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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
2E_3/2010 
{T 0/2} 
 
Arrêt du 1er décembre 2010 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Zünd, Président, 
Merkli et Karlen. 
Greffier: M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
A.X.________, demandeur, 
 
contre 
 
Confédération Suisse, 3003 Berne, 
représentée par le Département fédéral des finances, Service juridique, Bernerhof, Bundesgasse 3, 3003 Berne. 
 
Objet 
Demande de dommages-intérêts, 
 
action contre la décision de la Confédération Suisse du 28 avril 2010. 
 
Faits: 
 
A. 
Le 1er juin 1971, A.X.________, né le 10 novembre 1966, a été victime d'un grave accident de la circulation devant son domicile de Y.________ (Fribourg). Estimant que son avocat avait commis une faute professionnelle dans la défense de ses intérêts, A.X.________ a ouvert une action en responsabilité contre ce dernier, qui s'est terminée par un arrêt 4A_103/2009 du Tribunal fédéral du 27 avril 2007 qui a jugé que l'action contre le mandataire était prescrite en application de l'art. 127 CO
 
Par courrier du 24 février 2010, A.X.________ a réclamé réparation à la Confédération suisse du dommage causé par l'arrêt 4A_103/2009 rendu le 27 avril 2007 par le Tribunal fédéral au motif qu'il violerait la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. 
 
Par courrier du 28 avril 2010, le Conseil fédéral a rejeté les prétentions de A.X.________. 
 
B. 
Par mémoire du 27 octobre 2010 adressé au Tribunal fédéral, A.X.________ a ouvert action contre la Confédération suisse. Il demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision du 28 avril 2010, de déclarer recevable l'action et d'admettre sa "demande de pouvoir trouver rapidement avec la Confédération suisse une solution d'indemnisation consensuelle à satisfaction des parties, qui permette de retirer la requête n° 1892/10 A.X.________ c. Suisse du 28 octobre 2009 conformément à l'art. 39 CEDH modifié par l'art. 15 du Protocole n° 14 à la CEDH en vigueur le 1er juin 2010". Il a sollicité l'octroi de l'assistance judiciaire totale en application des art. 41 et 64 LTF
 
C. 
Par décision du 2 novembre 2010, le Tribunal fédéral a rejeté la requête d'assistance judiciaire et celle de nomination d'un avocat commis d'office et imparti à A.X.________ un délai pour effectuer l'avance de frais. Celle-ci a été versée dans le délai. 
 
D. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
E. 
Par courrier du 27 novembre 2010, A.X.________ a déposé des observations complémentaires confirmant ses conclusions. Il demande en outre l'audition de Me A.________ et de Me B.________. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
D'après l'art. 120 al. 1 let. c LTF, le Tribunal fédéral connaît par voie d'action en instance unique des prétentions portant sur des dommages-intérêts ou sur une indemnité à titre de réparation morale résultant de l'activité officielle de personnes visées à l'art. 1, al. 1, let. a à c, de la loi fédérale du 14 mars 1958 sur la responsabilité de la Confédération, des membres de ses autorités et de ses fonctionnaires (Loi sur la responsabilité; LRCF; RS 170.32). L'art. 10 al. 2 LRCF a une teneur identique. 
 
L'art. 1 al. 1 let. b et c LRCF prévoit que les dispositions de la loi sur la responsabilité s'appliquent à toutes les personnes investies d'une fonction publique de la Confédération, en particulier les membres du Conseil fédéral et le chancelier de la Confédération ainsi que les membres et les suppléants des tribunaux fédéraux. Tel est le cas en l'espèce, puisque le demandeur semble fonder son action en responsabilité contre la Confédération à raison des actes illicites qu'auraient commis le Conseil fédéral par sa décision du 28 avril 2010 et le Tribunal fédéral par son arrêt 4A_103/2009 du 27 avril 2009. 
 
En procédure d'action au sens de l'art. 120 LTF, les conclusions ne doivent pas nécessairement être chiffrées (ATF 112 Ib 334 consid. 1 p. 335 s. à propos de l'art. 23 let. b PCF encore valable à ce jour). En l'espèce le demandeur expose un dommage dépassant 16 millions de francs (mémoire de demande, p. 15). 
 
Par conséquent, déposée dans le délai de six mois dès la décision rendue le 28 avril 2010 par le Conseil fédéral de rejeter la demande de dommages-intérêts déposée le 24 avril 2010 par le demandeur (art. 20 al. 3 LRCF et art. 3 al. 2 de l'ordonnance du 30 décembre 1958 relative à la loi sur la responsabilité [RS 170.321]) et dans les formes prévues par la loi (art. 120 al. 3 LTF en relation avec l'art. 23 PCF), la présente action est en principe recevable. 
 
2. 
2.1 La Confédération répond du dommage causé sans droit à un tiers par un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, sans égard à la faute du fonctionnaire (art. 3 al. 1 LRCF). Toutefois, la légalité des décisions, d'arrêtés et de jugements ayant force de chose jugée ne peut pas être revue dans une procédure en responsabilité (art. 12 LRCF). 
 
2.2 En l'espèce, l'arrêt du 27 avril 2007 est entré en force à cette même date (art. 61 LTF) et a définitivement jugé que l'action ouverte par le demandeur contre son ancien mandataire pour réparation d'une éventuelle faute professionnelle était paralysée par la prescription de l'art. 127 CO. Cet arrêt ne peut pas être remis en cause par la présente procédure en responsabilité dirigée contre la Confédération suisse en application de l'art. 12 LRCF. A cela s'ajoute, comme le souligne à bon droit le Conseil fédéral, que le dommage n'existe pas aussi longtemps que le demandeur, qui a déposé un recours auprès de la Cour européenne des droits de l'homme contre l'arrêt du 27 avril 2007, peut obtenir la révision de ce dernier aux conditions de l'art. 122 LTF et partant reste, le cas échéant, en mesure de réclamer de son avocat la réparation du dommage allégué. 
 
La demande d'audition de Me A.________ et de Me B.________ porte sur des faits qui sont inséparables de la cause qui a trouvé son épilogue dans l'arrêt 4A_103/2009 du 27 avril 2009. Elle doit par conséquent être écartée pour les mêmes motifs. 
 
L'action doit être rejetée sous cet angle. 
 
3. 
De l'avis du demandeur toutefois, "en violation de l'art. 3 CEDH et l'art. 7 du Pacte ONU II qui relèvent du jus cogens, il vivrait, en tant qu'invalide des deux bras suite à un accident de la route, une véritable situation de torture et de traitement inhumain depuis que l'assureur RC du véhicule fautif a décidé le 1er avril 1993, en violation de l'art. 65 LCR, avec l'aide indispensable du canular de son ancien mandataire Me A.________ de changer illicitement les conditions d'indemnisation, le privant de tout avenir vu la gravité de son handicap qui demande des soins et de l'aide 24 h sur 24 et à vie." 
 
3.1 Selon l'art. 3 CEDH, nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. L'art. 7 du Pacte ONU II a une teneur similaire à celle de l'art. 3 CEDH. Selon la jurisprudence de la CourEDH, l'interdiction de la torture et des traitements inhumains est une obligation essentiellement négative qui pèse sur les autorités nationales de ne pas faire subir de mauvais traitements aux personnes relevant de leur juridiction. Mais c'est aussi une obligation positive de protection, qui exige des autorités nationales qu'elles protègent l'intégrité physique des personnes privées de liberté, d'une part et d'autre part, qu'elles prennent des mesures propres à empêcher que les personnes placées sous leur juridiction ne soient soumises à des traitements contraires à l'art. 3, même administrés par les particuliers (cf. les arrêts de la CourEDH cités in Frédéric Sudre et alii, Les grands arrêts de la Cour européennes des droits de l'homme, 4e éd., PUF 2003, p. 137 s.). La jurisprudence de la CourEDH distingue les concepts de torture, de traitement inhumain et de traitement dégradant. Elle définit le traitement inhumain comme celui qui provoque volontairement des souffrances mentales ou physiques d'une intensité particulière et le traitement dégradant comme celui qui humilie l'individu grossièrement devant autrui ou le pousse à agir contre sa volonté ou sa conscience ou qui abaisse l'individu à ses propres yeux, tandis que la torture est définie comme un acte par lequel des souffrances aiguës physiques ou mentales sont intentionnellement infligées à une personne par un agent de la fonction publique, ou à son instigation, dans un but déterminé, tels l'aveu, la punition ou l'intimidation (cf. arrêts de la CourEDH cités in Frédéric Sudre et alii, op. cit., p. 137 s.). 
 
3.2 Le demandeur perd de vue que, durant les très longues années qui ont suivi son malheureux accident de circulation et durant lesquels il a tenté de demander réparation à l'assurance RC du véhicule fautif puis à son mandataire professionnel, il n'a à aucun moment été volontairement soumis à des traitements inhumains de la part des autorités cantonale ou fédérale ou encore de toutes autres manières similaires aux actes interdits par les art. 3 CEDH et 7 Pacte ONU II empêché par ces dernières de faire valoir ses droits de victime de la circulation routière sur le plan pénal et civil. Encore fallait-il le faire en temps voulu, ce qui n'a pas été le cas, comme l'a jugé définitivement le Tribunal fédéral par arrêt 4A.103/2009 du 27 avril 2009, et ne dépendait que de la volonté du demandeur. Par conséquent, quoi qu'en pense sur ce point ce dernier, qui invoque une violation de son droit à voir sa cause jugée dans un délai raisonnable garanti par l'art. 6 CEDH, l'écoulement du temps n'est en l'espèce pas imputable aux autorités suisses. Dans ces conditions, il est exclu d'imputer aux autorités judiciaires suisses qui ont successivement été saisies de sa cause un comportement contraire aux art. 3 CEDH et 7 Pacte ONU II pour avoir dûment appliqué le droit suisse lorsqu'elles en ont été requises par le demandeur. 
 
Pour le surplus, les graves séquelles physiques et psychiques dont souffre assurément le demandeur depuis près de 40 ans n'ont pas été causées par les autorités cantonale ou fédérale, mais par une personne physique qui n'a pas agi volontairement, ce qui ne saurait être considéré comme une torture ou un traitement inhumain, s'il fallait admettre en pareille hypothèse, ce qui n'est pas certain, un effet horizontal de l'art. 3 CEDH
 
C'est par conséquent en vain que le demandeur invoque les art. 3 CEDH et 7 Pacte ONU II pour écarter l'application de l'art. 12 LRCF
 
4. 
Enfin, le demandeur n'a pas qualité pour invoquer la violation des art. 4 al. 1 CEDH et 8 Pacte ONU II à la place de sa soeur, B.X.________, qui serait, selon lui, maintenue en esclavage du fait qu'elle devrait s'occuper de lui de manière continue. Ce grief est irrecevable. 
 
5. 
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet de l'action dirigée contre la Confédération suisse dans la mesure où elle est recevable. Succombant, le demandeur doit supporter un émolument judiciaire et n'a pas droit à des dépens(art. 65, 66 et 68 LTF par renvoi des art. 120 al. 3 LTF et 69 al. 1 PCF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
L'action est rejetée, dans la mesure où elle est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge du demandeur. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué au recourant et à la Confédération Suisse. 
Lausanne, le 1er décembre 2010 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: 
 
Zünd Dubey