Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_879/2023
Arrêt du 29 mai 2024
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Bovey et De Rossa.
Greffière : Mme Mairot.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Thomas Barth, avocat,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me Lisa Locca, avocate,
intimé.
Objet
divorce, restitution de contributions d'entretien en raison du remariage (art. 130 al. 2 CC),
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de justice du canton de Genève du
17 octobre 2023 (C/19905/2020 ACJC/1390/2023).
Faits :
A.
A.a. A.________, née en 1955, et B.________, né en 1964, se sont mariés en 2001 à U.________. Ils sont les parents de C.________, né en 2000.
Par jugement du 24 septembre 2013, le Tribunal de première instance de Genève (ci-après: le Tribunal) a prononcé le divorce des intéressés et a notamment donné acte au mari de son engagement de verser à l'épouse, dès le 31 janvier 2013, un montant de 10'000 fr. par mois à titre de contribution à son entretien, ceci jusqu'au 31 août 2025. Le Tribunal a, pour le surplus, ratifié la convention d'accord conclue par les parties le 22 mars 2013 et dit qu'elle faisait partie intégrante du jugement.
A.b. A.________ s'est remariée le 22 septembre 2018 avec D.________.
B.________ a cessé de verser la contribution d'entretien avec effet au mois de février 2020. Par courrier du 11 février 2020, il a mis en demeure A.________ de lui restituer le montant de 170'000 fr. plus intérêt à 5 % l'an dès le 15 mai 2019 (intérêt moyen), correspondant à la contribution d'entretien perçue par elle entre le 1er octobre 2018 et le 1er février 2020, au motif que l'obligation d'entretien qu'il avait à son égard s'était éteinte légalement, en vertu de l'art. 130 al. 2 CC, à compter de la date de son remariage.
Le 6 mai 2020, à l'instance de B.________, l'Office des poursuites de Genève a notifié à A.________ un commandement de payer la somme de 170'000 fr. plus intérêt à 5 % l'an dès le 15 mai 2019, auquel la poursuivie a fait opposition. Par jugement du 11 septembre 2020, le Tribunal a débouté le poursuivant de sa requête en mainlevée provisoire.
A.c. Par demande du 6 octobre 2020, déclarée non conciliée le 3 décembre 2020 et introduite auprès du Tribunal le 18 décembre 2020, B.________ a conclu à ce que A.________ soit condamnée à lui verser la somme de 160'000 fr. avec intérêts à 5 % dès le 15 mai 2019.
À l'appui de ses conclusions, il exposait qu'il avait eu vent du remariage de celle-ci en décembre 2019, sans plus de précisions. Il avait alors recouru aux services d'un détective privé pour en obtenir la confirmation. Celui-ci lui avait indiqué, dans un rapport du 7 février 2020, que l'intéressée s'était remariée le 22 septembre 2018. Dans l'ignorance de cette nouvelle union avant ledit rapport, il avait continué de verser la contribution d'entretien de 10'000 fr. par mois pour la période de septembre 2018 à février 2020, montants dont il réclamait le remboursement.
Dans sa réponse du 30 avril 2021, la défenderesse a conclu au rejet de la demande. Elle faisait notamment valoir que le demandeur avait eu connaissance de son remariage quelques semaines avant que celui-ci n'ait lieu, de sorte qu'il n'avait pas continué de s'acquitter de la contribution d'entretien par erreur. Il ne pouvait donc pas fonder ses prétentions sur la base de l'enrichissement illégitime et elle était ainsi en droit de percevoir une contribution d'entretien jusqu'en 2025.
B.
Par jugement rendu le 19 décembre 2022, le Tribunal a débouté B.________ des fins de sa demande en paiement.
Statuant par arrêt du 17 octobre 2023 sur l'appel formé le 31 janvier 2023 par le demandeur, la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a, notamment, annulé le jugement du 19 décembre 2022 et l'a réformé en ce sens que la défenderesse est condamnée à payer au demandeur la somme de 160'000 fr. avec intérêts à 5 % l'an dès le 15 mai 2019.
C.
Par acte posté le 20 novembre 2023, A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 17 octobre 2023. Elle conclut principalement à son annulation et à sa réforme en ce sens que le demandeur est débouté de toutes ses conclusions. Subsidiairement, elle sollicite le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Des déterminations n'ont pas été requises.
Considérant en droit :
1.
Le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 al. 1 LTF), contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur recours par une autorité supérieure statuant en dernière instance cantonale ( art. 75 al. 1 et 2 LTF ), dans une affaire civile (art. 72 al. 1 LTF) de nature pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 51 al. 1 let. a et 74 al. 1 let. b LTF). La recourante, qui a pris part à la procédure devant l'autorité précédente et qui a un intérêt digne de protection à l'annulation ou la modification de la décision querellée, a en outre qualité pour recourir ( art. 76 al. 1 let. a et b LTF ).
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l' art. 42 al. 1 et 2 LTF , il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 III 364 précité consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 III 364 consid. 2.4).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1), étant rappelé qu'en matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2 et les références; 145 IV 154 consid. 1.1).
3.
La recourante reproche à la Cour de justice d'avoir retenu, en violation du droit fédéral ( art. 62 et 63 al. 1 CO ) et de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.), que l'intimé n'avait eu connaissance de son remariage qu'en février 2020. Elle est d'avis que ses contre-preuves ont été écartées de manière arbitraire, alors qu'elles suffisaient à faire naître des doutes sérieux quant à l'exactitude des allégations de l'intimé et, partant, à faire échec à la preuve que celui-ci était censé apporter.
3.1.
3.1.1. À teneur de l'art. 130 al. 2 CC, sauf convention contraire, l'obligation d'entretien après le divorce s'éteint lors du remariage du créancier.
Le remariage du créancier de la contribution d'entretien entraîne de par la loi l'extinction de l'obligation d'entretien. L'extinction est automatique et ne nécessite aucune procédure judiciaire (arrêt 5C.13/2003 du 30 août 2004 consid. 1.3, non publié in ATF 131 III 1; SPYCHER/GLOOR, in Basler Kommentar, ZGB I, 7ème éd. 2022, n° 9 ad art. 130 CC; SIMEON i, in Commentaire pratique, Droit matrimonial, 2016, n° 1 ad art. 130 CC). Les parties peuvent non seulement prévoir d'autres causes d'extinction, mais aussi exclure l'application de l'art. 130 al. 2 CC par convention et prévoir, dans les limites des art. 19 al. 2 et 20 CO , que la contribution ne s'éteindra pas en dépit de la survenance d'une des causes d'exclusion de l'art. 130 al. 2 CC (PICHONNAZ, in Commentaire romand, Code civil I, 2ème éd. 2023, n° 19 s. ad art. 130 CC; cf. ég. LEUBA/MEIER/PAPAUX/VAN DELDEN, Droit du divorce, 2021, n° 831 p. 346).
Le débiteur d'une obligation d'entretien qui ignore le remariage de son ex-conjoint et continue de lui verser sa rente peut lui en réclamer le remboursement en application des dispositions sur l'enrichissement illégitime (art. 62 ss CO) (SPYCHER/GLOOR, op. cit., n° s 5 et 9 ad art. 130 CC; PICHONNAZ, op. cit., n° 32 ad art. 130 CC). Une partie des auteurs estime dès lors que la question de savoir si le bénéficiaire de la rente n'aurait pas une obligation de communiquer son nouveau mariage au débiteur peut rester ouverte (PICHONNAZ, op. cit., n° 32 ad art. 130 CC et les auteurs cités).
3.1.2. Aux termes de l'art. 63 al. 1 CO, qui fonde un cas spécial d'application de l'art. 62 al. 1 CO (ATF 129 III 646 consid. 3.2; 123 III 101 consid. 3a), celui qui a payé volontairement ce qu'il ne devait pas ne peut le répéter s'il ne prouve qu'il a payé en croyant, par erreur, qu'il devait ce qu'il a payé et, selon l'art. 67 al. 1 CO, son action se prescrit par un an à compter du jour où il a eu connaissance de son droit de répétition. La voie légale pour obtenir la restitution d'un montant versé par erreur à un non-créancier est l'action en répétition de l'indu de l'art. 63 al. 1 CO dirigée contre celui-ci en tant que défendeur (ATF 141 IV 71 consid. 3; arrêts 4A_565/2019 du 15 octobre 2020 consid. 3.1; 4A_292/2017 du 29 janvier 2018 consid. 3.2).
Pour rechercher s'il y a erreur aux termes de l'art. 63 CO, les circonstances ne doivent pas être appréciées de façon trop stricte (ATF 129 III 646 consid. 3.2; arrêt 4A_254/2019 du 6 avril 2020 consid. 4.4.3 et la jurisprudence citée). L'erreur est admissible lorsque, d'après les faits de la cause, il est exclu que l'auteur du paiement ait agi dans l'intention de donner. Il n'est notamment pas nécessaire que l'erreur soit importante ou excusable (ATF 129 III 646 consid. 3.2; arrêts 4D_13/2015 du 3 juin 2015 consid. 4.1 et les références; 5A_616/2012 du 2 octobre 2012 consid. 7.1.2).
3.1.2.1. Dans l'action fondée sur l'art. 63 al. 1 CO, le demandeur doit prouver l'inexistence de la dette (art. 8 CC; ATF 64 II 125 consid. 1; arrêt 4C.48/1988 du 22 juin 1989 consid. 2a, reproduit in JT 1991 II 190). En particulier, il lui appartient de prouver qu'il s'est exécuté par erreur, c'est-à-dire qu'il croyait à tort devoir payer ce qu'il a payé indûment (arrêts 4A_184/2017 du 16 mai 2017 consid. 6; 4C.161/2006 du 2 août 2006 consid. 3.2; 5C.51/2004 du 28 mai 2004 consid. 7.1; SCHULIN/VOGT, in Basler Kommentar, OR I, 7ème éd. 2020, n° 9 ad art. 63 CO). Si des faits juridiquement déterminants restent douteux ou ne sont pas établis, la conséquence de l'absence de preuve est supportée par la partie demanderesse. Selon la jurisprudence, la règle de l'art. 8 CC s'applique en principe également lorsque la preuve porte sur des faits négatifs, soit en l'occurrence celui que constitue l'inexistence de la dette. Cette exigence est toutefois tempérée par les règles de la bonne foi (art. 2 CC et 52 CPC) qui obligent le défendeur à coopérer à la procédure probatoire, notamment en offrant la preuve du contraire, soit la contre-preuve de l'existence de la dette (ATF 119 II 305 consid. 1b/aa). Pour que la contre-preuve soit couronnée de succès, il suffit qu'elle affaiblisse la preuve principale; il n'est pas nécessaire de convaincre le juge que la contre-preuve est concluante (ATF 120 II 393 consid. 4b; arrêt 5C.51/2004 précité loc. cit.). L'obligation faite à la partie adverse de collaborer à l'administration de la preuve, même si elle découle du principe général de la bonne foi, est de nature procédurale et est donc exorbitante de l'art. 8 CC, car elle ne touche pas au fardeau de la preuve et n'implique nullement un renversement de celui-ci. C'est dans le cadre de l'appréciation des preuves que le juge se prononcera sur le résultat de la collaboration de la partie adverse ou qu'il tirera les conséquences d'un refus de collaborer à l'administration de la preuve (arrêt 4C.48/1988 précité loc. cit. et les références; cf. ég. arrêt 5A_503/2018 du 25 septembre 2018 consid. 3 et les références).
3.1.2.2. Élucider ce qu'une personne savait ou voulait au moment d'exécuter une prestation relève de la constatation des faits. Les déductions que le juge opère sur la base d'indices, notamment au sujet des connaissances ou de la volonté des personnes en cause, relèvent elles aussi de la constatation des faits (arrêts 4D_13/2015 précité loc. cit. et la jurisprudence citée; cf. ég. arrêts 4A_474/2010 du 12 janvier 2011 consid. 3; 4C.161/2006 précité consid. 3.2: " Savoir si et dans quelle mesure une partie se trouvait dans l'erreur est une question de fait à trancher par l'autorité cantonale. ").
3.2. En l'espèce, la Cour de justice a retenu, au terme de son appréciation des preuves, que le demandeur était parvenu à démontrer qu'il n'avait appris le remariage de la défenderesse qu'en février 2020 et que celle-ci avait échoué dans la contre-preuve qu'elle était tenue d'offrir eu égard à son devoir de collaboration. La recourante le conteste. Elle considère tout d'abord que les juges précédents auraient déjà dû avoir des doutes quant à la véracité des allégations de l'intimé lorsqu'ils avaient constaté que celui-ci n'avait pas été précis sur les circonstances dans lesquelles il aurait eu vent de sa nouvelle union. Or, si l'intimé avait réellement été informé du remariage plusieurs mois plus tard, une explication desdites circonstances aurait pu renforcer ses allégations. Le fait qu'il ait mandaté un détective privé, de même que son attitude postérieure, ne démontraient pas objectivement la date à laquelle il avait eu connaissance du remariage. En effet, l'intimé avait souhaité mettre un terme au versement de la contribution d'entretien en raison d'une forte dispute avec son fils en 2020 (laquelle avait été confirmée par celui-ci lors de son audition du 31 mai 2022), dispute qu'il estimait être de la faute de son ex-épouse. Le rapport du détective privé ne servait en réalité qu'à mettre à mal les preuves de sa partie adverse, notamment l'e-mail du 25 août 2018 par lequel le futur remariage lui était annoncé. La recourante relève aussi que la cour cantonale a retenu que l'intimé avait fait preuve de largesses à plusieurs reprises. On ne pouvait donc exclure qu'il ait continué de verser une contribution d'entretien après le remariage, dans l'intention de donner, contribution qui servait d'ailleurs à l'entretien du fils des parties.
Pour le surplus, la recourante soutient que les e-mails qu'elle a produits auraient dû, en tant que tels, faire naître un doute sérieux chez les juges cantonaux quant à l'exactitude et à la véracité des allégations de l'intimé, ce qui suffisait à faire constater l'échec de la preuve qui incombait à celui-ci. S'agissant du courriel qu'elle avait adressé à l'intimé le 25 août 2018, il était selon elle arbitraire de l'avoir écarté au motif qu'elle n'avait pas sollicité d'accusé de réception et n'avait pas produit l'original, pour les motifs suivants: premièrement, il ne serait pas courant, " voire jamais pratiqué ", de solliciter un accusé de réception lors d'un envoi par e-mail, ce d'autant plus lorsqu'il est envoyé à un proche; deuxièmement, un e-mail " original " n'existait pas, de sorte que l'on peinait à comprendre comment un document qui, notoirement, est inexistant aurait pu être produit. La recourante tient également pour arbitraire la constatation de la Cour de justice, selon laquelle les autres e-mails qu'elle avait adressés à l'intimé iraient dans le sens de la position de celui-ci. En effet, elle avait indiqué dans ces e-mails qu'elle allait refaire sa vie et qu'elle garderait la contribution d'entretien pour leur fils. Dans l'e-mail du 27 septembre 2018, elle avait notamment écrit ce qui suit: " A plusieurs reprise (sic) durant ces 10 années j'ai eu des propositions de mariage que j'ai refusé (sic) tant que C.________ était mineur également pour préserver notre belle relation. (...) aujourd'hui il est temps pour moi de refaire ma vie alors j'ai finalement accepté de la refaire. " Selon elle, bien que ce courriel ne cite pas formellement le remariage, tout un chacun peut comprendre en le lisant qu'elle allait se remarier. A tout le moins, un tel message devait forcément éveiller la curiosité de toute personne qui ne souhaite pas verser de contribution d'entretien en cas de remariage de son ex-épouse. Or, l'intimé n'avait jamais réagi à cet e-mail, notamment en posant des questions sur sa signification. Pour la recourante, cette absence de réaction était due au fait que l'intimé était d'ores et déjà informé de son remariage, qu'elle lui avait annoncé par e-mail du 25 août 2018. Quant aux courriels qu'elle avait échangés avec la mère de l'intimé, la Cour de justice avait également fait preuve d'arbitraire en les écartant. En effet, le fait que la discussion ait eu lieu à son initiative n'en modifiait pas le contenu. Aucun élément objectif ne permettait de retenir que la mère de l'intimé aurait menti, qui plus est au détriment de son fils. La recourante relève encore que le témoignage du fils des parties devait être relativisé, dès lors qu'il était fort probable qu'il n'ait pas voulu prendre position s'agissant d'un litige entre ses deux parents. Au demeurant, le fait que le fils n'ait pas informé son père du remariage de sa mère ne signifiait pas encore qu'il n'en était pas au courant, au vu des e-mails susvisés et, également, du fait que les parties avaient des amis communs et qu'il paraîtrait invraisemblable qu'aucun d'entre eux ne lui en ait parlé.
3.3. A la lecture de l'arrêt attaqué, il apparaît que la cour cantonale s'est prononcée en détail sur tous les éléments de preuve mis en exergue par la recourante, exposant les raisons pour lesquelles ceux-ci n'étaient pas parvenus à susciter de doutes quant à la véracité des allégations de l'intimé. Or la recourante ne démontre pas - à telle enseigne que la recevabilité des moyens soulevés apparaît d'ailleurs douteuse au regard de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. supra consid. 2.1 et 2.2) - que la manière dont l'autorité précédente a apprécié les preuves offertes de part et d'autre soit manifestement insoutenable ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice. Elle se borne en réalité à soumettre à nouveau au Tribunal fédéral l'ensemble des éléments de preuve. Il n'appartient cependant pas à la Cour de céans de substituer sa propre appréciation des preuves à celle de l'autorité cantonale, mais uniquement d'intervenir lorsque celle-ci est manifestement insoutenable (cf. supra consid. 2.2). Le fait que les e-mails invoqués par la recourante puissent être interprétés, le cas échéant, d'une autre manière que ne l'a fait la cour cantonale ne suffit pas en soi à faire apparaître comme insoutenables les déductions qu'en a tirées cette autorité. La même remarque peut s'appliquer au témoignage du fils des parties. S'agissant plus particulièrement de l'e-mail du 25 août 2018, dont la recourante fait grand cas, on ne voit pas en quoi il serait arbitraire d'avoir, en définitive, exigé la preuve de sa bonne réception, dans la mesure où il n'est pas contesté que l'intimé a toujours nié l'avoir reçu. Compte tenu du manque de fiabilité du trafic électronique en général et, en particulier, des difficultés liées à la preuve de l'arrivée d'un message électronique dans la sphère de contrôle du destinataire, il n'apparaît en tous les cas pas insoutenable, dans les circonstances particulières de l'espèce, d'avoir considéré que la recourante aurait dû requérir du destinataire une confirmation de réception de son e-mail ou, à tout le moins, de réagir en l'absence d'une telle confirmation. Enfin, les critiques de la recourante relatives aux circonstances qui ont entouré le mandat donné par l'intimé à un détective privé, ainsi qu'aux prétendues raisons qui auraient motivé la cessation du paiement de la contribution d'entretien ou encore aux largesses dont l'intimé avait preuve, revêtent exclusivement un caractère appellatoire et sont, en conséquence, irrecevables.
En conclusion, force est de constater que la recourante a échoué à démontrer que la cour cantonale aurait arbitrairement apprécié les preuves en considérant que suffisamment d'éléments établis - ne serait-ce qu'à titre d'indices - démontraient que l'intimé ignorait son remariage et, partant, l'inexistence de la dette. Autant que recevable, la critique est infondée.
4.
Mal fondé, dans la mesure où il est recevable, le recours doit être rejeté et les frais judiciaires mis à la charge de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens, l'intimé n'ayant pas été invité à déposer une réponse (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 29 mai 2024
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : Mairot