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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_147/2022  
 
 
Arrêt du 23 novembre 2022  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Abrecht et Bechaalany, Juge suppléante. 
Greffier : M. Ourny. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Steve Alder, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ville de Genève, Palais Eynard, 
Rue de la Croix-Rouge 4, 1204 Genève, 
intimée. 
 
Objet 
Droit de la fonction publique (résiliation sans préavis), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 25 janvier 2022 (A/2693/2021-FPUBL ATA/57/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ a été engagé par la Ville de Genève (ci-après: la Ville) en septembre 2004. Il a été nommé au poste d'agent de sécurité et d'huissier remplaçant au Musée B.________ (ci-après: Musée B.________) avec effet au 1er janvier 2008. Selon son cahier des charges, il devait notamment assumer sur le site des missions de sécurité, de sûreté et de surveillance, ainsi que d'accueil. Entre octobre 2005 et septembre 2008, quatre entretiens périodiques globalement positifs sur son comportement et son travail ont eu lieu. Entre 2005 et 2015, il a suivi différentes formations en lien avec ses fonctions. En septembre 2013 et mars 2014, il a reçu un avertissement, respectivement un blâme, en raison de son comportement à l'égard de certaines collègues féminines. En janvier 2019, un différend avec l'un de ses collègues a entraîné un entretien interne, sans autre suite.  
 
A.b. Le 13 mai 2021, A.________ a eu une altercation - qui s'est déroulée en trois temps - avec un visiteur du Musée B.________ (ci-après: le visiteur). Il s'est d'abord énervé avec celui-ci devant le bar C.________, face à son insistance à vouloir se faire servir un café alors que le restaurant était fermé en raison des restrictions sanitaires liées au Covid-19. Plus tard, lorsque l'employé, en pause déjeuner, a entendu par radio qu'un visiteur se plaignait à l'accueil de son comportement, il s'est rendu dans le hall de la réception et s'est à nouveau querellé avec le visiteur. Vu l'ampleur que prenait la conversation, il a invité celui-ci à sortir du musée et l'a accompagné vers la sortie. Une fois à l'extérieur, ils ont eu une discussion houleuse au cours de laquelle l'employé a traité le visiteur de "connard fini", celui-ci refusant d'entendre ce qu'il avait à dire.  
 
A.c. Par décision du 23 juin 2021, le Conseil administratif a prononcé le licenciement immédiat de A.________ pour justes motifs, avec effet rétroactif au 26 mai 2021. En sus de l'attitude de l'employé lors de l'altercation du 13 mai 2021, que celui-ci avait voulu justifier en se prévalant des effets secondaires de sa vaccination contre le Covid-19 et d'une situation familiale difficile, il lui a été reproché d'avoir déjà adopté un comportement agressif et injurieux par le passé. De tels comportements constituaient des manquements particulièrement graves aux devoirs d'un membre du personnel de la Ville et le lien de confiance était rompu.  
 
B.  
Par acte du 18 août 2021, A.________ a interjeté recours par-devant la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève contre la décision du 23 juin 2021, en concluant à son annulation et à sa réintégration à compter du 26 mai 2021. La cour cantonale a rejeté son recours par arrêt du 25 janvier 2022. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant principalement à sa réforme en ce sens que la décision du 23 juin 2021 soit annulée et que sa réintégration à compter du 26 mai 2021 soit ordonnée, avec renvoi de la cause à l'intimée pour statuer sur les effets économiques du retour à son poste. A titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle décision. 
L'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement, à son rejet. La cour cantonale persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le recourant a répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt entrepris concerne des rapports de travail de droit public au sens de l'art. 83 let. g LTF. Il tranche une contestation pécuniaire et la valeur litigieuse dépasse le seuil de 15'000 fr. qui ouvre la voie du recours en matière de droit public en ce domaine (art. 51 al. 1 let. a et 85 al. 1 let. b LTF). Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF) contre une décision finale (art. 90 LTF) prise par l'autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF), le recours en matière de droit public est recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral, qui est un juge du droit, conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 145 V 188 consid. 2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Si le recourant entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, il doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, il n'examine la violation de droits fondamentaux ainsi que celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2 LTF). Sauf exceptions non pertinentes en l'espèce (cf. art. 95 let. c, d et e LTF), on ne peut pas invoquer la violation du droit cantonal ou communal en tant que tel devant le Tribunal fédéral (art. 95 LTF a contrario). En revanche, il est possible de faire valoir que sa mauvaise application consacre une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un autre droit fondamental (ATF 143 I 321 consid. 6.1; 142 II 369 consid. 2.1; 142 V 577 consid. 3.2). L'application du droit fédéral à titre de droit cantonal ou communal supplétif est aussi uniquement examinée par le Tribunal fédéral sous l'angle d'une violation de l'interdiction de l'arbitraire ou d'autres droits constitutionnels (arrêt 8C_709/2021 du 2 mai 2022 consid. 2.2 et les arrêts cités).  
Appelé à revoir l'application ou l'interprétation d'une norme cantonale ou communale sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motif objectif et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (ATF 148 I 145 consid. 6.1; 145 II 32 consid. 5.1). 
 
3.  
 
3.1. Selon l'art. 3 du Statut du personnel de la Ville de Genève du 29 juin 2010 (LC 21 151; ci-après: le Statut), les rapports de service des membres du personnel sont régis par le Statut, les dispositions d'exécution, ainsi que, le cas échéant, les clauses du contrat de travail (al. 1); en cas de lacune, les dispositions pertinentes du CO sont applicables à titre de droit public supplétif (al. 2).  
 
 
3.2.  
 
3.2.1. Aux termes de l'art. 82 du Statut, les membres du personnel sont tenus au respect des intérêts de la Ville de Genève et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice. En vertu de l'art. 83 du Statut, ils doivent par leur attitude entretenir des relations dignes et respectueuses avec leurs collègues, leurs supérieures et supérieurs et leurs subordonnées et subordonnés et faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a), établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public (let. b) et justifier et renforcer la considération et la confiance dont le personnel de la Ville de Genève doit être l'objet (let. c). Conformément à l'art. 84 du Statut, ils doivent notamment remplir leurs devoirs de fonction consciencieusement et avec diligence (let. a) et se conformer aux règlements et directives les concernant (let. f).  
 
3.2.2. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, un fonctionnaire a l'obligation d'adopter un comportement qui inspire le respect et qui soit digne de confiance. Sa position exige qu'il s'abstienne de tout ce qui peut porter atteinte aux intérêts de l'État. Il doit en particulier s'abstenir de tout comportement de nature à entamer la confiance du public dans l'intégrité de l'administration et de ses employés ou à le rendre moins digne de confiance aux yeux de son employeur. Il est sans importance que le comportement répréhensible ait été connu ou non du public et ait attiré l'attention (arrêt 8C_336/2019 du 9 juillet 2020 consid. 3.3.2 et les arrêts cités).  
 
3.3. Selon l'art. 30 du Statut, quelle que soit la nature et la durée de l'engagement, l'employeur et les membres du personnel peuvent en tout temps mettre fin immédiatement aux rapports de service pour justes motifs lorsque les règles de la bonne foi ne permettent plus d'exiger de la partie qui donne le congé leur continuation (al. 1); la résiliation par l'employeur (licenciement) fait l'objet d'une décision motivée du Conseil administratif (al. 2). L'art. 99 al. 4 du Statut dispose que lorsque le licenciement a été précédé d'une suspension, il peut, si les conditions de l'art. 30 sont remplies, être prononcé avec effet à la date de la suspension. L'art. 106 du Statut prévoit qu'en dérogation à l'art. 105 (qui concerne les conséquences d'un licenciement contraire au droit), lorsque le licenciement contraire au droit est également abusif au sens de l'art. 336 CO ou des art. 3 ou 10 de la loi sur l'égalité entre femmes et hommes (LEg) ou sans juste motif au sens de l'art. 30 du Statut, la Chambre administrative de la Cour de justice annule le licenciement et ordonne la réintégration de la personne intéressée.  
 
4.  
Le litige porte sur le bien-fondé du licenciement avec effet immédiat du recourant pour justes motifs. Dans la mesure où le droit communal ne fournit pas de précision sur les conditions de l'art. 30 du Statut, l'art. 337 CO est applicable à titre de droit public supplétif (cf. consid. 3.1 supra), comme l'a constaté l'instance précédente. 
 
4.1. La résiliation immédiate pour justes motifs au sens de l'art. 337 CO est une mesure exceptionnelle, qui doit être admise de manière restrictive. Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat; lorsqu'il est moins grave, le manquement ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété malgré un avertissement (ATF 142 III 579 consid. 4.2 et les arrêts cités). Par manquement du travailleur, on entend en règle générale la violation d'une obligation découlant du contrat de travail, mais d'autres incidents peuvent également justifier une résiliation immédiate (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1). Ce qui est déterminant, c'est que les faits invoqués à l'appui du congé immédiat aient entraîné la perte du rapport de confiance, qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1 précité). Savoir si le comportement incriminé atteint la gravité nécessaire dépend des circonstances du cas concret (ATF 142 III 579 consid. 4.2 précité). Dans son appréciation, le juge doit notamment prendre en compte la position et la responsabilité du travailleur, le type et la durée des rapports contractuels, ainsi que la nature et l'importance des incidents invoqués (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1 précité; 130 III 28 consid. 4.1 précité).  
 
4.2.  
 
4.2.1. En droit privé du travail, la jurisprudence considère que la partie qui résilie un contrat de travail en invoquant de justes motifs ne dispose que d'un court délai de réflexion pour signifier la rupture immédiate des relations de travail, sous peine de déchéance; si elle tarde à agir, elle donne à penser qu'elle a renoncé à la résiliation immédiate, respectivement qu'elle peut s'accommoder de la continuation des rapports de travail jusqu'à l'échéance ordinaire du contrat (ATF 138 I 113 consid. 6.3.1; 130 III 28 consid. 4.4; 123 III 86 consid. 2a). Les circonstances du cas concret déterminent le laps de temps dans lequel on peut raisonnablement attendre de la partie qu'elle prenne la décision de résilier le contrat immédiatement; de manière générale, la jurisprudence considère qu'un délai de réflexion de deux à trois jours ouvrables est suffisant pour réfléchir et prendre des renseignements juridiques, étant précisé que les week-ends et les jours fériés ne sont pas pris en considération (ATF 138 I 113 précité consid. 6.3.2). Un délai supplémentaire est toléré s'il se justifie par les exigences pratiques de la vie quotidienne et économique; on peut ainsi admettre une prolongation de quelques jours lorsque la décision doit être prise par un organe polycéphale au sein d'une personne morale, ou lorsqu'il faut entendre le représentant de l'employé (ATF 138 I 113 consid. 6.3.2 précité; 130 III 28 consid. 4.4 précité).  
 
4.2.2. Ces principes jurisprudentiels, développés au regard de l'art. 337 CO, ne sont pas sans autre transposables aux rapports de travail de droit public. En ce domaine, le licenciement se fait en général par voie de décision motivée et il est souvent précédé d'une enquête, en particulier quand il s'agit d'étayer ou d'infirmer des soupçons. L'intéressé bénéficie en outre des garanties propres à la procédure administrative, en particulier du droit d'être entendu. Enfin, indépendamment de ces garanties, les contingences liées aux procédures internes d'une administration ne permettent souvent pas de prendre une décision immédiate, surtout lorsque la décision ne peut pas être prise par le supérieur hiérarchique direct, mais dépend de l'autorité d'engagement ou d'une autorité de surveillance. Des motifs objectifs (droit d'être entendu, spécificités de la procédure administrative) peuvent ainsi justifier selon les cas d'accorder à l'employeur de droit public un délai de réaction plus long qu'en droit privé, mais celui-ci ne doit pas pour autant laisser traîner les choses (ATF 138 I 113 consid. 6.4.1 et 6.5; arrêt 8C_204/2020 du 17 août 2020 consid. 4.2.3 et les arrêts cités).  
 
5.  
 
5.1. Sur le plan formel, les juges cantonaux ont rejeté les griefs du recourant tirés d'une violation de son droit d'être entendu. En outre, ils ont rejeté, par appréciation anticipée des preuves, sa requête tendant à la production par l'intimée du procès-verbal de la séance du Conseil administratif au cours de laquelle il avait été décidé de le licencier avec effet immédiat.  
 
5.2. S'agissant de la durée écoulée avant que l'intimée ne congédie le recourant, la juridiction cantonale a constaté que celui-ci avait informé son supérieur des événements le 14 mai 2021, à savoir le lendemain de leur survenance, et que ce dernier avait entendu les collègues ayant assisté à l'altercation le même jour. La direction du musée avait reçu une plainte du visiteur, datée du 14 mai 2021, le 19 mai 2021. Le 21 mai, elle avait convoqué le recourant à un entretien le 25 mai 2021, à savoir le jour ouvrable suivant compte tenu du weekend et d'un jour férié. Le lendemain de l'audition, soit le 26 mai 2021, le maire avait suspendu le recourant avec effet immédiat. Le 1er juin 2021, le Conseil administratif avait confirmé cette suspension et informé l'intéressé qu'il entendait le licencier avec effet immédiat. Un délai pour se prononcer lui avait été imparti au 9 juin 2021 et prolongé au 15 juin 2021 sur requête. Le Conseil administratif avait reçu la détermination du recourant le 17 juin 2021 et prononcé son licenciement immédiat le 23 juin 2021. Compte tenu des exigences découlant de la résiliation des rapports de droit public, les premiers juges ont considéré que le temps écoulé entre les événements ayant motivé la décision litigieuse et sa notification n'était pas critiquable.  
 
5.3. La cour cantonale a ensuite jugé que lors de l'altercation du 13 mai 2021, le recourant avait manqué à ses devoirs de fonction, notamment à son obligation d'établir des contacts empreints de compréhension et de tact avec le public, et avait mis en danger la considération et la confiance dont le personnel de l'intimée devait faire l'objet. Ces manquements étaient suffisamment graves pour justifier à eux seuls une rupture du lien de confiance, le recourant ayant déjà fait l'objet d'un avertissement en raison de problèmes de comportement. En ce qui concernait ses difficultés familiales (problèmes de santé de sa fille) et les effets (insomnie) de sa vaccination contre le Covid-19 survenue la veille de l'altercation, le tribunal cantonal a considéré qu'il revenait au recourant de ne pas se rendre à son travail s'il n'était pas apte à remplir ses obligations professionnelles conformément à ses devoirs. En examinant la proportionnalité du licenciement, l'instance précédente a noté que le recourant ne pouvait pas se targuer de parfaits états de service, compte tenu de son avertissement en septembre 2013, de son blâme en mars 2014 et d'une altercation avec un collègue en janvier 2019. Ainsi, le débordement du 13 mai 2021 ne pouvait pas être considéré comme un acte isolé et le fait que le recourant avait à cette occasion dirigé son attitude inappropriée contre un visiteur, et non pas contre des collègues, rendait la violation de ses devoirs de fonction plus grave encore. Le recourant reconnaissait certes ses torts, mais il en minimisait l'importance. Dans ces conditions, il ne pouvait pas être reproché à l'intimée d'avoir considéré qu'elle ne pouvait plus avoir confiance dans les capacités du recourant à remplir les exigences de son poste, dès lors qu'il risquait à tout moment de perdre ses moyens en présence d'une situation contrariante pour lui.  
 
6.  
Dans un premier grief d'ordre formel, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) en raison du refus de la cour cantonale d'ordonner la production du procès-verbal de la séance du Conseil administratif lors de laquelle celui-ci a décidé de le licencier avec effet immédiat. En substance, il souhaitait par ce biais vérifier le respect des règles formelles relatives au prononcé du licenciement. Les juges cantonaux ont considéré que l'offre de preuve ne visait qu'une simple hypothèse, selon laquelle le quorum nécessaire à la prise de décision aurait pu ne pas avoir été respecté. Or rien n'indiquait que les modalités décisionnelles, notamment sur la composition de l'autorité ou le quorum, n'aient pas été observées. L'autorité précédente a ainsi refusé de requérir le procès-verbal sollicité. Compte tenu de l'issue du litige, la question d'une éventuelle violation du droit d'être entendu peut demeurer ouverte (cf. consid. 7 infra). 
 
7.  
 
7.1. Le recourant reproche ensuite à l'intimée d'avoir tardé à prononcer son licenciement immédiat et à la juridiction cantonale d'être tombée dans l'arbitraire en niant une violation du principe de la célérité. Il conteste en outre l'existence de justes motifs permettant un licenciement immédiat. En résumé, les faits sous revue constitueraient un acte isolé, de brève durée. En tant qu'huissier remplaçant, il aurait occupé une position subalterne. Son poste n'aurait pas impliqué d'exigences particulières, au niveau comportemental notamment, et sa position n'aurait guère eu d'influence sur la perception que pouvait se faire le public du musée. Il aurait admis, le jour des faits, que son comportement était inadéquat, s'en serait excusé et aurait indiqué qu'il ne se reproduirait plus. En outre, il aurait traversé au moment des faits une période difficile en raison des tentatives de suicide de sa fille. Il soutient que sa souffrance avait pu entraîner une réaction différente de celle qu'il aurait eue dans d'autres circonstances face à une personne qui tenait absolument à se faire servir un café dans un restaurant fermé en raison des restrictions sanitaires dues au Covid-19. Le raisonnement de la cour cantonale et son résultat, en tant qu'ils valident la sanction la plus lourde contre un employé, seraient ainsi arbitraires.  
 
 
7.2.  
 
7.2.1. Il ressort des constatations de la juridiction cantonale, qui lient le Tribunal fédéral (cf. consid. 2.1 supra), que six jours ouvrables se sont écoulés entre les faits litigieux le 13 mai 2021 et la convocation du recourant le 21 mai 2021. Celui-ci a été entendu le jour ouvrable suivant, à savoir le 25 mai 2021, et suspendu le jour d'après. Quatre jours ouvrables se sont écoulés entre son audition le 25 mai 2021 et le 1er juin 2021, date à laquelle il a été informé du fait qu'un licenciement avec effet immédiat était envisagé. La décision de licenciement a été prise le 23 juin 2021, soit le quatrième jour ouvrable après la réception de ses déterminations le 17 juin 2021. Au total et sans tenir compte des jours fériés ainsi que de la prolongation de délai accordée au recourant pour prendre position, près d'un mois et demi s'est écoulé entre l'altercation sous revue et la décision de licenciement. Il convient encore de relever que, sur la base du déroulement des événements, on peut se demander si ce n'est pas la plainte du visiteur qui est à l'origine de la procédure de licenciement. En effet, la direction a convoqué son employé deux jours après avoir reçu cette plainte. Or le recourant avait déjà annoncé les faits à son supérieur le lendemain des événements. Celui-ci avait alors immédiatement entendu les collègues témoins de l'altercation. Il apparaît cependant qu'il n'en a pas tiré de conséquence particulière. Il n'a notamment pas rapporté le cas à la hiérarchie ou aux ressources humaines. Vu ce qui suit, le point de savoir si l'employeur pouvait s'accommoder de la continuation des rapports de travail et a tardé à prononcer le licenciement immédiat peut toutefois rester ouvert.  
 
7.2.2. En effet, s'il n'y a pas lieu de remettre en question le constat selon lequel le recourant a enfreint ses devoirs de fonction lors de l'altercation du 13 mai 2021, il convient de souligner qu'il comptait près de dix-sept ans de service au moment des faits. Par ailleurs, cette altercation s'est déroulée huit ans, respectivement sept ans, après les circonstances ayant donné lieu à un avertissement en septembre 2013 et à un blâme en mars 2014. Ces sanctions administratives apparaissent ainsi trop éloignées dans le temps pour être opposées au recourant dans le cadre de la présente procédure. Quant au différend avec un collègue en 2019, demeuré sans suite et dont aucun détail ne figure dans l'arrêt entrepris, il ne saurait pas non plus être pris en compte. Il y a en outre lieu de tenir compte du niveau de responsabilité limitée du recourant et de sa position dans la hiérarchie en tant qu'agent de sécurité et huissier remplaçant. On peut par ailleurs imaginer que les tentatives de suicide de sa fille, si elles ne l'empêchaient en principe pas d'accomplir ses obligations professionnelles et n'excusent pas son comportement, ont joué un rôle dans sa réaction face à un visiteur qui tenait absolument à se faire servir un café dans un restaurant fermé en raison des restrictions sanitaires dues au Covid-19 et qui a lui-même admis être sorti de ses gonds. On notera encore que selon un rapport du 29 juillet 2021 de l'Hôpital D.________ évoqué par la cour cantonale, le vaccin E.________ contre le Covid-19 reçu par le recourant la veille de l'altercation peut - au vu des effets indésirables répertoriés de ce vaccin - avoir joué un rôle prépondérant dans l'insomnie et l'épisode d'agitation qui s'en sont suivis. Il ressort ainsi de l'ensemble des circonstances que les premiers juges ont versé dans l'arbitraire en retenant que le comportement du recourant était suffisamment grave pour justifier une rupture du lien de confiance et son licenciement immédiat pour justes motifs.  
 
7.3. Il s'ensuit que le recours doit être admis et l'arrêt entrepris réformé en ce sens que la décision du 23 juin 2021 de résiliation immédiate des rapports de service est annulée et le recourant réintégré dans ses fonctions avec effet au 26 mai 2021 (cf. consid. 3.3 supra).  
 
8.  
L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Le recourant a droit à des dépens à la charge de l'intimée (art. 68 al. 2 LTF). La cause sera renvoyée à la juridiction cantonale afin qu'elle statue à nouveau sur les frais et les dépens de la procédure qui s'est déroulée devant elle (art. 67 et 68 al. 5 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 25 janvier 2022 est réformé en ce sens que la décision de l'intimée du 23 juin 2021 est annulée et le recourant réintégré dans ses fonctions avec effet au 26 mai 2021. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
L'intimée versera au recourant la somme de 2800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lucerne, le 23 novembre 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
Le Greffier : Ourny