Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_16/2023
Arrêt du 22 juin 2023
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Escher et Bovey.
Greffière : Mme Achtari.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Aba Neeman, avocat,
recourant,
contre
Masse en faillite de Société B.________ SA,
représentée par Me Olivier Derivaz,
intimée.
Objet
cession conditionnelle des droits de la masse
(art. 260 LP),
recours contre la décision du Tribunal cantonal du canton du Valais, Juge de l'autorité supérieure en matière de plainte, du 7 décembre 2022 (LP 22 9).
Faits :
A.
A.a. Par décision du 28 août 2019, la Juge suppléante du district de Monthey, sur requête de C.________ SA, a prononcé la faillite sans poursuite préalable de Société B.________ SA. Statuant le 9 mars 2020, le Juge de l'autorité de recours en matière de poursuite et de faillite du Tribunal cantonal valaisan a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé par la faillie contre cette décision. Par arrêt du 18 juin 2020, le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours déposé par la faillie contre ce prononcé (5A_288/2020).
A.b. Avant le prononcé de sa faillite, Société B.________ SA a ouvert deux actions en libération de dette à l'encontre de C.________ SA devant le Tribunal de première instance du canton de Genève (causes n° C/15777/2017 et C/26090/2018, ultérieurement jointes sous le n° C/15777/2017). Dite autorité a exigé de la demanderesse, Société B.________ SA, le dépôt d'avances de frais de, respectivement, 13'000 fr. et 150'000 fr.
D.________ SA et Société d'exploitation E.________ SA ont, en parallèle, ouvert les mêmes actions à l'encontre de C.________ SA (causes ultérieurement jointes également sous le n° C/15777/2017).
Selon un avis de débit du 29 décembre 2018, un montant de 150'000 fr. a été prélevé, le 28 décembre 2018, sur le "[c]ompte courant entreprises" no
xxx, dont A.________ est titulaire auprès de la banque F.________, et bonifié sur le compte G.________ SA (n°
yyy) en faveur du Tribunal de première instance du canton de Genève. Selon l'intéressé, l'ordre de virement y relatif a été donné aux fins d'acquitter l'avance de frais exigée dans la cause n° C/26090/2018, ce que l'intimée ne conteste pas. Il n'est pas non plus contesté que A.________ a fait exécuter ce virement pour le compte de Société B.________ SA.
A.________ n'a pas produit une (éventuelle) créance en remboursement de l'avance de frais de 150'000 fr. dans la faillite de Société B.________ SA.
Par ordonnance du 1er novembre 2019, la Présidente du Tribunal de première instance du canton de Genève a ordonné, en application de l'art. 207 al.1 LP, la suspension de la procédure n° C/15777/2017, qui en était au stade de l'échange d'écritures.
A.c. Par décision du 5 novembre 2020, le Juge du district de Monthey a autorisé la liquidation sommaire de la faillite.
A.d. Dans le cadre des opérations de liquidation de la faillite de Société B.________ SA, l'Office des poursuites et faillites du district de Monthey (actuellement: Office des faillites du Bas-Valais;
ci-après: office) a décidé de ne pas poursuivre la procédure en libération de dette contre C.________ SA. L'office a ainsi adressé, le 30 septembre 2021, une circulaire aux créanciers leur soumettant cette décision et, dans le cas ou la majorité des créanciers le suivrait sur ce point, a offert les droits de la masse en cession. L'office a assorti cette cession de la condition que le créancier qui la demanderait paie en ses mains la somme de 150'000 fr. correspondant à la part d'avance déposée par la faillie auprès du Tribunal de première instance du canton de Genève.
A.e. Par lettre recommandée adressée à l'office le 11 octobre 2021, A.________ a requis la cession de l'action en libération de dette contre C.________ SA, s'est engagé à verser la somme de 150'000 fr. dans le délai imparti par la circulaire mais a, par ailleurs, " contest[é] la possibilité pour l'Office de requérir ce montant " au motif " qu'il s'agi[ssait] là d'un obstacle à la cession non autorisée (sic) par la LP ".
A.f. Le 23 novembre 2021, l'administration de la faillite a, en application de l'art. 260 LP, autorisé A.________ à agir, en lieu et place de la masse en faillite, dans la procédure en libération de dette pendante devant le Tribunal de première instance du canton de Genève. Cette autorisation était soumise à diverses conditions.
A.g. Par ordonnance du 18 août 2022, la Juge du Tribunal de première instance du canton de Genève a ordonné la substitution de Société B.________ SA en liquidation par A.________, la reprise de la procédure opposant désormais celui-ci à C.________ SA (cause n° C/15777/2017) et la division de cette cause en tant qu'elle oppose Société d'exploitation E.________ SA en liquidation et D.________ SA en liquidation à C.________ SA sous le numéro de cause C/15735/2022, actuellement suspendue.
B.
B.a. Le 12 octobre 2021, A.________ a porté plainte contre la circulaire précitée du 30 septembre 2021 devant le Juge du district de Monthey en sa qualité d'autorité inférieure de surveillance, en concluant, sur le fond, à l'annulation de " la condition posée par la[dite] circulaire [...] (chiffre 5) s'agissant de la cession des droits de la masse consistant en le versement de la somme de Fr. 150'000.-- ".
B.b. Par décision du 9 mars 2022, le Juge suppléant du district de Monthey a rejeté la plainte.
B.c. Par décision du 7 décembre 2022, le Juge de l'Autorité supérieure en matière de plainte du Tribunal cantonal valaisan a partiellement admis le recours formé par A.________ contre la décision du 9 mars 2022 et a renvoyé la cause à l'office pour qu'il complète l'autorisation (formule obligatoire n° 7F) délivrée au recourant en y ajoutant que:
- L'autorisation délivrée au recourant de suivre au procès en libération de dette C/15777/2017 pendant devant le Tribunal de première instance du canton de Genève est conditionnée au versement par le recourant, en main de l'administration de la faillite, de la somme de 150'000 fr. correspondant à l'avance de frais du même montant effectuée pour le compte de la faillie dans ledit procès;
- Dans l'hypothèse où, dans la cause précitée C/15777/2017, le recourant retire les demandes, acquiesce aux conclusions reconventionnelles de C.________ SA ou transige avec celle-ci, l'administration de la faillite lui remboursera la différence entre le montant de 150'000 fr. et le solde des avances de 163'000 fr. qui lui sera effectivement versé par le Tribunal de première instance du canton de Genève;
- Dans l'hypothèse où le procès en libération de dette (cause précitée C/15777/2017) est liquidé par un jugement sur le fond à caractère final, l'administration de la faillite remboursera au recourant le montant de 150'000 fr., sous déduction de celui des avances qui lui seront éventuellement restituées par le Tribunal de première instance du canton de Genève.
C.
Par acte posté le 9 janvier 2023, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre la décision du 7 décembre 2022. Il conclut principalement à sa réforme en ce sens que la condition posée par la circulaire aux créanciers du 30 septembre 2021 de l'Office des faillites du Bas-Valais (chiffre 5) s'agissant de la cession des droits de la masse consistant en le versement de la somme de 150'000 fr. est annulée. Subsidiairement, il sollicite le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
L'intimée conclut au rejet du recours. La cour cantonale s'est référée aux considérants de sa décision.
Considérant en droit :
1.
Le recours a été déposé à temps en temps utile (art. 100 al. 2 let. a LTF
cum art. 46 al. 1 let. c LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF), dès lors que le renvoi à l'office est assorti d'injonctions très précises (ATF 134 III 136 consid. 1.2), rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF, en relation avec l'art. 19 LP), par une autorité supérieure de surveillance statuant en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF). Il est recevable sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). Le plaignant, qui a succombé devant l'autorité précédente et possède un intérêt digne de protection à la modification de la décision attaquée, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par la partie recourante, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 145 V 215 consid. 1.1; 144 III 462 consid. 3.2.3; 143 V 19 consid. 2.3). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit se conformer au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf.
supra consid. 2.1). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).
En l'espèce, la partie du recours intitulée " Résumé des faits et du déroulement de la procédure " (p. 2-4) sera ignorée en tant que les faits qui y sont exposés s'écartent de ceux contenus dans l'arrêt attaqué, sans que le recourant ne démontre que, d'une part, leur établissement serait arbitraire ou qu'ils auraient été constatés en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et que, d'autre part, leur correction serait susceptible d'influer sur le sort de la cause.
3.
L'autorité de surveillance a tout d'abord relevé que si, en l'occurrence, aucun créancier n'avait requis la cession des droits de la masse, le procès en libération de dette (C/15777/2017) serait devenu sans objet et les (éventuels) frais y relatifs auraient dû être mis à la charge de la faillie. En tant que partie demanderesse audit procès, celle-ci aurait ainsi disposé d'une créance en restitution de tout ou d'une partie des avances de frais de 163'000 fr. (150'000 fr. + 13'000 fr.), laquelle créance serait "rentr[ée] dans la masse" (art. 197 al. 2 LP). Par conséquent, il eût appartenu au Tribunal de première instance du canton de Genève de verser le montant de 163'000 fr., déduction faite d'un éventuel émolument (art. 95 al. 2 let. b CPC), à l'office des faillites et non au recourant, dès lors que la cause qui a fondé le paiement par celui-ci de l'avance de frais de 150'000 fr. pour le compte de Société B.________ SA constitue pour le tribunal une
res inter alios acta.
Elle a ensuite envisagé l'hypothèse où le recourant, en tant que cessionnaire des droits de la masse, retire les actions en libération de dette et acquiesce aux conclusions reconventionnelles de C.________ SA, retenant que, dans ce cas de figure, ce serait à lui, et non à la masse, que reviendrait le solde des avances de frais de 163'000 fr., dans la mesure où la liquidation des frais du procès a lieu entre les seules parties à celui-ci, à savoir le "
Prozessstandschafter " et son adverse partie. Or, dans ce cas, la créance de C.________ SA serait définitivement colloquée, sans que les créanciers puissent l'attaquer (art. 63 al. 3 OAOF), comme lorsque le procès n'est continué ni par la masse ni par les créanciers individuellement (art. 63 al. 2 OAOF). Le désistement du recourant léserait donc la masse, qui se verrait frustrée (du solde) des avances de frais de 163'000 fr. Autrement dit, elle se trouverait placée dans une situation moins favorable que si aucun créancier n'avait demandé et obtenu l'autorisation de continuer le procès. L'autorité cantonale a considéré qu'il en irait de même si le recourant devait transiger avec la partie défenderesse. Le fait qu'il n'avait pas produit dans la faillite de Société B.________ SA une (éventuelle) créance en remboursement du montant de l'avance de frais de 150'000 fr. n'y changeait strictement rien. Le juge précédent a encore relevé que le risque identifié ci-dessus ne se réaliserait en revanche pas si le procès en libération de dette était liquidé par un jugement sur le fond à caractère final (cf. art. 236 al. 1 CPC), puisqu'en cas de rejet de la demande, les frais judiciaires seraient compensés avec les avances fournies (art. 111 al. 1 CPC), étant toutefois entendu qu'il convenait de réserver l'hypothèse où le montant desdits frais serait inférieur à celui des avances, de sorte que le tribunal devrait en restituer l'excédent au recourant.
L'autorité de surveillance a ensuite rappelé qu'il n'était pas envisageable d'astreindre le cessionnaire, dont la créance n'est pas (totalement) couverte, à remettre à la masse tout ou partie du gain du procès - fût-il constitué uniquement du solde de l'avance de frais. En effet, de par la cession, la masse perd tout pouvoir sur la prétention "cédée", si bien qu'une tentative de l'administration de la faillite de disposer de ladite prétention ne serait pas admissible.
Dans ces conditions et dès lors qu'il était exclu de subordonner la conclusion d'une transaction (ou le retrait de la demande) à l'accord de la masse (cf. ATF 102 III 29 p. 31), l'autorité cantonale a jugé que, plutôt que de refuser l'autorisation de suivre au procès en libération de dette, il était justifié de conditionner celle-ci au versement de "sûretés" par le créancier cessionnaire.
Si le Tribunal de première instance du canton de Genève devait rayer la cause du rôle à la suite, notamment, du retrait des demandes (cf. art. 241 al. 3 CPC), il ne percevrait, en principe, qu'un émolument de décision réduit (cf. art. 7 al. 1 du règlement genevois du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière civile; RTFMC - RS/GE E 1 05.10), qu'il prélèverait sur les avances de 163'000 fr. et dont il verserait le reliquat au recourant. L'on ne pouvait toutefois d'emblée exclure qu'il renonce à la perception d'un tel émolument en raison de " circonstances particulières " (cf. art. 7 al. 2 RTFMC). L'administration de la faillite aurait ainsi dû, selon l'autorité cantonale, conditionner l'autorisation de continuer le procès au dépôt de la totalité de la somme de 163'000 fr. Le principe de l'interdiction de la
reformatio in peius (cf. art. 20a al. 2 ch. 3 LP) interdisait cependant d'augmenter de 13'000 fr. - correspondant à l'avance de frais qui a été fournie dans la cause n° C/15777/2017 (avant la jonction des causes) - les sûretés devant être acquittées par le créancier cessionnaire. L'autorité cantonale a en outre considéré qu'il convenait de préciser, dans l'autorisation délivrée au recourant (formule obligatoire n° 7F), que l'administration de la faillite restituerait à celui-ci la différence entre le montant de 150'000 fr. et le solde des avances de 163'000 fr. qui lui serait effectivement versé par le tribunal genevois. L'intéressé ayant d'ores et déjà payé la totalité du montant considéré en main de la masse, on ne voyait pas qu'il serait " entrav[é] (...) dans l'exercice de ses droits légitimes ". C'était en revanche de manière pertinente qu'il soutenait que la condition susdécrite devait être énoncée dans la formule obligatoire n° 7F, et non pas (seulement) dans l'offre de cession.
4.
Le recourant invoque une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), sous l'aspect du droit à une décision motivée. Il fait valoir que la décision attaquée est dépourvue de toute motivation sur la question des conséquences de l'absence de production, par ses soins, d'une créance en remboursement par la faillie du montant de 150'000 fr. qu'il a versé pour elle à titre d'avance de frais au Tribunal de première instance du canton de Genève.
4.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. implique notamment, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 142 I 135 consid. 2.1). Il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respectée, la motivation pouvant d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1).
4.2. En l'occurrence, le recourant reconnaît que l'autorité cantonale a fourni une " explication " à l'appui de son avis selon lequel l'absence de production dans la faillite d'une créance de 150'000 fr. était sans pertinence pour l'issue du litige. Il considère toutefois que " cette explication n'apporte aucune justification à l'affirmation qui la précède, mais est vraisemblablement censée soutenir l'opinion selon laquelle la masse se trouverait dans une plus mauvaise situation en cas de désistement ou de transaction du recourant qu'en l'absence de cession des droits de la masse ". Ce faisant, le recourant confond manifestement le défaut de motivation, qui relève du droit d'être entendu, avec le désaccord que la motivation présentée a suscité chez lui et qui relève du fond (ATF 145 III 324 consid. 6.1 et les références).
Il suit de là qu'autant que recevable, le grief doit être rejeté.
5.
Le recourant fait grief à l'autorité cantonale d'avoir violé l'art. 260 LP.
Il relève en premier lieu que tant et aussi longtemps qu'il ne produit pas de créance à raison du montant de 150'000 fr. qu'il avait lui-même versé au Tribunal de première instance du canton de Genève avant la faillite ou qu'il ne revendique pas ce montant, alors qu'il est établi qu'il avait versé ce montant, la masse en faillite est exposée, tout au plus, à la perte d'une chance et non à un risque de diminution de son actif, d'augmentation de son passif, de non-augmentation de son actif ou de non-diminution de son passif. En l'absence de risque de préjudice avéré, l'administration de la faillite n'était ni autorisée à refuser la cession requise ni autorisée à la conditionner au versement de sûretés.
Ensuite, le recourant souligne qu'il ne ressort pas de l'arrêt 7B.206/2005 sur lequel l'autorité de surveillance s'est fondée que le versement de sûretés serait admissible. Selon lui, s'il fallait admettre le risque de préjudice et la possibilité de soumettre la cession à une condition, l'autorité de surveillance aurait dû au moins le faire de la manière la moins attentatoire à ses droits et d'ériger en condition une restriction de la faculté du créancier-cessionnaire de transiger ou de se désister sans l'accord de l'administration de la faillite, étant précisé que l'ATF 102 III 29 ne l'exclut pas
Sur cette prémisse, le recourant soutient qu'il faudrait alors subordonner la conclusion d'une transaction ou un désistement à l'obtention de l'accord de l'administration sur les frais. Il relève que la qualification de
res inter alios acta par l'autorité de surveillance du paiement par lui-même de l'avance de frais pour le compte de la faillie n'est pas correcte si la condition précitée est mentionnée dans la formule obligatoire n° 7F, qui doit nécessairement être communiquée non seulement à la partie contre laquelle les prétentions sont dirigées, mais également à l'autorité saisie du litige, le moment venu. Cela suffisait à exclure une transaction ou un désistement qui ne respecterait pas les conditions posées, partant à prémunir la masse contre un éventuel risque de préjudice.
6.
La question qui se pose est de savoir si l'administration de la faillite peut soumettre la cession d'une prétention de la masse, au sens de l'art. 260 LP, à la fourniture de sûretés afin de garantir à celle-ci le remboursement des frais de justice versés par la société, demanderesse à une action en libération de dette, avant sa mise en faillite.
6.1.
6.1.1. Aux termes de l'art. 260 al. 1 LP, si l'ensemble des créanciers renonce à faire valoir une prétention, chacun d'eux peut en demander la cession à la masse.
La cession selon l'art. 260 LP est une institution du droit de la faillite et du droit de procédure
sui generis. Elle peut être considérée comme une "
Prozessstandschaft ", permettant au cessionnaire d'entamer un procès en son propre nom, pour son propre compte et à ses risques et périls ou de reprendre celui-ci dans les mêmes conditions. En revanche, il ne devient pas, par la cession, le titulaire de la prétention litigieuse qui continue d'appartenir à la masse; ne lui est cédé que le droit d'agir à la place de la masse, qui n'est cependant pas partie au procès (ATF 146 III 441 consid. 2.5.1; 138 III 628 consid. 5.3.2). L'art. 260 LP sert l'objectif général visé par l'ouverture d'une procédure de faillite à l'encontre d'une société, à savoir rendre disponible les biens appartenant à la masse dans l'intérêt des créanciers (ATF 146 III 441 consid. 2.5.2).
La qualité pour agir du créancier cessionnaire repose sur une délégation légale de la faculté de conduire le procès, ou capacité d'agir. Les créanciers de la masse ne poursuivent ainsi pas le recouvrement de créances dont ils sont titulaires, mais de créances du failli qui tombent dans la masse. Ils disposent toutefois d'un droit préférentiel au moment de la répartition du produit du procès (art. 260 al. 2 LP), soit celui de se satisfaire avant tous les autres créanciers du failli, sur le résultat éventuel du procès à concurrence de l'entier de leur propre créance contre le failli. Les cessionnaires peuvent donc employer la somme obtenue, après paiement des frais, pour couvrir leur créance, l'excédent éventuel devant être remis à la masse (formule obligatoire n° 7F ch. 3). A ces fins, ils doivent soumettre les pièces justificatives à l'administration, qui vérifiera les frais effectivement occasionnés (formule obligatoire n° 7F ch. 2 et 4; GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 2001, n° 66 ad art. 260 LP; JEANNERET/CARRON,
in Commentaire romand, LP, 2005 n° 32 ad art. 260 LP). Le procès conduit après une cession au sens de l'art. 260 LP sert ainsi à augmenter les actifs de la masse et le fait que le produit, au moment de la répartition, revienne en première ligne à celui qui en supporte le risque n'y change rien (ATF 145 III 101 consid. 4.1.1 et les références).
Les frais qui doivent être déduits - payés - sont ajoutés au montant de la prétention du créancier cessionnaire admise au passif, en modifiant l'état de collocation lorsque le tableau de distribution définitif n'est pas passé en force (art. 83 al. 2 OAOF) ou que la faillite n'est pas close (art. 95 OAOF; GILLIÉRON,
op. cit., n° 83 ad art. 260 LP). Par frais, il faut entendre les frais du procès que le créancier cessionnaire a effectivement conduit et qui n'ont pas pu être recouvrés sur la partie adverse (exceptionnellement les frais de faillite que le créancier a avancés pour provoquer la faillite et faire valoir lesdites prétentions: cf. les conditions décrites dans l'ATF 68 III 117 p. 119).
6.1.2. Le créancier cessionnaire a la faculté d'agir: il n'est pas obligé d'intenter action, mais s'il ne le fait pas dans le délai qui lui a été fixé, l'administration de la masse peut révoquer la cession qui devient alors caduque (formule obligatoire n° 7F ch. 6; ATF 138 III 628 consid. 5.3.2; 121 III 291 consid. 3c). L'administration de la faillite peut aussi annuler une cession si, avant que le créancier cessionnaire ait pris des mesures en vue de réaliser la prétention ou de poursuivre la procédure, la prétention litigieuse est reconnue par le tiers débiteur. Le même principe s'applique si la partie adverse au procès admet la demande (quand elle est intimée) ou la retire (quand elle est demanderesse). A l'inverse, le créancier cessionnaire n'est, pour sa part, pas obligé de continuer le procès jusqu'au jugement (ATF 105 III 135 consid. 3). Il peut ainsi conclure une transaction extrajudiciaire ou judiciaire (ATF 138 III 628 consid. 5.3.2; 93 III 59 consid. 1a; arrêt 4A_165/2021 du 18 janvier 2022 consid. 3.1.1 et 3.1.2) ou retirer la demande déjà introduite (ATF 121 III 488 consid. 2c). D'ailleurs, le droit préférentiel accordé au créancier cessionnaire sur le produit de réalisation du droit litigieux l'incite à transiger pour peu que ses frais soient couverts et qu'il obtienne de toucher un dividende plus élevé que celui probable annoncé lors du dépôt de l'état de collocation, voire même d'être totalement désintéressé (GILLIÉRON,
op. cit., n° 11 ad art. 260 LP). En particulier, pour qu'une transaction soit valable, il n'est pas nécessaire qu'elle soit approuvée par l'administration de la faillite; celle-ci peut seulement, avec l'accord du créancier cessionnaire, se réserver le droit de ratifier la transaction passée par celui-ci (ATF 102 III 29 p. 31). En effet, l'intervention comme partie dans un procès déjà pendant à la place de la masse est un droit du créancier cessionnaire, et non un devoir. En vertu de l'acte de cession, le créancier n'est donc pas obligé de continuer le procès commencé, mais il y est uniquement autorisé. Il peut donc tant renoncer à ouvrir un procès, qu'à le continuer (ATF 105 III 135 consid. 3).
6.1.3.
6.1.3.1. La cession a lieu aux conditions fixées par la formule obligatoire n° 7F (art. 80 al. 1 OAOF; ATF 139 III 391 consid. 5.1).
Il appartient à l'autorité de surveillance, et non au juge du fond de l'action, de contrôler la légalité de la décision de cession prise par l'administration de la faillite. Dans la procédure intentée par le créancier cessionnaire, le juge se borne à constater que la légitimation du demandeur résulte d'une telle cession. En effet, la cession n'est qu'une mesure de liquidation de la faillite (art. 252 ss LP) qui relève de la compétence de l'administration (art. 240 LP), qui se doit de défendre les intérêts de la masse et est soumise à l'autorité de surveillance (ATF 145 III 101 consid. 4.2.1).
Le créancier a le droit d'exiger la cession si les conditions en sont remplies. L'administration ne se borne toutefois pas à déterminer
a posteriori si tel est le cas, mais jouit d'un certain pouvoir d'examen. Il faut vérifier, notamment, que les créanciers ont bien renoncé à faire valoir la créance dont la cession a été offerte, que la faillite n'a pas été révoquée ou suspendue, que le requérant a bien qualité pour devenir cessionnaire et que la cession n'entraînera pas un préjudice pour la masse. La demande de cession n'est donc qu'une condition de la cession (ATF 113 III 135 consid. 3b).
6.1.3.2. L'administration de la faillite peut subordonner son autorisation à la réalisation de conditions - distinctes des devoirs assignés au créancier aux termes de la formule obligatoire n° 7F - pour autant qu'elles paraissent nécessaires ou opportunes pour sauvegarder les intérêts de la masse (arrêt 7B.206/2005 du 2 février 2006 consid. 4 et la référence).
6.1.4.
6.1.4.1. Dès que le créancier cessionnaire devient partie au procès, étant donné qu'il le poursuit en son nom, pour son propre compte et à ses risques et périls, il en assume ainsi tout le risque. S'il gagne le procès, c'est à lui que la partie adverse devra verser des dépens et s'il le perd, il doit en supporter tous les frais, y compris ceux accumulés avant qu'il devienne partie au procès - ce même lorsque le débiteur failli bénéficiait de l'assistance judiciaire (arrêt 4P.217/2000 du 10 novembre 2000 consid. 3b) -, ainsi que les dépens de la partie adverse (ATF 105 III 135 consid. 4; arrêt 4A_335/2014 du 18 décembre 2014 consid. 2;
contra : BACHOFNER,
in Basler Kommentar, SchKG I, 2ème éd., 2021, n° 91 ad art. 260 LP).
Si le créancier cessionnaire, demandeur, gagne le procès, il doit réclamer le remboursement des frais de procès à la partie adverse à charge de laquelle ceux-ci ont été mis. Il faut toutefois réserver le montant de la rémunération due à son avocat pour le paiement de laquelle il peut se servir sur le gain du procès si le tarif contractuel est plus élevé que celui appliqué par le tribunal pour fixer les dépens mis à la charge de la partie adverse (ATF 73 III 41 consid. 2; KREN KOSTKIEWICZ, OFK SchKG Kommentar, 20
ème éd., 2020, n° 64 s. ad art. 260 LP). Si la partie adverse qui a été condamnée aux frais est insolvable, le produit de la réalisation du gain du procès est affecté en premier lieu au paiement des frais du procès que le créancier cessionnaire, qui a obtenu gain de cause, a supportés (ATF 77 III 13 p. 15 s.; GILLIÉRON,
op. cit., n° 84 ad art. 260 LP).
L'art. 83 al. 2 CPC qui prévoit que la partie qui se retire du procès répond solidairement des frais encourus jusqu'à la substitution ne s'applique pas à la cession de créance de l'art. 260 LP, réservée par l'alinéa 4, 2
ème phrase de cette disposition. En effet, en instaurant la solidarité en cas de substitution volontaire, le législateur a prévu un tempérament aux conséquences financières négatives imposées à la partie adverse par l'arrivée d'une partie substituante dont la solvabilité pourrait être moins bonne que la partie précédente. Or, un tel rééquilibrage n'a pas lieu d'être en présence d'une substitution légale suite à la faillite de la partie précédente (JEANDIN, La substitution de partie,
in Dix ans de Code de procédure civile, 2020, p. 109 ss [127 s.]; dans le même sens, DIETSCHY-MARTENET,
in PC CPC, 2020, n° 20 ad art. 83 CPC; SCHWANDER,
in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung (ZPO), 3
ème éd., 2016, n° 38 ss ad art. 83 CPC;
contra : BACHOFNER,
in Basler Kommentar, SchKG I, 2
ème éd. 2021, n° 91 et 108 ad art. 260 LP).
6.1.4.2. En application de l'ATF 105 III 135 précité qui fait supporter le risque du procès au créancier cessionnaire, y compris les frais encourus avant qu'il ne reprenne un procès déjà introduit, le Tribunal fédéral a jugé que l'administration de la faillite est en droit de conditionner la cession des droits de la masse au paiement de l'avance de frais déjà effectué par le failli, dans le délai qu'elle fixera (arrêt 7B.51/1998 du 13 mars 1998 consid. 2).
Le Tribunal fédéral a suivi la même ligne lorsque la masse fait valoir une prétention en justice et obtient une partie du montant qu'elle réclame. Dans le cas où ce montant lui resterait acquis même si elle retirait son recours en raison du fait que le défendeur s'est contenté de se joindre audit recours, il lui appartient d'offrir aux créanciers la cession de la prétention encore en partie litigieuse pour continuer le procès. Toutefois, cette cession doit être soumise à la condition que les créanciers cessionnaires Iui versent au préalable le montant qu'elle a déjà obtenu au terme de l'instance précédente (ATF 78 III 133 consid. 3; 67 III 100 consid. 1; KREN KOSTKIEWICZ,
op. cit., n° 69 ad art. 260 LP).
6.2. En l'espèce, au vu de l'ATF 105 III 135 et des arrêts 7B.51/1998 et 7B.206/2005 précités, c'est à bon droit que l'autorité de surveillance a confirmé que la cession des droits de la masse peut être conditionnée au paiement, par le créancier cessionnaire, du montant de 150'000 fr., qui représentait une partie des frais totaux de 163'000 fr. déjà encourus sous la forme de l'avance payée par la faillie. Le fait qu'elle ait méconnu que l'administration aurait aussi pu tenter de se réserver le droit d'approuver une transaction passée par le recourant dans l'acte de cession, en obtenant l'adhésion de celui-ci à une telle clause (cf. ATF 102 III 29), est sans incidence. En effet, cette condition supplémentaire n'aurait pas permis de protéger la masse du risque que l'avance de frais restituée en tout ou en partie par le juge de l'action en libération de dette ne lui soit pas rétrocédée par le créancier cessionnaire. Par ailleurs, l'argumentaire du recourant relatif à son intervention dans le paiement de l'avance de frais due par la faillie n'est pas davantage pertinent; ce n'est pas par le biais d'une éventuelle restitution de l'avance de frais qu'il peut, aux dépens de l'égalité entre les créanciers, obtenir un remboursement d'une créance qu'il prétendrait avoir contre la faillie suite à son intervention dans le paiement de l'avance de frais et qu'il n'a pas produite en l'état (art. 232 al. 2 LP).
Il convient donc d'admettre que la condition posée par l'office consistant au versement du montant de 150'000 fr., correspondant à une partie de l'avance de frais de 163'000 fr. déposée par la faillie en mains du Tribunal de première instance du canton de Genève, est admissible au vu de la nature même de la cession des droits de la masse suite à laquelle le créancier cessionnaire agit à ses propres risques. C'est en effet au créancier d'évaluer si, en supportant déjà les frais avancés par le failli, il entend conduire le procès, étant précisé que la liquidation des frais de la procédure se fait entre les seules parties à celle-ci, soit le "
Prozessstandschafter " et sa partie adverse (cf. LÖTSCHER, Die Prozessstandschaft im schweizerischen Zivilprozess, 2016, n. 247 s.).
En revanche, l'autorité cantonale a méconnu les principes de la cession en tant qu'elle a conçu le versement de 150'000 fr. comme de simples sûretés, et non comme un paiement définitivement acquis à la masse (cf. arrêt 7B.51/1998 précité). Est en particulier incompréhensible l'obligation de rembourser au recourant le montant de 150'000 fr., sous déduction de celui des avances qui lui sera éventuellement restitué par le tribunal, en cas de liquidation du procès par jugement. Dans l'hypothèse où le recourant perd le procès et que les frais de justice s'élèvent au montant total de l'avance de 163'000 fr., une telle condition expose la masse à devoir rechercher le recourant non seulement pour les 13'000 fr. que l'administration a omis de lui réclamer, mais aussi pour les 150'000 fr. qu'elle lui a demandés immédiatement. Cela étant, si ces conditions exposent la masse à devoir rechercher le recourant en paiement du montant de l'avance de frais dans l'hypothèse où il ne s'exécuterait pas spontanément, il n'en demeure pas moins qu'elles ne modifient pas la règle de l'art. 260 LP selon laquelle le créancier cessionnaire supporte le risque du procès, dont les frais déjà encourus.
Il suit de là que le grief, infondé, doit être rejeté.
7.
En définitive, le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant, qui succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF) et verser à l'intimée une indemnité à titre de dépens ( art. 68 al. 1 et 2 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Juge de l'autorité supérieure en matière de plainte du Tribunal cantonal du canton du Valais et à l'Office des poursuites et des faillites du district de Monthey.
Lausanne, le 22 juin 2023
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Achtari