ouvrable (al. 2). La correspondance est contrôlée par l'établissement (al. 3). Pour autant qu'elle soit identifiée comme telle, la correspondance échangée entre la personne condamnée et un avocat, un agent d'affaires breveté, le service, les autorités de surveillance, les autorités pénales ou les consulats et les ambassades, n'est pas contrôlée, de même que les bulletins de vote (al. 4). A l'exception des courriers mentionnés à l'alinéa 4, tous les courriers sont remis ouverts, qu'il s'agisse de ceux que les personnes condamnées confient aux établissements en vue de leur expédition ou de ceux qui sont transmis par les établissements aux personnes condamnées (al. 5). Lorsque pour des questions de sécurité au sens de l'article 84 CP, un courrier est censuré, mention en est faite à la personne condamnée (al. 6). Le coût de l'affranchissement du courrier est à la charge de la personne condamnée qui l'envoie. En cas de moyens financiers insuffisants, l'affranchissement des courriers officiels est avancé par les établissements. Il en va de même des courriers personnels, à raison d'un par semaine (al. 7). 
Au sein de B.________, les surveillants-chefs de maison surveillent l'application du régime prescrit par le règlement pour chaque catégorie de détenus, notamment en ce qui concerne la correspondance (art. 185 du règlement de B.________ du 20 janvier 1982 [R-B.________/VD; RSV 340.11.1]). 
 
3.3. Selon l'art. 156 CPP, la Confédération et les cantons peuvent prévoir des mesures visant à protéger des personnes en dehors de la procédure. Le droit à la vie, tel qu'il est garanti aux art. 10 al. 1 Cst. et 2 CEDH, implique notamment une obligation positive pour l'État de préserver la santé et la vie des personnes placées sous sa responsabilité (ATF 138 IV 86 consid. 3.1.2 et la référence). Ainsi, l'obligation de témoigner dans la procédure pénale a pour corollaire une obligation positive de l'État d'assurer la protection des personnes qui courent un risque du fait de leur témoignage (arrêt 1A.32/1999 du 13 décembre 1999 consid. 3c, reproduit in EuGRZ 2000 p. 451; WOLFGANG WOHLERS, Die Grenzen von Schutzmassnahmen zugunsten sensibler Zeugen und gefährdeter Personen, RPS 129/2011 p. 127; MADELEINE HIRSIG-VOUILLOZ, Le projet fédéral de mesures de protection extraprocédurale des témoins, RSJ 108/2012 p. 78).  
 
4.  
 
4.1. La cour cantonale a retenu que l'autorité d'exécution des peines devait prendre toute mesure utile pour protéger la personnalité des victimes lorsqu'elle constate que des actes sont de nature à y porter atteinte. A cet égard, l'extrême gravité des actes commis par le recourant sur la majorité de ses enfants et les traumatismes qui en ont découlé justifiaient une protection accrue de ces derniers. L'intérêt des enfants à ce que leurs photographies ne tombent pas dans les mains de leur bourreau - sauf accord exprès de leur part ou de leurs représentants légaux - primait manifestement sur celui du recourant à pouvoir disposer librement de photographies de ses enfants. En vertu de l'art. 28 CC, le recourant ne pouvait pas non plus continuer de posséder des photographies que lui-même et son épouse avaient faites de leurs enfants sans leur consentement ou celui de leurs représentants légaux. Il en allait de la protection de la personnalité des enfants, particulièrement du respect de leur vie privée. Les enfants devaient pouvoir se reconstruire en décidant s'ils voulaient ou non avoir des contacts ou relations avec leur père; si le seul fait que celui-ci détenait des photographies d'eux ne pouvait pas être considéré comme un contact à proprement parler, il fallait en revanche un tel contact pour obtenir l'autorisation nécessaire en vue de la transmission des photographies. Aussi, l'envoi de ces photographies au recourant sans le consentement des enfants serait constitutif d'une atteinte illicite à leur personnalité.  
 
4.2. Le recourant ne conteste pas le fait que l'ouverture de sa correspondance, telle que prévue à l'art. 89 al. 3 et 5 RSPC/VD, est conforme aux principes de la légalité et de la proportionnalité (art. 84 al. 2 CP; ATF 145 I 318 consid. 2.6). Il soutient en revanche que la direction de B.________ n'était pas en droit de refuser de lui transmettre les photographies de ses enfants. Il fait valoir que seul un juge civil, saisi par ses enfants, pourrait interdire la communication des photographies. Autrement dit, à défaut d'une ordonnance du juge civil, la censure de son courrier était dépourvue de fondement. Par ailleurs, la possession de photographies de ses enfants était en dessous du seuil de tolérance qu'on est en droit d'attendre de tout membre d'une famille, étant rappelé que ses enfants ne s'en étaient pas plaints. L'éventuelle illicéité (au sens de l'art. 28 CC) serait au surplus couverte par son intérêt privé à disposer de souvenirs des membres de sa famille.  
 
5.  
 
5.1. Les limites posées au droit d'un détenu de recevoir de la part de tiers des photographies de ses enfants trouvent leur fondement dans les motifs qui sont à l'origine de sa condamnation pénale. Dans la mesure où les enfants sont les victimes directes d'infractions graves, des mesures de protection de leurs droits et de leurs libertés peuvent devoir être prises. En présence d'enfants victimes de viols et d'agressions sexuelles graves, susceptibles d'être exposés à un risque de victimisation secondaire, d'intimidation et de représailles, les obligations positives inhérentes à un respect effectif de leur vie privée (art. 13 al. 1 Cst. et 8 CEDH) imposent notamment l'adoption de mesures de protection particulières jusque dans les relations des individus entre eux (cf. arrêt de la CourEDH J.L. c. Italie du 27 mai 2021 [requête n° 5671/16], § 119 et la référence). Ainsi, dans le canton de Vaud, l'art. 81 al. 3 RSPC/VD rappelle que des mesures particulières sont prises lors des visites parent-enfants, notamment lorsque l'enfant est la victime directe ou indirecte de l'infraction de son parent.  
 
5.2. En l'espèce, le recourant a été condamné à une peine privative de liberté de 18 ans, pour des actes d'une particulière gravité commis notamment au préjudice de ses enfants. Depuis lors, il purge sa peine à B.________. En dehors des raisons d'ordre et de sécurité de l'établissement (art. 84 al. 2 CP), qui ne trouvent pas application dans le cas présent, les relations avec le monde extérieur du détenu sont régies par le plan d'exécution de sa sanction pénale (art. 75 al. 3 CP; cf. art. 35 let. j RSPC/VD). Selon cet acte, le recourant ne doit pas entrer en contact, de manière directe ou indirecte, avec les victimes pénales. De plus, par communication du 11 mars 2020, l'OEP lui a interdit expressément de prendre contact avec sa femme et ses enfants. Cela signifie qu'une prise de contact, directe ou indirecte, est préjudiciable au bien-être de ses enfants, au regard de leur vulnérabilité particulière.  
Si les différentes mesures de protection des victimes peuvent certes être prises par le juge civil (art. 28 ss CC), dans les rapports de droit privé (ATF 101 II 177 consid. 3), elles découlent cependant aussi de la mesure de contrainte imposée aux détenus et du rapport de sujétion spécial qui lient ces derniers à l'État. Lors du contrôle de la correspondance d'un détenu, il existe en particulier un intérêt public important (au sens de l'art. 36 al. 1, 3 e phrase, Cst.) à protéger la personnalité des tiers (arrêt 1B_77/2008 du 15 juillet 2008 consid. 2.2). Au regard du risque de victimisation secondaire, cela est d'autant plus vrai s'il s'agit d'enfants victimes de crimes d'une gravité particulière. Eu égard à la nature même de la situation, c'est aux autorités publiques chargées de l'exécution de la sanction pénale de s'employer alors activement à protéger les enfants victimes d'infractions graves.  
 
5.3. Aussi, en présence d'enfants victimes de crimes d'une particulière gravité de leur père, la cour cantonale a retenu à juste titre qu'il appartient aux enfants de manifester le désir - s'ils le souhaitent - que des tiers remettent au recourant leurs photographies. L'interdiction ne porte en outre pas sur les relations du recourant avec autrui en général, mais uniquement sur sa relation avec ses victimes, dans le cadre de laquelle toute forme de contact, direct ou indirect, est actuellement exclue. On cherche enfin en vain dans l'argumentation du recourant des griefs qui ont trait à la proportionnalité de la mesure. A cet égard, les différentes autorités qui se sont succédé ont rappelé à raison qu'il suffisait au recourant de s'adresser aux différents curateurs des enfants pour que ces derniers soient mis en situation de manifester ou non leur désir qu'il détienne des photographies d'eux. La présentation d'une telle demande ne doit en effet pas entraîner en elle-même de conséquences fâcheuses pour les enfants du recourant, si bien qu'il n'appartient pas à un établissement pénitentiaire de la mettre en oeuvre. Au demeurant, nul préjudice personnel, social ou moral susceptible d'être considéré comme une conséquence prévisible de la perpétration de graves infractions pénales ne saurait servir de fondement à un grief consistant à dire que les intérêts des enfants devraient s'effacer devant celui du recourant à disposer d'un souvenir de ses victimes.  
 
5.4. Ensuite des éléments qui précèdent, l'arrêt attaqué est conforme dans son résultat au droit fédéral, qui admet que certaines mesures soient prises par les autorités publiques chargées de l'exécution de la sanction pénale aux fins de la protection de la personnalité des enfants victimes d'infractions graves, pourvu que ces mesures n'allaient pas au-delà de ce qui est nécessaire. Le grief du recourant doit être rejeté.  
 
6.  
 
6.1. Le recourant se plaint enfin d'une violation du droit à l'assistance judiciaire. Il soutient en particulier que la nécessité de l'assistance d'un avocat pour la sauvegarde de ses droits était donnée devant le SPEN.  
 
6.2. Aux termes de l'art. 29 al. 3 Cst., toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toutes chances de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. Cette disposition confère au justiciable une garantie minimale, dont le Tribunal fédéral examine librement le respect (ATF 142 III 131 consid. 4.1), à l'exception des constatations de fait qui s'y rapportent, qu'il n'examine que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 134 I 12 consid. 2.3; arrêt 6B_1069/2021 du 12 novembre 2021 consid. 3.2).  
Le CPP règle la poursuite et le jugement, par les autorités pénales de la Confédération et des cantons, des infractions prévues par le droit fédéral (art. 1 CPP). Il ne régit en revanche pas la procédure d'exécution des jugements rendus, qui demeure de la compétence des cantons, sauf dispositions spéciales du CPP ou du CP (consid. 3.1 supra; cf. arrêts 6B_974/2021 du 11 octobre 2021 consid. 2.1; 6B_158/2013 du 25 avril 2013 consid. 2.1; 6B_621/2011 du 19 décembre 2011 consid. 2.1). L'art. 132 CPP (sur la défense d'office) ne s'applique par conséquent pas directement à la procédure cantonale d'exécution d'une peine ou d'une mesure. Tout au plus, est-il applicable à titre de droit cantonal supplétif (cf. art. 38 al. 2 LEP/VD). Le Tribunal fédéral ne contrôle l'application du droit cantonal qu'avec un pouvoir d'examen limité à l'arbitraire (ATF 141 I 105 consid. 3.3.1). L'invocation d'un tel grief déduit du droit constitutionnel (art. 106 al. 2 LTF) suppose une argumentation claire et détaillée (ATF 143 IV 500 consid. 1.1).  
 
6.3. En l'espèce, du point de vue factuel, la cause ne posait pas de difficulté particulière devant le SPEN. Du point de vue juridique, quoi qu'en dise le recourant, l'affaire ne présentait pas non plus de difficulté particulière. En effet, l'issue du litige à ce stade dépendait exclusivement de l'application du principe de la proportionnalité. En outre, c'est en vain que le recourant affirme qu'il avait besoin de l'assistance d'un avocat car il n'avait aucune connaissance juridique et présentait un trouble mental. Exposer au SPEN qu'il souhaitait disposer des photos de ses enfants ne nécessitait aucune qualification juridique particulière. Au contraire, on peut attendre de tout citoyen détenu qu'il soit en mesure de faire valoir ses droits devant le SPEN, en contestant en des termes simples la communication de la direction de B.________. On ne voit enfin pas pourquoi il serait "insoutenable" d'accorder l'assistance judiciaire devant l'autorité judiciaire et la refuser devant le SPEN. En tout état, c'est sur la base d'éléments de droit que la cour cantonale a mis le recourant au bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure cantonale de recours, non pas en raison d'un développement juridique ardu nécessitant déjà devant le SPEN l'assistance d'un avocat. Faute pour la cause de présenter un état de fait délicat ou de soulever des questions juridiques complexes, la désignation d'un conseil juridique gratuit devant le SPEN n'apparaît pas nécessaire en l'espèce.  
 
6.4. En définitive, compte tenu des considérants qui précèdent, la cour cantonale n'a pas violé l'art. 29 Cst., ni les différentes dispositions de droit cantonal citées dans le recours, en confirmant le refus du SPEN d'octroyer l'assistance judiciaire au recourant.  
 
7.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. 
Dès lors que le recourant est dans le besoin et que ses conclusions ne paraissaient pas d'emblée dénuées de chances de succès, sa demande d'assistance judiciaire doit être admise. Par conséquent, il y a lieu de le dispenser des frais et d'allouer une indemnité à son mandataire, désigné comme avocat d'office (art. 64 al. 2 LTF). Une indemnité de 3'000 fr. apparaît proportionnée et suffisante pour indemniser le travail fourni. 
Le recourant est rendu attentif au fait qu'il devra rembourser la caisse du Tribunal fédéral, s'il retrouve ultérieurement une situation financière lui permettant de le faire (art. 64 al. 4 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est admise. M e Loïc Parein est désigné comme conseil d'office. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Une indemnité de 3'000 fr. est allouée à M e Loïc Parein à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 30 mars 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Bleicker